Eylion Grenn

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 02 avr. 2018, 16:56

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Ce fut un Miqo'te particulièrement éméché qui rentra au beau milieu de la nuit au refuge des Auras. Sitôt les portes franchies, ce fut l'Inattendu. L'Improbable qui se produisit telle une plaisanterie appropriée en ce jour des Proeufs, un improbable pourtant bien réel. L'Aigri. Le Grincheux. L'Amer. Le Brisé se mit à chanter, sa voix à la fois jeune et mature résonnant dans le grand hall. Les paroles claires témoignaient de son état tout comme le sourire qui les suivaient.
Quelques pas dansants et rythmés enchaînèrent son entrée pendant qu'il décrochait le nœud de son col de Majordome. Il écarta les bras, son trophée en main. L'Incongru, le Miqo'te était... Heureux. Il poursuivit ainsi son chemin vers sa chambre tout en se délestant de sa veste. L'ensemble termina jeté dans un coin de la pièce alors qu'il refermait la porte tout en continuant à chanter. Sa chemise ouverte, il termina sa Chute dans son lit, Rêverie et Vertige accompagnant celle-ci.

La soirée avait pourtant mal commencé.

- Comment ça, c'est votre dernier costume?! avait-il fait, atterré, mains sur le comptoir.
- Ouaip, pour votre taille. Si vous voulez sinon, j'ai encore des robes ou ce costume de chocobo là-bas...

L'imposant gérant avait pointé du pouce les vêtements d'un jaune vif non loin. Soit le Mage rebroussait chemin, décevant sa disciple... Ou bien il acceptait de faire face au traumatisme. Il s'était retrouvé dans la tenue qu'il avait tant honni pendant vingt ans. Vingt longues années de supplice et il se souvenait de chaque geste pour arranger les plis, ajuster les gants, nouer le nœud. Un monocle teinté avait remplacé le cache-œil et quelques produits avaient suffi pour changer sa coiffure. D'anciens échos avaient heurté sa conscience.

- ... Qui êtes-vous?
- Si j'étais vous, je ferai mieux de courir. Tic, tac.


Il avait rejoint sa disciple qui avait été prise au dépourvu par son changement d'apparence et de maintien. Pour une fois, il avait dérogé à ses principes et joué la comédie pour détourner l'attention. Il s'était autorisé, pendant un jour, à ne plus être Eylion. Au début, il n'éprouvait aucun plaisir à se trouver parmi la foule, à devoir se plier à son rôle de Majordome. Puis, quand la chasse aux œufs fut lancée, il s'était surpris à se prendre au jeu. Il avait autant pris plaisir à courir qu'à réfléchir, à éprouver les capacités de Kaly tout en travaillant de concert.

La fatigue avait fini par les faire lâcher la compétition mais il avait reconnu que gagner n'était pas le plus important. Malgré l'abandon, Kaly s'en était sortie avec deux lots, l'un offert par son frère, l'autre par leurs efforts.

Il avait accepté une baignade par la suite, qui faillit bien se solder par une noyade quand la jeune femme, enthousiaste, s'était mis en tête d'explorer les courants plus loin. Un rocher fut leur providence commune et le Mage était parvenu à les ramener au rivage, non sans que son monocle ne sauta à l'eau. Quelques explications plus tard et un monocle retrouvé, ils étaient revenus sur la terrasse se rhabiller pour... retrouver un lalafell ivre endormi dans les vêtements de la Miqo'te.

Un lancer d'ivrogne dans l'eau plus loin, un échange vif avait interrompu la tranquillité des lieux.

- OUAIS... BAH... BAH... ELLE SENT BON!! avait hurlé le coupable.
- GROS DÉGUEULASSE!! avait lancé Kaly, gênée, en retour.
- OUAIS BAH VIENS LÀ QUE JE TE MONTRE... SI JE SUIS PAS MIEUX QUE TON MÂLE LÀ!
- Le MÂLE DE QUI, LA DEMIE PORTION?! avait hurlé, cette fois, Eylion.
- BAH ALORS SI C'EST PAS TA FEMELLE, PARTAGE BÂTARD!! DE QUOI TU TE MÊLES?!
- ELLE CHOISIRA TRÈS BIEN TOUTE SEULE COMME UNE GRANDE SON PROPRE MÂLE, ABRUTI! avait-il fait, les mains sur le rebord, très investi dans la "discussion".
- PUTAIN, T'ES AUSSI CON QU'AVEUGLE TOI! ELLE TE BOUFFE DU REGARD CRÉTIIN!

Il n'avait pas répondu, se contentant d'un vague... "Il a réussi à me faire dire le mot mâle" dépité envers lui-même. Éluder le sujet pour mieux éviter une mine, il pouvait le faire. Malheureusement, il était loin d'être aveugle. Il avait bien noté l'intérêt palpable de sa disciple envers lui. Le bourgeon était là, non éclos, insignifiant mais le Mage avait senti sa présence chez elle.

- Hm... Dans ce cas, pourquoi votre instinct vous fait me tutoyer. Si j'étais que votre élève dans votre esprit, ça n'arriverait pas, non?
- Parce que votre comportement prête à confusion, voilà tout.
- Quel comportement? Celui d'une gamine, d'une petite sœur, d'une amie?
- Je ne sais pas... J'ai parfois plus l'impression d'agir comme votre père qu'autre chose.
- Merde... Je vous vois pas DU TOUT comme un père. Trop sexy pour un paternel.

La discussion, sur le chemin du retour, s'était envenimée en conséquence.

- Encore une fois, je vous prie, Eylion de cesser de choisir à ma place ce que je dois faire, penser ou apprécier. C'était sincère. Ce n'est pas parce que vous ne vous acceptez pas ou ne vous aime pas que vous êtes hideux ou déplaisant aux yeux des autres.
- ... La seule femme à m'avoir dit que je pouvais être "plaisant" physiquement est celle qui jouait la comédie, je vous le rappelle. Combien de fois, vous croyez que j'ai eu affaire à des "morveux", "gamins" et autres remarques du même acabit? Vous me pensez assez idiot pour ne pas savoir ce que les femmes aiment?
- Oui, vous êtes idiot et même blessant si vous n'avez pas encore compris que JE ne suis pas comme les autres femmes moi, j'ai rien à voir avec ces idiotes, perverses et superficielles qui préfèrent un beau mâle musclé sans défaut mais rien dans le plot! Sur ce, bonne nuit! Et je squatte la salle de bain avant d'aller dormir. N'entrez pas, merci.

Ce fut sur une porte claquée froidement au nez qu'il était retourné sur ses pas jusqu'à la Cave, bien décidé à se soûler à défaut de savoir quoi faire. Il avait assisté au rangement d'après fête des Proeufs jusqu'à son arrivée au comptoir. Après ses deux verres, il avait fait la rencontre inattendue d'un cœur brisé comme le sien en la personne d'une secrétaire en recherche d'emploi, une Miqo'te brune à la tenue impeccable. Leur discussion s'était prolongée tard dans la nuit, chacun se confiant à l'autre. Il avait allégrement profité du couvert de son costume et du voile de l'alcool.

- Il faut jamais qu'on fasse ça en public hein... avait-elle amorcé sur un ton grave.
- Hm?

Elle avait alors esquissé un semblant de sourire en coin des lèvres.

- On pousserait au suicide à deux, vous aviez raison.

Un léger rire lui avait répliqué.

- Avec un peu de chance, on pourrait en emporter quelques uns dans la tombe.
- C'est pire que l'espionnage ou la propagation de maladies ça, vous savez.
- J'admets Coupable sur toute la ligne. Mince, vous avez mis à jour mon plan de dépression mondiale...
- Démoralisation de masse...

Un rire commun avait éclaté dans la pièce désormais vide de monde, à l'exception de la serveuse de garde. Après quelques plaisanteries douteuses, la conversation s'était poursuivie plus calmement.

- ... Ne le faites pas seule. Quoiqu'il arrive, lui avait-il conseillé après quelques échanges.
- Il va falloir que j'apprenne un minimum quand même, j'en ai assez d'avoir peur de tout. Je suis contente déjà... Vous n'imaginez pas à quel point c'est dur pour moi de m'être confiée comme ça.
- C'est... normal d'avoir peur. Au moins, ça veut dire que vous n'êtes pas inconsciente, avait-il souligné avec un sourire désabusé.

Elle avait dodeliné de la tête, incrédule, pendant qu'il enchaînait.

- Vu qu'on sait à peu près ce qu'il en est de chaque côté... Je vais sans doute vous énoncer une demande étrange mais avant de la faire... Je vais vous expliquer pourquoi je la fais.

Elle avait pivoté sur son siège, intriguée.

- Je ne suis pas un poète, je n'étais pas un danseur mais pour Elle, j'ai pris sur moi d'apprendre. J'ai toujours dansé pour Elle, avec Elle. En discutant avec ma disciple, j'ai compris qu'il y avait des choses que j'avais besoin de faire pour... L'exorciser. À la base, la fête des Proeufs aurait dû être cette occasion mais je n'ai pas voulu donner... Comment dire... un message confus à ma disciple en lui proposant de danser avec moi. Alors puisque nous sommes sensés ne plus nous revoir et que vous savez ce qu'il en est...

Il avait soupiré.

- Accepteriez vous de danser avec le pauvre ivrogne que je suis?

Un clignement de regard et un rire avaient suivi la demande impromptue.

- Avec plaisir monsieur...

Il s'était levé, délaissant de son mieux sa gêne. Ses appréhensions. Sa garde. Ses fardeaux. En parfait cavalier, il s'était incliné, main sur le cœur, pour saluer sa Dame du soir avant de la tendre vers elle. Elle avait déposé ses doigts graciles dans les siens et il l'avait entraîné au centre de la pièce, sous le regard discret de la serveuse.

- Vous devez admettre qu'il y a plus romantique comme situation pour une valse, avait-il dit avec un sourire d'autodérision, un brin nerveux.

Alors qu'elle posait son bras sur le sien, il avait amorcé les premiers pas, laissant ses réflexes faire le reste.

- Vous plaisantez... Un inconnu en costume m'invite à une danse au beau milieu de la nuit après avoir supporté de m'écouter...
- Deux cœurs brisés, je suppose qu'il y a du symbole quelque part... On a toujours supposé que Nymeia aimait jouer des tours mais... je suis heureux que la soirée finisse ainsi, avait-il fait avec un maigre sourire comblé.

Sa cavalière n'était pas en reste, connaissant sur le bout des doigts la posture à adopter, la pointe de ses pieds effleurant à peine le sol.

- Faites attention, là ça devient vraiment romantique... avait-elle souligné avec un sourire discret.

La plaisanterie avait pris le pas alors qu'ils tournaient lentement.

- Selon ma disciple, il est possible que je courtise comme un manche vu que ma précédente Femme jouait la comédie.
- Ah oui ? Je pense qu'elle est jeune et manque de discernement alors. Vous lui feriez ce petit numéro là qu'elle vous tombe dans les bras, monsieur.
- Elle est jeune, oui... Quant à tomber dans les bras, je dois avouer que je ne comprends pas ce que les femmes veulent parfois.

Il l'avait alors fait tourner sur elle-même, la prenant au dépourvu, avant de la ramener à lui.

- On penserait que ce seraient les bellâtres grands et musclés qui vous intéressent.

Elle avait soufflé sa surprise, se prêtant volontiers au jeu d'improvisation qu'il lui offrait.

- L'apparence compte pour toutes, elle ment si elle vous dit le contraire. Mais c'est le charme qui agit.
- Le charme?

Ce fut là qu'il avait poursuivi son improvisation, obligeant sa partenaire à changer de rythme. Il avait mélangé allégrement le tango à la valse, faisant fi des conventions de la danse, mêlant de manière chaotique ce qui lui plaisait. La manœuvre avait eu le don d'amuser sa cavalière, la queue de la Miqo'te battant le rythme joyeusement.

- J'ai vu des lalafells mille fois plus charmants que de magnifiques Hyrgoths bronzés. Et des Élezèns plus attirants par un simple geste que le plus puissant des mâles parmi mes ancêtres.
- Hrm... Donc elle mentait... à moitié?
- À moitié? Vous vous pensez si laid que ça...
- ... Je sais quels sont mes traits, ma taille, ma corpulence. Je ne me fais pas d'illusions et si je m'en faisais... "Elle" s'est appliquée à les détruire.
- Je ne sais pas ce qu'il en est des autres mais je peux vous dire ce qui me fait sourire tous les matins, ce sont les grands hommes. J'aime les visionnaires, pas les mannequins. De l'assurance en vos capacités, vous en avez tous, vous et c'est pour ça qu'on vous... aime.

