Eylion Grenn

Répondre
Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 15 avr. 2019, 20:14

Image
La disparition de Nailah, fille de Volug, avait été une première préoccupation. En compagnie de Kyuuji et rejoint plus tard par Nukh, ils avaient dû voyager jusqu'au Coerthas pour la retrouver. Nailah avait toujours été plus portée sur le Monde des Rêves que de la Réalité. La seule chose qui lui permettait de percevoir les alentours, au-delà de ce Voile, était un mystérieux papillon bleu qui la suivait partout. Papillon qui avait disparu ce jour-là, Nailah s'étant empressée d'aller à sa recherche.

Le duo avait trouvé la jeune femme devant une grotte remplie de Kamuy, des esprits des Steppes. Le papillon, lui, était descendu du ciel jusqu'à Nailah telle une étoile. Après un échange muet entre les deux êtres, elle avait semblé accepter quelque chose, un halo de lumière suivant son acceptation. Quand la lumière disparut, Nailah avait désormais la forme d'un Raen masculin de haute stature.

Kyuuji: Qu-...
Eylion: Que...
???: Ah... ainsi... voici ce que cela fait, d'être humain?

L'inconnu s'était tourné vers eux.

???: Ah, Père, vous êtes là!
Kyuuji: Humain... vous êtes... les Kamuy?
Eylion: Humain...? Quoi...?

Le Lunaire avait tiré la tête de quelqu'un qui venait de louper deux chapitres.

???: En effet, mais laissez-moi saluer mon père dignement avant ça!
Kyuuji: Pardon...
Nukh: Hein? Moi? avait demandé le chamane.
???: Non! avait-il répliqué avec un grand sourire.

Il s'était alors approché du Mage pour l'étreindre.

Eylion: ... ... Quoi?!
???: Je suis content de vous rencontrer.

Kyuuji avait arqué un sourcil.

Eylion: Erh, il y a forcément erreur sur la personne.

Ce dernier avait eu la tête de quelqu'un qui venait de louper trois chapitres ET l'épisode précédent. Ses deux comparses à ses côtés n'avaient pas de meilleures expressions.

???: Nous savons que vous êtes là pour nous aider...
Eylion: Quelqu'un peut... m'expliquer...?!

L'explication avait tardé à venir mais finalement, l'inconnu s'était présenté sous le nom d'Hrid. En tant qu'Esprit, il avait entendu les nombreux souhaits des membres de la Brigade et était décidé à tous les exaucer. L'un des souhaits du Mage avait toujours été d'avoir un enfant... Seulement l'Esprit n'était pas en mesure de savoir les détails exacts des souhaits, ni le sens "humain" pour les interpréter.

Eylion avait, en effet, toujours conçu le Désir d'avoir un enfant issu de son sang et de celui de son Absolu, la plus belle preuve d'une Union à laquelle il aspirait. Un Rêve qu'il avait enterré le jour où il avait choisi Solid. Bien qu'il y avait bien des moyens détournés pour parvenir à ce fait, le Mage n'était absolument pas prêt à les envisager, sans parler du refus de Solid de revivre sa Perte de Little Shield.

Les discussions avec Hrid avaient été extrêmement coûteuses et pénibles pour le Lunaire. Non pas qu'il n'était pas capable d'adopter des enfants... Seulement, il lui était difficile de le faire. Il n'y avait eu que deux personnes qu'il avait considéré comme tels. Son fils adoptif, Neil, et K'alyanni, son ancienne disciple.

Il ne pouvait pas accepter comme ça le premier venu.

Après Lucrétia, il avait essayé plus ou moins de juguler les catastrophes que le Kamuy bien intentionné allait engendrer au sein de la Brigade en essayant d'exaucer les voeux des uns et des autres de manière maladroite. Toutefois, Hrid avait fini par trouver sa place en aidant les dormeurs à mener des nuits plus paisibles ou encore en accompagnant le Mage dans ses excursions mentales.

L'une d'elles avait été d'ailleurs décisive dans l'évolution de Lucrétia. Eylion avait fini par souligner que Lucrétia n'avait pas effectué le Rituel des Shields. Il s'était demandé si, en l'effectuant, la Démone retrouverait un semblant de stabilité mentale. L'idée approuvée, il avait parcouru, avec Hrid, le Paysage mental de Lucrétia qui n'était autre que le Manoir.

Bien qu'ils faillirent y rester, ils étaient parvenus à insuffler la Lumière au coeur de sa conscience. De manière inattendue, ils étaient tombés sur une version de la Démone que personne n'avait vu auparavant: une jeune femme morne, assise en prisonnière devant la fenêtre de sa chambre, prison aussi statique et éternelle qu'elle était immaculée.

Quand la Lumière avait envahi les lieux, Eylion avait entendu une voix et entrevu une vision du Passé de celle-ci.

Lucrétia: "Chaque Jour était les mêmes. Père avait chassé tous les servants. Mère était morte. Je n'avais pas le droit de sortir, pas même de sourire à un homme. Je crois que j'ai aimé, fut un Temps. Oui, de vagues sentiments bourgeonnants qu'il a méthodiquement assassiné. Chaque prétendant, il les écartait ou les éliminait en les faisant passer pour des accidents. Quelque part, je m'en doutais mais, naïve, je voulais croire en mon Père. Je ne voulais pas voir le Monstre qu'il était. Je ne voulais pas remarquer ses regards sur moi. Son souffle avide sur mon cou, ce cou qu'il convoitait sans oser le toucher.

Je me souviens, ce jour de bal. Je dansais avec cet homme. Ma mémoire a perdu le souvenir de son Nom mais pas de son Sourire. Je crois que j'aurai pu l'aimer, oui. Je n'ai pas eu même le droit d'assister à son enterrement. Un accident regrettable m'a t'il dit mais ça ne devait pas me dévier de mon devoir de fille parfaite.

Oh, comme je l'ai haï, ce rôle, le sais-tu?

Et toi, tu viens, au sein de ma Geôle éternelle. Oui, de toi, je me souviens de tout. De ton premier regard effrayé à celui qui me renvoie un reflet du mien, quand je regardais Père. Je souris. Oui. À ces rôles inversés.

Es-tu sûr de ta décision?
... Es-tu sûr de ne pas regretter ma Libération...?"


Eylion: ...!!

Il avait sursauté en se réveillant brutalement, en sueurs. Hrid était tombé du lit à la renverse. Solid s'était relevé. Pour cette épreuve, le Démon avait accepté de rester, d'accorder sa Présence.

Solid: ...!? Eylion?
Eylion: S-Solid...? avait-il émis, encore troublé.
Solid: C'est moi, oui! Est-ce que ça va?

Ils avaient alors entendu un craquement. Eylion n'avait jamais laissé Lucrétia sans un garde-fou, lui offrant un bracelet pour contenir ses pouvoirs. Mais à ce moment précis, le bracelet avait été détruit. Dans l'instant qui avait suivi sa destruction, des ronces étaient apparues pour entourer Lucrétia comme un cocon dense, transperçant le lit.

Hrid: A-attention!

Le Démon avait tiré le Miqo'te pris au dépourvu sur le côté. Celui-ci s'était agrippé à son compagnon dans le même temps.

Hrid: Qu'est-ce que c'est?!

Une Noirceur palpable s'était dégagé des ronces qui avaient recouvert entièrement la jeune femme.

Eylion: Merde, c'est... normal ça...??
Solid: Que se passe-t-il?!

Finalement, les ronces s'étaient dissipées en disparaissant dans le sol. Solid avait pu sentir que l'aura de Lucrétia était désormais semblable à celle des Shields même si elle avait fait le "Choix", tout comme Kaldriss, de conserver ses Ténèbres.

Solid: ...
Lucrétia: ...!

Elle avait ouvert les yeux en prenant une brusque inspiration, comme si son souffle avait été coupé durant tout le procédé.

Solid: Je crois qu'elle a lucidité... Mais Pour ce qui est des Ténèbres, rien n'a bougé. Elle a peut-être choisi de les garder, aussi. Personne n'arrive à se détourner de l'obscurité, pour le moment...

Elle s'était relevée lentement, tête baissée.

Lucrétia: Pourquoi... avait-elle fait d'une voix sourde.
Solid: ... Lucrétia?
Hrid: ...
Lucrétia: Pourquoi vous avez fait ça... avait-elle poursuivi, tremblante.

Le Lunaire avait dressé des oreilles, surpris.

Eylion: Tu... nous entends...?
Hrid: ... T'avoir libéré?
Lucrétia: M'avoir... libéré... LIBÉRÉ...?
Hrid: ... On a fait une bêtise?

Lucrétia avait tenté de se redresser sur ses genoux, tendant un bras vers le Lunaire avant de tourner de l’œil, manquant de sombrer dans l'inconscience. Tout le poids de ses siècles d'existence étaient en train de lui retomber dessus. Dans le même temps, le Mage avait porté une main à son front, impacté par les répercussions d'une telle chose.

Solid: Du calme...
Eylion: Hgn...

Solid était allé auprès de sa consoeur pour la maintenir et l'empêcher de bondir de rage sur le Miqo'te. Une juste initiative.

Lucrétia: P-pourquoi... avait-elle balbutié, ivre de rage, de confusion même si elle était faible physiquement.
Solid: Pourquoi avoir fait ça? Aurais-tu préféré rester la prisonnière de ce torrent de noirceur?

Un torrent de larmes avait fini par franchir le regard dissembable sous l'effet de sa détresse alors que sa Lucidité procédait enfin à l'ensemble de son vécu. Les sensations à demi-partagées, le Miqo'te avait traversé un véritable Enfer commun avec son ancienne tortionnaire. Il avait été soutenu par Hrid, inquiet.

Hrid: Tout doux!
Lucrétia: De tout, Je me souviens de Tout... avait-il dit, hantée. Du goût du sang. La Fiancée maudite qu'ils murmuraient... Tous m'ont été arrachés... Ah, Père, j'avais si confiance...

Solid l'avait alors étreint pour la consoler même si le regard fixe de la Démone avait démontré que son Esprit était bien trop chargé pour s'en rendre compte.

Lucrétia: Tant de Sang, tant de Morts. Mère... Pourquoi...
Solid: La vie est injuste... mais le calvaire s'arrête ici...

Elle n'était pas parvenue à s'arrêter de pleurer, secouée de toutes parts pendant que son "Lié" était au supplice, tête entre ses mains.

Lucrétia: Je ne voulais pas Voir. Je ne voulais pas Ressentir. La Solitude, l'Amour, la Perte, le Deuil...

Dans sa Folie de "Perfection", Lucrétia avait enfermé sa vision des choses derrière le prisme du rôle qu'elle s'était imposée de jouer. Elle s'était comportée jusque là comme une enfant ne pouvant et ne voulant pas voir les pans de Réalité qui auraient pu la faire dévier de son "devoir". Bien qu'Obsédée par Eylion, jamais elle ne s'était rendue compte que ses sentiments étaient de l'acabit de l'Amour. Le Désir ne pouvait pas non plus exister.

Solid: Hrid, si tu sais utiliser la magie des rêves, c'est le moment.
Hrid: Hein?
Solid: Aide-la à s'endormir, maintenant!
Hrid: Ah oui, pardon!
Lucrétia : Tout était si Voilé... Et me voilà Orpheline dans les rues d'Ul'dah, me voilà plaquée contre ce mur, par cette main épaisse et répugnante, le rire goguenard jusqu'à ce que Claus intervienne. Et je me souviens que Père les a tous chassé, les servants, les Jours toujours les mêmes. Mère est morte d'une maladie, oui, certainement alors pourquoi ce doute...?

Une douce lumière, quoique froide, avait imprégné la main du Kamuy qui s'était appliqué à endormir le duo tourmenté. Les jours suivants, Eylion avait dû passer à nouveau du temps à calmer la Démone complètement hystérique mais ses efforts avaient fini par payer. Là où elle ne s'exprimait que par métaphores, sans réellement voir son entourage, Lucrétia était désormais Consciente, "Lucide". Ce fut au terme de cette période qu'elle l'avait pris dans ses bras, dans le Salon de l'Aube, qu'ils accaparaient pour ce genre de sessions.

Lucrétia: Merci...

Le Lunaire avait soupiré, bien tenté de lui demander de dégager mais il avait pris sur lui.

Eylion: De rien, avait-il grommelé.
Lucrétia: ... Tu m'en veux toujours?
Eylion: ... Je mentirai en disant le contraire.

Elle avait souri faiblement.

Lucrétia: Je... me doute que des excuses... ne serviraient à rien?
Eylion: ... Ça pourrait être un début.
Lucrétia: Alors je te présente mes excuses pour tout ce que j'ai fait... À toi, à Kaldriss, à tous ceux que j'ai tué... et torturé... Mais sache... Mon Lunaire, je ne m'excuserai pas de t'avoir rencontré. Je ne m'excuserai pas pour mes sentiments. Je ne m'excuserai pas pour ton Œil. Je ne m'excuserai pas pour la Haine que je voue à ceux qui te convoitent.

Il avait soupiré à nouveau.

Eylion: Je ne te pardonne toujours pas mais, hrm...

Il avait grimacé.

Eylion: Je t'entends, Lucrétia, je t'entends, avait-il fait en s'arrachant littéralement le nom de la gorge.

Elle s'était redressée, surprise. Puis elle avait bondi sur lui.

Lucrétia: Mon LuNAIre! ♡
Eylion: Argh, non! Non, dégage!

Le reste de ses proches avait appris la nouvelle plus tard, quand le Mage avait pu se remettre de ses "émotions".

Kyuuji: Une lubie?
Eylion: Je t'avais parlé de la taverne que je voulais ouvrir, il me semble...?
Kyuuji: Oui.
Eylion: Hé bien... On a eu une discussion assez...
Kyuuji: Hum?
Eylion: Particulière... et elle souhaite me prouver qu'elle est capable de se "débrouiller" et même de fréquenter "l'Extérieur". Elle m'a réclamé la gérance de l'Abéhys...
Zaurak: Elle a changé... Elle s'humanise. Son vocabulaire déjà...
Kyuuji: Que s'est-il passé... Devenir un Shield? avait-il demandé en écarquillant les yeux.

Zaurak s'était tourné vers le Raen en lui souriant.

Zaurak: S'il y a bien une personne capable d'aider les gens à devenir plus humains, c'est bien toi.

Eylion avait soupiré, embarrassé et défrisé.

Eylion: Oui, Solid a suggéré que je teste la combinaison du Refuge Mental et des pouvoirs du ClairObscur... Sur Kaldriss, hé bien, l'effet a été probant alors on a fait ça vis à vis de Lucrétia, avec le soutien d'Hrid.
Kyuuji: Hum?
Eylion: On a failli crever d'ailleurs...

Zaurak avait haussé un sourcil.

Kyuuji: Que s'est-il passé?
Zaurak: Vous avez utilisé votre voyage mental dans l'esprit de Lucrétia? Effectivement, c'est plutôt... téméraire.

Le Mage s'était passé une main sur le côté de son cou, embarrassé.

Eylion: Hé bien, quand on a vu que Kaldriss était revenu à lui-même... Je suis allé demandé de l'aide à Hrid qui avait un don inné en Oniromancie de par sa nature et Neilah. On est entré au sein de l'Esprit de Lucrétia à l'aide du Refuge Mental pendant que je portais la lumière de Volug. Et on a eu affaire à une sorte de... Manoir en version plus labyrinthique jusqu'à ce que Hrid sente où se trouvait le chemin vers le Cœur de la Conscience de Lucrétia.

Kyuuji avait opiné à certaines phrases, l'air concentré.

Eylion: On a chuté après le passage d'une porte et une espèce de... Serpent de ronces gigantesque a tenté de nous bouffer... On a dû combiner nos forces pour pouvoir le vaincre et atteindre l'objectif. Je lui ai remis la Lumière et on a été expulsé par l'impact, hors de l'Esprit.
Kyuuji: Oh... d'accord...
Zaurak: Vous avez purifié son âme, en gros?
Kyuuji: Son esprit.
Eylion: Quand elle s'est réveillée, elle a failli me sauter à la gorge... Parce que, hé bien... La Lucidité, ça vient aussi avec le fait de se rendre compte de tout ce qu'elle a vécu.
Kyuuji: Pourquoi s'en prendrait-elle à vous?
Eylion: En fait, les Shields sont à demi humains... Quand un Démon passe par leur rituel, s'il existe encore une once de Lumière en eux, il est possible de la renforcer.
Kyuuji: Oh!

Le Prêtre avait haussé les sourcils, surpris.

Eylion: Pour le reste, je pense que vous feriez mieux de demander à Solid, je ne veux pas révéler des détails qu'il ne voudrait pas révéler...
Zaurak: Alors c'est ça qu'on a vu... au Manoir... la Lumière qui rendait le démon humain... Je me demandais quel était le sens de cette vision.

Eylion avait eu un air gêné en ayant l'impression d'en avoir trop dit quand il avait entendu son confrère vif. Puis ses oreilles s'étaient abaissées sous l'effet de la Culpabilité.

Eylion: Hrm, ça, seul mon Homme pourra vous en dire plus...
Zaurak: Ne vous en faites pas, je ne dirai rien à ce sujet avant d'y être invité.
Kyuuji: Pareil pour moi, je me tairais.

Le Lunaire avait hoché la tête.

Eylion: ... Dans le cadre de Lucrétia, elle s'est réveillée avec la lucidité de deux mémoires, la sienne, de plusieurs siècles... et la mienne... Autant dire qu'elle a été hystérique pendant plusieurs jours... C'est pour ça que vous m'avez vu aussi crevé... J'ai passé mes nuits à la calmer...
Zaurak: Et les souvenirs des atrocités de son père en prime non?

Il avait acquiescé à nouveau en réponse.

Kyuuji: Dieux...
Eylion: Même si je pense que tu t'es un peu mépris à ce sujet, Zaurak... Il ne l'a jamais touché. Il... défoulait sa frustration sur des femmes qui lui ressemblaient avant de les tuer puisqu'elles ne pouvaient pas la remplacer... Lucrétia a fini par tomber sur la pièce où se trouvait les corps. Elle l'a maudit pour ça mais aussi pour la Solitude dans laquelle il l'avait enfermé... Il faisait disparaître tous les hommes de sa vie, prétendants comme servants.
Zaurak: Je sais. Que vous ayez pu surmonter ça... elle et vous... prouve que l'esprit humain peut être solide...

Vu comment le duo maudit avait ses propres soucis mentaux, le Mage s'était dit qu'ils ne s'en étaient certainement pas sortis sans dommages.

Eylion: Et oui, je me demande encore comment elle comme moi, on peut encore maintenir une conversation comme ça... avait-il approuvé avec fatigue.
Kyuuji: Le prix et la cause...
Zaurak: Vous avez Solid mais elle... c'est vous qu'elle veut.
Eylion: Oui... avait-il dit en soupirant. Elle s'est raccrochée à moi... Pour le moment... Mais je ne vois pas comment régler le problème pour l'instant... à part tracer des limites...
Zaurak: Cela évoluera peut-être... surtout si elle a vu votre esprit... elle sait que vous ne l'aimez pas. Les limites lui permettront de se tourner vers d'autres...
Eylion: Elle le sait, oui, mais ça ne la décourage pas... Ça la blesse en permanence mais elle s'accroche, avait-il lancé, agacé. C'est un peu pour ça que je lui ai permis d'entreprendre son apprentissage pour gérer l'Abéhys.
Zaurak: Mais en faire une tenancière de taverne... vous pensez qu'elle a assez de... normalité... pour ça?
Eylion: Son apprentissage en décidera. Elle a du chemin à faire: apprendre à servir les gens, à faire les comptes, à ranger, à cuisiner...

