Une atmosphère lugubre régnait dans les galeries souterraines de la demeure Kusakari. Seul le crépitement des torches qui éclairaient la route sinueuse à travers le dédale de pierres brisait le sombre silence qui pesait au plus profond des tunnels. Le plafond des grottes était immensément haut, au point qu’on ne put en déceler sa forme tant la pénombre l’obscurcissait. L’air était humide et quelques gouttes perlaient le long des parois rocheuses. Il faisait froid.
Au bout de la traversée, le chemin se scindait en deux parties. En poursuivant celui de gauche, on arrivait aux ruines de l’ancien laboratoire aménagé par le traître Kyokai. L’endroit même où il perdit la vie. De l’autre côté, si on choisissait d’emprunter le sentier de droite, un long couloir menait jusqu’à la crypte familiale. C’est là, depuis la mort de son frère, qu’Eien passait le plus clair de son temps.
Au centre de la pièce trônait le corps inanimé de Kyokai, allongé sur une table d’embaumement. Deux miko s’attelaient à aider l’aînée Kusakari durant le rituel de purification post-mortem. Cette dernière, le visage fermé par le deuil, lavait le front et la bouche de son cadet à l’aide d’un chiffon mouillé. Ses assistantes, quant à elles, veillaient soigneusement à ne pas envahir l’espace de leur princesse. Chaque jour, elle lui disait adieu et, chaque jour, les prêtresses se taisaient. Elles brûlèrent de l’encens en signe de respect.
Eien, d’ordinaire si lumineuse, voilait d’une tristesse digne son regard améthyste dès qu’elle pénétrait dans le caveau. Elle portait le deuil avec élégance, du moins si on osait l’en juger.
Alors que celle-ci s’affairait à s’occuper de la dépouille, une servante entra nerveusement dans la crypte. Elle scruta Eien, hésitant à l’interpeller.
- Mi… Mizuki-hime, pardonnez-moi de vous interrompre… Bafouilla la domestique en s’inclinant. Un émissaire éorzéen souhaite s’entretenir avec vous. Il dit qu’il ne peut attendre…
Un lourd silence s’ensuivit. La princesse continua de laver délicatement la tête de Kyokai sans accorder le moindre regard à l’arrivante. Les deux miko se stoppèrent néanmoins, analysant timidement la réaction d’Eien.
- Les Brumdelain auraient-ils prédit le trépas de mon frère pour qu’un de leurs messagers me demande une audience moins d’une semaine après sa mort ? Répondit enfin l’embaumeuse, la voix résonnante et l’air impassible. La Mer du Chant des Sirènes est-elle devenue si rapide à traverser ?
- Je… Je ne saurais le dire… Reprit la servante, visiblement troublée que son interlocutrice devine l’identité du demandeur. Puis-je le faire entrer ?
Eien laissa quelques secondes s’écouler avant de hocher la tête en guise de réponse. D’un regard bref et assuré, elle autorisa ses deux assistantes à prendre congés et resta seule le temps que le nouveau protagoniste se présente.
L’écho des talonnettes retentirent enfin. La silhouette élancée d’un élézen se dessina alors dans l’encadrement de l’entrée. Celui-ci arborait un style typiquement ishgardais. Il baissa la tête en signe de salut à la raenne.
- Bonjour, Dame Kusakari. Excusez mon intrusion mais je crains malheureusement de ne pas pouvoir patienter davantage. De nombreuses affaires requièrent ma présence ailleurs. Je me nomme Elinaud, employé de la maison Brumdelain… Votre grand-mère, Mayu, nous a informé de la mort de votre frère. Celle-ci étant une gouvernante appréciée au sein de notre famille, les filles de Dame Elaine ont tenu à l’honorer en vous faisant parvenir quelques présents. J’ai d’ores et déjà transmis les cadeaux destinés à vos cadets.