Dans ce jeu de dupes entendu, le cœur du cavalier s'était figé un instant. La gêne, palpable, partagée, avait le goût de l'Interdit, la saveur du non-dit.

- ... J'espère que vous arriverez à trouver votre chemin et votre conclusion... ou avenir.

Il avait fait ses Adieux sur un baise-main.

Leurs chemins s'étaient séparés et il se retrouvait là, dans son lit, se laissant d'autant enivrer qu'il n'y avait aucun Risque. Il avait vécu le Moment présent comme s'il allait durer éternellement, faisant fi de toutes ses inhibitions. Il avait goûté de nouveau au Plaisir de Plaire et de Faire Plaisir. De Séduire, de se laisser Séduire sans se soucier des conséquences, du lendemain.

Au Réveil, il savait qu'il reprendrait le cortège de ses Fantômes mais pour ce soir... Pour cette nuit, il n'était qu'un homme simple qui profitait encore du Voile de l'Illusion, rêvant après la mystérieuse et belle inconnue qui avait su lui faire oublier, un instant, Qui il était.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 05 avr. 2018, 13:13

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Lien du Post Lié.

Le verre de rhum tinta quand il le reposa sur la table basse. Dos contre le mur, assis sur le lit, jambe levée, il retraçait les contours de ses derniers échanges. Ce qui avait paru, tout d'abord, être une mésaventure avait été, au final, une expérience des plus instructives.

Une formule se doit d'être parfaite. irréprochable. Chaque ligne, chaque symbole doit être en parfaite harmonie pour parvenir à l'effet escompté. La moindre erreur peut mener à des effets inattendus, voire dramatiques.

La Réalité était bien plus complexe qu'une formule, avait-il oublié d'inclure dans ses leçons. Si un Arcaniste se devait d'être préparé en toutes circonstances à cause du manque de flexibilité de son Art, il devait aussi parvenir à faire le lien entre tous les composants d'une situation. Voir le tableau dans son ensemble. Il avait pris le temps de délaisser le manteau du Rebelle, du Chaotique pour revêtir celui du Mage.

- Sur ces fameux projets d'urbanisation... Si vous saviez comme aucun autre n'était plus à sa place que lui pour faire que toute cette... Technologie serve à autre chose qu'à tuer.
- Il avait... une certaine pression dû à ces projets?
- Oui, moi et l'histoire l'avons achevés...
- De... quoi aviez-vous peur?
- Avec tout ce qui s'est passé ces trois dernières années, on lui a petit à petit retiré tous ses budgets, ils se sont servis de ses inventions contre son gré pour les tourner contre les dragons et les émeutiers... C'est devenu très compliqué pour lui et je n'ai pas su l'épauler. Il s'enfermait des heures et il a fini par faire des tests, c'était...


Tous les éléments étaient devant lui. Chaque parole, chaque geste, chaque expression, chaque perspective. Que ce soit celle de Lahi, de sa disciple, des gérants, de Velren et du sien, il les rassembla. L'Empathie, la Raison et la Logique prirent le relais, soulignant chaque contradiction. Le mot Peur était revenu souvent dans les paroles de Lahi, tel un écho marquant un tempo.

- Vous avez déjà connu quelqu'un qui pouvait être tout pour vous?

La Familiarité, Infecte. Douloureuse. La Sorcière avait tenu le même discours.

- Mon Homme est tout pour moi, c'est comme ça que je suis.

A la Danse, la voix de Kaly se mêla, la grimace audible dans son ton.

- ... Et c'est comme ça qu'agit quelqu'un qui dit qu'il est tout pour elle.

La Sorcière et Lahi n'avaient pas menti en soi. L'une s'était affirmée cruelle. L'autre avait affirmé avoir été la cause de la perte de son couple. Quelque part, dans leurs tourments communs, Elles savaient ce qui clochait.

- Mais leur haute estime d'elles-mêmes, née de leur manque de confiance, les poussent à nier cette part, murmura t'il.

Bercées par l'image du Prince Charmant, elles cherchaient l'Homme avec un grand H. L'Homme Infaillible, Parfait, prêt à leur prendre l'épaule et à leur offrir le Monde. Niant l'Humanité, avec ses Forces et Faiblesses. Le Partage n'existait pas dans leur vision.

Comment peut-elle prétendre se soutenir si elle est incapable de soutenir qui que ce soit?

La prédiction du Mage tomba. Si le Cycle continuait de la sorte, elle tomberait sur un véritable Manipulateur dominateur. Confiant en lui-même, il saurait conforter les illusions de cette dernière tout en détruisant le reste de sa confiance en elle-même, gorgeant la sienne. Ou bien, elle tomberait sur un autre pauvre hère romantique, souffrant du syndrome du Sauveur... Jusqu'à ce qu'elle le place dans le rôle du Persécuteur quand il ne parviendrait pas à nourrir ses illusions.

- Foutaises. Comme vous l'avez senti, il a peut-être besoin de vous justement... En admettant qu'il ne se soit pas laissé corrompre par son travail et ce n'est pas en restant vos fesses vissées sur cette chaise que vous répondrez à cette question.

Il délaissa son Pragmatisme pour reprendre son opinion personnelle. La Lâcheté était l'un des traits qu'il haïssait. Il passait son temps à la combattre. Il connaissait la puissance de la Peur, l'une de ses plus féroces ennemies.

- On peut admirer une fleur sans avoir forcément envie de s'attarder. D'où pourquoi on utilise le mot Plaire au lieu d'Aimer.

Il s'était autorisé un moment d'Illusion mais au final, la Réalité lui allait mieux. Il reprit son verre, trinquant à celle-ci, remerciant Nymeia pour cette leçon.

- Vous êtes dure mais juste. Si je n'étais pas fils d'Azeyma, j'aurai pu dire que vous seriez une parfaite amante.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 08 avr. 2018, 17:58

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L'alignement me paraît correct tout comme la forme. Vous pouvez passer à la pratique.

Le premier sort de sa disciple. Ce fut dans un abri discret de Lavandière que naquit une mince poussée d'air, tourbillonnant au creux de la paume de la Miqo'te. L'Ether avait illuminé les lignes de son grimoire, guidé par la formule. Le professeur avait partagé la fierté et la joie de son élève face à ce pas concret, un de plus vers l'Arcanisme. Sa méfiance des femmes n'avait pas diminué mais il avait appris à y mettre une sourdine face à l'assurance de Kaly. A arrêter de "trop réfléchir". A profiter de l'instant présent.

Cependant, l'attitude brusque d'Eylion n'avait pas été sans conséquences. La jeune Miqo'te ne venait plus déjeuner avec ce dernier et observait une distance scrupuleuse. Son enfermement contraint pesait chaque jour un peu plus sur ses épaules, une solitude que l'absence de son frère n'arrangeait pas. K'rayne, en effet, enquêtait à leur place sur Jaroud, un accord qui avait été trouvé pour éviter d'engendrer des risques inutiles.

Les premiers jours, le Mage avait été soulagé. Autant il admirait la joie de vivre de Kaly, autant elle heurtait parfois son sérieux, voire sa fierté. Il avait tout fait pour instaurer des barrières et il y était parvenu mais au prix qu'il craignait d'engendrer.

Il avait mis le Temps mais il avait fini par remarquer, attraper au vol, les expressions assombries de sa disciple. Les sourires moins grands, moins présents, plus discordants. Non seulement il avait été à l'origine de toute cette situation mais il ne faisait rien pour soulager Kaly de ce qu'elle traversait. Pire encore, il l'aggravait.

Il rajouta ce Dilemme à ceux qu'il avait déjà. K'rayne avait fini par trouver des pistes ainsi que des informations inquiétantes. Dorian Malkorion, enlevé. Un jeune novice qu'il avait "connu" à l'Académie. Il se souvenait encore du sourire suave et cruel de son ancienne Femme.

Fais moi confiance, mon Chat.

Si seulement il ne l'avait pas écouté... Si seulement il ne s'était pas laissé entraîner.
Si seulement il avait réfléchi un tant soit peu.

Le Regret était là, présent, lancinant. Assis au bureau de la chambre que les Auras lui avaient alloué, devant son nouveau grimoire ouvert, il posa les coudes sur la table et se prit la tête. Il avait refusé de rester à l'écart. Si Dorian mourrait, ce serait de sa faute. Comment pouvait-il ne pas, au moins, faire quelque chose?

Le sujet de Yunaia le préoccupait aussi. Il était parvenu à lui rendre visite en passant par la fenêtre arrière de sa chambre mais il avait bien noté, lors d'un appel, que quelque chose n'allait pas dans le ton de sa voix. La présence de sang au niveau de l'évier et la main bandée d'Al'namar, le compagnon de la jeune femme, n'avaient rien fait pour le rassurer. Il s'était permis de tester le compagnon en question à quelques reprises durant la conversation. Le Mage avait pu vérifier quelques points du profil de ce dernier tout en tentant de ne pas aller trop loin, par respect pour la jeune femme. Il espérait pouvoir en discuter avec celle-ci quand il le pourrait.

La conversation avait mis au jour une question délicate... Comment traiter le cas de Jaroud? Fallait-il le faire chanter, arrêter par les autorités ou bien fallait-il le tuer? Au départ, Eylion aurait répondu de tout faire pour le faire arrêter. Maintenant que quelqu'un avait été enlevé... Que l'affaire avait pris une autre dimension... Il n'était plus sûr de rien. De quoi était réellement capable le Prince Marchand? Bien que son commerce était majoritairement honnête, il avait déjà trempé dans le trafic de somnus selon les dires d'Al'namar. Est-ce que Jaroud serait prêt à tuer pour parvenir à ses fins? A torturer? Comment allait Dorian? Est-ce que Rhian aurait pu prendre sa place ou bien lui-même? Eylion avait vu la folie danser dans les yeux de son interlocuteur sans être sûr de ce qu'il avait vu.

Face à autant de questions, l'Arcaniste avait pris sa décision. Il savait que personne ne l'approuverait mais il devait savoir. Il devait revoir Jaroud. Il devait avoir une discussion, en face à face. S'il ne faisait pas tout pour obtenir une résolution par la discussion, pour savoir à qui il avait affaire exactement, jamais il ne pourrait se revoir dans un miroir. Le sang sur ses mains lui donnait déjà du mal à le faire.

Pour un tel acte, il aurait besoin de quelqu'un qui pourrait le couvrir à distance. L'idée le répugnait mais il aurait peut-être besoin d'Al'namar même s'il se réservait un peu de temps pour trouver la personne... ou le mercenaire adéquat.

Enfin, il y avait le sujet des Sept Voiles, le mystérieux établissement que Jaroud aurait fréquenté avant sa rencontre avec Kaly. Vis à vis de celui-ci, Eylion était prêt à impliquer deux de ses anciens "collègues". Il escomptait bien ne rien laisser au hasard. Pendant que la première équipe irait sauver Dorian, il constituerait une seconde pour enquêter sur les Sept Voiles en parallèle.

Il se força à reprendre sa plume, à poursuivre la reconstitution de son grimoire précédent. Puis il s'interrompit de lui-même.

N'oubliait-il pas quelque chose d'important parmi tous ces méandres...?

Il reposa momentanément sa plume. Devant lui se trouvaient les contours d'un sort offensif inachevé. Il soupira. Tourna la Page.

Il reprit son écriture, commençant à poser les bases d'une formule pour invoquer un Carbuncle.

Vu les risques qu'il allait prendre, il se devait de prendre un peu de Temps pour s'excuser auprès de Kaly.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 13 avr. 2018, 22:40

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Ça faisait depuis plusieurs minutes qu'il était affalé, joue contre le bureau, atterré.

- Oh... Je ne sais pas si les mariages sont possibles avec un Carbuncle, voilà une thèse à creuser.
- Tant mieux en ce cas parce que c'est l'invocateur que je veux.


- Les femmes sont une espèce véritablement dangereuse...

Il avait une sensation désagréable comme s'il avait un mauvais pressentiment. Des pans de sa conversation avec K'rayne lui revenait.