Lucrétia avait, en effet, mené un long apprentissage auprès des différents membres de la Brigade. La période qui suivit avait été plutôt "calme" et surtout riche en révélation. Eylion avait appris que Kyuuji avait un lien très particulier avec la Nature. Le Raen y était si lié que son bras s'était transformé en partie en écorce. Plus il s'éloignait et était déçu de l'Humanité, plus il se rapprochait de l'état de plante. Le Mage était bien décidé à empêcher ce cas de figure d'arriver.

Il avait aussi appris que son confrère Arcaniste, Zaurak, ne possédait pas de grimoire mais un circuit de matérias tatoué sur son corps dans lequel il puisait ses forces et ses sorts. Un tel procédé expérimental demandait de nombreux ajustements et c'était avec joie, et curiosité, qu'Eylion avait participé à ce Projet fascinant. Un Projet complexe, qui n'était pas sans ses complications mais le Mage n'allait l'apprendre en détail que plus tard.

Il y avait eu, par la suite, l'arrivée de Jaqatai, un esclave Xaela, et plus tard, de J'reya, une Solaire amnésique au QG. Jaqatai avait été rapidement adopté par l'ensemble de la Brigade. Élevé comme un animal au sein d'une arène, il ne savait ni parler, ni écrire. Ses premiers apprentissages avaient mis au jour une personnalité aux joies simples, encore enfantines. Quant à J'reya, elle avait eu plus de mal à s'intégrer à la Brigade, se sentant bien "normale" par rapport au reste.

Elle s'était naturellement rapprochée de Kyuuji. Les rapports entre Eylion et elle, en revanche, avaient été compliquées au départ. Toujours aussi misophobe sur les bords, Eylion s'était méfié de l'apparition de la Solaire au sein du QG. Le caractère tranché de J'reya n'avait pas manqué de se heurter à celui, explosif, du Mage, ce qui avait engendré quelques disputes dans les couloirs. Il avait néanmoins appris à l'accepter plus ou moins, surtout qu'elle était là avant tout pour son amnésie. Amnésie qu'elle refusait de creuser, ayant ses propres craintes qu'elle ne devait confier que plus tard.

La Construction de l'Abéhys avait bien avancé entretemps jusqu'à ce que Lucrétia eut la soudaine lubie d'organiser un bal privé. De manière assez surprenante, elle s'était attachée à J'reya, la considérant comme son "amie", et elle était décidée à en faire une "vraie demoiselle". J'reya étant de nature plutôt garçon manqué et peu portée sur la mode, ce point allait être le début d'un long Enfer et d'une peur presque phobique des personnes aux cheveux blancs.

La première Inauguration de la taverne s'était donc faite en très petit comité. Kyuuji, Eido, J'reya, Eylion et Lucrétia s'étaient retrouvés à l'étage dont seul le sol et les murs avaient été aménagés. Lucrétia avait préparé deux jeux mais elle avait absolument tenu à commencer par des danses. C'était en pleine période de Saint-Valention. La majorité de leurs proches était des célibataires et ils avaient évité l'événement sans savoir qu'Eylion avait fait pression sur la Démone pour que l'événement reste à la portée de tous, en concédant le point sur les danses.

Cependant, ce qui troubla le Lunaire, c'était que Solid avait insisté sur la notion que la Saint-Valention était une fête pour célébrer tous les liens, notamment de famille et d'amitié. Son attitude avait été si insistante que le Mage l'avait interprété comme une manière de le décourager de faire quoique ce soit de romantique à part, pour eux deux. Ce point allait le mener à aller boire au Kenkyo le jour J, pour mieux oublier ses doutes qui ne faisaient que s'empiler avec le Temps.

Lors de la soirée du "bal", Solid avait remarqué leur chiffre impair.

Solid: Il faut bien un cavalier pour Lucrétia, voyons!
Kyuuji: Lucrétia participe alors qu'elle est organisatrice?
Solid: On ne peut décidément pas te laisser seul.
Kyuuji: Oh, l'esprit de ma femme m'accompagnera... ou... j'ai Floral!
J'reya: Floral?

Kyuuji avait fermé les yeux pour invoquer un goobbue miniature, à la surprise de la Solaire. Le goobbue en question était un Kamuy de la nature que Nukh avait trouvé et qui s'était aussitôt lié au Raen.

Kyuuji: Floral.
Lucrétia: Du coup, Eido et J'reya, vous formerez un duo...!
J'reya: Quoi? avait-elle fait, son attention détournée du Kamuy. Non.

Eylion s'était mis une main sur le visage sans mot dire. "Laissons la catastrophe se faire..."

Lucrétia: Si, si, si, il faut des duos...! Et je n'ai pas dit couple! avait-elle fait en regardant Eylion en mode "Tu vois?".
Eylion: ...

Il avait gardé la main devant le visage.

Kyuuji: Eylion et Solid sont un couple, Lucrétia, avait-il remarqué en souriant avec une certaine douceur.

Eido avait ouvert la bouche comme s'il allait prononcer quelque chose mais rien n'était sortit, restant un instant celle-ci ouverte avant de la refermer remarquant qu'il devait avoir l'air stupide.

Lucrétia: Je sais, je parlais de J'reya et Eido, ils formeront un beau duo...! avait-elle répliqué dans une moue.
Kyuuji: Oh pardon... Je n'écoutais qu'à moitié... navré.
Lucrétia: Mais, du coup, vous êtes tout seul, Kyuuji...
Solid: Pourquoi ne pas tirer au hasard?
Lucrétia: Au hasard...?

Le Démon avait esquissé un sourire pendant que le Mage avait haussé son unique sourcil visible. Pourquoi il ne sentait pas ce coup là...? Le Prêtre avait pris alors le Kamuy dans ses bras.

Kyuuji: J'ai Floral, avait-il insisté.
Solid: Oui, on peut faire une courte paille spéciale, qui déterminera qui sera avec qui.

Lucrétia avait fait une moue. Son plan parfait pour mettre J'reya et Eido en couple pouvait "risquer" de tomber à l'eau dans son esprit tordu.

Lucrétia: Alors eux, pas besoin...! avait-elle lancé en les indiquant.
Eylion: ... Quoi? avait-il fait, à moitié interloqué, n'ayant pas du tout un bon instinct sur ce coup.
Kyuuji: Et ne séparons pas Solid et Eylion, enfin...

Le Prêtre ne devait pas savoir le montant de reconnaissance que le Mage lui avait porté en cet instant.

Eylion: À la courte paille et puis quoi encore...
Solid: C'est pourtant simple, et ça met tout le monde d'accord!
Lucrétia: Totalement aléatoire...?
Solid: Et puis... Lucrétia pourrait tomber avec Eylion...
Lucrétia: ...!!

Le regard de la Démone s'était illuminé de mille feux là où celui du Lunaire avait exprimé l'horreur absolue.

Eylion: Je m'oppose TOTALEMENT à cette idée!
Kyuuji: Non... dans ce cas, je serai le cavalier de Lucrétia...
J'reya: C'est une bonne idée, je trouve. Faisons ça.

La Solaire était bien décidée de se "venger" du fait d'avoir été jugée en tant que "Femme donc créature nuisible" par Eylion.

Kyuuji: Oh...

Lucrétia s'était tournée vers Eylion, avec une moue.

Lucrétia: C'est moi qui organise. Tu m'avais promis!

Solid avait récupéré trois paires de cerise, les ramifications bien cachées.

Eylion: Je sais bien mais...
Lucrétia: Tu m'avais promis que je pourrai organiser ça comme JE veux...!
Solid: Il suffit de choisir une cerise, et de voir à qui on est relié.

Eylion avait réprimé un "putain de bordel de merde" à peine audible.

Eylion: TRÈS bien mais n'oublie pas la TIENNE.

Il lui avait fait promettre de lui ficher la Paix pendant un moment en échange.

Kyuuji: ... Allons...

Chacun avait tiré sa part de cerise. Les résultats avaient été Solid et Kyuuji, Eido et J'reya et...

Eylion et Lucrétia.

Un lourd silence était tombé sur les participants.

Solid: Cela faisait un moment que Nymeia ne s'était pas manifestée!
Eylion: Non, c'est pipé... avait-il hoqueté, horrifié.

Lucrétia avait à peine contenu sa jubilation alors qu'elle avait regardé le Lunaire, plus obsessionnelle que jamais.

Eylion: Dites moi que c'est pipé...
Solid: Non...

J'reya avait, quant à elle, à peine dissimuler un sourire mauvais, savourant pleinement sa vengeaaaanncee.

Eido: Piper? On peut piper des cerises? avait-il demandé, le regard interrogateur vers Solid.
Solid: Pas à ce que je sache, surtout en si peu de temps.
J'reya: Bon, bah...
Kyuuji: ...

Le Prêtre avait eu l'air inquiet en remarquant l'air prédateur de Lucrétia vis à vis d'Eylion. Celle-ci avait tendu la main vers le Mage, telle une dame de la noblesse.

Lucrétia: La première danse alors...!

Solid s'était tourné vers Kyuuji en soupirant.

Solid: Tout va bien, allons!
Kyuuji: Navré...
Solid: Kyuuji, me feriez-vous l'honneur? avait-il demandé en s'inclinant avec élégance.

Eylion avait avalé, sur l'instant, bien des couleuvres, en plus de dépérir à l'intérieur mais il devait jouer le jeu, au moins pour Solid et les autres. Kyuuji n'avait pas été dans un meilleur état, s'étranglant sur le coup, pris de bieeen trop court.

Kyuuji: ... Heu... hum... oui... je... crois...
Eylion: Me feriez-vous l'honneur, Dame... Erh... Lucrétia...
Lucréia: Bien évidemment, mon cher...!

Trop impatiente, elle en était venue à oublier l'étiquette complètement, tirant le Miqo'te avec sa force démoniaque, les pieds d'Eylion avaient quitté momentanément le sol.

Eylion: Aaah, put... Lucrétia...!!

Eido, lui, s'était tourné vers J'reya timidement.

J'reya: ... Alors...?
Eido: Je... préfère vous prévenir que je ne danse pas très bien.
J'reya: Je ne sais pas danser non plus...

J'reya et Eido s'étaient maladroitement mis à danser, tout comme Kyuuji et Solid. Le Démon ne savait pas danser et le Prêtre n'était pas vraiment habitué à la valse. Le seul "duo" qui savait ce qu'ils faisaient était le duo maudit.
Eylion avait lutté pour reprendre le contrôle de la valse qui avait presque pris des allures de combat artistique, pour la plus grande joie de la Démone.

Lucrétia: Tu sais bien danser, avait-elle musé, satisfaite.
Eylion: Tu sais très bien pourquoi, avait-il répliqué, contrarié.

Elle s'était contentée de sourire avant de lui chuchoter à l'oreille.

Lucrétia: Il ne semble pas vraiment se soucier de toi, ton Élu.

Il avait froncé son sourcil unique.

Eylion: ... Moi qui pensais que tu avais changé.
Lucrétia: Certaines choses changent-elles?

Il avait fermé brièvement son Azur.

Eylion: Je vois très bien où tu veux en venir. Je ne t'accorderai pas la joie de jouer à ton petit jeu.
Lucrétia: Vraiment...? avait-elle fait, suave. Tu sais très bien que tu ne peux pas me cacher tes doutes, tes... ruminations.
Eylion: Je lui fais confiance.

Elle avait eu un léger rire cristallin.

Lucrétia: La Confiance est un Sablier. Si l'un des partis oublie de le retourner, les grains finiront par se vider pour ne rien laisser.

Il avait abaissé ses oreilles, rongeant son frein comme il le pouvait. Elle avait Raison et il le savait.

Eylion: Après tout ce qu'il a fait pour toi...
Lucrétia: Et je lui en suis reconnaissante... Assez pour le laisser poser ses mains sur toi.
Eylion: Je ne t'appartiens pas.
Lucrétia: Ça ne veut pas dire que ça me plaît pour autant de te voir dans les bras d'un autre.

Il avait esquissé un sourire à la fois grimaçant et peu amène.

Eylion: Et pourtant, tu lui tournes autour... Tu crois que je ne l'avais pas remarqué?
Lucrétia: Tu m'aurais déçu si tu ne l'avais pas remarqué, mon Lunaire, avait-elle répliqué, amusée. Tu sais pourquoi je le fais mais ce que je me demande surtout...

La Démone avait rapproché son visage du sien, après un tournoiement.

Lucrétia: Serais-tu inquiet que je réussisse?

Il avait frissonné de dégoût, d'inquiétude et de colère sur l'instant.

Eylion: Jusqu'ici, non.
Lucrétia: Oui... Je pense que le Sablier se videra de ses derniers grains avant ça.
Eylion: Lucrétia... avait-il grogné bassement.
Lucrétia: Désolée mon Lunaire, je ne dirai plus rien, avait-elle fait sans se départir de son sourire. Je ne voudrais pas gâcher cette merveilleuse soirée. Tu ne le voudrais pas non plus...
Eylion: Ne me tente pas...
Lucrétia: Je ne tenterai plus, promis, avait-elle dit avec un sourire ravissant. Plus un mot.
Eylion: ...

Le reste de la soirée avait été, heureusement, plus chaleureuse et amusante. La Démone avait organisé une partie de chasse aux amulettes au sein de la Coupe, donnant quelques situations cocasses aux participants puisque l'une des amulettes se trouvait au fond d'un bassin d'eau. Puis il y avait eu de petits numéros improvisés dont une leçon d'amitié décalée donnée par Kyuuji et Solid, et le sauvetage de "Princesse" Eido par "Prince" J'reya. Celui de Lucrétia et Eylion avait été un Chant commun. La Démone avait gagné, clairement, la soirée. Elle avait eu absolument tout ce qu'elle désirait, sans une fausse note, au détriment total du Mage.
Enfin, Lucrétia avait improvisé une chanson joyeuse et rythmée, terminant la fête par des danses plus folkloriques.
Finalement, J'reya et Eylion étaient restés en arrière pour ranger tout le matériel.

Eylion: Fiou...
J'reya: Fatigué?
Eylion: Ouai... Je ne pensais même pas être là, à la base.
J'reya: Pourquoi être venu alors?

À la base, Eylion avait juste songé "accueillir" les arrivants avant de s'éclipser. Vu tout ce que Solid lui avait lourdement sous-entendu, il s'était attendu à ce qu'il esquive le bal comme les autres.

Eylion: Parce que Solid était là. Je ne pensais pas qu'il viendrait.
J'reya: Oh, je vois...
Eylion: ...
J'reya: ... Quoi ?
Eylion: Quoi de quoi...? avait-il répliqué en maugréant un peu.
J'reya: Tu... Ne m'aimes vraiment pas, hein? Je sais, c'est la Valention, tout ça, mais justement... Je me demandais juste... Pourquoi.

Il avait froncé son unique sourcil visible.

Eylion: ... Ce n'était pas personnel avant une certaine remarque, avait-il maugréé t'il avec réticence. Je n'aime pas les femmes, en général.
J'reya: Quelle remarque? Et tu as l'air de t'entendre avec Nerill et Lucrétia.

J'reya, lors d'une dispute, avait réussi à frapper durement le Mage avec une pique le mettant au rang de Femme. Elle l'avait lancé sans savoir qu'il pouvait se transformer en tant que telle, un point privé et délicat chez lui. Autant dire qu'Eylion lui avait voué une Rancune farouche à partir de ce point.

Eylion: Celle sur le fait que j'appartiens à ce genre, avait-il dit en triturant son anneau au passage, de manière inconsciente. Lucrétia, c'est plus pour l'aider dans son effort de rédemption... Nerill... On va dire que je peux comprendre ce qu'elle a traversé encore, même si je m'attends toujours au coup de poignard dans le dos.
J'reya: Tu t'es vexé pour ça? C'est toi qui le prend pour une insulte... Je n'ai jamais voulu te... Blesser, avait-elle émis.

Il avait plissé son Azur, comme s'il cherchait à déterminer si elle se "fichait" de lui ou pas. En s'étant aperçu qu'elle était sincère, il avait grommelé tout en maudissant son Principe de Vérité.

Eylion: On va dire que ça a tapé là où ça faisait mal.
J'reya: Alors je...

Elle avait pris le temps de réfléchir, de peser le pour et le contre, de prier, d'hésiter, puis enfin...

J'reya : ... Je suis désolée.

Il avait écarquillé son Azur à l'excuse. Est-ce que le suivant Fléau allait arriver? Depuis quelques temps, des FEMMES lui présentaient des excuses. Le ciel allait s'écrouler, c'était certain à ce stade.

Eylion: ...
J'reya: Q... Quoi...?
Eylion: ... J'ai du mal à déterminer si vous êtes sincère ou si vous essayez de me faire baisser ma garde pour mieux vous ficher de moi.
J'reya: J'ai vraiment l'air si mauvaise? Sérieusement... Pourquoi je me ficherais de toi?
Eylion: Parce que c'est ce que font les femmes en général. Taper là où ça fait mal, remuer le couteau dans la plaie et aller droit à la gorge si elles ont l'occasion...
J'reya: Je ne sais pas qui t'a fait ça mais ça n'était pas "une femme" particulièrement... C'était juste quelqu'un sans honneur.
Eylion: Si ce n'en était qu'une, j'aurai sûrement dit "quelqu'un".
J'reya: Tu n'as pas eu de chance. Mais... Je n'ai aucune raison de te vouloir du mal. Surtout que tu fais parti des gens qui m'ont accueillis, alors...

Il avait soupiré, déviant son regard. Ça ne lui plaisait pas d'être méfiant de la sorte.

Eylion: Celles que j'ai croisé n'en avaient pas non plus, de raisons. Enfin... Sauf pour certaines, je le reconnais.
J'reya: Bah... Moi je t'assure que je n'en ai pas?
Eylion: Je ne crois pas aux mots. Je crois aux actes, à ce que je vois.

Elle lui avait tendu la main.

Eylion: Si c'est vous chasser qui vous inquiète ou vous agresser d'une quelconque façon, je... ...?
J'reya: Alors voilà mon acte. C'est la soirée idéale pour ça... Reprenons depuis le début.

Il avait baissé la tête vers la main tendue.

Eylion: Hrm...
J'reya: Je... J'aime. Les gens avec qui je vis. Et je veux pouvoir continuer à vivre des soirées comme celle-là... Enfin, tu comprends?

Il avait hésité, pesant le pour et le contre. Le Choix ne lui avait vraiment pas été facile. Il avait regardé la main, il l'avait regardé, elle. Finalement, après un temps interminable, il avait fini par la prendre et la serrer avec une poigne calculée pour être assurée sans broyer non plus la main.

J'reya: Ce n'est pas facile pour moi de faire confiance non plus... Alors on essaiera. J'imagine.
Eylion: Très bien. J'admets qu'il faut du courage pour s'excuser alors que vous ne savez pas réellement les tenants et aboutissants... Je ne pense pas parvenir à changer d'avis du jour au lendemain sur les femmes mais je...

Il avait pris une inspiration difficile.

Eylion: Je suis désolé si je vous ai froissé par mes propos.

Elle avait acquiescé.

J'reya: C'est oublié. Disons qu'on tourne la page et qu'on avance. Il ne faut pas rester bloqué dans le passé...

Suite au bal, il y avait eu quelques petites affaires mineures et des rencontres jusqu'à ce que la routine ne fut brisée par un événement qui allait marquer un tournant dans la vie du Mage. Ce jour là, il était allé dans une auberge à Lavandière pour boire un coup et réfléchir, faire le point sur tout ce qu'il avait vécu. Un Solaire inconnu s'était assis à sa table, verre à la main.