L’élézen fit un pas en avant. Il tenait entre ses mains un écrin en bois finement sculpté qu’il ouvrit devant l’air désintéressé d’Eien. L’intérieur du coffret était matelassé d’une doublure en satin pourpre où reposait un œuf d’apparence tout à fait banale. La princesse le zieuta à peine, occupée à laver les avant-bras de son frère.
- J'apprécie la noble intention de vos employeurs, Elinaud-san, bien que je sois navrée qu’il vous ait fallut gravir nos montagnes pour m’offrir un simple œuf de zu.
Ledit Elinaud haussa les sourcils, trahissant son étonnement. Il devint alors bien moins solennel.
- Oh non, vous vous méprenez madame ! Les filles Brumdelain m’ont chargé de prendre contact avec les meilleurs spécialistes orientaux. Il ne s’agit pas d’un volatile lambda ! Le marchand qui me l’a vendu m’a garanti de sa rareté.
- Et ce marchand vous a de toute évidence escroqué, trancha Eien en parvenant talentueusement à rester cordiale. Cette situation n’a, hélas, rien d’exceptionnelle : un bon nombre de kuganiens profitent de la naïveté des touristes occidentaux pour revendre leurs babioles à prix fort.
L’élézen fixa l’œuf un moment, dubitatif. Il sembla si gêné que l’instinct maternel de l’aînée Kusakari la poussa à s’adoucir. Pour la première fois depuis le début de la conversation, elle arrêta de nettoyer le corps de Kyokai et se redressa pour parler directement à l’étranger.
- Ne vous en sentez point coupable. Votre démarche est louable et ne saurait être raillée. Transmettez mes sincères remerciements à ceux qui vous envoie. Ils auront mon affection, dans cette vie et dans les autres.
Les mots de la princesse apaisèrent le tourment naissant d’Elinaud. Ce dernier adressa alors une révérence distinguée à Eien, clôturant l’entretien. Il déposa la petite boite sur un coin de table, comme s’il souhaitait s’en débarrasser rapidement. Puis il tourna les talons vers la sortie après que la jeune femme lui ait permit de disposer.
De nouveau seule dans la crypte, Eien observa l’œuf de loin. Elle soupira, la mine pensive, en reprenant la toilette de son frère.
- Ils peuvent bien me couvrir de trésors, il n'y a qu'une chose que je désire réellement : te retrouver.
Au bout de la traversée, le chemin se scindait en deux parties. En poursuivant celui de gauche, on arrivait aux ruines de l’ancien laboratoire aménagé par le traître Kyokai. L’endroit même où il perdit la vie. De l’autre côté, si on choisissait d’emprunter le sentier de droite, un long couloir menait jusqu’à la crypte familiale. C’est là, depuis la mort de son frère, qu’Eien passait le plus clair de son temps.
Au centre de la pièce trônait le corps inanimé de Kyokai, allongé sur une table d’embaumement. Deux miko s’attelaient à aider l’aînée Kusakari durant le rituel de purification post-mortem. Cette dernière, le visage fermé par le deuil, lavait le front et la bouche de son cadet à l’aide d’un chiffon mouillé. Ses assistantes, quant à elles, veillaient soigneusement à ne pas envahir l’espace de leur princesse. Chaque jour, elle lui disait adieu et, chaque jour, les prêtresses se taisaient. Elles brûlèrent de l’encens en signe de respect.
Eien, d’ordinaire si lumineuse, voilait d’une tristesse digne son regard améthyste dès qu’elle pénétrait dans le caveau. Elle portait le deuil avec élégance, du moins si on osait l’en juger.
Alors que celle-ci s’affairait à s’occuper de la dépouille, une servante entra nerveusement dans la crypte. Elle scruta Eien, hésitant à l’interpeller.
- Mi… Mizuki-hime, pardonnez-moi de vous interrompre… Bafouilla la domestique en s’inclinant. Un émissaire éorzéen souhaite s’entretenir avec vous. Il dit qu’il ne peut attendre…
Un lourd silence s’ensuivit. La princesse continua de laver délicatement la tête de Kyokai sans accorder le moindre regard à l’arrivante. Les deux miko se stoppèrent néanmoins, analysant timidement la réaction d’Eien.