- J'ai un attachement, ça me fait mal de le dire... Mais de là à dire que... Je veux dire, je suis aussi attaché à Yunaia et Rhian mais... Sinon, dans le cas de Kaly, je ne sais pas... Elle est peut-être plus... mature, je l'admets que je ne le croyais. Elle est déterminée, admirable et il faudrait être con pour ne pas voir ça...
- Je me doute que c'est pas du "jour" et du "nuit"... Il y a une transition, des nuances. Et tu l'as dit wep, faudrait être con...


N'importe quel homme aurait sauté sur une telle occasion. Là où était le hic...

C'était qu'il n'était pas n'importe quel homme.

Il finit par se redresser lentement, restant assis.

- Les choses ne sont pas aussi compliquées que ce que vous pensez, vous les rendez compliquées dans votre esprit mais je comprends.

Les faits étaient simples, en effet.

- Très simples, reprit-il dans un murmure.

Son élève était tombée amoureuse de lui. Un dénouement que même des inconnus avaient pu saisir à la volée mais qu'il s'était refusé de soulever, par crainte des conséquences. Il avait espéré que ce n'était qu'une passade, un vague intérêt, un "Plaire" mais elle avait démontré des sentiments plus profonds sur la question.

- Je m'adapte à vous depuis qu'on s'est rencontré, ça ne changera pas... Vous croyez que ça ne l'est pas pour moi? Je ne me pensais pas réellement capable d'aimer autre chose que mes livres ou mon frère.

Il se décida à un face à face avec lui-même. Qu'est-ce qui lui posait réellement problème, au juste?

- Je sais que je ne veux pas vous voir malheureuse. Je sais que j'ai hâte de voir l'avenir que vous formerez de vous-même. Je sais à quel point vous êtes aux antipodes de celle qui m'a arraché le cœur... Mais je ne sais pas si c'est de l'Amour, si c'est de la Passion.
- Et comment comptez vous le savoir et le découvrir si vous ne tentez rien? Je crois pas que vous soyez un homme capable de désirer uniquement une femme par passion ou même par désir charnel.


Ce dont il se méfiait, c'était du vide affectif laissé par celle qu'il avait cru pouvoir être sa Femme. Il ignorait totalement s'il était capable d'un quelconque sentiment après ce qu'elle lui avait infligé. Il se méfiait d'autant plus de la superficialité. Combien de fois avait-il été témoin de grandes déclarations qui tombaient à plat, une fois le quotidien instauré? Ce qui paraissait être un fantasme au départ devenait un ennui, délaissé aussitôt obtenu. C'était un rôle qu'il refusait.

Bien qu'il ne pensait pas Kaly superficielle, il avait du mal à croire qu'elle pouvait maintenir une relation sur le Temps.

- Vous ne pouvez pas refuser de vivre quelque chose de mieux, de vrai et sincère, de plus pur, à cause de ce que vous avez vécu avec elle. Ce serait injuste pour vous comme pour nous, mais j'ai conscience que ce n'est pas naturel pour vous et que vos craintes et traumatismes sont bien trop grands encore.

[ Vous ne pouvez pas refuser. ]

La longue lettre de son élève se trouvait à proximité, sur le bureau devant lequel il était assis. Elle était le résultat des excuses qu'il lui avait donné, une discussion qui aurait dû aboutir, à la base, sur la promesse d'être moins rabat-joie. Seulement, celle-ci avait pris des tournants inattendus, aboutissant sur un sujet beaucoup plus sombre.

J’ai ressenti votre désarroi et j’ai alors compris pourquoi vous êtes ce que vous êtes. Après tout, c’était ce que je recherchais. A mes yeux, Eylion, vous n’êtes pas un meurtrier, mais bien une victime du sort qui s’est acharné sur vous dès la naissance.

Il avait consenti à raconter une partie de son passé. Kaly n'avait pas réussi à supporter le récit au-delà du Manoir, prenant la fuite. Même sa précédente Femme avait dû creuser pour obtenir la Vérité. Mais à elle, à sa jeune élève, il avait consenti à accorder un pan de sa confiance. Il ignorait, au juste, ce qui avait motivé son geste... La Volonté de ne pas céder aux Ombres de son Passé? Démontrer qu'il était encore prêt à se confier à quelqu'un?

Et pourquoi elle, pas un autre?

Sans doute sa Candeur mêlée de Détermination avaient convaincu l'Arcaniste d'amorcer un pas. Il avait tout fait pour écarter la Pitié de son histoire, quitte à l'énoncer comme un sujet sans importance. C'était bien la dernière chose dont il avait besoin. Les mots "émotif", "victime", "soumis" et "sensible" de sa disciple avaient déjà résonné comme des gifles à sa Fierté. Jamais il n'avait cédé. Même au fond du Gouffre. Même dans les affres de la Passion. On pouvait l'écraser. Le détruire. L'insulter. Le piétiner. Le Soumettre mais ça ne durait jamais qu'un temps.
Ma Vie, ma Liberté et mon Âme ne sont pas négociables, avait-il craché à la face de sa précédente Femme alors qu'ils se bataillaient encore à leurs premières rencontres.

Hargne n'avait jamais été un terme aussi juste pour le désigner.

- Je ne sais pas exactement ce que vous me proposez au juste mais quoique vous me vendiez, je ne suis pas intéressé. Ma Liberté n'est pas négociable. Nous pouvons résoudre ça de manière pacifique ou de manière plus violente. Votre choix.
- La pacifique est que tu baisses ce putain de mur et que tu me laisses finir ce qui est dû. La violente est que tu sois Mien à ton Trépas.
- La pacifique, c'est que je vous rende un service dans les limites de mes moyens et que vous laissiez ce jeune coq tranquille. La violente, c'est que je vous expulse à travers le mur de ce cabanon et que je m'en aille avec ce que vous jetez aussi aisément, c'est à dire lui.


Il n'était pas entièrement certain d'apprécier la façon dont sa disciple le percevait. Ce qu'il sentait au fond de ses tripes.

- Vous êtes bien trop sensible, émotif et droit dans vos bottes pour ça, sans quoi vous ne seriez pas aussi blessé par votre passé et cette femme.

Elle était encore jeune, quelque part sur la réserve. Une certaine forme d'impatience et d'incompréhension rongeait les veines de son élève, il pouvait le sentir. Au moins, il avait été Honnête et Franc avec cette dernière. Ce pan ne changeait rien à leurs rôles respectifs, à savoir celui d'un Professeur et son élève. Il tiendrait ses Promesses.

Le reste, il le laissait au Temps.
Dernière modification par Ennrael le 04 août 2018, 15:46, modifié 2 fois.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 18 avr. 2018, 11:50

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Le Rêve l'avait surpris, tard dans la nuit, alors qu'il s'attelait à remplir son nouveau grimoire. La plume était tombée, les paupières s'étaient alourdies, les muscles s'étaient détendus et enfin, le faste de l'Inconscience l'avait happé sur ce qui aurait pu être et qui ne le sera jamais. Le Rêve broda la Chimère, le faux souvenir, un passé plausible, flou et pourtant presque aussi vibrant que la Réalité.

- ... Tu sais que les portes servent à quelque chose?
- Quoi? Une fenêtre est une entrée comme une autre, déclara, hilare, le Miqo'te.

Le sourire insupportable, l'adolescent trônait fièrement, mains sur le rebord d'une riche fenêtre ouverte. Il chercha une pomme dans son dos, coincée dans une sacoche de ceinture. Il la lança à son interlocuteur qui la rattrapa à grande peine. La Chimère tissa ce qui aurait pu être le passé des deux individus s'ils s'étaient connus dès l'enfance.

- Allez, il fait trop beau aujourd'hui pour que tu restes à l'intérieur!
- J'ai des leçons, tu sais, répliqua le jeune Élézen avec une grimace discrète.

Faussement choqué, le Miqo'te se mit une main sur le cœur.

- Ça veut dire que tu préfères passer du temps avec Professeur Bouquetin plutôt qu'avec moi?

Le long rire de Kaldriss lui répliqua.

- Tu es vraiment stupide.
- Non mais j'ai compris, tu me délaisses, je ne pouvais pas rivaliser avec le charme de sa barbichette grise, répliqua t'il en portant le dos de sa main à son front, théâtral.

Il écarta ensuite les bras.

- Je n'ai plus qu'à mettre fin à mes jours. Notez sur ma pierre tombale: "Ci-git,  , voleur au grand cœur qui cherchait à sauver Kaldriss Lacroisel d'une éternité de leçons interminables". Adieu!

Alors que l'intéressé secouait la tête, dépité, l'adolescent se laissa choir en arrière, disparaissant dans le vide.

- !

Kaldriss se précipita vers la fenêtre, agrippant le rebord à deux mains pour pouvoir se pencher. Il s'aperçut que le Miqo'te était parvenu à se rattraper à la corde qui lui avait servi à monter. Dans un élan de vantardise, il avait enroulé sa jambe et sa queue arrière à celle-ci de façon à pouvoir mettre ses mains derrière la tête. Il éclata de rire.

- Si tu voyais ta tête!
- ... Ça ne va pas de me faire peur comme ça?!

Il écarta les bras à nouveau en réponse.

- Au moins, ça a eu le mérite de te décrocher de tes livres! En attendant...

Il nargua son interlocuteur d'un sourire tout en attrapant la corde de l'autre main.

- Tu viens?

Un soupir lui répondit. Kaldriss entreprit de descendre à son tour.

- Si jamais j'ai des ennuis à cause de toi, je te vends à mon père sans scrupules.
- La Vie est trop courte pour ne pas en profiter!
- Avec toi, c'est clair qu'on perd des années...
- Allez bouge toi au lieu de ronchonner.

La Carcasse rouvrit les yeux sur son refuge. L'Adulte, l'Adolescent enchaîné et l'Enfant étaient là, fidèles à leurs postes. Le Mage se pencha sur lui.

- L'Heure n'est plus à la Culpabilité mais à l'Action.

Un bruit de Chaînes tombantes résonna, l'Adolescent retrouvant sa Liberté. Il se regarda d'ailleurs avant d'esquisser un sourire cynique.

- Oh, on dirait qu'On a, enfin, atteint une forme de Conclusion.

L'Enfant se prit les bras, incertain.

- Le Temps a fait son Œuvre. Que reste t'il de l'Innocence après la Chute? Peut-on Chuter plus loin que là où on s'est écrasé? Mais sur ce Rebord, oui... Pétris d'Incertitudes, au seuil de la Démence, une Constante a été trouvée.

La Carcasse se releva péniblement et se redressa. L'Adolescent ricana depuis son perchoir.

- Ça change, pour une fois, de ne pas le traîner dans un Procès.
- Nous jugeons quand c'est Nécessaire, répliqua l'Adulte.

Tant que nous nous rappelons de notre Humanité, nous pourrons trouver un moyen de sortir d'ici.

Au fond du Gouffre, le Miqo'te devait toujours se rappeler de cette main sur son épaule. Cette même phrase, allongé auprès de celle qu'il avait cru pouvoir être sa Femme, il l'avait susurré en réajustant une longue mèche d'ébène.

- Je serai là pour te rappeler ton Humanité, quoiqu'il arrive, avait-il fait avec un sourire empreint de tendresse.

La Remarque avait été reçue avec une perplexité équivoque.

- ... Pourquoi faire? Suis-je plus ou moins avec cet attribut? Voilà bien longtemps que je ne suis plus humaine.

Aux prises avec sa Passion, bien plus tard, à la suite d'un échange sulfureux, il en avait presque oublié sa promesse.

- Monstre, je serai le tien.

Mais il n'avait pas pu. Il s'y était refusé.

Tant que nous nous rappelons de notre Humanité, nous pourrons trouver un moyen de sortir d'ici.

Le sourire de l'Élézen laissait parfois place au désespoir à son tour.

- On ne s'en sortira jamais...

C'était là que le Miqo'te intervenait alors, le prenant au col.

- Arrête de raconter des conneries! Tu retrouveras ta fiancée et ton mariage sera le plus beau de tout Eorzéa. Il sera tellement lumineux, tellement dégoulinant de bons sentiments, d'amour, de joie que je serai le putain de témoin le plus envieux et aigri jamais vu. Ta sœur me détestera, ton père me tolérera juste par principe et ta mère sera ivre de rage. Ta fiancée sera amusée et toi, tu seras tellement ébloui par cette dernière que tu te ficheras bien de toute l'assemblée. Tu m'entends, crétin?! Si l'un d'entre nous doit s'en sortir, c'est TOI! Ils t'attendent TOUS! Tu ne peux pas abandonner maintenant, tu ne peux pas l'abandonner ELLE!