Solaire: Héé, salut...! Ça te dérange si je m’assoies là?
Eylion: ... Oui.
Solaire: Merci!

Il s'était assis, culotté. Malgré le verbe acerbe du Mage, le Solaire s'était entêté et était parvenu à détourner son attention, juste assez pour pouvoir droguer son verre. Eylion ne s'en était aperçu que quand sa tête avait commencé à tourner et sa Conscience à lui échapper. La suite n'avait été qu'une chaîne de souvenirs et de sensations floues. On l'avait entraîné dans une chambre. Il avait senti le haut de sa chemise déboutonné. Il avait entendu un cri de souffrance quelque part. Des voix familières, inquiètes.

Puis, l'Obscurité.

Il s'était réveillé dans sa chambre au QG, Solid à son chevet. Le Démon lui avait expliqué que Lucrétia était sortie de la Brigade, furieuse, arrivant juste à temps pour clouer le Solaire qui avait tenté de profiter de lui. Elle avait arraché la main du responsable et aurait pu le tuer mais Kyuuji, Eido et Shadow l'en avaient empêché à temps. Cette agression allait mener à une série de conséquences en cascade.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 16 avr. 2019, 20:01

Image
La Première pièce.

Elle avait été posée vers la fin de l'affaire Hunter, quand Solid avait dit à Eylion "d'aller voir ailleurs". Le Mage, interloqué, s'était insurgé. En voyant sa réaction, le grand Rouge s'était aussitôt ravisé, argumentant qu'il voulait juste lui faire découvrir le libertinage. Bien que calmé sur les intentions et après un non équivoque, la pièce était restée.

La Seconde pièce.

Solid avait le don particulier d'être d'une grande subtilité. Au fil du Temps, il avait posé des barrières entre lui et le Miqo'te. Des mots choisis au juste moment. Des sous-entendus voilés. Le Mage était d'autant plus vif à les saisir qu'il en était plus vulnérable. Le Démon n'avait eu aucun mal à jouer sur sa Culpabilité comme un virtuose jouerait un violon. Chaque Passion était réfrénée, rabaissée directement aux plus bas instincts humains, dénuée de tout romantisme ou de sentiment amoureux. Les barrières étaient des miroirs reflétant le plus vil des reflets. Eylion n'avait plus rien osé faire, pas même proposer la moindre sortie.

La Troisième pièce.

Eylion l'avait vu de moins en moins souvent. Au départ, il avait tablé sur le fait que Solid était le chef de la Brigade. C'était normal qu'il soit occupé. Et puis, la fréquence des disparitions s'était accentuée. Le Mage avait de plus en plus l'impression d'être évité. C'était tout juste s'il le voyait durant les réunions. Pensant que le Démon avait peut-être honte de lui par ses quelques gestes et noms affectueux, le Mage s'était efforcé d'être plus distant et "professionnel", pour lui montrer qu'il n'avait rien à craindre en public.

Il en venait à s'étonner quand Solid venait faire preuve d'un geste affectueux quelconque, se demandant ce qu'il avait fait de "bien" pour le mériter.

La Quatrième pièce.

Quand le Mage chantait Absolu, Union, Partage, il avait Famille avant tout, Amitié, Aide à autrui en retour. Eylion voyait le couple en un là où Solid le voyait en deux éléments isolés.

La Cinquième pièce.

Le Refuge Mental de Solid. Cette vision de lui en tant que victime devant être secourue.

Solid: Mais l'histoire que tu es me fascine et m'attriste... malgré ça, je trouve que c'est une très belle histoire, bien que sombre. Si je peux lui apporter un peu de réconfort et de paix... alors, oui, j'en suis.

La Sixième pièce.

Quand Eylion avait repris connaissance et avait appris la nouvelle de son agression, il ne l'avait pas, évidemment, reçu avec joie. La Colère, l'Indignation avaient bouillonné dans ses veines même s'il avait tenté de les réfréner de son mieux. En présence de Solid, il se trouvait incapable d'exprimer dignement la moindre Passion, prisonnier des mots suintant des barrières. Malgré tout, il avait réclamé Justice...

... Il avait réclamé Vengeance.

Ce qu'il eut en face n'avait pas été son Compagnon. Il n'y avait pas eu un être aimé inquiet en face de lui. Non, il avait eu affaire au froid Chef de la Brigade, lui intimant simplement que la Vengeance n'était pas la solution. Pas un réconfort, pas une once de compassion. Quand bien même les propos de Solid étaient justes, ce n'était pas le refus de la Vengeance qui avait heurté le Mage de plein fouet.

À ce constat terrifiant, Eylion était parti en claquant la porte, promettant amèrement de ne pas se mêler de l'affaire. La douleur de l'agression n'avait été qu'une caresse face à celle du poids de toutes les pièces, de toutes les Failles accumulées au fil du Temps. Une fois en-dehors de la Brigade, les pieds nus, il s'était mis à courir jusqu'à ce que ses poumons lui brûlent. Jusqu'à ce que ses jambes lui fassent mal. Jusqu'à ce que sa respiration ne crie grâce. Jusqu'à subir la morsure du Vent sur sa peau vulnérable.

Tout était bon pour étouffer la Corrosion qui faisait hurler son Âme. Tout était bon pour ignorer sa gorge nouée. Tout était bon pour ne pas craquer, pour ne pas s'écrouler.

Il ne sut jamais comment il était parvenu chez lui, dans sa maison à la Coupe, haletant. La porte passée, il était tombé à quatre pattes, les pieds en sang.

Il avait hurlé, sans discontinuer.

La Septième pièce.

Il avait passé les jours suivants tel un fantôme. Dans le miroir, il n'avait vu qu'un être brisé et livide. Beaucoup de gens préféraient éviter la Rétrospection. Il n'y avait pas de reflet plus terrifiant que celui de la Vérité. Certains noyaient ça d'ailleurs sous l'Alcool, la Drogue et tout autre substance pouvant leur permettre d'éviter d'être seul à seul avec eux-mêmes. Ce n'était pas l'envie qui avait manqué au Mage.

Mais non.

Il s'était trouvé là, face au Miroir. Regardant cette pâle copie de lui-même. Les Failles avaient dansé, avaient glissé dans chaque interstice de son Esprit. Chaque mot, chaque geste, chaque action passée au crible.

"Une fois qu’on a éliminé l’impossible, ce qui reste, aussi improbable que cela soit, doit être la Vérité"

Le déclic était venu d'un constat. Un constat aussi simple, aussi évident qu'il était fondamental. Malgré l'évidence, le Mage l'avait enterré par manque d'estime de lui-même.

Et si...

Et si sa Passion n'était pas le problème?

Si c'était tout à fait normal, quand on aime quelqu'un, de vouloir le couvrir d'attentions?

Le jeu de dominos avait commencé à pencher, à vaciller. Toutes les pièces avaient enfin semblé s'assembler.

Qu'en était-il de Solid?

S'il avait été amoureux de lui, n'aurait-il pas éprouvé une même Flamme? Est-ce que le Lunaire n'aurait pas senti un Retour semblable?

Il avait pu enfin la voir. Cette Steppe désertique sous un ciel de Crépuscule. Et ce Mur, immense, épais, d'un gris cendre montant jusqu'au ciel et couvrant l'ensemble de l'horizon. Il ne s'était pas rendu compte qu'il s'était assis au pied de ce Mur, en attendant de pouvoir le passer, avec Patience. Sans se rendre compte que si les sentiments avaient été véritables, il l'aurait déjà passé depuis longtemps.

En parlant de Véritable, le Lunaire s'était rendu compte, avec une certaine nausée, que la malédiction n'avait jamais stipulé...

Que le Baiser devait être réciproque.

Non pas qu'il doutait de l'affection de Solid. Le Démon ne le détestait pas, il le savait. Jamais il ne l'avait traité mal, bien au contraire. Seulement, il ne le traitait pas comme on traiterait un Compagnon.

Est-ce que ça voulait dire que sa première intuition avait été juste...? Que Solid ne l'aimait que comme un membre de sa famille? Et vu les mœurs légères qu'il avait... En quoi ça le dérangeait de coucher avec lui?

Si je peux lui apporter un peu de réconfort et de paix...

Il s'était passé une main tremblante sur le bas de son visage.

Une fois qu'il avait compris l'ensemble du tableau, le Mage avait dû passer à la phase la plus difficile. Que devait-il faire? ... Devait-il confronter Solid? La Peur de le perdre s'était aussitôt éveillée, le prenant aux tripes. Il avait secoué la tête à cette pensée. Il ne voulait pas, il ne pouvait pas le concevoir! Il en serait incapable...

Il avait pris les bords du bassin d'eau, sous le Miroir. Après un instant, sa silhouette avait été parcourue par les débuts d'un rire. Un rire grinçant qui s'était fait de plus en plus fort tandis qu'il avait relevé la tête avec une démence extatique.

Incapable...?

Il avait été capable de subir les insultes de son ancienne Femme durant le Procès sans mot dire. Il avait été capable de sacrifier un amour pour un autre. De... quoi... au juste n'était-il pas capable?!

Son rire avait péri progressivement tandis que son regard et ses épaules s'étaient rabaissés sous l'effet de la Douleur.

Que préférait-il? Risquer de le perdre ou vivre une Idylle mensongère...?

Il connaissait déjà la Réponse tandis que l'Azur de Glace s'était tourné vers son Reflet.

La Dernière pièce.

Durant ces jours de réflexion, Lucrétia l'avait contacté à travers leur Lien, ne manquant pas de lui transmettre que Solid voulait lui signifier qu'il ne s'excuserait pas pour leur dernière discussion. Le Démon était persuadé que le Lunaire était parti à cause du fait que sa Vengeance avait été refusée. Un frisson d'Indignation avait parcouru l'échine d'Eylion à cette mention.

Pour qui le prenait-il? Pour une péronnelle qui lui faisait du chantage affectif?

Jamais il ne s'était attendu à ce que Solid vienne le chercher. Au vu de toutes les Pièces, il en aurait même été surpris.

Le Mage ne s'était isolé que pour deux Raisons: Pour réfléchir et rassembler, selon son propre vocabulaire, ses couilles. Et il en fallait pour la confrontation qu'il avait dû faire.

Il avait donc revêtu son long manteau noir. Il avait ajusté sa chemise et sa cravate, puis ses mitaines.
Il s'était rendu au QG. La discussion s'était déroulée calmement. En aucun cas, le Lunaire n'avait élevé la voix. Il n'était pas là pour accuser le Démon. Il n'était pas là pour le blâmer. Il n'était pas là pour réfuter ou nier son affection.

Il était là pour la Vérité. Il était là pour lui-même.

Solid lui avait confirmé tout, l'ensemble de ses hypothèses, sans une fausse note. S'il était en mesure d'aimer tout le monde, il n'était pas en mesure d'aimer véritablement qui que ce soit car son véritable amour, Deep Star, était déjà morte.

Le Mage avait taché de rassembler toutes ses forces mentales pour lui offrir un sourire. Pour ne pas se laisser submerger par ses émotions.

Eylion: ... Alors arrêtons les frais là.

Solid avait tenté de lui assurer qu'il n'était pas malheureux de la situation, que le QG restait son chez lui. Eylion lui avait fait comprendre qu'il ne recommencerait pas la même "connerie" qu'avec Yunaia. Il n'irait pas endurer le fait d'être témoin du défilé d'amants qui allait s'en suivre.

Le Miqo'te n'avait pas su réellement comment il était sorti de là. Une fois le seuil de la porte franchi, ses jambes l'avaient lâchés. Assez paradoxalement, il avait été aussi anéanti...

...

Que soulagé.

Il ne s'était pas rendu compte à quel point il n'avait pas été lui-même. À quel point les barrières l'avaient méthodiquement miné, enfermé. À quel point il avait étouffé.

Il avait fiché de lui-même un coup de pied aux dominos. Il avait regardé les Pièces s'effondrer. Il les avait laissé pleuvoir sur ses sentiments avec la pensée que demain, il devrait se relever. Demain, il devrait se battre. Demain, il allait recevoir de nouveaux appels pour le Docteur de l'Occulte.

Mais ce Jour là,
ce Jour là, il n'avait été personne.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 21 juin 2019, 19:09

Image
Les patients "habitués" étaient rares. La plupart du temps, on engageait le Lunaire pour un cas unique. Quand il s'était retrouvé devant la porte de Wiloh, le Mage s'était demandé si Nymeia la détestait au moins autant que lui. Cette Affaire s'était déroulée en trois fois, durant la période de réflexion vis à vis de Solid, puis après l'avoir quitté. Malgré son état mental déplorable, il était bien trop accroché à son Devoir pour délaisser ses patients. Et puis, se plonger dans son travail était le meilleur moyen pour lui d'occuper son esprit avec autre chose que ses déboires avec Menphina.

Il avait découvert une Solaire enceinte, au ventre des plus arrondis, les cheveux mi-longs, bien mieux coiffés. À la voir ainsi, il en aurait presque pu oublier l'image de l'archère sauvage. Wiloh, elle, avait pu découvrir un Lunaire désormais adulte mais vêtu d'une coule sombre, dont la capuche masquait en partie le visage. Il allait porter cette coule de Deuil pendant une longue période. Le Mage, Fier, n'avait pas voulu exposer facilement son Azur terne, sa cerne sous celui-ci, son teint plus livide qu'à l'ordinaire. Il avait su, pertinemment, que cette capuche était insuffisante pour masquer entièrement son Tourment mais il avait préféré ça à une exposition directe.

Wiloh: Bonsoir. Entre et installe-toi, lui avait-elle dit, étonnée, en s'écartant de l'entrée.

Il s'était laissé détailler sans vraiment de réaction. Après un hochement de tête, il s'était assis dans le coin salon de la maisonnée. Son regard s'était attardé sur une caisse à jouets non loin. Lilas... La fille adoptive de Wiloh et Thay. Il l'avait gardé parfois avec Yunaia durant ses visites au Tapas. Cette vue avait été suffisante pour réveiller la Douleur. Il n'avait plus porté un seul Deuil mais deux.

Wiloh: Je vais chercher quelque chose, j'arrive.

Elle avait disparu à l'angle d'une cloison pour revenir avec un objet enroulé dans un tissu.

Wiloh: J'ai reçu, il y a quelques lunes, un colis mystère sans nom d'expéditeur. Dedans, il y avait ça.

Elle était venue le lui remettre avec une extrême précaution.

Eylion: ... Vous avez déjà regardé à l'intérieur?

Elle avait hoché la tête pendant qu'il observait la forme.

Wiloh: Et c'est ce qui est le plus troublant. Te souviens-tu de... L'entité que j'avais créé au souvenir d'un être aimé décédé?

Il avait répondu en le déroulant pour en regarder le contenu.

Eylion: Comment pourrai-je l'oublier? avait-il mentionné avec un ton morne.

Il avait découvert une broche d'une grande finesse en forme de papillon, avec des pierres précieuses incrustées.

Eylion: ... Le bijou me fait penser à la clé, avait-il remarqué. Vous dites l'avoir reçu seulement récemment...?
Wiloh: Il y a quelques lunes, avait-elle acquiescé. Ce bijou appartenait à Elianh, et elle le portait le jour de sa mort.
Eylion: Y'avait-il un message avec?
Wiloh: Aucun. Mais je sens quelque chose d'étrange dedans, et je ne sais pas le percevoir...
Eylion: Hm... Quand vous aviez reçu la boîte-puzzle, est-ce que ça avait été envoyé de la même façon...?
Wiloh: Non, en fait, la boîte puzzle m'a été donnée par son père. D'ailleurs, je l'ai aussi reçu dans une autre boîte puzzle. Mais il n'y avait qu'elle qui les construisait et savait les résoudre... Elle me l'a juste appris.
Eylion: Hm... C'est étrange... D'après ce que je me souviens... le jour de sa mort, le corps d'Elianh avait été perdu au fond de l'eau, c'est bien ça?
Wiloh: Exact, je suis toute aussi perdue que toi. Je ne sais pas si c'est une mauvaise blague ou non mais cette broche, je suis certaine n'en avoir fait faire qu'un exemplaire.

Elle s'était assise à son tour, en croisant les bras, l'air dur et fermé.

Eylion: Si elle le portait le jour de sa mort... Alors comment se fait-il qu'il soit ici... Une copie aurait pu avoir été faite, oui, mais... Je ne vois personne dans votre récit qui aurait un intérêt à le faire, ou même la connaissance d'un tel détail. En tout cas, il porte bel et bien des traces de magie. Si vous me permettez, je vais l'analyser.
Wiloh : C'est pour ça que je t'ai demandé, je me suis dit que comme tu as déjà été sur cette affaire avec Elianh, ça serait plus simple puisque j'aurais pas à réexpliquer toute l'histoire.

La permission donnée, il avait déposé le bijou sur ses genoux, le tissu du paquet en-dessous pour qu'il ne tombe pas à terre. Il avait alors soutiré son grimoire de son flanc pour en effeuiller les pages jusqu'à celle de son sort habituel d'analyse. Sa voix profonde avait prononcé les incantations nécessaires pour imprégner les lignes de la formule avec l'Éther adéquat.

Son Azur était devenu d'un bleu surnaturel, sa vision s'étant trouvée envahie par la traduction des phénomènes magiques en formules arcaniques. L'exercice de les interpréter était toujours délicat mais il était rôdé à ça. Il avait pu découvrir une protection éthérique et un message caché par une signature. Intrigué, il avait cherché à voir ce qui se cachait sous celle-ci.

Un fondu blanc avait alors envahi sa vue et il s'était retrouvé au sein d'une vision. Devant lui, il avait aperçu une Lunaire de dos, face à une Lune pleine. Elle s'était retournée avec un regard ambré d'une grande douceur. Plutôt petite, c'était une adolescente à la peau grisâtre et à la chevelure d'un bleu nuit, aux boucles courtes et indomptables.

Les lieux, dégagés, donnaient sur quelques arbres aux couleurs de l'automne et des collines entourant de grandes flaques d'eau.

???: Retrouve-moi comme tu as toujours su le faire, avait-elle fait en se retournant, d'une voix mélodieuse.

Elle lui avait tendu un bout de papier. Quand il l'avait pris, il s'était aperçu que sa main était celle d'une femme. Il ne lui avait pas fallu longtemps pour comprendre qu'il était Wiloh, en plus jeune et sauvage, blessée et égratignée de toutes parts. Bien que perturbé un instant, il était habitué maintenant à ce genre de forme. Il n'avait eu aucun mal à deviner l'identité de celle qui lui avait fait face.

Elianh.

Il s'était décidé à jouer le jeu.

Wiloh?: Je ne comprends pas, Elianh... Tu n'es pas sensée te trouver ici.

Il n'avait pas eu plus de mal à mimer la perdition et le désespoir qui devaient accompagner ses mots, un mime à la lisière de l'Imagination et de la Réalité, puisant dans ses expériences propres.

Elianh: Je ne suis pas ici justement. Je ne suis plus là. Seul mon devoir est encore là, inaccompli. Et c'est toi qui pourra m'aider à l'accomplir.
Wiloh?: Ton... Devoir...?
Elianh: Il y a tant de choses que tu ignores, ma tendre Wiloh... Mais tu découvriras la Vérité bien assez tôt, ne t'en fais pas. S'il s'agit bien de toi... Tu sauras ce qu'il faut faire grâce à ce que je t'ai enseigné. Tout ça avait un sens, un but, pour toi, pour moi, pour nous, pour mon devoir. À très bientôt Wiloh, nous nous reverrons plus vite que tu ne le penses...

La vision s'était finie abruptement, le Mage rouvrant l'Azur au sein de la maisonnée. Dans sa main, il avait pu sentir non seulement la broche mais aussi le bout de papier, apparu mystérieusement. Wiloh, quant à elle, toujours assise non loin, l'avait observé tout du long sans remarquer le moindre changement.