- Les Brumdelain auraient-ils prédit le trépas de mon frère pour qu’un de leurs messagers me demande une audience moins d’une semaine après sa mort ? Répondit enfin l’embaumeuse, la voix résonnante et l’air impassible. La Mer du Chant des Sirènes est-elle devenue si rapide à traverser ?
- Je… Je ne saurais le dire… Reprit la servante, visiblement troublée que son interlocutrice devine l’identité du demandeur. Puis-je le faire entrer ?
Eien laissa quelques secondes s’écouler avant de hocher la tête en guise de réponse. D’un regard bref et assuré, elle autorisa ses deux assistantes à prendre congés et resta seule le temps que le nouveau protagoniste se présente.
L’écho des talonnettes retentirent enfin. La silhouette élancée d’un élézen se dessina alors dans l’encadrement de l’entrée. Celui-ci arborait un style typiquement ishgardais. Il baissa la tête en signe de salut à la raenne.
- Bonjour, Dame Kusakari. Excusez mon intrusion mais je crains malheureusement de ne pas pouvoir patienter davantage. De nombreuses affaires requièrent ma présence ailleurs. Je me nomme Elinaud, employé de la maison Brumdelain… Votre grand-mère, Mayu, nous a informé de la mort de votre frère. Celle-ci étant une gouvernante appréciée au sein de notre famille, les filles de Dame Elaine ont tenu à l’honorer en vous faisant parvenir quelques présents. J’ai d’ores et déjà transmis les cadeaux destinés à vos cadets.
L’élézen fit un pas en avant. Il tenait entre ses mains un écrin en bois finement sculpté qu’il ouvrit devant l’air désintéressé d’Eien. L’intérieur du coffret était matelassé d’une doublure en satin pourpre où reposait un œuf d’apparence tout à fait banale. La princesse le zieuta à peine, occupée à laver les avant-bras de son frère.
- J'apprécie la noble intention de vos employeurs, Elinaud-san, bien que je sois navrée qu’il vous ait fallut gravir nos montagnes pour m’offrir un simple œuf de zu.
Ledit Elinaud haussa les sourcils, trahissant son étonnement. Il devint alors bien moins solennel.
- Oh non, vous vous méprenez madame ! Les filles Brumdelain m’ont chargé de prendre contact avec les meilleurs spécialistes orientaux. Il ne s’agit pas d’un volatile lambda ! Le marchand qui me l’a vendu m’a garanti de sa rareté.
- Et ce marchand vous a de toute évidence escroqué, trancha Eien en parvenant talentueusement à rester cordiale. Cette situation n’a, hélas, rien d’exceptionnelle : un bon nombre de kuganiens profitent de la naïveté des touristes occidentaux pour revendre leurs babioles à prix fort.
L’élézen fixa l’œuf un moment, dubitatif. Il sembla si gêné que l’instinct maternel de l’aînée Kusakari la poussa à s’adoucir. Pour la première fois depuis le début de la conversation, elle arrêta de nettoyer le corps de Kyokai et se redressa pour parler directement à l’étranger.
- Ne vous en sentez point coupable. Votre démarche est louable et ne saurait être raillée. Transmettez mes sincères remerciements à ceux qui vous envoie. Ils auront mon affection, dans cette vie et dans les autres.
Les mots de la princesse apaisèrent le tourment naissant d’Elinaud. Ce dernier adressa alors une révérence distinguée à Eien, clôturant l’entretien. Il déposa la petite boite sur un coin de table, comme s’il souhaitait s’en débarrasser rapidement. Puis il tourna les talons vers la sortie après que la jeune femme lui ait permit de disposer.
De nouveau seule dans la crypte, Eien observa l’œuf de loin. Elle soupira, la mine pensive, en reprenant la toilette de son frère.
- Ils peuvent bien me couvrir de trésors, il n'y a qu'une chose que je désire réellement : te retrouver.