Ils discutaient souvent de ce qui aurait pu être et qui ne sera jamais.

- Quand nous serons hors d'ici, tu n'auras plus jamais à retourner à ta vie de voleur. Ça te dirait de devenir un vrai Mage attitré?
- Un Mage... attitré.
- Inutile de me regarder comme ça, avait fait Kaldriss avec un rire. Je suis sincère... Tu es le frère que je n'ai jamais eu et j'aurai bien besoin d'un vrai Conseiller une fois de retour à la maison.

L’œil d'Eylion s'ouvrit sur le plafond de sa chambre. Une aube pâle et timide entrait par la fenêtre et le chant de la forêt environnante s'élevait discrètement, à moitié étouffé par les murs. L'Arcaniste se redressa, remarquant alors un changement. Il porta une main à son cœur.

La Douleur... La Perte instaurée par sa précédente Femme...
Il ne la ressentait plus.

Là où il vivait avec la présence d'un Pieu régulier, il ne pouvait que remarquer son Absence. Le Temps avait fait son œuvre, son Esprit obéissant à sa Volonté implacable.

Tu ne seras que l'ombre d'un rêve, d'un souvenir éteint.

Ni Tristesse, ni Haine, ni Rancœur, elle n'était plus qu'une Leçon, un mauvais souvenir. Sa linkperle acheva son Réveil, l'obligeant à aller la chercher sur la table de nuit pour la porter à son oreille.

- Ici Eylion.
- MOOOONN RAYOOOONNN DE SOLLEEEEIIILLL, BWAAAAAH!

Le Miqo'te ne put s'empêcher de grimacer à l'agression sonore et larmoyante, mi-agacé, mi-blasé.

- Salut, abruti, maugréa t'il.
- Tu... tu te souviens encore de moi... résonna un ton à la fois dramatique et exagéré.
- Écoute, "Chérie", j'ai mal à la tête alors si tu pouvais te calmer un peu, ça m'arrangerait...
- ... ... Attends, tu viens de plaisanter là?
- Je crois mais juste à entendre ce genre de remarque, ça me donne envie de faire l'inverse.
- Hééé, tu ne peux pas m'en vouloir de me plaindre...! Ça fait des jours que tu ne me donnes plus aucune nouvelle!
- ... "Pas de nouvelles, bonne nouvelle"? répliqua Eylion avec un ton torve.
- ... Pendant un instant, j'ai presque cru que tu avais de l'humour.
- Certainement plus que toi, "Chérie". Bon, qu'est-ce que tu veux savoir à part que je respire encore?

Un instant de silence s'instaura à cette question.

- Rhian?
- J'ai cru comprendre que quelqu'un s'était pris une jolie Miqo'te en tant que disciple ~

La Colère eut tôt fait de prendre les veines du Mage.

- Si tu songes à m'emmerder, toi aussi, avec ça, je te garantis que je te retrouve et que je fais mon possible pour trouver le sort le plus tordu possible pour te faire passer le goût des femmes.
- Hein? "Moi aussi"?

Eylion soupira en se passant une main devant l’œil.

- On va dire que mes dernières sorties ont été... plutôt mouvementées. Je n'ai pas... vraiment envie d'en parler, d'accord? Juste que... Oui, j'ai pris quelqu'un sous mon aile pour diverses raisons et il se trouve que c'est une femme.
- Mouvementées, comment ça?
- ... On va dire que l'alcool et la confusion m'ont poussé à parler un peu trop à la Cave et que j'ai eu droit à des jugements hâtifs par rapport à ça.
- Oh... Désolé, je ne savais pas... Mais attends un peu, l'alcool et la confusion?

Le Miqo'te eut un air blasé.

- On va dire que j'ai essayé de demander des conseils à Morgan vis à vis du fait que ma disciple aurait... de l'intérêt vis à vis de moi... et sache que je prends la peine de te préciser ça juste parce que c'est toi!
- ... Wow. Vraiment?
- ... Vraiment.
- Je comprends... Enfin, je comprends mieux maintenant. Et heu... C'est quoi ton avis sur la question?
- Il est constitué de deux arguments: C'est ma disciple et elle est trop jeune.
- Elle a quel âge?
- ... Dix-sept ans.
- J'ai connu des filles plus précoces que ça, c'est presque une grande fille maintenant.
- Rhian... Rappelle moi, c'est quoi ton expérience au niveau des relations sentimentales?
- Aucune! fit fièrement le Hyur.
- Tu comprendras pourquoi je n'accorde aucun crédit à ce que tu dis à ce niveau, lança t'il platement.
- Hey! Je ne suis pas complètement stupide non plus, j'ai des sentiments aussi. D'accord, on n'a pas les mêmes valeurs mais je peux, au moins, essayer de comprendre!
- "Wow", tu as des sentiments? reprit le Miqo'te avec un cynisme amusé.
- ... Tu as mangé quoi, aujourd'hui?
- Va savoir, je suis plutôt en forme... ou je dois être tellement au fond du gouffre que je n'en ai plus rien à foutre maintenant. Sinon, sérieusement... Si tu veux, on en reparlera une autre fois mais là, je n'ai vraiment pas la tête à penser à ça. Et toi, de ton côté?
- D'accord, d'accord... Je suis chez Suzie, elle m'héberge pour le moment... En parlant d'ailleurs de sentiments, je dois t'avouer qu'elle et moi, on envisage peut-être de débuter une relation ouverte... pour commencer.

Eylion esquissa un air stupéfait à la nouvelle.

- Suis-je bien en train de parler à Rhian?
- Hé... Je sais que ça peut paraître bizarre mais... J'ai parlé à une sorte de spécialiste et je n'ai pas arrêté de cogiter depuis. Tu sais comment est ma famille, mes parents... Il se peut que je sois comme ça parce que... Je ne sais pas, peut-être parce que j'ai peur de finir comme eux?
- Amoureux comme au premier jour, avec une ribambelle de bambins dont un plus dégénéré que les autres? fit le Miqo'te avec un sourire désabusé.
- ... Exactement. Si ça se trouve, c'est moi qui vais avoir besoin de tes "avis éclairés", lança Rhian avec un rire à la fois gêné et nerveux.
- ... Laisse moi deviner, tu es mort de trouille.
- Tu n'as pas idée.
- Pour me parler "d'avis éclairés" venant de ma part à ce niveau, je m'en doute. Bienvenu au club.
- Allez, tu as bien un conseil à filer à ton meilleur ami adoré entre tous...?

Le Hyur entendit un soupir.

- Prends juste le Temps. Ne te force pas, ça ne sert à rien. Tu as de la chance au moins, Suzie et toi, vous êtes du même acabit. Elle doit être aussi morte de trouille que toi, si ce n'est plus.
- ... Tu peux m'expliquer comment ça se fait que tu gères mieux la situation des autres que la tienne?
- Va savoir, fit Eylion avec un léger rire. Ah, en fait, ça veut dire que je vais te perdre en tant que colocataire?
- Je te manque déjà? chantonna Rhian.
- Arrête, c'est un soulagement, mentit le Miqo'te avec un ton équivoque.
- ... Je ne sais pas, pour le moment, pour tout t'avouer.

Un silence court s'instaura entre les deux partis.

- Bon, il va falloir que j'y aille. Je suis content de t'avoir entendu un peu, reprit l'Uldien avec un faible sourire.
- Oui, moi aussi, abruti... répliqua le Lunaire sur le même ton. Prends soin de toi.
- Toujours mieux que toi!
- J'ai une réputation à tenir à ce niveau, dit-il sur un ton faussement noble. Allez, hors de ma vue.

Eylion mit court à l'appel, ôtant le doigt de sa linkperle. Il avait, à peine, terminé son geste qu'un bipement sonore se fit entendre. Il activa le nouvel appel, perplexe.

- Ici Eylion...?

Une voix posée et familière lui répondit.

- Ici Velren. J'espère que je ne vous dérange pas car je dois vous parler à propos d'un sujet important.

Les propos qui s'ensuivirent eurent le don de faire écarquiller l’œil au Mage.

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Ennrael
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Message par Ennrael » 22 avr. 2018, 10:58

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- Vous êtes morts.

Le sourire vicieux du lalafell narguait les trois intrus qui se trouvaient dans son bureau. Sept assassins étaient sortis de passages secrets, cimeterres au clair. Morgan, le vétéran, avait le dos plaqué dans un coin de la pièce. Merydwen, l'élève de ce dernier, se trouvait sous le bureau. Quant à Eylion, il s'était jeté sous une table basse. Des fléchettes empoisonnées s'étaient plantées à proximité de leurs couverts respectifs.

La situation avait rapidement dégénéré.

Plus tôt dans la journée, en début d'après-midi, le Mage avait convié les deux combattants pour une réunion dans un coin discret de la Bibliothèque Axiome.

- Velren a trouvé une piste pour s'infiltrer au sein des Sept Voiles... Enfin, une... "opportunité" qui est aussi un sauvetage. L'un de ses clients, Almarad, a un fils, Ere'zen... Il faut savoir que le client est assez "influent" dans le domaine de la négoce. Son fils adoptif s'est entiché d'une fille du nom de Reha'ni... sauf que celle-ci a disparu, il y a presque une semaine. Ere'zen a fait des pieds et des mains pour retrouver sa trace... et découvrir qu'elle se trouve au sein de l'établissement. Il a, du coup, fait le nécessaire pour se faire remarquer en utilisant l'influence de son père et il a réussi à s'assurer un accès mais avant de pouvoir y aller, il a été arrêté par son père. Il ne veut pas que celui-ci prenne des risques inconsidérés. C'est là que Velren a pu négocier avec ces derniers... Il se trouve qu'Ere'zen... est un Miqo'te. On n'est pas très éloignés physiquement à part qu'il est blond et un peu plus grand que moi. Je vous laisse déduire le reste par vous-même...

L'organisation de l'infiltration avait été assez simple. Il avait endossé l'identité d'Ere'zen et les deux combattants, de ses gardes du corps. Ils s'étaient donnés rendez-vous au soir. Une porte épaisse avait accueilli le trio, muni d'un vasistas au niveau des yeux. Le Miqo'te avait toqué à celle-ci selon un rythme précis.

- Bonsoir, je suis Ere'zen Altehali. Je souhaiterai savoir s'il y a une "table" disponible ce soir.

Ils avaient découvert un hall de taille modeste mais au luxe indécent avant d'être escortés auprès du gérant, Naadir Ladjah, un lalafell. L'entretien avait eu pour but de vérifier les goûts "particuliers" d'Ere'zen et de présenter l'endroit. Merydwen et Morgan avaient dû rester hors du bureau.

- C'est un plaisir de faire affaire avec vous, Altehali, avait fait Naadir à la sortie de l'entretien, avec un grand sourire.
- Tout le plaisir est pour moi. Si je me doutais des divertissements que vous proposiez... Je serai venu plus tôt!
- Oh, vous devez comprendre que nous nous devons d'être prudents...
- Je le comprends tout à fait, avait prétexté le Miqo'te avec un ton chaleureux. Au moins, ça me rassure sur votre... discrétion.
- Nous assurons une discrétion entière et totale.
- Et donc... pour ma "table"?
- Je laisse Marr vous conduire aux sous-sols. Nous avons une fille qui pourrait correspondre à vos goûts, je vous l'envoie sur le champ. Je ne crois pas que... vous avez mentionné quelque chose vis à vis de vos gardes mais nous pouvons, aussi, leur proposer des... divertissements.
- Ils viennent avec moi.

A l'air surpris du lalafell, "Ere'zen" avait enchaîné.

- J'ai... des rapports particuliers avec Farha... et Deneb adore regarder.

Une servante les avait guidé à travers l'endroit, sous l'incompréhension totale des "gardes" du Miqo'te. Celui-ci ne put les informer qu'une fois isolés dans une chambre dont le luxe était aussi raffiné que les détails sordides de ses équipements.

- ... Cet endroit... n'est pas un bordel classique, avait fini par dire Eylion en reprenant son ton habituel.

Il avait dû de marquer un instant de silence pour contenir sa rage.

- Les... prostitués ici ne savent pas que les "clients" ont le droit de tout leur faire. Pas le seul... fantasme tordu et classique du sadisme, non... Amputations, tortures, même le meurtre est autorisé.

La nouvelle avait été un choc pour ses compagnons, le vétéran s'exprimant aussitôt.

- Bordel de merde... Si on ferme pas cet endroit... J'y mettrais le feu...