En la voyant ainsi, il avait regretté d'avoir creusé. Bien qu'il n'avait pas pu le savoir, le Message caché était pour elle. En observant à nouveau la broche, il avait constaté que la Magie était à usage unique.

Eylion: Je crains que ce colis ne soit que le début d'un mystère plus entier...
Wiloh : Hein...? avait-elle fait, interloquée.
Eylion: Hrm... Je ne sais pas si c'est un mal ou un bien que j'ai analysé ce bijou...

Il avait ouvert davantage sa main pour en extirper, avec l'autre, le bout de papier.
Note a écrit :"Là où la foudre est la plus forte, mais aussi la plus magique, tu trouveras un chant qui s'élévera dans les cieux pour te guider sur la voie."
Wiloh: Pourquoi? Qu'est-ce qu'il y a? avait-elle demandé en fronçant les sourcils.
Eylion: Il y avait un message surnaturel caché au sein de l'objet...
Wiloh: Comment...?
Eylion: J'ai vu Elianh, avait-il fini par lâcher sobrement en consultant ce qu'il tenait.

Elle avait aussitôt bondi sur ses pieds.

Wiloh: Q-Quoi?! Comment?!

Une douleur subite en bas de son dos l'avait forcé à se rasseoir derechef en grimaçant, une main sur ses reins. Il lui avait confié le message. Elle l'avait pris et parcouru plusieurs fois, déstabilisée, bouche bée.

Wiloh: Hmpf... C'est quoi ce message? Qu'est-ce que ça peut vouloir dire?

Il lui avait narré son expérience. Ils avaient établi ensuite diverses hypothèses avant d'en venir au fait que Wiloh avait besoin de réfléchir à l'énigme. Si elle parvenait à trouver le lieu, le Mage, lui, se portait garant de trouver une équipe pour l'expédition. Il avait bien eu quelques réticences par rapport au fait que Wiloh était enceinte mais l'archère avait bien fait comprendre que c'était important pour elle. Après un remerciement de sa part, il avait soupiré.

Eylion: ... Je ne laisserai jamais un de mes patients livrés à lui-même, surtout dans une affaire aussi délicate. À dire vrai, ce sera bien plus difficile pour vous et Thay que pour moi.

Elle avait marqué un instant de silence. Elle avait fini par parler avec un ton aussi neutre que possible avant de dévier le regard et de baisser les oreilles.

Wiloh: ... Thay n'est plus. Alors il n'y a que moi.

Il avait dressé légèrement les siennes, interloqué.

Eylion: ... Comment ça?
Wiloh: Thay est mort...
Eylion: ...! Merde... Comment...
Wiloh : Noyé.

Elle avait serré la mâchoire, murmurant ensuite d'une voix déchirée.

Wiloh: Comme Elianh...
Eylion: Put... Je... Je suis désolé...

Il avait alors abaissé ses oreilles pendant qu'elle fermait les yeux, une lèvre tremblant sous l'effet de l'émotion.

Wiloh: C'est...Comme ça...
Eylion: Mais, erh... Vous... êtes toute seule...?

Elle avait hoché doucement la tête, inspirant avant de se frotter les yeux et de les rouvrir.

Eylion: ... Vous ne devriez pas rester ici seule, avait-il dit en gardant les oreilles abaissées. Pas avec une telle peine et dans votre état.
Wiloh: Je ne suis pas exactement seule, il y a une petite fille que nous allions adopter avec Thay. Une fille orpheline depuis la mort d'un de ses très proches amis... Et j'ai des amis qui viennent me voir, mais ils ont leur propre vie aussi.
Eylion: Je la connais, je... Hm, l'ai gardé avec Yuna...

Une certaine douleur s'était échappée quand il avait prononcé, par inadvertance, le nom raccourci. Il s'était alors repris.

Eylion: Yunaia.
Wiloh : Ho...
Eylion: Pourquoi vous, hm... ne viendriez pas à la Brigade? De nombreuses personnes qui n'y appartiennent pas y trouvent refuge, le temps de se reconstruire.
Wiloh: Mmh, je ne sais pas... Je suis partie de Brumée où je vivais pour me réinstaller dans mon appartement ici, pour trouver un lieu où je me sens le plus chez moi, le plus à l'aise pour me reconstruire justement.
Eylion: Oui mais... Toute seule... Je sais à quel point...

Il s'était à nouveau repris, ne voulant pas s'exposer de trop.

Eylion: À quel point, avait-il amorcé difficilement. Il... Hm, est facile de ruminer des pensées noires quand on est seul. C'est dans un moment de... ... peine... qu'il est d'autant plus important d'être bien entouré.
Wiloh: Oui, c'est sûr mais... Je n'ai vraiment pas beaucoup d'entourage en réalité...
Eylion: Alors, c'est... erh... l'occasion d'en découvrir un nouveau...? avait-il dit en se massant le côté de son cou tout en détournant son Azur.
Wiloh: Je sors parfois pour voir du monde et me changer les idées, j'ai même réussi à redanser et à rire... avait-elle dit en souriant légèrement.
Eylion: C'est vous qui voyez, moi, je dis ça comme ça...
Wiloh: J'en prends note, merci... Et ne me vouvoie pas, j'ai l'impression d'être soit vieille, soit pas toute seule dans ma tête.
Eylion: Hrm, c'est surtout que nous ne sommes pas vraiment proches. Vous tutoyer, ça me paraîtrait... ... étrange.
Wiloh : C'est pas une question de proximité pour moi. M'enfin...

Elle avait haussé les épaules.

Wiloh: Tu me contacteras quand tu auras une équipe pour partir, alors?

Il avait acquiescé.

Wiloh: Merci.
Eylion: Et vous savez où se trouve la Brigade... Mais si jamais vous y allez, prévenez moi par perle car je n'y suis pas pour le moment. Histoire que... ... Je prévienne qui de droit...

Il avait grimacé sur la fin de sa phrase. À ce moment, il en était encore à ses débuts de réflexion mais même sans ce fait, il séparait bien ses affaires personnelles de ce qu'il estimait "juste" de faire.

Wiloh: Ha? D'accord.

Elle avait acquiescé avant de détacher sa perle.

Wiloh: Nous devrions les synchroniser alors.
Eylion: En effet.

Ils avaient synchronisé leurs perles brièvement, pour les remettre ensuite.

Eylion: Avez-vous besoin de quelque chose en particulier?
Wiloh: Non, je te remercie et je te remercie pour l'aide que tu m'apportes. Thay tenait à m'aider aussi mais il n'aura jamais pu...
Eylion: C'est ma Voie... mon "Devoir". Aider ceux qui ne le peuvent pas à retrouver une vie normale ou résoudre les mystères qui les hantent. Pour Thay... Mes condoléances même si je sais qu'aucun mot ne saura apporter une réelle consolation...
Wiloh : Merci...

Elle avait étiré un léger sourire forcé, les oreilles basses, le chagrin clairement visible sur son regard, même si elle avait essayé de garder sa contenance.

Eylion: Je vous tiens au courant. Appelez moi s'il y a quoi que ce soit.

Il s'était relevé en réajustant son grimoire à son flanc, puis ses manches tour à tour. Elle l'avait de nouveau remercié de manière inaudible.

Wiloh: À bientôt alors.
Eylion: À bientôt.

Il s'était éclipsé et avait, alors, contacté Kyuuji et J'reya de façon à composer à une équipe adéquate, au-delà du fait qu'il leur faisait confiance. Un Mage, un Soigneur, une Combattante. Il n'avait plus qu'à attendre d'être contacté par la Solaire, chose qui s'était faite quelques jours plus tard.

Ils s'étaient tous rendus chez elle, Wiloh leur exposant qu'elle pensait que la foudre devait faire référence aux terres des Sylphes, sur le territoire de Ramuh. Le groupe avait avancé quelques réticences sur le bien-fondé d'une telle expédition dû au fait qu'elle était enceinte mais, finalement, Eylion y avait consenti face à la Volonté de celle-ci. Même s'il y avait des risques, il avait été confiant du fait qu'ils parviendraient à l'escorter proprement et au vu de tout ce que Wiloh avait traversé, il n'avait pas pu lui refuser une chose aussi importante.

Après quelques échanges et mises au point, ils s'étaient finalement mis en route vers Gridania pour emprunter des barques à l'embarcadère.

Ils avaient traversé la rivière vers l'autre rive, en direction de la Forêt de l'Est. Le trajet n'avait pas été de tout repos car un élémentaire d'eau s'en était pris à eux, élémentaire qu'ils avaient fini par vaincre même si le Mage faillit bien passer par-dessus bord. Il avait été retenu, in extremis, par Kyuuji, la tête déjà dans l'eau. Le pied sur la rive, il avait pu pester allégrement avant que le groupe ne reparte.

Il leur avait fallu se présenter, en premier lieu, aux Sylphes. Un passage durant lequel chacun dut danser pour pouvoir les saluer et leur parler, au plus grand dam d'Eylion. L'échange passé et les négociations faites, ils avaient pu entrer sur le territoire de Ramuh, dans cette partie de la forêt chargée des énergies du Primordial de la Foudre.

Après un long trajet, durant lequel ils avaient privilégié la discrétion, ils étaient parvenus jusqu'à un endroit particulier, envahi par des champignons fluorescents aussi hauts que leurs hanches. Devant eux, ils avaient pu constater la présence d'une grande plante suspendue, luisant d'une lumière violette gorgée d'Éther et ressemblant à une grande fleur close. Ils avaient pu également entendre d'antiques murmures indescriptibles hantant les environs.

À cet instant, le cristal de Wiloh s'était mis à s'illuminer d'une teinte verte, preuve qu'ils étaient sur la bonne voie.

Après une fouille et quelques essais, ils avaient découvert qu'une énigme se cachait derrière les champignons entourant la grande plante. Ceux-ci émettaient de la musique, une musique que le groupe avait dû recomposer en les touchant dans un certain ordre. La fleur avait alors éclos en émettant un chant que seul l'Arcaniste avait pu décrypter à l'aide de son sortilège d'analyse, alors actif.

"Au plus haut toit se situant sur une Tour de Verre, se trouvera le grand Secret au milieu d'un jardin d'eau et d'arbres. Mais avant toute chose, tu devras passer des épreuves que seule toi, ma douce Solaire, pourra résoudre par la dignité que t'ont prodigué mon apprentissage."

Quand il avait compris le message, il avait ensuite avancé son bras vers la fleur, sentant qu'il y avait autre chose. Une initiative dangereuse car les pétales s'étaient alors refermées autour de son bras sans ménagement. Les champignons alentours avaient soulevé leurs têtes, révélant leur nature de jeunes tréants.

Eylion: ...!!
Kyuuji: Eylion!
J'reya: C'est pas vrai! avait-elle fait en sortant son épée directement.
Eylion: Putain... À croire que mon instinct l'avait prévu...! avait-il émis en sifflant de douleur.
Kyuuji: Attendez, je vais essayer de les apaiser.

En entendant Kyuuji, J'reya s'était précipitée vers Eylion pour tenter de l'aider à dégager son bras.

Eylion: URGE...!! avait-il lancé au prêtre.
J'reya: Comment tu fais pour toujours te foutre dans la merde comme ça...!!

Wiloh, elle, après avoir sursauté à la situation, s'était empressée de dégainer son arc, attendant toutefois l'action du Prêtre. Celui-ci s'était doucement avancé vers les champions-tréants pour tenter de les apaiser à l'aide de ses affinités avec la Nature.

Eylion: J'ai senti que... quelque chose manquait... dans ce que j'ai entendu et perçu... avait-il répliqué entre ses canines.

Malgré la douleur dû à la force de la plante, il avait senti quelque chose sous ses doigts, quelque chose qu'il avait tenté d'agripper. Sitôt le contact fait, une vision avait englouti ses sens, l'Azur s'étant fait évasif, lointain. Ses épaules s'étaient affaissées et il avait mis un genou à terre, son bras toujours prisonnier.

J'reya: Eylion?!

Il avait à peine entendu son nom, le paysage alentours ayant laissé place à celui de la Mer d'Éther. Devant un cristal géant, Elianh était apparue, presque de dos. Il avait tenté de crier son nom, chose qui avait semblé attiré son attention. Sa tête à peine tournée vers lui, elle avait froncé les sourcils face à cette "intrusion". L'instant suivant, il s'était réveillé brusquement.

Entretemps, Kyuuji était parvenu à apaiser les tréants et la fleur, les convainquant de les laisser partir. Eylion relâché, ils ne s'étaient pas attardés et ils avaient pris la route de la maison de Wiloh. Le retour s'était fait sans heurt et ils étaient finalement parvenus à destination en soirée. Eylion leur avait alors confié tout ce qu'il avait vu. S'en était suivi une longue discussion sur ce qu'était cette Tour de verre, sans vraiment de succès, puis...

Eylion: La soirée a été longue et difficile. Il vaudrait mieux faire une pause là et la laisser se reposer. Quelque chose lui reviendra peut-être en mémoire avec du calme mais avant...

Wiloh avait soupiré.

Wiloh: Mmh, tu as raison. C'est juste que... Je ne comprends rien de tout cette histoire, c'était vraiment elle alors? Pas un piège? Pou-
Eylion: Je ne sais pas si c'est un piège ou non. Si ce n'est pas le cas alors... Ces visions étaient là pour vous à la base. À ce propos... J'aimerai avoir votre permission pour utiliser le Refuge Mental, l'un de mes sorts, sur vous.
Wiloh: Qu-... C'est quoi? avait-elle demandé, confuse, les sourcils froncés.
Eylion: Il s'agit d'un sort qui plonge deux personnes dans un sommeil profond avant de lier leurs Esprits et de broder un Rêve qui les représente sous la forme d'un Paysage onirique propre à chacun, permettant ainsi leur exploration. Je l'utilise pour divers cas. Ici, j'aimerai vous transmettre les souvenirs des visions que j'ai eu.

Le Mage avait grandement culpabilisé. Même s'il n'avait pas pu savoir, ni prévoir ces visions, elles avaient été faites et créées pour Wiloh. C'était leur histoire.

Wiloh: ... Mais comment aurais-je pu les voir... Elle savait que je suis nulle en magie ou alors...

Elle avait abaissé ses oreilles en soupirant une énième fois, tout en se massant l'arête du nez.

Wiloh: Hmpf... Je comprends rien...
Eylion: Hm... C'est une bonne question en soi... Hormis s'il y a quelque chose qui vous a échappé dans votre "apprentissage". Mon sort me permet de décrypter les phénomènes magiques, peut-être détenez-vous une connaissance permettant d'en faire de même sans le savoir?
Wiloh: Aucune idée.
Kyuuji: Tu n'as pas parlé d'un manque? C'est peut-être ce qui empêche Wiloh d'y accéder?
Eylion: Hé bien, le souci avec mon sort d'analyse, c'est qu'il me faut du temps pour décrypter ce qu'il m'affiche... Ce qui veut dire que mon temps est souvent limité pour comprendre un phénomène. Il y a des pans que je n'ai pas pu analyser avant la fin de la chanson.
Kyuuji: Oh, d'accord.
Eylion: C'est déjà un miracle que j'ai pu soutirer tout ce que j'ai pu soutirer mais une chose est sûre: On ne voulait pas que n'importe qui y ait accès, avait-il dit en levant l'index.
Wiloh: À cause de la fleur qui a mangé ton bras?
Eylion: C'était une protection en effet mais il n'y avait pas que cette mesure: d'une part, votre cristal a provoqué le phénomène. D'autre part, le chant était crypté et le cœur protégé. Quelque soit ce Secret, il doit être assez important pour demander de tels moyens.
Wiloh: Secret, Devoir, Apprentissage... Toujours plus de termes et moins de réponses. Mmh... Et tu as des hypothèses?
Eylion: ... Hé bien, celle qui me paraît la plus probable pourrait être la plus douloureuse pour vous. Et je préférerai autant ne pas en rajouter avec ce vous traversez déjà. En plus du fait que je pourrai me tromper...

Elle avait soufflé du nez avec frustration. Il n'avait pas voulu évoquer le fait qu'il soupçonnait l'âme d'Elianh toujours retenue quelque part, que c'était bien elle qui avait envoyé tous ces messages, dans l'espoir d'amener Wiloh à reprendre ce mystérieux Devoir.

Wiloh: Si tu estimes cela ainsi, je n'insisterai pas...
Eylion: Pour le Refuge, est-ce que vous voulez avoir accès à ces visions?

Elle s'était mise à réfléchir avant de finalement acquiescer, l'air déterminée.

Kyuuji: Ce n'est pas risqué?
Eylion: Seulement si on explore, avait-il fait en tournant la tête vers Kyuuji. Le Refuge peut être utilisé de diverses façons. Ce n'est dangereux que si le Paysage Mental est entièrement dangereux, ce qui est un cas rare. La plupart du temps, les "Lisières" sont sans danger.
Kyuuji: Oh, oui, c'est vrai, excuse moi.
Eylion: Communiquer dans une Lisière, partager un souvenir auquel le dormeur a libre accès ne sont pas des actions dangereuses.
Wiloh: Un Paysage mental peut être dangereux?

Le Prêtre avait opiné à la question.

Eylion: Oui, avait enchéri le Mage. Tout dépend desquels, ça varie d'une personne à l'autre. Chacun est unique. En général, un Paysage est constitué d'une Frontière, d'une Lisière et d'un Cœur.

Wiloh: J'ai du mal à saisir la différence entre Lisière et Frontière.
Eylion: Hé bien, le sort lie deux Paysages, avait-il amorcé en joignant ses index pour mimer ses propos. Du coup, une Frontière les lie et peut prendre une infinité de formes en fonction des personnes impliquées. Par exemple, l'un pourrait avoir une forêt en paysage, l'autre une cité volante. Pour accéder à l'un et l'autre, grimper à un Arbre gigantesque pourrait être l'action à effectuer.
Wiloh: Je vois...

Le Raen, quant à lui, s'était approché discrètement de J'reya.

Kyuuji: Ça va, vous? avait-il demandé, à voix basse.

Celle-ci, en retour, avait souri, quelque peu attendrie par son attention au vu de son silence.

J'reya: Ne vous en faites pas, ça va. Concentrez vous sur Wiloh, elle en a besoin.
Kyuuji: Je ne peux pas grand chose de plus, dans l'immédiat, avait-il émis en murmurant et en penchant la tête.

Le duo s'était alors mis à chuchoter pour ne pas déranger les explications d'Eylion.

Eylion: Une fois l'Arbre escaladé, le premier lieu de la Cité est ce qu'on appelle la Lisière. Ou s'il descend de l'Arbre, le bosquet de la forêt serait la Lisière de l'autre individu. Ce n'est que si l'un et l'autre cherche à aller plus loin que la Lisière que les choses peuvent devenir dangereuses car on s'enfonce alors dans l'un des Esprits.
Wiloh: C'est grand en général un Paysage Mental...?
Eylion: Hé bien, je dois avouer que je ne me suis jamais risqué à explorer l'ensemble d'un Esprit pour le savoir.
Wiloh: Oh. C'est compliqué quand même... avait-elle fait en grimaçant.
Eylion: On joue ici avec une magie extrêmement compliquée. En fait, le Subconscient cherche, la plupart du temps, à se défendre instinctivement contre les intrus. Par exemple, dans le cas de la Cité, des gardes pourraient apparaître pour arrêter les intrus.
Wiloh: Ah d'accord.
Eylion: Et plus on se rapproche du Cœur, plus le danger grandit. Mais ça varie d'un Esprit à un autre. J'ai pu croiser des Paysages totalement inoffensifs, même en s'enfonçant au-delà de la Lisière. Et à l'inverse, certains sont dangereux dès la Lisière.
Wiloh: Donc il y a un risque que ce soit dangereux si le Subconscient se défend...