Merydwen avait flanché, son regard habituellement si assuré passant de droite à gauche nerveusement, les dents serrées à s'en les briser.

- ... Comment est-ce possible...? Comment un tel lieu peut-il bien exister...?
- ... L'Ennui. Ils sont prêts à tout pour du sensationnel, pour de l'unique, pour leur donner l'impression qu'ils ont le Pouvoir, pour quelque chose que l'argent aurait du mal à payer, avait expliqué le Miqo'te en se prenant le bras, presque à se le broyer. Avec leur influence, qui se soucierait d'une ou deux disparitions dans les Bas Fonds...?
- Bon... Qu'est-ce qu'on fait alors ? avait demandé Morgan. On était là pour Jaroud mais je dois avouer que... Que tout ça me donne envie de jouer au pyromane!

Le groupe avait eu du mal à se décider, réceptionnant au passage Reha'ni. Eylion avait fait en sorte de glisser des goûts spécifiques à Naadir pour augmenter les chances que la Miqo'te leur soit envoyé. Les délibérations sur la marche à suivre furent nombreuses et laborieuses par la suite.

- ... Je me refuse à fuir en laissant ces monstres faire ne serait-ce qu'une seule autre victime...
- Je suis d'accord avec Merydwen... Nous ne pouvons tolérer ceci!
- Je ne voudrais pas en rajouter mais vous devriez savoir ce qui se passe actuellement, au moment même où nous parlons... dans les autres chambres... Mais j'aimerai aussi vous rappeler que nous ne sommes que trois, dans un endroit inconnu, face à des effectifs tout aussi inconnus...

Face aux risques, une dispute avait même éclaté. Morgan et son élève voulaient impérativement libérer les prisonniers. Le Mage se voulait plus réaliste, se refusant à risquer les preuves qui pourraient dénoncer le réseau. Finalement, ils s'étaient décidés à s'attaquer directement au gérant, dans l'espoir de le prendre en otage et d'éviter un combat en leur défaveur.

Le plan avait tourné court quand il s'était avéré que le bureau de Naadir était, en réalité, construit de façon à assurer la sécurité de ce dernier. Ce fut ainsi qu'ils s'étaient retrouvés entourés par plusieurs assassins.

Un combat féroce s'était alors amorcé pour la survie. Le fer avait croisé le fer. Les sorts du Mage avaient ravagé la moitié de la pièce. Le sang et la hargne s'étaient mêlés, la Mort dansant parmi les belligérants. Le trio avait fini par ressortir, victorieux, au prix de multiples blessures. Ils avaient découvert, à leurs dépends, que les armes de leurs ennemis étaient empoisonnées mais une fouille rapide des corps leur avait permis de récupérer les antidotes.

Dans le feu des combats, Merydwen avait fauché la vie de Naadir, mettant à mal leurs objectifs. Toutefois, l'Arcaniste avait su suggérer le fait d'utiliser les passages secrets pour neutraliser discrètement le reste des gardes de l'endroit. Ce fut au prix d'une longue nuit qu'ils étaient parvenus à nettoyer l'endroit, emprisonner les clients présents, rassembler les prisonniers blessés et les soigner.

- ... Tu penses que tout ira bien pour eux ? lui avait demandé, épuisée, Merydwen.
- Tu veux la Vérité ou un truc pour te rassurer? avait-il lancé, dans le même état.

Elle l'avait fixé un instant avant de détourner la tête sans répondre, préférant ne rien entendre de sa part. Il avait alors soupiré.

- En mettant de côté les aspects évidents... Ils n'auront plus, pour certains, à vivre dans la rue avec ce qu'ils ont maintenant. Il y a des personnes solides dans le tas comme Ishla qui est bien décidée à ne lâcher aucun d'entre eux moralement. Je vais m'arranger pour que les blessés soient pris en charge. Vous devriez y aller...

Le Miqo'te était resté en arrière pour gérer les rescapés et se coordonner avec ces derniers. Il avait finalement laissé la plus débrouillarde d'entre eux à la charge de l'établissement devenu refuge et hôpital de fortune. Son travail enfin terminé, il était revenu au refuge des Auras avec les preuves, épuisé et meurtri.

Il avait croisé sa disciple, inquiète. Il avait béni le fait que la discussion avait été courte, les nouvelles données, ne pouvant plus maintenir sa façade forte. Dès le départ de Kaly, il s'était autorisé, enfin, à s'effondrer, aussi bien mentalement que physiquement, sur le lit. L'horreur des Sept Voiles l'avait ramené à une époque sombre où la vision des mutilations, du sang et de la peur était journalière. Le regard traqué et désespéré des victimes qu'il avait soigné, il les connaissait. Les récits fiévreux et délirants qu'il avait entendu, il les connaissait.

- Tu veux la Vérité ou un truc pour te rassurer?

Il était le premier à savoir que rien ne pourrait réparer ce qui avait été fait.
Rien ne pourrait défaire leurs cauchemars.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 25 avr. 2018, 02:33

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- Maaaaîîîtreee Greeeeennnnn...!!

Eylion essayait de se dire, de toutes ses forces, que ce qui arrivait était une juste punition pour tous ses anciens méfaits. Autour de sa taille, des bras l'enserraient, l'obligeant à lever les siens pour éviter de toucher Dorian. Une grimace de dégoût défigurait les traits du Miqo'te. Le jeune homme, quant à lui, pleurait à moitié dans son giron.

- J'étais sûr que vous viendriez me sauver!

Non loin de là, un Rhian semi-hilare, semi-embarrassé observait la scène incongrue. Suite à son sauvetage par les Auras, C'Thay avait amené Dorian chez Suzie après un appel à l'Uldien. Un peu de nourriture et de repos, ainsi que des soins par le docteur, avaient rapidement remis d'aplomb le rescapé. Eylion finit par prendre son courage à deux mains pour saisir les épaules de celui-ci et l'écarter aussi loin de lui que possible sans pour autant le "brusquer".

- Alors déjà, crétin, ce n'est pas moi qui t'ai sauvé mais un autre groupe. De deux... J'AVAIS DIT QUOI A PROPOS DE LA FERMER APRÈS LE CULTE?!

Dorian esquissa un air stupéfait au cri qui eut le don d'arrêter net ses débuts de larmes. Il joignit ensuite ses mains devant lui, extatique. Le visage du jeune novice présentait les traces laissées par les mauvais traitements de Matza, le bras droit de Jaroud. La moitié gauche de ses traits n'était plus qu'un amas de chair brûlé.

- Je suis désolé, Maître, désolé! Tout le monde dit tellement de mal de vous... J-je ne pensais p-pas... P-Punissez moi.

Le dernier propos eut le don de défriser au dernier degré le Miqo'te qui le relâcha comme si Dorian était enflammé.

- Je ne suis pas ton Maître, je vais devoir te le répé...! commença t'il à vociférer avant de s'apercevoir que c'était exactement ce que le jeune homme attendait.

Il se força à reprendre son souffle et un semblant de calme.

- Écoute, je l'ai déjà dit, c'est dangereux de faire parti de mon entourage. Alors ce que tu vas faire, comme un grand garçon, c'est de repartir à l'Académie et de broder je ne sais quel mensonge à propos de ton visage. Et la prochaine fois que quiconque ira là-bas pour poser des questions à mon sujet, tu ne sais rien, tu ne me connais pas, tu ne m'as jamais vu de TOUTE TA FICHUE EXISTENCE!

Il n'avait pu s'empêcher d'exploser à la fin, la colère, le dégoût et la culpabilité incendiant ses veines. A genoux, Dorian agrippa les pans de la veste du Mage, larmoyant.

- N-non, M-Maître, je vous en prie... G-gardez moi auprès de vous, j-je vous serai utile. J-je promets de ne p-plus jamais rien d-dire. L-laissez moi rester auprès de vous.
- Si tu veux m'être utile, REpARs à l'Académie! Ne m'oblige pas à me répéter...

Un gémissement étranglé lui répondit pendant que le Miqo'te dégageait sa veste, sans pitié. Il sortit de la chambre pour arriver dans le grand salon de la maison de Suzie, suivi par Rhian qui prit la peine de refermer la porte derrière eux.

- ... Tu devrais essayer d'être gentil avec lui, je suis à peu près sûr que ce serait plus efficace pour le repousser.
- Tu... peux me demander TOUT, de faire TOUS les efforts du MONDE mais ça, non! fit Eylion, traumatisé au dernier degré.

Rien que de penser au regard lubrique du novice sur lui suffisait à plonger le Miqo'te dans un abîme de répulsion. Combien de fois l'avait-il subi à l'Académie?

- ... Et tout ça à cause de cette SALOPE!

- J'ai besoin de me changer les idées et la Bibliothèque sera parfaite pour ça.
- La B-Bibliothèque...?


- Du calme, Eyl', du calme...

Peine perdue, le Mage fulminait sur place. Finalement, il se tourna vers son ami, l’œil acéré.

- Tu peux t'occuper d'organiser son retour...?
- Heu, oui, pas de problème, fit Rhian en s'efforçant d'offrir un sourire rassurant.
- Parfait.

Sur ces mots, Eylion se dirigea vers la sortie d'un pas vif. Au seuil de celle-ci, Rhian l'interpella.

- Eyl'...
- Quoi? maugréa t'il en jetant un œil en arrière.

Le Hyur lui offrit un sourire navré.

- Bonne chance pour Jaroud.
- Je n'ai pas besoin de Chance, juste de ma Colère.

Le Mage s'apprêtait à refermer derrière lui quand il s'arrêta dans son geste.

- ... Merci, pour t'occuper de Dorian.

La porte se referma sur un Rhian qui secoua la tête, mi-dépité, mi-inquiet.

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Ennrael
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Message par Ennrael » 25 avr. 2018, 13:51

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Lien des Textes Supplémentaires liés à la Quête.

La nuit était tombée depuis un moment sur Uld'ah. Depuis sa rencontre avec Kaly, Jaroud n'avait pas quitté sa demeure secondaire hormis pour quelques entretiens vitaux pour son commerce. Ça faisait depuis deux jours qu'il n'avait plus de nouvelles de Matza. L'homme, fatigué, se glissa sous ses draps. Il commençait à trouver le Temps long... Où était donc sa Muse, sa Déesse...?

Il ferma les yeux, laissant l'huile de sa lanterne allumée se consumer lentement sur la table de nuit.

Qui était ce Miqo'te pour bénéficier autant d'alliés et de moyens?

- Maudit soit-il, grommela t'il en tournant le dos à la lampe.
- Oh, pour ça, ne vous inquiétez pas, c'est déjà fait ♪

Le Hyur ouvrit brutalement les yeux quand il entendit la voix perfide à son oreille. Il tenta de retourner aussitôt pour s'arrêter dans son geste quand il sentit le contact glacial d'une lame sous sa gorge.

- Bonsoir, Jaroud.
- ...!

Paniqué, le Marchand regarda les alentours de sa chambre. Comme s'il devinait ses intentions, le Mage reprit la parole.

- Je ne crois pas que c'est une bonne idée d'alerter la garde sans prendre le temps de m'écouter.

Sans lui laisser le temps de répondre, Eylion plaqua l'homme sans ménagement dans son lit. Une main sur l'épaule de celui-ci, l'autre tenant le poignard vint chercher un papier dans une sacoche arrière de sa ceinture du bout de l'index et du pouce. Le papier termina devant les yeux abasourdis du marchand. Il prit un moment avant de lire ce qui était écrit dessus. Quand Jaroud comprit de quoi il s'agissait, ses traits se déformèrent sous les effets de la peur et de la stupéfaction.

- Aah, on dirait que ça vous dit quelque chose... Toutes ces femmes... Toutes ces filles...
- Comment... souffla le Hyur, abasourdi.
- Nous avons rendu une petite visite à votre ami, Naadir. Vous risquez d'avoir du mal à reprendre contact désormais... Mais dites moi, Jaroud... Est-ce que c'était jouissif?

Le Marchand essaya de se redresser mais le Miqo'te le plaqua contre le rebord du lit.

- Répondez! vociféra t'il d'une voix mesurée entre ses canines. Est-ce que c'était jouissif de les battre, de les humilier?!
- E-Elles étaient payées pour ça...!
- Ah oui et Clarissa, elle était payée aussi quand elle est morte de ses blessures?
- C'é-était un accident!
- Un accident, bien sûr... Vous saviez ce qu'était l'établissement... Amusant aussi comme elles étaient toutes rousses... C'était comme ça que vous vouliez traiter ma disciple?
- Non!
- La ferme! cracha le Miqo'te. Vous allez payer, Jaroud, vous m'entendez? Pour chaque coup, pour chaque cri que vous leur avez arraché, pour chaque putain de minute de terreur passée en votre compagnie.
- M-me tuer n'arrangera rien, souffla le Hyur.
- Qui dit que je vais vous tuer? fit Eylion avec un sourire perfide. Non, Jaroud... Ce serait trop facile... Ce que je vais faire, c'est tout vous arracher et vous allez faire exactement tout ce que je vous dis. Vous savez pourquoi...?

Le Marchand, atterré, secoua la tête.

- Parce que vous n'avez pas le Choix... Ou plutôt si, vous en avez mais vous n'allez pas aimer les options. L'option numéro un... C'est que vous allez dénoncer l'ensemble du réseau des Sept Voiles avec les preuves que je vais vous donner. Vous allez utiliser l'ensemble de vos moyens pour les empêcher d'étouffer l'affaire. L'ensemble de votre fortune, vous allez la dépenser exactement comme je le dirai, à la lettre près. Une fois les Procès amorcés et sécurisés, vous et votre amie Matza, vous vous rendrez alors aux autorités.
- Vous êtes complètement fou... souffla Jaroud. Ils me tueraient!

Un ricanement bas lui répondit.

- Évidemment qu'ils vont tenter de vous tuer... Mais vous aurez moi, mes alliés et les autorités à vos côtés. Nous allons vous tisser une magnifique fable du repenti. Bien sûr, vous pouvez refuser... Mais j'ai fait une promesse: tout vous arracher. Soit vous vous en sortez avec une image moins ternie que vos actes... Soit je ferai en sorte d'aller voir les autres clients des Sept Voiles. Je suis sûr qu'ils seraient ravis de vous faire porter le chapeau. Le bouc émissaire idéal. Sans parler aussi de cette triste histoire de trafic de somnus... De quoi aggraver votre cas.

Le Hyur écarquilla les yeux.

- Vous n'oseriez pas...

Eylion lui offrit un sourire si angélique qu'il en était démoniaque par essence.

- Et pourquoi pas? Ce qui m'intéresse avant tout, c'est de vous couler. Que ce soit par les autorités ou bien par vos "amis", dans l'un comme dans l'autre, je suis parfaitement gagnant. Alors, Jaroud...

Le sourire se fit alors, à nouveau, perfide en revenant au Marchand.

- Quel est votre Choix...?

Le Hyur se mit à pâlir. Un long moment de silence pesant s'instaura, durant lequel la respiration lourde et paniquée de l'homme était audible. Ce dernier tenta de chercher toutes les échappatoires possibles. L’œil implacable du Mage savourait ce moment de lutte, laissant Jaroud établir ses propres conclusions et creuser sa propre tombe.

- Je... le ferai, finit-il par dire d'une voix sourde. Mais je veux La voir...
- Je crois que vos actes vous ont ôté ce droit depuis longtemps...

Puis Eylion ajouta, nonchalant.

- Mais qui sait, si vous vous repentez suffisamment... Ça restera son Choix, bien sûr, mais je pourrai "éventuellement" la tenir au courant.

Un pur Mensonge mais ce Mensonge suffit à donner de l'Espoir au supplicié au fond de son Gouffre.

- J-je... Je ferai le nécessaire! Je payerai tout... Je serai un autre Homme, je le promets... Tout pour Elle, Tout! Dites lui!

Le Miqo'te rangea le papier et rengaina son poignard, satisfait.

- Alors je vous dis à tout à l'heure pour les premières démarches, lança t'il avec un sourire peu amène.

Eylion laissa le Hyur, brisé, au fond de son lit.

Il m'a fallu du temps mais je pense savoir ce que je veux faire... Et ce n'est pas vis à vis de moi ou de Kaly que je devais penser... Tuer Jaroud, Naadir ou autre... A quoi ça servirait, au fond, à part seulement éliminer quelques enfoirés? Non, ce que je veux, c'est filer une leçon à l'ensemble des enfoirés riches et influents... Qu'ils ne sont pas à l'abri de la justice. Que la corruption a ses limites... Je les saignerai à blanc, je les ruinerai, je réduirai leur vie sociale en cendres.

C'est le rôle d'un Voleur, après tout, de dépouiller.


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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 26 avr. 2018, 01:43

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Dans les ténèbres de sa chambre, il se redressa, assis sur son lit. Depuis combien de temps était-il endormi? Le Miqo'te avait perdu le compte du temps. Son œil finit par s'habituer, à apercevoir les contours des draps. Ce fut là qu'il aperçut cinq doigts sur le bord gauche comme si une main était sortie de sous le lit. Puis cinq autres. Et cinq autres. A tribord, à bâbord, des dizaines de mains se mirent à agripper les couvertures, à les utiliser pour avancer sur le lit...

Vers lui.

Des silhouettes féminines, aux visages incertains, suivirent leurs mains. Elles saisirent le Miqo'te, le submergeant. Horrifié et terrifié, il hurla face à ces assauts cauchemardesques.

Il se réveilla dans un sursaut. Un mal de tête terrible lui vrillait le crâne. Ses sens refusaient d'être précis. Il savait qu'il était allongé sur un lit mais il ignorait où. Il pouvait vaguement sentir que son bras serrait un oreiller contre lui. Quant à son autre main...

Scouic.

Alors qu'une certaine nausée prenait ses entrailles, ses doigts tâtaient quelque chose de doux et chaud. Il entendit alors vaguement un...

- Aoutch...!

... Aoutch. Était-ce lui qui venait de faire Aoutch? Non, ça ne pouvait pas être lui. A moins que...?

- Ugh...

La nausée et la migraine ne s'arrangeaient pas. Non, il n'avait pas une voix aussi aiguë ou alors il devait commencer à s'inquiéter. Et ça... C'était quoi? Il essaya de voir ce qu'il tenait, à moitié éveillé. Ce n'était pas son bras, non... Une cheville? Ce n'était pas la sienne... Et là devant... Non, ce n'était pas son pied. Il était d'ailleurs vachement fin ce pied... Pâle aussi. Mais il était pâle de même, non?

Il tâta de nouveau. Non, c'était bien une cheville. Pas la sienne. Il lui fallut un moment pour capter pour ce fait. Une voix féminine lui vrilla alors les tympans.

- ...Aaaah...!! Aahh, qu'est-ce que...!!!

Dans la seconde suivante, Eylion se reçut un coup de pied puissant à la mâchoire qui l'envoya valser sur l'autre flanc. La douleur n'arrangea pas son état, aggravant son réveil déjà brutal. Il se prit la partie touchée, gémissant de douleur.

- ... Sp... e... brute...! marmonna t'il, en souffrance, entre ses canines.
- ... Bon sang... Eylion...! Qu'est-ce que... qu'est-ce que tu fiches... dans ma chambre...!

Il écarquilla l’œil, reconnaissant la voix de Merydwen. Des souvenirs de la soirée précédente lui revinrent. La Cave. Il avait donné rendez-vous à Morgan et Merydwen pour payer une tournée.

- Ce soir, je refuse d'entendre les mots Raison et Sagesse!
Il avait laissé Jaroud sous la surveillance et les bons soins de l'Anrad. Plus tôt dans l'après-midi, il avait confié un coffret plein d'or à sa disciple, fruit d'une partie de ses rapines. Il avait pu lui annoncer la reprise de leurs libertés respectives ainsi qu'assister à l'invocation du premier Carbuncle de Kaly. Autant de motifs à faire la fête même s'il avait préféré ne pas exposer une image peu glorieuse à la Miqo'te, évitant de l'inviter là où il comptait bien boire jusqu'à plus soif.

Les Combats de la Cave avaient été l'occasion, pour lui, de "défier" Morgan à un concours de paris qui avait tourné en la faveur du Mage infernal. Il était parvenu à convaincre le vétéran à se présenter à la prochaine session. Comme d'habitude, Merydwen et Eylion avaient du mal à passer outre leurs différences, le Miqo'te ayant pour coutume de la surnommer la "frigide" et de la provoquer en permanence. Devant le comptoir, suite aux paris, le trio s'était retrouvé autour de leurs verres.

- ... Nous trainons tous les boulets de notre passé, ce n'est pas une excuse pour pourrir la vie des gens, avait-elle lancé avec contrariété. Mais peu importe, nous ne sommes pas là pour nous quereller.

Eylion avait pris le temps de prendre une profonde inspiration. Puis expiration. Calme, détente, des choses qui avaient toujours été des choses difficiles pour lui à appréhender.

- Exactement, ce soir n'est pas un soir de guerre, avait-il maugréé.

Morgan avait alors pris la parole en se passant une main devant le visage.

- En effet... Cessez donc de vous quereller tous les deux... De toutes façons... Vous n'êtes pas capables de tenir l'alcool...

La remarque avait eu le don d'arracher un bref pouffement de rire à Merydwen.

- Vous ne savez pas à qui vous vous adressez.
- Quoi? Moi, ne pas tenir l'alcool? avait aussitôt lancé Eylion, faussement offusqué.
- Vraiment ? avait répliqué Morgan. Pourtant... Je me suis toujours dit qu'Eylion tenait mieux l'alcool que toi, Merydwen...
- Elle? Je parie qu'au second verre, elle nous refait les chœurs ishgardiens à l'envers.
- Je peux boire l'équivalent de vos verres à tous les deux, sans broncher. Je vois que vous êtes d'humeur à parier ce soir.

Après quelques échanges et provocations, la tournure de la conversation s'était faite plus évidente.

- Est-ce qu'il y a vraiment besoin de parier face à l'évidence? avait fait le Miqo'te, nonchalant.
- Parce que tu penses tenir, avec ton petit corps chétif?
- Je pourrai en surprendre plus d'un, avait-il lancé avec une assurance presque vantarde.
- Dois-je comprendre que le défi est lancé entre vous deux?
- ... Bien. Tu parles beaucoup mais prouve-nous donc tes dires, chaton.
- Bon, le pari, c'est quoi? avait-il répliqué avec un semi-sourire carnassier. Ce serait trop facile de parier seulement de l'argent.
- Morgan pourrait en décider.

L'arbitre attiré s'était alors levé pour se mettre derrière les deux belligérants.

- Que diriez vous ... D'un "Vœu de Vassalité"?
- De Vassalité? avait demandé Eylion.
- ... C'est à dire?
- En effet, le perdant devra se vouer à être au service du vainqueur... Pendant une journée... Évidemment... Si vous pensez que la défaite est envisageable... Je peux comprendre que vous refusiez...

L'enjeu avait eu le don de faire dresser les oreilles au Miqo'te. L'idée d'être possiblement sous la coupe d'une femme l'avait défrisé au dernier degré. La guerrière, quant à elle, fut peu emballée dans un premier temps avant de finir par hausser les épaules.

- Ma foi, pourquoi pas. Qu'importe, je gagnerai quoi qu'il en soit, avait-elle dit.

L'impulsivité d'Eylion avait pris le pas, celui-ci posant une bourse sur le comptoir.

- ... Hrm. Il n'y a aucun risque pour moi.

Le Mage et la Guerrière s'étaient défiés du regard. Il n'avait pas fallu longtemps pour qu'ils se retrouvent avec des verres.

- Bien... Eylion... Merydwen... êtes vous prêts?
...
Prêts... Buvez!

Les deux premiers verres étaient passés rapidement.

- Tu peux encore abandonner, avait fait Eylion à son adversaire.
- ... La suite quand tu veux.

Les suivants verres s'étaient enchaînés, entrecoupés de provocations.

- ...Tu veux souffler un peu peut-être? avait nargué Merydwen.
- La suite! Ah, tu es vingt ans trop tôt pour me battre à ce jeu là!
- Nous verrons cela, lorsque tes petites oreilles soyeuses tremperont dans ton propre vomi.
- C'est ça, on verra si tu as plus de classe à la fin de ce duel.
- Oh, je t'en prie, ce n'est que du rhum. Je bois ça comme du petit lait.
- Ne jamais sous-estimer le rhum, jamais.
- Prêts, saisissez... Buvez!

Après quelques verres...

- ... Vous vous souvenez toujours comment vous vous appelez? avait demandé Morgan, inquiet.
- Ugh... Celui-là, je l'ai senti passer...
- Ooooh... Est-ce que ta petite tête tourne, mon cher Eylion?
- Jamais!
- Envoie la suite, au lieu de dire des bêtises, Morgan!
- Il pleuvra des chocobos le jour où je me soumettrai de nouveau à une femelle, avait fait, éméché, le Miqo'te.