Il avait acquiescé pour renforcer ses dires.

Wiloh: Mais... Dangereux... Ce qui s'y passe aura quel impact? avait-elle demandé en prenant un air sérieux.
Eylion: Hé bien... Je dois avouer que je n'ai que des théories à ce niveau car j'ai toujours su gérer les impacts du sort et que je ne laisse que rarement quelqu'un d'autre que moi explorer un Esprit mais... Je soupçonne qu'un Esprit pourrait finir brisé, changé ou bien emprisonné, que ce soit pour l'un ou l'autre individu.
Wiloh: ...
Eylion: Dans le cas ici présent, vous seriez celle qui viendriez dans ma Lisière pour que je puisse vous confier les souvenirs que j'ai. Ma Lisière est sans danger. Même si, hrm... Ma représentation spirituelle peut être considérée comme...

Il avait marqué un certain temps de pause et d'hésitation. Pause qui avait fait arqué un sourcil à la Solaire.

Eylion: Particulière.
Kyuuji: Comment les gens se représentent-ils, en général?
Eylion: Hé bien, un Paysage Mental étant, par nature, onirique, les représentations dépendent des gens. Souvent, chacun se voit comme il est dans la réalité mais les esprits plus fantasques, spirituels ou imaginatifs engendrent des représentations, hm... "Différentes". J'avais déjà croisé quelqu'un qui se représentait sous la forme d'une sorte d'élémentaire de feu imaginaire par exemple.
Kyuuji: Oh... d'accord...
Wiloh : Tu as l'air d'en avoir fait de nombreuses fois...
Eylion: C'est l'un de mes outils, avait-il opiné en hochant la tête. Dans mon Domaine, très souvent, la Magie a cette mauvaise tendance à influencer les Esprits. Possessions, troubles de la mémoire, souvenirs déformés...
Wiloh: Comment ça...? avait-elle demandé en fronçant les sourcils.
Eylion: Hé bien, par exemple, je peux utiliser un Refuge Mental pour m'adresser directement à la créature qui possède mon patient. Dans un cas de figure, j'ai permis à un hôte et à son démon de communiquer ensemble en liant leurs Esprits via le Refuge, ce qu'ils ne pouvaient pas faire dans des conditions normales. Dans le cadre d'un trouble de la mémoire, je peux tenter d'explorer le Paysage à la recherche du souvenir enterré.

Elle avait dressé des oreilles, l'air aussi impressionnée qu'étonnée.

Eylion: Les usages sont vastes, pour peu qu'on sache comment l'utiliser.

Kyuuji avait glissé un regard vers J'reya à la mention de la mémoire. Celle-ci avait alors détourné son regard à l'évocation du sujet. Le Prêtre avait esquissé un sourire peiné, baissant les yeux un instant pour les reposer sur Eylion et ses explications.

J'reya: ...
Eylion: Quand l'usage est risqué, dans le cadre d'une exploration, c'est au choix du patient d'accepter ou non, une fois que je présente tous les risques. Ici, je peux vous le proposer car je sais que c'est pour un usage limité. Et que je sais qu'Elianh était importante pour vous.

Wiloh avait abaissé légèrement ses oreilles en hochant la tête doucement.

Eylion: Je peux rester encore un peu mais vu l'heure tardive, je ne voudrais pas être un frein au sommeil de tous.

Le Prêtre avait approuvé avant de raccompagner J'reya à Opale, après quelques échanges de politesse et d'encouragement. Une fois seuls, le Mage avait invité sa patiente à trouver un endroit confortable où s'allonger. Elle l'avait conduit dans sa chambre où elle avait pu retrouver son lit, soulagée même si inquiète par rapport à la magie à laquelle elle allait être confrontée. De son côté, il avait préféré le sol non loin, s'installant de façon à éviter une chute douloureuse une fois le sortilège lancé.

Il avait pu ensuite incanter, sa Voix prenant en volume et profondeur. L'incantation était bien plus complexe que celle de ses sorts habituels. Les pages s'étaient tournées sous l'impulsion de sa Volonté pour s'arrêter sur celle du Refuge Mental, les symboles s'illuminant, l'air s’appesantissant sous l'effet du phénomène complexe en œuvre. Il n'avait pas fallu longtemps avant que l'Esprit de Wiloh ne lui échappa, la Solaire sombrant dans un profond sommeil, tout comme le Mage. Tout d'abord, il y avait eu... l'Obscurité.

Puis, elle s'était éveillée dans son propre Paysage Mental qui s'apparentait au Thanalan Oriental. Surprise, elle avait exploré les lieux avant de découvrir un précipice donnant sur une mer infinie d'étoiles. Elle avait hésité face à ce phénomène. En observant les alentours, elle avait fini par apercevoir un cristal corrompu qu'elle poussa vers le vide inconnu. Le cristal avait alors chuté au ralenti avant de disparaître au sein de la mer comme s'il avait traversé une sorte de membrane.

À cette vue, elle s'était décidée à suivre le même chemin, se lançant à son tour. Tout comme Empty avant elle, son monde s'était renversé et le ciel nocturne s'était étendu au-dessus d'elle. Elle avait pu découvrir la Lisière du Refuge Mental du Mage, l'esplanade d'une étrange structure aux allures d'Académie. En se relevant, les quatre incarnations d'Eylion l'avaient alors accueilli: l'Adulte, l'Adolescent, l'Enfant et la Carcasse.

Cependant, les épreuves récentes avaient assombri les lieux. La luminosité enchantée avait laissé place à une pénombre tamisée. Au lieu d'avoir son éternel sourire d'un cynisme acide aux lèvres, l'Adolescent avait été des plus moroses. Des ruisseaux de larmes infinis étaient apparus sur les joues de l'Enfant et l'Adulte avait été plus austère que jamais.

Quant à Wiloh, sa représentation avait celle d'une majestueuse Cœurl enceinte, à la fourrure d'un noir dense. Son cristal de barde avait lui d'une lueur verte tout comme ses yeux, un regard perçant qui s'était intéressé à ses environs, sa tête bougeant en conséquence. L'Adolescent avait soupiré à cette vue.

Adolescent: Et il a fallu que notre seconde visite soit "elle"... Génial...

À cette remarque, la Cœurl s'était assise sur son séant et avait avisé l'Adolescent en inclinant la tête sur le côté, intriguée. L'Enfant avait alors pris la parole en reniflant.

Enfant: C'est Lui qui l'a invité...
Adulte: Elle est là pour les souvenirs de sa bien-aimée... avait lancé l'Adulte en soupirant à son tour.

Il s'était alors retourné pour baisser les yeux sur l'Enfant.

Adulte: Peux-tu aller les chercher?

Wiloh était restée silencieuse à cet échange, soufflant toutefois du nez. Son regard avait suivi lentement chaque interlocuteur.

Enfant: Oui...

Le petit Miqo'te avait offert à la Cœurl un sourire navré, accentué par le flot continu de ses larmes. Puis il était parti vers le portique lumineux au-dessus duquel l'Adolescent était juché.

Adolescent: Vu comment on est parti, de toutes façons... avait-dit avec une grimace aussi morose que dénigrante. Une emmerde de plus, ou de moins...
Enfant: Ne lui dis pas du mal, d'accord? lui avait-il lancé en levant la tête, au seuil du portique.

L'Adolescent avait haussé les épaules avec une grimace avant de détourner le regard.

Adolescent: Comme si j'avais les Pensées pour ça...

L'Enfant avait froncé des sourcils avant de regarder de nouveau devant lui. Il n'avait pas tardé à s'avancer et disparaître dans la luminosité aveuglante du portique. Son départ avait fait baisser les oreilles de Wiloh, qui s'était ensuite intéressée à l'Adolescent, se levant pour aller le renifler sans gêne.

Adolescent: Hé...! avait-il beuglé en reculant son buste instinctivement tout en levant son bras. Je te renifle, moi?!

Elle avait senti une multitude d'odeurs complexes. Cynisme, Amertume, Ego, Fierté. Puis elle s'était contentée de souffler sur ce dernier par les nasaux en guise de réponse. Après un grognement de la part de l'Adolescent, elle s'en était allée vers l'Adulte pour le renifler à son tour. Austérité, Droiture, Jugement et Douleur, voilà ce qu'elle avait pu sentir sur lui.

Adulte: Je vous ignorai si curieuse, avait-il dit, quant à lui, sobrement en haussant un sourcil.

Sans un mot, elle s'était éloignée pour s'approcher de la Carcasse. Cette fois, elle avait pu sentir une multitude d'odeurs, extrêmement riches et complexes. Fierté, Droiture, Cynisme, Espoir, Désespoir, Blessures, Ego, Rage, il y en avait tant qu'il lui avait été difficile de toutes les décrypter. La Carcasse n'avait pas bronché, toujours aussi "inamovible", "écorchée", sa chair à vif laissant égoutter quelques gouttes de sang qui s'évaporaient au sol après un moment.

Malgré son aspect des plus repoussants, Wiloh avait fait une petite léchouille comme pour tenter de le soigner avant de s'écarter pour ne pas déranger davantage. Puis elle avait constaté les regards de mépris que l'Adulte et l'Adolescent lançaient à la Carcasse de temps à autre. C'était à ce moment que l'Enfant était revenu, une sphère de lumière dorée entre ses mains. Il avait accouru vers la Cœurl, trébuchant au passage dans sa précipitation. Toutefois, il s'était relevé bravement et avait repris sa route, tendant la sphère une fois à portée. Il avait esquissé un sourire se voulant chaleureux, un effet gâché par les larmes qui coulaient en continu sur ses joues.

Enfant: Tiens...!

Elle avait posé sa tête sur le dessus de la sienne en signe de remerciement. Elle avait ensuite ouvert sa gueule pour attraper la sphère. Dès que celle-ci avait touché ses crocs, elle s'était fondue en elle. Elle avait pu alors avoir toutes les visions qu'Eylion avait pu être témoin. Elle avait pu également ressentir les émotions du Mage, profondément touché par cette histoire, ainsi que ses intentions. Intentions qui avaient été que si ces visions étaient réellement l'héritage d'Elianh alors Wiloh se devait de les avoir même s'il y avait toujours la possibilité que ce soit un piège. Mais si ce n'en était pas un, le Mage ne prendrait pas le risque de refuser à la Solaire de tels fragments de la personne qu'elle aimait, ne sachant que trop bien ce qu'était la Perte d'un être cher.

Elle s'était effondrée face aux visions. Son cristal avait vibré au rythme des messages, diffusant l'entière afflux de ses émotions. Joie, Culpabilité, Honte, Tristesse, Rage, Incompréhension, Amour s'y étaient mêlés. Elle avait tremblé. Elle avait souffert mais elle avait fini par se relever.

À cette vue, l'Enfant lui avait donné un câlin.

Enfant: Tout va bien se passer...

De retour à elle-même, bouleversée, elle avait remercié l'Enfant d'une petite léchouille sur sa joue mouillée, léchouille qui avait arraché un petit rire discret à celui-ci, malgré les larmes.

Adolescent: Oh pitié... avait-il lancé, grimaçant, à la scène.
Enfant: On trouvera le fin mot de l'affaire et moi, j'espère qu'on trouvera Elianh ou... Heu... qu'au moins, tu puisses l'honorer.

Wiloh avait été attendrie par la Candeur de l'Enfant, hochant lentement la tête à ses dires.

Adulte: Quelque soit le danger sur le chemin, avait-il amorcé, toujours aussi Austère. La Prudence devra rester le mot d'ordre. Il n'y a pas qu'une seule vie en Jeu.
Enfant: Moi, je crois que c'est Elianh, ça ne peut être qu'elle...!

Elle les avait écouté se contredire, surprise d'autant de pensées contradictoires.

Adolescent: Oui, c'est ça, remue le couteau dans la plaie, avait-il émis, grinçant.

Les oreilles de l'Enfant s'étaient abaissées à la remarque.

Enfant: Ce... n'est pas mon but... avait-il dit contrit.

Il s'était tourné vers la concernée, ses poings menus levés.

Enfant: Je te promets que je ne veux pas que tu ais encore mal avec tous ces souvenirs. Moi, je veux que tout se passe bien et on sera tous là, forts! Pour toi, pour Elianh et pour le bébé!

La déclamation avait eu le don de faire rouler des yeux à l'Adolescent.

Adolescent: Je peux le tuer...? avait-il "demandé" à l'Adulte.
Adulte: Non, avait-il tonné en retour, ferme.

La menace avait fait immédiatement réagir Wiloh, celle-ci montrant les crocs vis à vis de l'Adolescent.

Adolescent: Mais c'est qu'elle mordrait presque, avait-il répliqué à cette vue, muni d'un sourire Cynique et d'un ton infantilisant.
Enfant: Arrête, je t'avais dit de pas dire du mal...!

Le concerné avait ignoré la remarque, se contentant de rouler sa main dans un geste théâtral.

Adolescent: Maintenant qu'elle a ce qu'elle veut, elle pourrait peut-être... déguerpir d'ici? Je crois qu'on est complet sur la barque de la morosité partagée.

Elle avait soufflé du museau avant de pencher la tête, perplexe. L'Enfant, de son côté, avait abaissé davantage ses oreilles.

Enfant: Désolé... C'est vrai que... Ce n'est pas trop la joie ici... Et je suis désolé pour ce qu'il dit... C'est pas ce qu'on pense, promis... avait-il fait en donnant un autre câlin à Wiloh.

La Cœurl avait posé sa tête sur la sienne pour la tapoter gentiment, comme pour l'excuser. Au tapotement, l'Enfant avait émis un petit "hm!" mignon, ses oreilles tressaillant.

Adolescent: C'est ça, parce que "toi", tu as le pouvoir de renier une partie de Nous? avait-il aussitôt lancé, bassement. S'il te plaît, évite de me faire rire...
Enfant: C'est pas ce que je voulais dire! T'as pas besoin d'être aussi méchant!
Adolescent: Pour notre bien à Tous, encore heureux, oui, que j'en sois capable.

Cette fois, elle s'était levé pour s'approcher de ce dernier.

Adolescent: Woh, oh, oh, la Bête, toi, tu ne t'approches pas de moi, d'accord? avait-il grogné en retour.

Elle avait continué jusqu'à ce que son museau touche son torse, le défiant d'une légère poussée. L'intéressé s'était aussitôt relevé sur son perchoir, l'air mauvais.

Adolescent: C'est quoi ça, une menace?
Adulte: ... Il serait bon de garder ces Lieux un tant soit peu dans son précaire Équilibre, était-il alors intervenu, l'air toujours composé.

Wiloh avait tourné la tête vers lui avant de finir par la hocher après un moment.

Adolescent: Tch, typique, ce ne serait pas la première fois qu'elle essayerait de Nous buter.

L'Enfant avait eu un faible sourire avant de s'approcher pour poser sa main sur le flanc de la Cœurl.

Enfant: Tout va bien...

Il s'était ensuite adressé à l'Adolescent.

Enfant: Ce n'est pas son intention.
Adolescent: Qu'est-ce que tu en sais, naïf que tu es? avait-il répliqué en croisant les bras.

À cette remarque, Wiloh avait grogné légèrement avant de regarder avec une tendresse maternelle l'Enfant.

Enfant: Parce que je lui fais confiance, avait-il affirmé avec aplomb.

Elle avait alors redressé la tête, surprise.

Adolescent: Ah, avait-il fait en esquissant un autre sourire Cynique. Tu ferais confiance à la Terre Entière. Encore heureux que je sois là quand la Réalité le rattrape.
Enfant: Tout le monde a un bon fond, c'est toi qui n'arrive pas à le voir!
Adolescent: Oh, et qu'est-ce que ça nous a apporté, tu peux me le dire...? Est-ce que je dois te rappeler ce que Nitrisch...
Adulte: SON NOM ne sera pas prononcé ici! avait-il tonné.

La Cœurl avait eu un sursaut au haussement de voix. Ses moustaches électriques s'étaient embrasées brièvement sous l'effet de la surprise. L'Enfant, lui, avait hoqueté. Un silence pesant s'était installé, puis Wiloh était repartie. Le silence s'était poursuivi à leurs deux réveils. Le Mage avait toujours haï le fait d'exposer cette partie de lui et il ne s'était donc pas attardé auprès de la Solaire. Après quelques salutations, il avait quitté la maison et repris le chemin du retour, sous une pluie nocturne.

Le ruissellement épais avait semblé résonner en écho avec son état. Peu avant la troisième expédition, il était allé faire sa confrontation vis à vis de Solid. Suite à sa Perte, il était resté chez lui pour se plonger entièrement dans ses recherches. Tout était bon pour ne pas penser. Pour ne pas avoir à faire de Rétrospection à nouveau. Il avait ainsi accueilli avec soulagement la nouvelle d'une piste pour la Tour.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 24 juin 2019, 18:48

Image
Wiloh: Je crois que j'ai compris ce que disait Elianh quand elle disait que son apprentissage me permettrait de la retrouver.

Au sein de la maison, le groupe s'était réuni. Eylion, de son côté, avait ignoré les regards inquiets de Kyuuji posés sur lui. Au moment des faits, ça faisait des jours qu'il n'avait donné aucune nouvelle à ses proches.

Eylion: Racontez nous, avait-il demandé sobrement en prenant place.
Wiloh: ... Je me suis remémorée tout ce dont elle m'avait laissé... La boîte à musique avec sa clé cachée, la boîte puzzle avec le cristal barde, la broche papillon avec un message caché, la plante chantante... Tout ça, nous le faisions sous forme de jeux lorsque nous étions enfants.

Il avait écouté avec attention tout en croisant les bras, pendant que le Raen avait opiné de son côté.

Wiloh: Alors, j'ai enquêté par rapport au message dans le chant de la fleur... Et cette histoire de Tour de Cristal. Ou Tour de Verre, peu importe.
Kyuuji: Qu'avez vous trouvé?
Wiloh: Elle et moi avions composé une musique toutes les deux... Moi en musique, elle en chant, elle avait mentionné dans ses paroles cette Tour de Verre. J'ai réécrit les paroles qu'elle avait inventé sur papier, et je me suis creusée les méninges jusqu'à ce que je trouve quelque chose.
"Dans mon Jardin Secret, dans mes Rêves,
Il n'y a de limite ni dans l'Espace, ni dans le Temps,
Où vivent en harmonie deux cœurs entre qui brûle un amour incandescent,
Ni même l'Union de la Lune et du Soleil dans une éternelle lumière qui s'élève,
Ni même un énième Fléau,
Ne sauront séparer le tintement de l’Écho,
Qui résonne et résonne de l'Aube au Crépuscule,
Autant que vivra cette Ode aux Cieux.
Seule cette incroyable Tour de Verre pourrait atteindre les Dieux,
Et leur prouver que pour notre Amour, dans une Dernière Prière, nous n'emploierons aucun Recul."
Wiloh: J'ai lu le texte de façon verticale et non horizontale, et j'ai trouvé où se trouve cette Tour.
Kyuuji: Oh, bravo.
Wiloh: Merci.
Eylion: Qu'en est-il, du coup? Qu'avez-vous... découvert vis à vis de cette Tour?
Wiloh: Je n'ai pas de localisation exacte, comme pour cette fleur qui chante, alors je suppose que mon cristal barde agira de la même façon? Cette Tour aurait une épreuve en son sein pour atteindre son toit et les étoiles. C'est en résumé ce qu'elle chantait.
Eylion: Vous avez, au moins, une zone...? avait-il demandé en acquiesçant.
Wiloh: Cela se situe dans le Thanalan.
Eylion: Hm, le Thanalan... Dans le désert?
Kyuuji: Je ne connais pas aussi bien le Thanalan que Sombrelinceuil... Une tour... avait-il émis, songeur.

Les traits de la Solaire s'étaient durcis à une pensée.

Wiloh: Pas exactement... Je pense savoir où cela peut se situer.
Kyuuji: Oh?
Wiloh: Je connais bien le Thanalan, j'y suis née. Et je pense que c'est dans le Thanalan Oriental plus précisément que cela doit se trouver. C'est un endroit riche en souvenirs pour nous deux...
Eylion: ... J'ai vécu à Ul'dah de mon côté mais... Je ne connais pas vraiment le désert.
Wiloh: J'ai vécu dans le désert avec ma Tribu natale.

Le Lunaire s'en était bien souvenu. Lui et un autre groupe s'étaient battus pour la tirer des mains de son Nunh discutable.

Eylion: Hm, je me souviens de celle-ci... Si on a au moins une piste, ça nous évitera d'arpenter de trop le désert. Malheureusement, J'reya a eu un empêchement avec Rhian.

Ce qu'il n'avait pas dit, c'était que J'reya avait dû le remplacer pour sauver le libertin des "griffes" d'une de ses amantes.

L'endroit ciblé, le trio s'était mis en route vers le désert du Thanalan. Le voyage, long, n'avait pas été sans danger, quand ils avaient dû passer à proximité d'un camp d'Amalj'aas. Cependant, Kyuuji et Eylion étaient parvenus à s'accorder pour endormir chacun un des gardes qui surveillaient la route qu'ils devaient emprunter. Les gardes neutralisés, chacun avait essayé de passer discrètement de l'autre côté. Wiloh y était parvenue sans difficulté. Kyuuji avait pu également la rejoindre. Mais au tour du Mage, un autre garde était arrivé et l'avait soudainement pris au dépourvu.

Les deux hommes, dans une action réflexe combinée, avaient pu lancer leurs sortilèges et endormir la sentinelle avant qu'elle n'ait pu donner l'alerte.

Le reste du chemin s'était fait sans encombre et ils étaient arrivés près de l'endroit indiqué, à bord de falaise. Ils s'étaient aussitôt mis en quête d'un quelconque indice. Wiloh et Kyuuji avaient fini par trouver, chacun de leur côté, des éléments. Kyuuji avait pu trouver une boîte, Wiloh un trou en forme de serrure derrière. Après quelques recherches, la Solaire avait pu déterminer que la boîte trouvée était une boîte puzzle comme celles qu'Elianh lui avait déjà confié. Sur les côtés, le groupe avait pu remarquer divers symboles: une Lune, une Tour, une Femme, et un Œil.

La mise en valeur de ces derniers avait engendré une multitude d'hypothèses. Sans moyen pour les vérifier, Wiloh s'était attelée à résoudre l'énigme de l'objet. Il lui avait fallu un peu de temps mais elle avait fini par entendre le déclic indiquant qu'elle était arrivée au bout de ses peines.

Elle avait pu extirper du coffret un pendentif en forme de croissant de Lune avec un cœur en Saphir ou en Cristal, accompagné d'une clé finement ciselée, aux allures de papillon. Ils avaient utilisé la clé sur la serrure, faisant apparaître un escalier qui descendait le long de la falaise. En bas, le groupe avait découvert un chemin bordé de champignons luminescents, au sein d'une immense grotte. Au bout du chemin, une Tour de verre imposante dépassait de loin le plafond ouvert, perçant le ciel de sa silhouette.

Il leur avait fallu résoudre une autre énigme pour y entrer, celle des double portes de l'endroit. Les symboles du coffret avaient pris tout leur sens face aux plaques des portes à déplacer, porteuses des mêmes dessins. Après plusieurs essais infructueux, Wiloh avait pu comprendre que l'ordre était plus simple qu'il n'y paraissait: du plus petit au plus grand et qu'il fallait insérer le pendentif pour compléter le motif de la Lune.

Les portes ouvertes, une fois à l'intérieur, ils avaient dû monter un long escalier en colimaçon, une épreuve certaine pour une femme à la grossesse aussi avancée que celle de Wiloh. Les deux hommes s'étaient adaptés à sa vitesse de montée, faisant des pauses au besoin. Ils étaient finalement parvenus jusqu'à une grande salle où une statue géante de cuivre les attendait, sous forme de Louve entourée de deux piliers munis de deux cubes de pierre en lévitation.

La Solaire avait immédiatement compris le principe, tiré des jeux qu'elle et Elianh faisaient avant la tragédie. La pièce était basée sur les règles de "1, 2, 3, Soleil" avec quelques différences. Les dalles qui séparaient le groupe de l'autre bord portaient toutes un chiffre. Il y avait deux phases. La première consistait à s'arrêter sur le chiffre indiqué par les dés au moment où la Louvre ouvrait les yeux. La seconde fonctionnait de la même façon mais il fallait toucher et s'immobiliser sur deux chiffres différents, ce qui pouvait obliger à quelques acrobaties.

Il n'y avait pas vraiment eu de doute sur le fait que la statue était enchantée de façon à "punir" ceux qui n'y parvenaient pas. Au vu de son aspect menaçant, aucun membre du trio n'avait été rassuré sur les conséquences possibles d'un échec. Après discussion, Wiloh avait été la première à se lancer, le Mage prêt à incanter en cas de besoin pour la protéger. Malgré son état, l'archère était parvenue de l'autre côté sans trop de complications.

Eylion avait été le second à passer. Pour l'ancien Roublard, l'épreuve avait été un "jeu d'enfant" malgré le fait que son âme avait été absente. Il s'était laissé guidé par son instinct, ses gestes aussi agiles qu'ils avaient été rigides de par le vide de son Deuil. Kyuuji, enfin, s'était avancé, une fois le champ libre. Le Prêtre avait eu plus de mal à aller d'un chiffre à l'autre jusqu'à ce qu'il ne trébuche à la toute fin.

La sentence s'était faite immédiate, la statue se mouvant pour lui lancer un sort de foudre. À cette vue, le Mage, prompt, avait étendu sa main dans les airs, sa voix tonnant le Verbe nécessaire pour plier le Vent à sa Volonté. Son élément de prédilection avait pu saisir à temps le Raen et l'amener auprès d'eux, en sûreté.

La frayeur passée, ils avaient continué leur route et monté un autre escalier en colimaçon. Ils avaient débarqué sur le toit, dans un grand jardin au sol tapissé d'eau. Des arbres fleuris montaient vers un ciel étoilé et une Lune, pleine, donnait aux lieux un aspect féérique. Devant eux, au fond, ils avaient pu apercevoir un miroir trônant sur un pilier. De celui-ci, une silhouette s'en était dégagée, à l'apparence d'Elianh.

Eylion: Est-ce qu'elle... nous voit?

L'apparition avait regardé chaque personne tour à tour avant d'entendre Eylion et de froncer les sourcils.

Elianh: Tu étais là toi aussi...
Eylion: ...! Ça veut dire que, durant ces visions... Vous me voyez? avait-il demandé pour situer un peu les connaissances de l'apparition.
Wiloh: Tu entends aussi sa voix?
Eylion: Oui... Et je ressens aussi son énergie... Ça ne ressemble pas à la chose qui vous parasitait.

La nouvelle avait tétanisé la Solaire pendant que l'adolescente éthérée s'était faite plus pensive en observant le groupe.

Elianh: Je ne t'ai vu que lorsque tu étais avec moi devant Hydaelyn, confrère Lunaire, avait-elle fini par dire en souriant.
Eylion: ... La Mer d'Éther... ... Dans ce cas, si vous êtes la véritable Elianh, je suppose que vous pouvez donner à Wiloh une anecdote que vous seules connaissaient?

Elle avait eu un léger rire à la question.

Elianh: Évidemment, Wiloh a tatoué sur sa jambe droite une œuvre pour me soutenir dans mon handicap. Je me trompe? avait-elle émis en regardant l'archère.
Wiloh: N-Non, tu... Tu es réelle...

Sous le choc, la Solaire avait tendu les mains vers Elianh. Cette dernière avait ri doucement en acquiesçant.

Elianh: Évidemment que je le suis. Tout est réalité. Mais tout n'est pas vérité. Or ici, c'est le cas, je suis vraiment réelle.

Le Mage, quant à lui, avait eu l'ombre d'un sourire peiné, à peine discernable.

Eylion: Hm... Il y a tellement de questions.

L'apparition s'était tournée vers lui, avec un sourire et des yeux plissés.

Elianh: Je n'en doute pas... Eylion le Mage. Et vous... Hm... Kyuuji, valeureux prêtre et dévoué à la Nature. Continue sur cette voie!
Eylion: ...!

Il avait froncé discrètement son sourcil unique sous la capuche.

Eylion: Comment connaissez vous nos noms...?
Elianh: N'as-tu donc pas deviné, toi qui est si perspicace de nature?
Eylion: ... Parce que nous sommes au plus proche de la Mer d'Éther, qui constitue nos Âmes respectives? s'était-il hasardé, incertain.
Kyuuji: Elle lit en nous, simplement, je pense.
Elianh: Kyuuji a trouvé la réponse! Tu n'y es pas encore toi, Eylion! avait-elle fait dans un rire.

Lire dans les Esprits? Ce type de capacité n'était clairement pas commun. Au point tel qu'il n'avait même pas voulu concevoir ou avancer ce genre d'hypothèse en premier lieu. Quel pouvoir pouvait donc...

La réponse n'avait pas tardé à venir.

L’Écho.

Il en avait déjà entendu parler mais il n'avait croisé, ou fréquenté, que très peu d'individus doté de ce don. Autant dire que le Lunaire avait été des plus mal à l'aise par rapport au fait d'être en présence d'un "fantôme" en mesure d'avoir des visions de son passé.

Après un court échange, l'apparition avait exposé ses intentions.

Elianh: Mon Devoir était d'être la voix pour Hydaelyn, comme beaucoup d'autres Porteurs de l’Écho. Mais je n'ai pas accompli ma mission... Avec la permission de Hydaelyn, je n'ai pas rejoint la Mer des Étoiles, pour pouvoir donner un héritier à ce Don, pour que ma mission inaccomplie ne soit pas vaine. Et C'Wiloh...

Elle avait posé ses mains sur le ventre arrondi, les yeux pétillants.

Elianh: Tu abrites la plus belle chose en toi, un être entièrement pur et vivant! Et je souhaiterais qu'il détienne ce Pouvoir, car je ne pourrais te le donner à toi précisément... Ton âme est déjà "occupée" par ce cristal que je t'ai offert.
Wiloh: Tu n'as jamais rien fait par hasard alors... Tu as toujours tout calculé...

Un frisson avait parcouru l'échine du Lunaire à cette déclaration.

Eylion: ... Quel est ce Devoir? avait-il demandé, méfiant.
Elianh: Apporter la Lumière en ce Monde grâce à mon Don.
Eylion: C'est très vague, avait-il dit, sourcil légèrement froncé.

Le Prêtre, quant à lui, était de dos par rapport à eux. En les entendant, il les avait regardé en plissant ses yeux, sans un mot. Il était resté, néanmoins, attentif, discret et respectueux.

Elianh: Assez oui, avait-elle fait dans un léger rire. La seule lumière que j'aurais pu apporter aura été celle pour C'Wiloh. Et je ne regrette rien.
Eylion: ... Qui a construit cet endroit?

Cette mention avait incité Kyuuji à se pencher pour ramasser un peu de terre au sol, la frottant entre ses doigts, songeur.

Elianh: Moi! Si moi, je suis bien réelle, cet endroit ne l'est pas. Il est le fruit de mon imagination et je lui ai donné une forme matérielle.
Eylion: ... La tour, la grotte, tout ç... ... Est-ce que ça a commencé quand le coffret a été ouvert?

Il avait déjà eu des soupçons dès la présence incongrue de la serrure derrière la pierre.

Elianh: Je ne sais pas? avait-elle fait, amusée.
Kyuuji: C'est pour ça qu'il est arrivé post Cartenaux alors vous ne pouviez avoir connaissance de cet endroit... vu qu'il n'existait pas encore... avait-il enchéri, songeur.
Elianh: Mais il n'existe pas Kyuuji, avait-elle dit, toujours amusée.
Kyuuji: Tant que nous y sommes si, après il n'existera plus.
Eylion: ... Malgré tout, vous ne trouvez pas que c'est discutable d'imposer un tel devoir à un nouveau-né qui n'a pas pu encore choisir pour lui-même la Voie qu'il souhaite suivre?
Kyuuji: D'autant que la Lumière... apporter la Lumière peut être un risque. L'équilibre rompu n'est pas enviable.
Elianh: C'était aussi mon cas. Hydaelyn choisit ses Porteurs et elle m'a encouragé dans cette voie, pour guider Wiloh jusqu'ici.
Eylion: Peut-être mais ici... Wiloh peut faire ce Choix, contrairement à vous. Je me trompe?

L'apparition avait exprimé de la surprise à la réplique du Mage. Elle s'était tournée vers Wiloh, cette dernière confuse.

Elianh: C'Wiloh...?
Wiloh: Je...
Eylion: C'est votre Enfant, Wiloh. Lui ne peut pas parler dès à présent... À l'inverse de vous, sa Mère.

Elianh avait eu une moue aussi enfantine que sérieuse en les regardant tour à tour.

Elianh: Je vous ai tous rendus un peu confus... Mince... C'est pas amusant ça.
Eylion: Je ne dis pas que vos intentions ne sont pas nobles mais c'est un grand pouvoir et de grandes responsabilités que vous portez au seuil d'une âme encore vierge comme vous le dites si bien.

Et ce n'était pas la seule chose qu'il "voyait". Un tel enfant serait forcément à part. "Différent". Le Lunaire ne savait que trop bien comment les gens traitent la différence. Quant au fait d'être en mesure d'avoir des visions? Il pouvait littéralement écrire une thèse sur tous les inconvénients, impacts et poids qu'une telle chose pouvait apporter. Sans parler du Devoir imposé par Hydaelyn, d'une Vie entière consacrée à prendre des risques.

Kyuuji: N'y a-t-il pas moyen de délayer votre don? Le mettre de côté le temps que l'enfant grandisse et qu'il puisse choisir sa Voie?
Elianh: Mais alors, je devrais attendre pour rejoindre la Mer Étoilée, Kyuuji...
Kyuuji: Oh... Il n'y a donc pas moyen...
Elianh: Mon âme s'affaiblit à force d'errer sans rejoindre cette Mer...

Un long débat s'en était suivi. Bien que Kyuuji avait été d'accord avec Eylion sur ce point, des désaccords étaient survenus sur leur manière de voir les choses. Le Mage était plus enclin à chercher des moyens de ramener Elianh d'entre les morts là où le Prêtre s'était fait porte-parole du cycle naturel de la vie. Eylion n'avait pas réellement insisté, respectueux du fait que ce n'était pas "ses" affaires mais celles d'Elianh et Wiloh.

Et comme il l'avait souligné à la Solaire durant la discussion.

Eylion: Écoutez... Je... Je ne suis pas le meilleur interlocuteur... Je ne suis pas doué de Raison actuellement. À votre place, je serai incapable de laisser partir Elianh par exemple. À votre place, j'aurai cherché un moyen de la ramener à la vie ou à la garder avec moi autant que possible. Ça, c'est pour ce que j'aurai fait à votre place, avait-il dit, la voix toujours éraillée. Et pour mes autres convictions, j'ai du mal à concevoir qu'on puisse imposer quelque chose à une si jeune âme.

Finalement, Elianh et Wiloh avaient décidé de tenter de transmettre le pouvoir directement à Wiloh, malgré les difficultés. L'apparition s'était rapprochée de la concernée, son pouce effleurant son front. Elle avait eu besoin du soutien du Prêtre pour l'aider à parvenir jusqu'au bout de sa tâche sans rejoindre la Mer d'Éther.

Le transfert s'était fait sans heurt mais Wiloh avait perdu à ce moment les eaux dans des grognements de douleur.

Wiloh: Huh... Aaaah, noon...
Kyuuji: Elle perd les eaux...
Eylion: ...!
Wiloh: Quoi...?! Non, non, non, non!
Eylion: Oh merde...

Ils avaient dû faire un Choix. Kyuuji avait dû rester sur place pour guider l'âme d'Elianh jusqu'à sa dernière destination, et pour retourner à la terre l'Éther utilisé pour créer l'illusion dans laquelle ils s'étaient trouvés. Eylion s'était chargé de prendre Wiloh dans ses bras et de courir pour rejoindre au plus vite la première ville.

Un trajet long, d'autant plus qu'il avait dû faire un détour pour éviter les camps Amalj'aas. Il avait manqué de tomber à plusieurs reprises durant son parcours et il avait dû poser un genou à terre à d'autres moments. Essoufflé, exténué, il s'était efforcé de continuer, tenant à la seule force de sa Hargne.

Au bout de ce périple, ils étaient parvenus jusqu'à un petit village, où le Mage avait littéralement hurlé sur le premier venu pour savoir où se trouvait le médecin des lieux. On lui avait fait comprendre que celui-ci était de sortie avant de lui indiquer une auberge où allonger Wiloh. Il s'était précipité autant qu'il le pouvait dans une chambre en allongeant la Solaire, au supplice de son état.

Eylion: Putain, me faites pas ça, tenez bon...

Elle s'était tordue de douleur, couverte de sueurs et du liquide qu'elle avait perdu. Il s'était jeté sur l'embrasure, se retenant à grande peine sur les bords.

Eylion: ... Un torchon, un récipient...! De l'eau...!

Une femme du personnel était venue lui apporter ce qu'il demandait, en panique. Il avait saisi le tout dans ses mains tremblantes avant de revenir auprès de Wiloh pour lui éponger maladroitement le front.

Eylion: Putain, putain... Quand est-ce qu'il arrive, ce médecin à la con...?!
Wiloh: Elianh... Thay... Gaaarh!!

Elle avait enserré le drap entre ses doigts, tant la douleur du pouvoir en elle et son bébé prenait place, en plus des contractions.

Eylion: Ils sont là, avec t-toi, avait-il balbutié, avec maladresse.

Il s'était autant senti à l'aise qu'un hareng hors de son étang.

Putain mais qu'est-ce que je fous là...?
...
Ce n'est pas MOI qui devrais être là!
...
Qu'est-ce que je fais si elle commence à accoucher?!


Un flot de pensées angoissées avait défilé en discontinu dans l'esprit survolté de l'infortuné Lunaire.

Wiloh: Oh bordel...
Eylion: O-Ouai, jure un bon coup, ça aide avec la douleur...

La femme du personnel était revenue.

Femme: Le médecin arrive d'ici quelques heures, il est en route...
Eylion: Des HEURES?!
Wiloh: Putain...!
Eylion: Mais... Elle va pas tenir... des heures... Ou si? Putain, je ne m'y connais rien...!
Femme: Je suis navrée, il y a des complications sur la route...!
Eylion: Mais, mais, mais...

L'angoisse s'était muée en panique totale.

Eylion: Qu'est-ce qu'il faut... Erh, Wiloh, tu m'entends...?
Wiloh: Je t'entends ouais... avait-elle péniblement dit, essoufflée. Je crois que les contractions peuvent durer des heures... Je tiendrais au piiiIIIIIIIIIIIIIIIIIIRE! AAAAH PUTAIN!
Eylion: ...!!

Les oreilles du Lunaire s'étaient dressées au cri.

Eylion: Erh, alors, déjà, il faudrait dégrafer un peu ton col pour pouvoir respirer...