Vers le septième, l'état des deux duellistes était devenu beaucoup moins... cohérent.

- Quoi, je sais comment elles sont les femmes, toujours sur le... contrôle! Toujours à vouloir tout contrôler...
- Et cela te déplait, chaton? avait lancé l'Ishgardienne d'une voix un peu molle, haussant un sourcil moqueur.
- Quand c'est ma foutue conscience et liberté qui sont en jeu, un peu, ouai!
- Je t'en prie... Vous les hommes, avec votre foutue fierté... Toujours cette crainte d'être inférieurs et de devoir... "affirmer" votre stupide virilité...!
- C'est pour ça que vous vous sentez obligés de nous écraser avec vos... bottines, hein?! Un peu de respect, d'affection, c'est pas trop demander...?!
- Tu plaisantes j'espère....! Vous ne connaissez pas le respect, et l'affection...! Vous ne connaissez... que la brutalité...!
- ... Neuvième verre... Saisissez! avait fait Morgan, un brin perplexe.

A ce stade, le Mage n'attendait même plus la fin du décompte pour boire.

- Quoi, la brutalité...?! Ouai, pour certains... mais pour les fins, finesse, enfin... Le contraire quoi, vous vous sentez obligées de les dominer, c'est à cause d'eux, c'est ça?!
- Qu'est-ce que j'en saurais, Eylion...! Je n'en ai rien à faire des hommes brutaux et même des hommes fins, tu vois...!
- ... Quoi, t'aimes les femmes, c'est ça? avait-il lâché, passablement ivre.

Merydwen avait alors lâché littéralement son verre qui s'était brisé avec fracas avant de s'affaler sur le comptoir, tête dans les bras. Le verre de trop. De manière surprenante, Eylion tenait davantage debout que sa comparse.

- Je crois que nous avons un vainqueur...
- ... Héé...! Répooonnd!
- ... Je sais pas... avait-elle murmuré d'une voix cassée.
- Du calme... Eylion, tu as gagné...
- Non...!

Elle s'était redressée, les larmes aux yeux.

- Non, je peux continuer...!
- Va t'falloir faire une raison, le rhum et moi, c'est une longue histoire d'amour, avait-il dit en levant son verre.
- Non, Merydwen, je ne le permettrais pas... Loona, rangez donc l'alcool...
- La ferme! Je peux boire encore cinq bouteilles s'il le faut...!
- J'crois que Papa n'est pas d'accord.
- Non! Cela suffit Merydwen!
- Mais Morgan... Je peux pas perdre contre cet abruti...! Juste... juste un verre...!

Après larmes, pestage et... câlin de groupe paternel de la part du vétéran, il avait traîné les deux ivrognes dans des chambres séparées. Pour une raison qui échappait actuellement au Mage, il s'était retrouvé dans celle de Merydwen, ivre mort.

- Vous n'êtes que deux idiots... Mais vous êtes mes deux idiots... leur avait-il confié au départ.
- Purée, trop de mièvrerie pour moii... C'est coontre le coode de la virilitéé...
- ... Non Eylion... Ce n'est pas ta faute... Mais j'aimerais que tu te souviennes d'elle non pas comme une manipulatrice... Mais une femme avec ses sentiments... Ses rêves et sa personnalité...
- Oui, j'ai des sentiments...!!
- J'en sais rieen, je saiis plus rieen... Elles oont toujouurs voulu ma peaau... La géraante de l'orpheelinaat, l'autre Aneha... Samiaaa, ma précédente Femme, un eeenfeeer...!
- Ce n'est pas parce que je ne le montre pas que je n'en ai pas... *euk*... Espèce d'imbécile...!

Un trajet avec quelques moments de glamour, notamment quand Eylion avait eu une remontée, plaquant ses mains devant ses lèvres.

- Urgh...
- ... Est-ce que t'es en train... de te vomir dans la bouche...??

Il avait mis un certain temps à répondre avant de la regarder en biais, gardant ses mains devant ses lèvres.

- ... Nan... C'est une illusion...
- Bon, ça suffit là.
- Mais... Morgan...! On était en train de discuter... là...!
- Ouai là, Papa, c'est important!

Plus tard, le Mage s'était ainsi retrouvé sur le lit de Merydwen. Déliés de leurs inhibitions, ils avaient sombré dans un état proche de l'enfance, à discuter entre déraison et confidences.

- ... Je sais plus ce que j'voulais *hips* dire... J'sais pas... Désoléé...?
- ... Pourquoi... tu t'excuses..?
- ... Bah, je suis désolééé... C'est justeee... super facile de te soortirr de tes goonds... Trop tentant et puis, t'aas parfoiis cet air... comme si t'allais bouffer le moonde entieer aloors j'me dis: Elle a besoiin d'une ciiblee. Mais tu craaques paas, tu te laaiissees jaaamais aller même pour les Sept biduules. T'aurais dû me fraapper... Merde quoii... Moi, j'culpabilise après.
- ... Ouai ben... j'ai eu un entraînement... intensif... avec ma famille...
- Pourquoii?
- Parce que... je devais faire... bêtement... ce qu'ils attendaient de moi... Même si... ça me convenait pas... Et je devais... me taire...
- Peuh... Ca sert à rien d'se conformer aux aautres, tu pourraas pas. Ils veeulent toujouurs les autrees mais merde! On est bieen comme on est... Révolutioon!
- Oui...! Je suis... bien d'accord...! Mais... Parfois, tu aimerais pas... juste être normal...?
- ... Des fois... Et d'autres fois... j'veux juste voir le monde brûleer... *hips!* Chienne d'vie.

La discussion s'était prolongée dans la nuit jusqu'à ce que le sommeil ne commence à les surprendre.

- AaAh... J'ai pas remiis ma suuurprise... J'aiii deuux coffreeets... d'argeent... 'toi et Morgan...
- ... Je m'en fiche... de l'argent...
- Y'en a un... pour chaque... L'Anrad, ma disciple... vous deux... De quoi être confortables pendant un teemps... Ça peut aaider et... J'te donne pas le choix... de toutes façoons...
- ...Donne ma part... à l'Anrad... elle en a... plus besoin...
- Arrêête... ou j'lui dis que tu veux lui faaiire des bisous...

Elle avait alors lancé son oreiller sur le Miqo'te qui l'avait pris en otage. Il s'était ensuite endormi, presque en boule à ses pieds comme le plus étrange des chats.

Il ne s'était strictement rien passé, au plus grand soulagement d'Eylion et de Merydwen quand ils s'en aperçurent.

Après quelques éclaircissements, l'Ishgardienne éclata.

- ... Espèce d'abruti... Je n'en reviens pas... que j'ai pu te confier toutes ces choses.... Même avec tout l'alcool du monde dans le sang...!
- Heh... Je pense qu'on peut s'entendre sur le fait que ce qu'il s'est dit à la Cave reste à la Cave?
- ... Est-ce vraiment nécessaire de le mentionner...?
- Hrm, vaut mieux le faire, oui... Même si je t'avoue que je n'ai pas... retenu beaucoup de choses... A part un mariage avec un cousin, fit-il, plus dubitatif.
- ...! Et bien reste-en là, c'est très bien comme ça...! Et en échange, sois assuré que mon comportement ne changera pas juste... parce que tu m'as raconté tes mésaventures et tes problèmes conjugaux...!
- ... Je m'en fiche, dit-il de but en blanc, l'air blasé. Je me souviens vaguement qu'on avait parlé d'attentes. Il n'y a pas d'échange à avoir, juste à rester soi-même.

Je le fais pas... vraiment exprès... je crois... J'ai juste peur... de ne pas être de bonne compagnie... De ne pas être à la hauteur de... ce qu'ils attendent de moi...?

Merydwen resta silencieuse, sa main placée en visière sur son front. Elle serra les dents, pensive, son regard déjà empreint de culpabilité pendant que le Miqo'te se redressait péniblement sur ses jambes.

- Tu as vraiment une sale tête, dit-il sobrement, d'une voix toujours aussi pâteuse.
-... Je me rends juste compte que j'agis... exactement comme j'aimerais ne pas agir.... Mais il faut croire que les vieilles habitudes ont la vie dure...
- Hrm... En ça, nous sommes similaires, dit-il avec un sourire grimaçant mi-amusé, mi-désabusé. Mais ça tombe bien justement que je ne suis pas le genre à m'attarder sur de faux détails.

Il haussa ensuite les épaules, faisant quelques pas vers un miroir à proximité.

- Le passé a cette sale tendance à nous contrôler... et c'est toujours plus dur de reprendre les rênes. Plus facile de cracher le venin qu'on a essuyé.
- ... Il faut croire, oui... fit-elle d'une voix légèrement cassée par la fatigue et l'alcool. C'est pourquoi j'essayerai de faire des efforts, parce que... pour être honnête, je commence sérieusement... à en avoir assez de tout ça...

Il resta silencieux tout en se dirigeant vers une carafe d'eau. Il remplit l'un des verres à disposition et vint le tendre à Merydwen.

- Bon, je suppose que je n'ai pas... été le plus... compatissant des compagnons d'arme. Je ne sais pas si je ferai... un bon ami mais je peux essayer... dit-il, mi gêné, mi maladroit.

Elle regarda le verre une seconde avant de le saisir et de remercier le Mage d'un hochement de tête. Elle prit le temps de boire quelques gorgées avant de répondre.

- Je ne peux pas prétendre avoir fait preuve d'une grande maturité non plus dans cette histoire, alors... Peut-être que l'on peut déjà essayer de ne pas se crêper le chignon à longueur de temps, ce sera un bon début...?
- Je pense que tu as dû noter qu'on ne s'est pas engueulé depuis le réveil...

Après quelques échanges, ils finirent par se mettre enfin d'accords pour la première fois depuis l'arrivée d'Eylion à Estenn.

- ... Hé bien... je suppose que j'ai moi-même... pu dire certaines choses que je ne me permettrai certainement pas de mentionner à présent, alors... Nous sommes quittes...? fit-elle, hésitante.
- Quitte à propos de quoi? dit-il avec un sourire mi-amusé, mi-navré. Bon, avant que je ne termine de ruiner mon image, je ferai mieux de dégager.
- Hrm... Excellente idée.... Cela me permettra enfin de prendre une douche car je crois bien que je sens plus le rhum que le rhum lui-même, actuellement... dit-elle en reniflant son peignoir dans une grimace.
- Suggestion que je ferai mieux de suivre, dit-il, blasé, en constatant la même chose avec sa veste.

Il se dirigea ensuite vers la sortie, d'une démarche quelque peu incertaine. Il s'arrêta après quelques pas en levant une main.

- Ah et vu que j'ai gagné... Ton gage sera d'accepter le coffre... J'aurai bien aimé trouver plus inventif mais je crois que j'ai eu mon compte de pieds et de tirage de gueule.
- ... Si tel est ton choix, marmonna t'elle en roulant des yeux. Mais sache qu'une fois ce coffre à moi, cela ne m'empêche en rien de le céder à qui je veux.

Il fit alors tourner son index alors qu'il rejoignait la porte.

- Alors je rajoute une clause, que l'argent dedans ne serve qu'à toi... Après, je peux toujours aller voir l'Anrad pour tisser la déclaration indirecte la plus exaltée d'Eorzéa ♪

Quand elle entendit la menace, elle envoya aussitôt son second oreiller sur l'impertinent qui prit la porte comme bouclier.

- File ou je jure que je retire tout ce que j'ai pu dire concernant les efforts que je comptais faire!!
- "Oh Anrad, si vous saviez comme son cœur ne bat que pour vous...", minauda t'il, parfaitement théâtral.

Elle se leva du lit d'un air menaçant, visiblement prête à littéralement égorger le Miqo'te pour le faire taire.

- Dehors!!

Sur un autre ricanement semi-machiavélique, il termina de prendre la fuite. Hors de la Cave, le Soleil accueillit ce dernier, l'éblouissant à moitié. Il dut lever un bras pour protéger son œil. Malgré sa gueule de bois, sa fatigue, il ne put s'empêcher d'esquisser un mince sourire face à cette nouvelle Journée.