La Solaire avait essayé de faire de son mieux pour rester éveillée malgré sa fatigue, manquant de s'endormir avant de se reprendre dans des sursauts. Le Mage, lui, avait dû retirer la capuche de sa coule, couvert de sueurs froides face à cette situation totalement inconnue pour lui.

Wiloh: O-Ouais... Si je me souviens de l'accouchement de mon amie, plus le temps entre les contractions sont proches, plus le bébé est proche d'arriver...

Elle avait essayé d'enlever son poncho. Le Lunaire, lui, n'avait clairement pas osé la toucher d'une quelconque façon.

Eylion: Et, errrhh... Elles sont proches là comment...? Et tu as... Erh, besoin d'aide...? avait-il fini par demander en la voyant galérer.
Wiloh: Ouais, je veux bien...

Il avait tâché de l'aider de son mieux, toujours avec maladresse.

Wiloh: Je dois compter combien de temps entre, mais je dirais environ 8 minutes... Je sais pas, c'pas moi l'arcaniste pro des maths ici...
Eylion: ... Je ne connais AUCUNE FORMULE qui enseigne le temps de CONTRACTION d'une femme ENCEINTE! s'était-il écrié, sa voix toujours éraillée, en panique, à la limite de l'étranglement.
Wiloh: DES MATHS, C'EST DES MATHS, C'PAS MOI l'INTELLO ICI! ALORS CALCULE. S'il te plaît. Hmpf.

Ils étaient parvenus à la dégager de son poncho mais Eylion avait beau tenter de réfléchir, son cerveau ne lui répondait pas. Un appel inattendu sur sa perle l'avait alors fait sursauter.

Eylion: QUOI?!

La voix de J'reya avait retenti de l'autre côté.

J'reya: Wow! Calme toi! Je voulais juste savoir si ça allait bien pour vous.
Eylion: Non, ça ne va PAS, Wiloh VA ACCOUCHER alors si tu connais, BORDEL, un moyen de TÉLÉPORTER un PUTAIN de médecin, je t'en serai reconnaissant à VIE!!!

Wiloh, au supplice, avait repris son poncho pour pouvoir mordre dedans tant la douleur avait été insupportable.

Wiloh: Punaise, c'était pas aussi rapide dès qu'elle a perdu les eaux, Xynia!
Eylion: Oh, non, oh non, non, non, avait-il fait en l'entendant.
J'reya: Je, euh... Je peux pas faire mieux que de vous rejoindre moi. Où vous êtes?
Wiloh: Roh c'est bon, C'EST PAS TOI QUI A MAL LÀ!

Il avait aboyé les cordonnées approximatives avant de raccrocher brutalement, puis de répliquer à Wiloh.

Eylion: Oui mais, bordel, je ne suis pas médecin moi!
Wiloh: BAH JE VOIS ÇA! avait-elle grogné.
Eylion: Putain, je... Alors, erh, il faut que tu sois, erh, calme... Oui, au calme, ça ralentira les choses...

Elle avait inspiré et expiré difficilement, les mains sur son ventre, le visage rouge sous la difficulté physique.

Wiloh: J'essaie de rester calme, mais comment l'être quand tu l'es pas? Bordel bébé, fallait que tu sortes n'importe quand et n'importe où avec n'importe qui, sérieux...

Il avait essayé de reprendre sa respiration de même, malgré son anxiété. Bien que tenté d'aboyer sur la Solaire, il s'était contenu de son mieux.

Eylion: ... Il y a quelque chose que je peux, erh, faire pour que tu sois, erh, plus confortable...?
Wiloh: Merci, Eylion, de garder ton calme.

Elle avait caressé ensuite son ventre.

Wiloh: Je veux bien un coussin en plus et que tu m'aides à me redresser un peu, je suis trop plate sur le lit là...
Eylion: Un, erh, coussin, oui... Tout de suite...!

Il s'était précipité volontiers vers la sortie, manquant de se heurter à J'reya qui était arrivée entretemps.

J'reya: Salut...? J'ai fait aussi vite que j'ai... pu, avait-elle dit, essoufflée.
Eylion: Vite, il faut un coussin...!

Étonnée, elle l'avait laissé sortir avant de regarder Wiloh, toujours à l'agonie.

Wiloh: Gnraaaaah!! avait-elle émis en se tordant à une nouvelle contraction. Je vais mourir...
J'reya: Ça, euh... Ça va...?
Wiloh: J'ai l'air d'ALLER BIEN?! avait-elle vociféré.

La combattante avait progressivement compris l'état du Mage, elle-même n'ayant jamais traversé ce genre de situation.

J'reya: C... C'est pas un bon plan de mourir dans ce genre de moment! Qu'est-ce que je peux faire pour aider?
Wiloh: J'en sais rien du tout, c'est mon premier bébé, je sais pas comment ça s'accouche!!

Eylion était revenu, "armé" de deux coussins. Il avait aidé la Solaire à se redresser pour pouvoir les installer derrière elle, même s'il l'avait fait du bout des doigts, comme si elle avait été en feu.

Eylion: Erh, n-non, ne dis pas ça...! T-tout va bien se passer!
Wiloh: Toi-même, t'as l'air d'en douter!

Il avait jeté un regard désespéré à J'reya.

Eylion: J'reya, tu sais comment faire...? avait-il balbutié.

Il avait presque manqué de hurler: "Tuesunefemmetusaisforcémentquoifaire!!". Heureusement, son instinct de survie l'avait arrêté à temps.

J'reya: Bah euuuh... Ça sort par là, y'a pas trente six façons!

Wiloh, elle, avait laissé sa tête lentement retomber sur l'oreiller, sa conscience lui échappant sous l'effet de la douleur intense et de l'épuisement. Le Mage lui avait aussitôt tapoté doucement la joue à cette vue.

Eylion: ...! N-non, non, non, non... Reste avec nous...!
Wiloh: Hmm... avait-elle émis en rouvrant les yeux.
Eylion: Il n'y pas le choix, J'reya, tu DOIS aller voir, erh... l-là dessous...
J'reya: Évidemment... Et merde! Eylion, tiens-la éveillée comme tu peux, hurle, je sais pas!

J'reya avait retroussé ses manches avant de grimper sur le lit et de s'installer en tant que "sage femme d'urgence".

Eylion: Je ne veux pas la stresser, bordel...!
Wiloh: Qu... Putain, bébé, tu commences bien ta vie, merde...
J'reya: Tu crois que le stress, c'est le pire truc qui peut lui arriver, là?

Elle avait pris son courage à deux mains pour regarder ce qui se passait pendant que le Mage aidait Wiloh à se redresser comme il le pouvait.

Wiloh: Tu regardes quoi là...?

J'reya se l'était demandé elle-même sur le coup.

J'reya: Je... Je sais pas? Si le bébé sort? Un truc? N'importe?

Puis, après un instant de latence...

J'reya: Oh. Oooooh.
Wiloh: Quoi, oooooOOOOOOOOOH, PUTAIN!

Elle s'était cambrée de douleur, serrant son poncho entre ses mains.

Eylion: Q-Quoi, "ooh"? C'est q-quoi "Ooh"? Parle Eorzéen, putain!
Wiloh: A-Aaaah, c'était plus proche cette contraction-làààààààà! avait-elle grincé entre ses dents avant de reprendre ses exercices de respiration.

La combattante n'avait pas répondu de suite, ses yeux plissés pour essayer de mieux voir. Elle avait ensuite balbutié des choses incompréhensibles qui s'étaient mués en un...

J'reya: C'est pour... Là maintenant, je crois...! Genre LÀ.
Wiloh: La vache, il force pour sortir, je le sens!
Eylion: Ç-ça... sort, là, vraiment?!
J'reya: Bah euuuh... Je sais pas... Poussez?!
Wiloh: ... Ghn... Okay...

Elle avait inspiré et expiré, se concentrant pour pouvoir contracter et forcer à la pousse.

Eylion: Erh, v-va y, Wiloh, tu... tu peux le faire...

Le Mage avait été d'une utilité remarquable. Pendant ce temps, Wiloh avait tâché de pousser de toutes ses forces, son aura devenant oppressante au fil de l'effort.

Eylion: O-oh putain, c'est... normal ça?
Wiloh: C'est trop dur...
J'reya: J'en sais rien, j'ai l'air d'avoir accouché?! ... Ça... Ça avance... Faut pas relâcher maintenant, Wiloh! Tenez le coup!
Eylion: M-mais si, il f-faut pousser, Wiloh, il faut p-pousser comme erh...
Wiloh: Okay, je vais essayer. PAS DE COMPARAISON, EYLION, C'EST GÊNANT.

Il s'était abstenu, fort heureusement.

Eylion: Non m-mais t-tu peux le faire, hein... P-pense à... ...

Oui, à qui...? Allait-il mentionner Elianh ou bien Thay?

Eylion: À un truc q-qui te plaît bien!
J'reya: PENSE À TON BÉBÉ ET POUSSE!!!
Wiloh: Merci! avait-elle lancé à la suite de J'reya en soupirant.

Elle avait repris ses efforts pour pousser, essayant de retenir ses cris et ses larmes au début avant de se laisser aller.

Eylion: O-oui, ton bébé!

Il avait alors vu que son aura augmenter en volume tandis que J'reya l'avait fusillé brièvement du regard.

Eylion: Oh bordel... Son aura...
Wiloh: C'est Elianh et son pouvoir...!! GAAAAAH!!
Eylion: Tu l-le vois, J'reya?
J'reya: Y... Y'a la tête. Continuez Wiloh, c'est parfait!
Eylion: Putain, il ne faudrait pas qu'il déconne ce pouvoir...!

Wiloh avait bien essayé de poursuivre mais ses forces l'avaient abandonné, ses oreilles et son corps s'affaissant.

Eylion: N-non, Wiloh...!
Wiloh: J'ai pas l'habitude d'avoir de la magie dans mon corps aussi... avait-elle souligné d'une voix faiblarde.
J'reya: Wiloh, s'il vous plaît. Encore une fois. Il est presque là, c'est pas le moment! avait-elle dit en levant la tête, aussi inquiète que sérieuse.
Wiloh: Je suis fatiguée là...
J'reya: Vous dormirez quand ce sera fini!
Eylion: Hm... J'ai...

Il lui avait tapoté à nouveau la joue, l'autre main venant chercher son grimoire.

J'reya: Tu peux pas faire un truc, toi? La magie, c'est TON domaine!
Wiloh: Il fait combien de yalms, ce bébé...? avait-elle fait en se réveillant grâce aux petites tapes, reprenant son souffle.

Le grimoire déposé sur le lit, il l'avait ouvert avant d'incanter, la page s'illuminant sous l'incantation éraillée du Mage. Sa main s'était imprégnée de son propre Éther qu'il avait tâché de transmettre à Wiloh en la plaçant au-dessus de son cœur.

Eylion: Ç-ça va, je lui transfère de quoi tenir! avait-il balbutié péniblement, lui-même à bout de forces. J'espère juste qu'il n-ne va pas tarder, je ne tiendrai pas éternellement...!

La Solaire l'avait regardé, reconnaissante. Encouragée, elle avait repris son effort jusqu'au bout, jusqu'à pousser un long cri de douleur fébrile.

J'reya: Il est PRESQUE là!
Eylion: J-je ne sais pas, tire le un peu pour aider?

Sous la suggestion, elle avait tenté de le faire même si elle avait craint de lui faire mal. Elle était parvenue à le sortir après quelques manœuvres maladroites.

Eylion: Ç-ca va, J'reya?
J'reya: Oh, ça y est!

Elle avait réajusté le petit être ensanglanté dans ses bras de son mieux.

Eylion: D-dis moi qu'il est sorti...!
J'reya: C'est bon!

Il avait pu arrêter son sort et s'effondrer presque au même moment que Wiloh, tous soulagés. Un soulagement qui avait été de courte durée quand ils s'étaient aperçus que le bébé ne pleurait pas. Il y avait eu moment de courte panique où le Mage avait espéré ne pas avoir à donner la fessée au nouveau-né pour l'inciter à prendre son premier souffle. Heureusement, les pleurs avaient fini par retentir d'eux-mêmes.

J'reya, déboussolée, avait remis l'enfant à sa mère lentement, avec précaution.

J'reya: C... C'est, euh...

Elle avait vérifié le genre au passage.

J'reya: ... C'est une fille...!
Eylion: O-oh, erh, f-félicitations...! Il... Il n'y a pas un c-cordon à couper, par contre...?
J'reya: S... Si, mais... Avec quoi?
Eylion: P-pourquoi tu me poses cette question!
Wiloh: Sérieux...?!

Wiloh avait éclaté de rire en prenant son bébé ensanglanté entre les bras, pleurant, riant, riant en pleurant. Elle avait laissé ses nerfs partir en serrant sa fille contre elle, se fichant de tout autour d'elle hormis de cette précieuse arrivée. Pour le Mage, ça avait été une véritable vision de l'apocalypse.

J'reya: T'as pas un... truc? N'importe, une lame, un... Juste... avait-elle balbutié, à court de mots.
Eylion: J'a-ai, erh, un poignard toujours sur moi...
J'reya: Donne.

Il l'avait sorti de sous sa coule pour la tendre à J'reya, complètement largué. Elle s'était occupée du nécessaire, même de laver la petite, Wiloh trop épuisée pour bouger. La petite avait été de nouveau confiée à sa mère, une fois propre. Le Mage, lui, avait relevé la capuche sur son visage.

Eylion: Je resterai ici, le temps que tu te remettes et que tu puisses repartir chez toi, Wiloh. Hm et, en fait, est-ce que... tu as déjà décidé d'un nom pour elle?
Wiloh: Oui, nous avions décidé avec Thay que si c'était une fille, ce serait Sveliannah...
Eylion: Un nom très sylvestre.

La voix de la Miqo'te s'était faite de plus en plus vague.

Wiloh: C'est un mélange du prénom de ma mère et celui d'Elianh...

Elle s'était ensuite évanouie. Sveliannah n'avait pas tardé à en faire de même après avoir autant pleuré.

J'reya: Wiloh...?
Eylion: Laisse, elle doit être épuisée... avait-il dit avec un geste de main. Merci en fait, pour ta venue.

Maintenant que la pression était retombée, J'reya s'était tournée vers lui pour le fixer longuement, très longuement. Elle s'était avancée vers lui avant de lui mettre une petite baffe, légère, et de se jeter dans ses bras, le prenant au dépourvu. Il avait alors constaté qu'elle tremblait comme une feuille.

Eylion: J'en conclus que... tu étais inquiète...? avait-il énoncé en lui tapotant maladroitement l'arrière de l'épaule, mal à l'aise.
J'reya: Plus JAMAIS, je ne fais ça... La prochaine fois, tu te débrouilles.

La prochaine fois...

Il avait bien espéré qu'il n'y en ait pas.

Eylion: Hé, c'est toi qui es venue...
J'reya: Parce que tu hurlais de panique! Je voulais vous aider!

Puis elle avait admis, plus difficilement.

J'reya: ... Je voulais t'aider...

Il avait continué à tapoter maladroitement l'arrière de son épaule.

Eylion: Et tu nous as beaucoup aidé, merci...

Elle l'avait finalement relâché en se reprenant un peu.

J'reya: Ouah, Eylion remercie une femme. Je suis flattée.
Eylion: ... N'en prend pas une habitude, avait-il essayé de plaisanter, avec un faible sourire douloureux.

Elle avait soupiré avant de le fixer à nouveau longuement, constatant son teint atroce.

J'reya: Ça... Ça va, toi...?
Eylion: ...

Il avait mis un temps infini à répondre à cette question. Il avait su, quelque part, que la repousser était inutile.

Eylion: ... J'ai quitté Solid, avait-il murmuré t'il dans un souffle imperceptible, presque inaudible.

Elle avait baissé les yeux à ces mots, les soupesant dans son esprit.

J'reya: Tu... Tu sais qu'on est là pour toi, hein...? Fuir... S'isoler... Ce n'est pas la solution. Tout le monde est là pour toi, même moi, même si tu me détestes. On... On a eu peur pour toi.

Il avait hoché faiblement la tête, même s'il n'avait pas du tout capté une partie de sa phrase dans sa fatigue.

Eylion: Je ne pouvais pas...

Il avait porté le dos de sa main à ses propres lèvres, pour rassembler ses forces mentales.

Eylion: J'avais... J'avais besoin de temps pour faire face à Azeyma... à la Vérité...
J'reya: Je... Je comprends, ouais. Mais... En tout cas, tu n'es pas seul, Eylion.

Elle avait tenté de le fixer droit dans les yeux, déterminée, même si elle avait eu du mal à cause de la capuche qui couvrait le visage du Mage. Mage qui avait eu un faible sourire de façade en retour.

Eylion: Il m'est difficile de... le concevoir mais... Mais je peux faire cet effort, oui...

Il avait tiré le rebord de sa capuche pour l'abaisser davantage sur le haut de son visage, de façon à le masquer. La Solaire s'était rapprochée pour lui tapoter légèrement le bras.

J'reya: Eh, si ce n'est pas toi, qui va rouspéter après Kyuuji quand il se déprécie, hein? Personne ne sait le faire aussi bien que toi, avait-elle dit pour détendre l'atmosphère.
Eylion: Oh, après les... ... excuses qu'il n'a pas... arrêté de faire, je compte bien... lui en toucher un mot, avait-il tâché d'énoncer de sa voix enrouée.

Ça s'était entendu qu'il avait fait des efforts pour lutter contre l’Émotion.

J'reya: ... Eylion... Regarde-moi...

Il avait détourné l'Azur en réponse.

Eylion: Hé, si tu n'as pas... envie de faire des cauchemars, vaut mieux que j'évite, avait-il dit, en essayant de plaisanter malgré sa voix fébrile.
J'reya: Dis pas de conneries... Regarde-moi. T'as pas besoin de te cacher...
Eylion: Laisse moi au moins... ma Fierté... ou ce qu'il en reste...
J'reya: Ça ne te rend pas moins "homme" de montrer ce que tu ressens. Mais... Je te forcerai pas.

Il avait émis un ricanement discordant et bas à cette mention.

Eylion: Ouai, non, je ne me sens pas spécialement "couilleux" à l'heure actuelle...

Elle avait gardé sa main sur son bras, serrant quelque peu sa manche. Elle avait haï le fait de se sentir impuissante de la sorte.

J'reya: Si jamais tu... tu as besoin de moi... N'hésite pas. D'accord? Ça, je ne l'oublierai pas.

Il avait acquiescé avant de baisser la tête, "honteux". Après un moment, il s'était obligé à s'arracher de son état pour poser une main sur le dessus de la tête de la Solaire.

Eylion: Le Temps...
J'reya: Hm? avait-elle dit en remuant des oreilles.
Eylion: Le Temps fera son œuvre... Quand bien même je ne sais pas si je désire encore rester ici en ce monde ou partir... Parfois, la nuance est floue... mais... quand l’Émotion ne prend pas trop le pas sur la Raison, je sais que je dois continuer...
J'reya: T'as intérêt à continuer. Si tu fais la moindre connerie, je viendrai te chercher et je te traînerai de force dans ce monde. Fais pas le con...

Il avait eu un faible sourire désabusé en relâchant le dessus de la tête de J'reya.

Eylion: ... On dit pourtant que c'est ma spécialité... avait-il dit en essayant de plaisanter à nouveau.
J'reya: Je pensais que c'était être de mauvaise humeur, ta spécialité. Repose toi un peu. Je reste là si y'a besoin.

Il avait tenté de la faire fuir de son mieux. En vain. Ils avaient fini par se poser à terre, dos au mur, à proximité du lit de Wiloh endormie. J'reya avait tourné la tête vers elle, sa main se posant sur son propre ventre, inquiète.