Une nouvelle Aube.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 01 mai 2018, 11:57

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Depuis la résolution de l'affaire de Jaroud, Eylion avait pu, enfin, rentrer chez lui. Il avait retrouvé une maison vide, saccagée par les fouilles des hommes de main du Marchand. Dépité, il avait dû se résoudre à faire un brin de ménage, le strict minimum pour que son salon soit au moins présentable et sa chambre vivable. Il avait retrouvé une note de Matza dans l'un de ses livres érotiques, secret de polichinelle pour tout homme solitaire.

"Je te recommande Cinquante nuances de Sodbert, nabot. M."

La note avait eu le don de le défriser au dernier degré. Il avait regretté le fait que les Auras n'aient pas exécuté...

- ... Cette chienne sans goût...!

Sa Colère passée et sa tâche laborieuse aboutie, il n'avait pu que constater le vide de la présence de Rhian. Il savait, au fond, que ce jour arriverait où il serait de nouveau seul. Ce fut au moment où il était livré à ses pensées et au silence qu'il entendit quelqu'un toquer à l'entrée. Des coups mous, sans conviction.

Il ne fallut pas longtemps pour que la porte ne s'ouvrit sur...

- Merydwen? fit-il, un brin surpris.

La combattante se tenait bien devant le seuil, le regard à la fois sombre et quelque peu éteint. Une bouteille de rhum se trouvait entamée dans sa main, un air perturbé hantant ses traits.

- ... Je peux entrer...?

La surprise laissa place à la perplexité. Il la laissa entrer avant de refermer derrière elle.

- Qu'est-ce qu'il se passe?
- Je t'apporte une bouteille de rhum...? Bon, je l'ai entamée pour pouvoir trouver le courage de venir ici mais il en reste encore suffisamment pour toi.

Elle fourra la bouteille entre les mains du Miqo'te, se dirigeant vers un canapé pour s'y affaler. Elle manqua de trébucher sur l'un des quelques livres qui restaient dans le salon.

- Le... Hrm... Prends place, pas envie qu'on m'accuse de meurtre par nuque brisée, grommela t'il en la suivant.
- C'est plutôt pas mal chez toi... Un peu le chaos c'est sûr, mais bon...
- J'ai viré la femme de ménage, dit-il en haussant les épaules.

Il posa la bouteille sur la table de la pièce, allant chercher par la suite des verres. Il les servit et prit le sien, laissant la femme saisir son verre en parallèle.

- Mmmm... Pourquoi ça?
- Elle déblatérait un peu trop sur la nature de ma "relation" avec Rhian, fit-il avec une grimace de mépris.

Sous l'effet de l'ivresse, Merydwen mit du temps à capter le sous-entendu tout en regardant mollement les alentours.

- Oooh... Je vois... Et ces déblatérations étaient... fausses..?

La question lui valut d'être fusillée par l’œil unique.

- Évidemment, cracha t'il. Je n'ai eu qu'une femme dans ma vie. De plus, les hommes ne m'intéressent pas et ne m'ont jamais intéressé.
- Bien, bien... Je demandais simplement...! répliqua t'elle en levant les mains avec un air innocent.

Air innocent qui fit place à un air plus préoccupé quand elle les rabaissa. Quand il nota ce fait, il s'empressa de grommeler.

- Bon, quel est le problème?
- Tu ne veux pas te servir un verre ou deux d'abord...?
- ... Pourquoi? demanda t'il, avec suspicion.
- Parce que je ne pense pas... me sentir d'en parler si tu n'es pas à peu près... dans le même état que moi... énonça t'elle en fuyant le regard du Miqo'te.

Celui-ci continua de l'observer avec méfiance, plissant son œil unique.

- Je serai seul Juge si je dois boire davantage, dit-il avec un ton tranchant. Tu dois savoir maintenant quel est mon Principe, ça ne sert à rien de tergiverser, dis ce que tu as à dire.

Elle serra la mâchoire aux paroles implacables de son interlocuteur avant de se passer une main sur son visage, le regard bas.

- Crois-le ou non, mais tu es la seule personne à qui je me sentais de parler de cela... Mais j'ai peut-être eu une mauvaise idée...
- Est-ce que c'est quelque chose de grave? demanda t'il en haussant un sourcil.

Elle continua de fixer la table, appuyant ses coudes sur les jambes, doigts croisés entre elles.

- Non, pas vraiment, mais... Ça... m’obsède, et je n'arrive pas à me le sortir de la tête... dit-elle avec honte et frustration en détournant la tête.
- Je t'écoute, prends ton temps, fit-il avec un ton détaché.

Les joues de la guerrière s'empourprèrent, chose que le Mage n'avait jamais vu chez elle jusqu'à présent. Elle masqua alors son visage avec ses mains.

- J'ai fait... un rêve... il y a quelques jours... finit-elle par avouer après un certain temps d'hésitation.

Il la laissa développer en silence en commençant à boire.

- Entre... l'Anrad et... et moi... ajouta-t-elle presque dans un murmure, ces quelques mots exigeant d'elle un effort surhumain.
- Entre l'Anrad... et toi... reprit-il, un brin perplexe. Cauchemar?
- Pas au départ.... En-enfin... tenta-t-elle d'articuler avec une gêne incommensurable. Bon sang, qu'est-ce que je suis en train de faire...!

Le Mage reprit le dessus, établissant ses hypothèses pour faciliter les confidences de la combattante. La discussion se prolongea dans la nuit, Eylion s'improvisant Interprète des Rêves et soutien moral, des rôles dans lesquels il s'était senti bien maladroit. Les insécurités de Merydwen s'étaient mises à refléter les siennes.

- Ce qui me file les jetons...? Regarde-moi, Eylion...! Qu'est-ce que je pourrais apporter, à qui que ce soit...? Le moindre contact, je suis incapable d'exprimer quoi que ce soit, incapable de mettre un doigt sur ce que je veux...! Qui voudrait se faire endurer le supplice de ma présence...? Personne!

La Mort, l'Onirisme et l'Amour s'étaient enchaînés en tant que sujets.

- Tu vois, là où tu as peur de ce que les gens pourraient te faire subir de nouveau, j'ai peur de ce que je pourrais faire endurer aux autres... avait-elle lancé en se rasseyant dans le canapé, le regard vide.
- Et qu'est-ce que tu pourrais bien leur faire endurer...? avait-il fait, perplexe.
- Parce que je suis incapable d'aimer vraiment... Hakon n'était pas comme ça, avant que nous nous marions... Il a changé à cause de moi... parce que j'étais incapable d'exprimer quoi que ce soit... incapable de lui rendre quoi que ce soit...
- L'amour, ça ne se décide pas... Ça te tombe dessus et ça ne demande pas ton avis... Tu crois que je voulais aimer l'autre salope...? L'ensemble de ma Raison et de ma Logique me hurlaient tout ce qui n'allait pas... J'étais pétri de doutes en permanence... S'il n'est pas fichu de comprendre que tu n'es pas amoureuse de lui, on ne peut plus rien pour son cas... J'ai trente-neuf ans, Merydwen... J'ai été dans une relation à trente-sept et demi... trente-sept ans où je n'ai aimé personne. J'ai eu des "coups de cœur", de vagues "intérêts", oui, mais aimer véritablement jusque là, non...
- ... Qu'est-ce qui cloche chez nous, alors...
- Il n'y a rien qui cloche... On désire juste l'Absolu... Enfin, pour moi, c'est le cas...
- L'Absolu...?
- De trouver La Personne, pas un simple coup de cœur, non... Mais l’Âme Sœur, celle qui est faite pour soi, celle avec qui on serait prêt à passer l’Éternité. Celle pour qui la Mort ne serait pas un obstacle. L'Absolu, pas le maigre sentiment induit par le stupre...

Il s'était alors aperçu du regard perplexe de son interlocutrice.

- Hrm, je parle Primordial pour toi, c'est ça? avait-il fait avec un sourire désabusé.
- Je ne sais pas... Une part de moi veut découvrir ce que c'est et d'un autre côté... J'ai l'impression que c'est un poison plus qu'un cadeau...
- Je ne peux pas dire le contraire... Mais, de toutes façons, tes Émotions ne te donneront pas le choix... avait-il soufflé d'une voix sourde.
- ... Mais tu as quand même envie de le vivre à nouveau, malgré ce que tu as vécu... Pourquoi?

La réponse avait eu le don de prendre au dépourvu Merydwen. Le sujet s'était embrayé sur le sujet de la Famille et des pans du passé de la femme. Les Confidences s'étaient prolongées de par et d'autre jusqu'à arriver à un point sensible.

- J'aurais bien aimé, parfois... Heureusement, j'ai eu un soutien qui m'a permis de tenir le coup tout ce temps... et qui m'a même incité et aidé à m'enfuir... avait confié Merydwen.
- Un soutien?
- Ma nourrice, Miranda... Elle a été comme une mère pour moi et j'ignore même comment elle se porte désormais...

Quand il avait remarqué son air pensif, il n'avait pas hésité deux fois.

- Je pourrai peut-être aller me renseigner si tu veux...
- Tu penses que tu pourrais...?
- Ta famille ne me connaît pas, ce qui fait que je peux aller à Ishgard sans attirer l'attention, avait-il fait en se pointant du pouce avec un sourire assuré. Je pourrai me renseigner discrètement vis à vis de Miranda une fois là-bas.
- Je... C'est trop risqué... Miranda ne quitte presque jamais le domaine, il te faudrait trouver une excuse pour y entrer, et la chercher... Si tu venais à poser des questions sur elle, ce serait suspect, elle est au service de ma famille, n'a pas vraiment de proches...
- Hmm...

Il s'était pris le menton, faisant mine de réfléchir avant de lever la main avec un sourire.

- Alors je n'aurai qu'à m'infiltrer dans sa chambre, la nuit ♪
- ...Tu te rends compte, de ce que tu dis ? S'ils t'attrapent, tu peux dire au revoir à ta tête...!
- Ce ne serait pas la première fois que quelqu'un tente de me tuer, avait-il lancé avec un sourire vantard. Au pire, je pourrai me faire passer pour son jeune amant.
- Très drôle, imbécile... Sincèrement, ce serait risqué non seulement pour toi, mais aussi pour moi s'ils venaient à faire le lien entre nous...
- Tu me crois vraiment capable de parler...? De toutes façons, ma décision est prise, je ferai mes affaires pour Ishgard. Je commençais à m'ennuyer, ça tombe bien, avait-il répliqué, nonchalant.

Il s'était autorisé un Mensonge pour rassurer sa comparse. Il avait assez de travail entre Jaroud et ses recherches pour deux vies mais il avait aussi senti à quel point le sujet était d'importance pour elle. Et il escomptait bien profiter de la bonne volonté de l'Anrad pour surveiller le marchand durant son absence... Elle lui devait bien ça après certaines confidences embarrassantes de la part de Merydwen. Celle-ci, d'ailleurs, s'était massée la nuque, mitigée avant de finalement soupirer.

- Je ne sais pas comment te remercier, Eylion...
- En arrêtant de dire des conneries à ton propos pour commencer? avait lancé l'impertinent Miqo'te. Et, hm... Ah oui, et d'éviter de rêver de moi et de ta nourrice après ce que j'ai dit, d'accord...? ♪
- Tu es vraiment le dernier des crétins, tu le sais ça...? avait-elle répliqué sur un ton faussement contrarié.
- En tant que Mage, cette remarque est totalement impossible, avait-il dit avec un sourire vantard.
- Hé bien, j'ai comme l'impression que tu es le roi pour rendre les choses impossibles possibles, alors... avait-elle fait en affichant un très bref rictus.
- Je ne sais pas si je devrais être flatté ou vexé par une telle remarque, avait-il relancé avec un sourire équivoque.
- Peut-être un peu des deux?

La conversation s'était terminée sur une note plus positive, les deux comparses enchaînant les remarques vaseuses comme deux amis de comptoir jusqu'au départ de la femme. Ce fut sans doute là, une fois Merydwen partie, que le Miqo'te s'était aperçu du miracle.

Il ne s'était pas écharpé avec celle-ci.
Une femme.

Avec Yunaia, il en était maintenant à l'exploit incommensurable de pouvoir parler avec deux membres du sexe opposé sans éprouver l'envie d'user de son Verbe acide. Il ne s'était pas senti mal à l'aise, ou jugé, ou encore obligé de guetter une quelconque manipulation. Il aurait volontiers fêté ça avec un verre...

...

Si ce n'était pour sa disciple dont le sujet continuait de le hanter. Un sujet qu'il avait évité d'aborder durant la conversation. Il appréhendait celui-ci, incapable de savoir comment il devait gérer les choses.

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