J'reya: Ça avait l'air de faire mal...

Il avait laissé sa tête aller contre le mur.

Eylion: Inquiète pour le quand ça t'arrivera? avait-il fait dans un faible sourire.
J'reya: Alors là, le jour où ça m'arrivera n'est pas encore arrivé... Il manque beaucoup trop de choses au tableau.
Eylion: Hm...

Il avait tenté de réfléchir à une plaisanterie douteuse sans y parvenir, l'épuisement ayant pris trop de marge sur son esprit.

Eylion: ... J'espère juste que Menphina sera clémente avec toi.
J'reya: ... Y'a toujours Rhian, avait-elle lancé sur un ton léger en haussant les épaules.
Eylion: ...

Il l'avait regardé, à moitié atterré.

Eylion: Même pour la plaisanterie, je dirai que c'est la pire chose à mentionner.
J'reya: Pas faux...

Elle l'avait ensuite regardé en coin à son tour.

J'reya: Repose-toi. Ou je t'assomme pour te faire dormir... On aura tout le temps de discuter demain.

Il avait hoché lentement la tête en se laissant aller davantage contre le mur et en fermant son Azur. Après un certain temps, sa voix éraillée s'était mis à émettre quelques notes jusqu'à former peu à peu un Chant discret. Malgré le fait que sa voix était abimée, il était parvenu, sans doute par un don inné pour le Domaine, à rendre son Chant harmonieux.
J'reya avait écouté en silence, repliée sur elle-même. À la fin des notes, il avait laissé sa Conscience se dissiper, une larme coulant sur sa joue.


Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 25 août 2019, 20:24

Image
Il était bien. Confortable. Il voulait rester ainsi plus longtemps. Ses bras enserraient une silhouette familière, sa tête reposant sur le meilleur des supports.

???: ... lion.

Encore quelques minutes...

???: Eylion...!

Il sursauta, son Azur s'ouvrant sur une courbe des plus généreuses. Un rire à la fois discret et clair résonna à ses oreilles.

Yunaia: J'ai encore besoin de respirer...!

Il se redressa légèrement, atterré. Où se trouvait-il déjà...? Ah oui, au Tapas, dans le lit de Yunaia. L'appartement aux alentours était tel qu'il se l'était toujours rappelé, seulement plongé dans une pénombre tamisée. La seule source de lumière était une lanterne de papier rouge posée sur un rebord à proximité. La taille du Lunaire était emprisonnée par le bras de Solid profondément endormi derrière lui.

Yunaia: Toujours pas réveillé?
Eylion: Je... Non, pas... vraiment?

Il se frotta le côté de la tête, confus.

Eylion: Yu...
Yunaia: Sshh...

Elle l'invita à s'allonger sur le côté doucement. Il se laissa faire en glissant sa main de façon à entremêler ses doigts avec ceux du Démon brièvement, l'autre coude le gardant toutefois redressé. Il accorda un sourire empreint de tendresse à la jeune femme. Celle-ci le lui retourna, levant sa propre main pour caresser le côté du visage du Lunaire. Il relâcha alors Solid pour passer la sienne sur les doigts adorés, en savourant le contact avant de la prendre et d'en embrasser la paume avec passion.

Eylion: Tellement de choses se sont passées...
Yunaia: C'est vrai...
Eylion: Est-ce qu'il t'arrive parfois de regretter?
Yunaia: ... C'est une question vaste... Il y a quelque chose qui t'inquiète...?
Eylion: Peut-être...

Il enserra ses doigts avec les siens. Pendant un long instant de silence, ils fixèrent ces mains unies.

Eylion: ... Dis moi, est-ce que tu es heureuse?

Elle ne répondit pas de suite, restant là à continuer de fixer leurs mains. Puis elle releva les yeux sur lui et lui offrit un doux sourire.

Yunaia: Oui, très.

Il esquissa un faible sourire désabusé avant de se rapprocher, se penchant sur elle, leurs lèvres se rapprochant... Jusqu'à ce qu'il ne s'aperçoive que quelque chose clochait. Ce n'était pas Yunaia face à lui. Non, il s'était aperçu qu'une Solaire tétanisée et rouge pivoine lui avait fait face.

J'reya.

Les oreilles avaient été les premières à amorcer un mouvement de surprise. Puis "ses" yeux, le Carmin comme l'Azur. Sa main s'était trouvée derrière la nuque de l'infortunée. Il y avait encore de la distance entre leurs lèvres mais assez infime pour qu'il eût senti leurs souffles communs. Dans l'instant qui avait suivi la réalisation, il l'avait brutalement jeté hors du lit avant d'attraper la couverture comme un bouclier improvisé.

Eylion: PUT...!!
J'reya: IIIIIIIH!

Dans un cri, elle s'était effondrée au sol, prise au dépourvu.

Eylion: J-J... J'reya...?!
J'reya: 'tain, t'es con...! Aïe... Tu parles d'un réveil...

Le teint de la combattante n'avait jamais été aussi rouge qu'en cet instant. Elle avait aussitôt brandi son index.

J'reya: Tu la fermes. Tu. La fermes.

Les oreilles du Mage étaient restées dressées droites comme des i sur sa tête.

Eylion: Il... Il s'est passé qu...?! Urgh...

Un violent maux de tête l'avait interrompu, l'obligeant à se prendre la tempe dans une grimace soudaine. De son côté, J'reya s'était relevée en se frottant un genou. Il s'était alors aperçu qu'il était vêtu de son simple caleçon là où la Solaire était encore entièrement vêtue à l'exception de ses chaussures.

J'reya: T'étais bourré, hier. Alors je t'ai ramené...
Eylion: Il ne...
J'reya: Quoi?
Eylion: On n'a pas...
J'reya: ... M-m-m-mais non, on a rien fait!!

Il avait poussé un soupir de soulagement.

J'reya: Tu étais saoul, je t'ai ramené, tu t'es endormi... Et après... Tu dormais mal, alors je me suis assise près de toi. Et tu m'as attrapée.
Eylion: Je t'ai... attrapé...? avait-il péniblement dit à travers sa gueule de bois.
J'reya: Tu m'as tirée à toi... Et en me serrant, tu dormais mieux. Alors... Je suis restée.

Un long instant de silence s'en était suivi.

Eylion: ... ... Merde... Désolé...
J'reya: Désolé de quoi? J'avais juste à te coller un gnon et on en parlait plus. C'est moi qui ai choisi de rester... Et puis j'étais fatiguée aussi, alors... J'ai pas cherché.
Eylion: Hrm... Je... ne me suis pas rendu compte...

Il s'était gratté l'arrière de la nuque, embarrassé, l'autre main maintenant la couverture contre lui.

J'reya: Ça, j'avais remarqué...

Elle avait paru un peu attristée un quart de seconde avant de le regarder de façon plus neutre.

J'reya: Mais ça a marché, non? Tu as dormi. C'est tout ce qui compte.
Eylion: Ouai mais pas pour des raisons... saines...

Il s'était glissé vers le bord opposé du lit pour s'y asseoir, de façon à faire dos à la Solaire tout en conservant le drap contre lui comme seul rempart à sa honte.

J'reya: ... Au moins, t'as un peu moins une tête de déterré, avait-elle fait en soupirant et en secouant la tête.

Il avait baissé la tête en retour.

Eylion: ...
J'reya: ... Je sais bien que ce n'est pas la solution... Mais pour une fois que je pouvais t'aider de façon efficace...

Elle avait grogné.

J'reya: Habille toi.

Il avait attendu qu'elle sorte pour le faire. Une fois seul, il s'était passé une main sur le visage, restant ainsi quelques instants avant de se forcer à se préparer, revêtant sa coule. La capuche relevée, il était sorti dans le petit salon qui jouxtait sa chambre à Opale. Il avait pu voir J'reya en train de regarder les étagères, dos tourné et bras croisés, alors qu'elle cherchait à penser à autre chose.

J'reya: Quoi?
Eylion: Merci de m'avoir ramené, s'était-il forcé à dire, difficilement.
J'reya: ... C'est normal. J'allais pas te laisser te saouler et t'abandonner là-haut.
Eylion: J'aurai pu rentrer aussi... Bon, j'aurai galéré mais je n'avais pas bu tant que ça non plus... avait-il dit en se massant le poignet.
J'reya: "Pas bu tant que ça"? Tu es tombé en enlevant ton pantalon, Eylion.

Il avait écarquillé son Azur à cette mention.

Eylion: Tu te fous de moi...?
J'reya: J'ai l'air de rigoler?

Il avait soupiré, pâteux, défrisé et agacé, en levant les mains.

Eylion: Bon, c'est fait, c'est fait. Tout le monde est rentré sain et sauf, accompagné.
J'reya: Ouais...

Il s'était aperçu à ce moment de l'embarras de la Solaire. Perturbée, elle avait été incapable de le regarder directement, ce qui n'avait arrangé en rien la gêne pesante entre eux.

Eylion: ... Désolé encore une fois... Tu sais, tu aurais pu te barrer...
J'reya: Je t'ai dit que... Rah, laisse tomber.

Elle avait grogné comme pour tenter de chasser son trouble.

J'reya: Je voulais juste que tu te sentes mieux. Même si c'était pendant un instant... Même si c'était en pensant que j'étais Yunaia...

Elle avait baissé les yeux à cette mention, cette vue augmentant le malaise du Lunaire d'un cran. Ses traits avaient eu la même expression que si elle l'avait frappé de plein fouet.

Eylion: Raison supplémentaire pour prendre tes jambes à ton cou...
J'reya: Je ne suis pas une lâche qui abandonne ceux qu'elle aime, avait-elle dit sans hésiter.
Eylion: Ce n'est pas une question de lâcheté ici...
J'reya: Alors quoi?
Eylion: Tu n'avais pas... à aller jusque là... Il y a des limites à ce qu'on peut faire pour les siens... Enfin, là, ça va, ce n'est pas... trop grave... mais ça aurait pu l'être.

Elle avait haussé les épaules.

J'reya: Ah oui? Et comment?

Il s'était passé une main sur la nuque, mal à l'aise.

Eylion: ... En principe, le Rhum ne me trahit jamais donc je ne pense pas que...
J'reya: Que quoi?
Eylion: Mais si ça avait été n'importe qui d'autre à ma place...

Il avait soufflé, défrisé.

Eylion: Bref...! Là n'est pas le sujet, il ne s'est rien passé, ce qui est TRÈS BIEN! On va pouvoir reprendre notre "merveilleux" "quotidien" comme si "rien" ne s'était passé...!

Elle avait baissé les yeux sur le plancher, restant silencieuse pendant un long moment.

J'reya: ... Ouais. J'imagine.
Eylion: ... Juste la prochaine fois, si ça arrive, tu me files un gnon pour me réveiller et tu te barres. Point.
J'reya: Je n'y manquerai pas.

Tout aussi malaisée que son comparse Lunaire, elle lui avait un signe de son index et majeur réunis comme un salut. Elle s'était toutefois figée dans son geste en voyant l'expression d'Eylion, livide, alors qu'il s'apprêtait à retourner dans sa chambre.

J'reya: Eh.
Eylion: ...?
J'reya: ... Te fous pas dans des états pareils pour ça, hein...
Eylion: ... Je ne peux rien promettre, avait-il lancé, dégoûté vis à vis de lui-même.

Elle avait soupiré longuement en s'approchant. Ils étaient rentrés en même temps dans la pièce, le Mage posant une main sur une table à proximité.

J'reya: Et pourquoi ça?
Eylion: À ton avis...?
J'reya: Ça pourrait être beaucoup de choses.
Eylion: ... Je t'ai pris pour Yunaia, je crois que ça résume assez bien les choses... Une femme que je suis sensé avoir passé outre. Une femme que j'ai laissé quand j'ai choisi Solid. J'ai mis tellement de Temps à passer outre ma première Femme... Combien de Temps me faudra t'il pour accepter que mes seconds Amours n'étaient que Chimères...?
J'reya: Eylion...

Elle s'était agacée, soudainement.

J'reya: Ça arrive. Tu es encore amoureux, c'est comme ça. Les sentiments, ça ne se contrôle pas. Tu finiras par l'oublier, ou au moins à vivre en paix avec ça. C'est toi-même qui l'a dit: il te faut du temps. Et moi, je ne t'en veux pas. Sur le coup, j'étais surprise. Et maintenant... Maintenant, je ne sais pas. Mais je ne t'en veux sûrement pas. Et... Et un jour tu trouveras quelqu'un, quelqu'un de sain, déjà. Et quelqu'un qui te soutiendra. Et qui t'aimera. J'en suis convaincue.

Elle avait grogné, énervée.

Eylion: Une part de moi n'y croit pas. N'y croit plus.

Elle avait serré les dents et les poings. Puis elle s'était rapprochée à grandes enjambées de lui pour pouvoir l'attraper par les épaules et le forcer à se tourner vers elle.

J'reya: Tu vas y croire. Je te jure que tu vas y croire. Et si tu n'y crois pas, je te foutrai des baffes jusqu'à ce que ça rentre dans ta jolie petite tête!

Il l'avait regardé, à demi-interloqué.

J'reya: Ce n'est pas en partant défaitiste que les choses vont s'arranger, Eylion.

La poigne de la Solaire, sur ses épaules, avait tremblé, mourant d'envie de le "guérir" sans être en mesure de savoir quoi faire.

Eylion: Menphina ne fait pas le bonheur... Enfin, elle peut en apporter mais ce n'est pas la seule chose qui existe... qui apporte du Bonheur...

Il avait baissé la tête.

J'reya: Mais c'est elle qui te rend comme ça.
Eylion: C'est pour ça que j'en ai assez... Assez d'elle... Assez des Souffrances qu'elle me promet... avait-il entre ses canines, en serrant les poings. De me donner de l'Espoir juste pour me l'arracher au final. Si je le pouvais... Si j'étais seulement plus lâche... Ces souvenirs, je les détruirai volontiers... Jusqu'au dernier...
J'reya: ... Et tu me dis ça à moi...?

Elle avait soufflé, presque peinée, sa poigne se desserrant progressivement.

Eylion: ... Parce que nos situations ne sont pas les mêmes, J'reya... Malgré ça, je m'accroche... Je... J'ai envie de les détruire mais je sais que sans eux... Je n'aurai pas ces leçons... Ces avertissements... Ces expériences pour ne plus tomber dans les mêmes pièges...
J'reya: Il ne tient qu'à toi de donner à ces souvenirs la place qui leur revient: des leçons du passé. Et il ne tient qu'à toi de les rendre positifs plutôt que négatifs. D'avancer malgré eux. TU es le maître de TES souvenirs. TU leur accordes de l'importance... Enfin. Je te dis ça...

Son ton, sur la fin, avait presque laissé évoquer un "Qu'est-ce que j'en sais, au fond?".

Eylion: ... J'essaye... Ça ne veut pas dire que ce sera simple... Ni que ça se fera en un jour... Je ne suis pas maître de mes émotions... C'est pour ça que j'ai mis tellement de temps à admettre ce que je ressentais pour Solid et Yunaia... Je craignais la Chute... J'ai nié et nié pendant si longtemps... Jusqu'à ce qu'il soit "trop tard" parce que je savais...

Il avait porté une main à son propre visage avant d'ajouter faiblement, sa gorge prise.

Eylion: J'aurai dû fuir...
J'reya: Eylion...

Elle avait avancé ses propres mains, tremblantes, pour pouvoir les poser sur lui, ses traits crispés face à cette Douleur qu'elle détestait tant voir chez ses proches.

Eylion: ... Désolé... avait-il fait d'une voix légèrement rauque.
J'reya: Arrête de t'excuser... Je ne te jugerai pas pour ça.
Eylion: Je sais que je suis pitoyable... Et c'est bien pour ça que je hais Menphina...
J'reya: Tu ne l'es pas...
Eylion: C'est ainsi qu'elle nous rend tous... Monstres et Démons, Sortilèges et Malédictions... Rien... Il n'y a rien qui n'est plus redoutable qu'elle...
J'reya: ... Je ne sais pas, Eylion. Ça ne m'est jamais arrivé...

Elle s'était abaissée de façon à pouvoir voir sous la capuche.

J'reya: Si tu as besoin de pleurer un bon coup... Vas-y. Lâche tout.
Eylion: Je n'ai plus de larmes, plus de Cœur... Et je te le souhaite, J'reya... Je te souhaite de le trouver ton Absolu... et que ce ne soit pas une voie pavée d'Enfer comme la mienne le fut...

Elle avait eu un sourire amer à cette mention.

J'reya: Mais qui voudrait d'une brute comme Femme, hein? avait-elle fait en soupirant. Tu as un cœur, Eylion. Tu es même l'un de ceux que je connais qui en a le plus un...

Il avait eu un léger rire discordant.

Eylion: Certains ont des tendances masochistes, je crois... avait-il tenté de dire tout en luttant contre sa gorge nouée.

Mais sa tentative pour la vexer et la faire fuir était tombée à plat. La Solaire avait été bien plus concernée par la Souffrance qu'elle avait eu entre les mains à cet instant. Elle avait tenté de le réconforter par des gestes doux, auquel il avait semblé impassible. Il était resté ainsi, immobile, les épaules voûtées, la tête baissée, main pour cacher autant que possible ce visage qu'il avait honni.

Eylion: Autant pour le grand Mage... avait-il fini par marmonner, s'accrochant à son Sarcasme.
J'reya: Ça va aller mieux, lui avait-elle soufflé doucement.

Elle avait essayé de passer sa main sous la sienne pour en essuyer d'éventuelles larmes. Il l'avait écarté sans geste brusque, renforçant son interdiction d'une tête secouée. Il avait ensuite reculé d'un pas, gardant sa Douleur loin de la vue de J'reya.

Eylion: Je "dois" aller mieux. J'irai mieux...
J'reya: J'ai confiance. Tu vas y arriver.
Eylion: ... Même si je dors mal, ne te mets plus à cette place.
J'reya: ... Compris... Je pensais bien faire. Désolée.
Eylion: Je ne doute pas de tes intentions mais ce n'est pas m'aider ou t'aider de faire ça...
J'reya: On ne parle pas de moi, ici, avait-elle lancé rapidement.
Eylion: Tu es pourtant là, en face de moi, avait-il grogné faiblement.
J'reya: Tu vas mal. Je fais des choses pour que tu ailles mieux. Ça s'arrête là. Ce qui se passe dans ma tête, c'est mon problème...
Eylion: Ton problème est le mien. On peut faire des choses pour ses proches mais il y a des limites.
J'reya: De toute façon, si ça ne t'aide pas, je ne vais pas continuer... Et comment ça, "ton problème est le mien"?

Il s'était rapproché en gardant la tête baissée, avant de "poquer" le front de la Solaire.

Eylion: Parce que je sais très bien ce qu'un excès de zèle peut faire.
J'reya: Je ne te suis pas.

Il avait soupiré.

Eylion: Je vois bien que tu veux nous aider à ta façon, que tu te sens parfois impuissante à ce niveau et que tu serais prête à aller loin pour aider les tiens, c'est très honorable de ta part mais c'est le genre de truc qui risque de te bouffer à terme si tu ne fais pas gaffe.
J'reya: Alors quoi? Je devrais juste vous regarder souffrir en silence? Ou abandonner dès que ça devient trop dur? Je sais. Tu vas me dire de ne pas me sacrifier pour les autres, comme tu m'as dit l'autre fois...
Eylion: Exactement. On peut prendre des risques pour les siens mais se sacrifier ou faire des conneries, au final, tu risques juste d'échanger les rôles.

La discussion s'était poursuivie jusqu'à ce que J'reya prenne congé. Pourquoi avait-il bu? La réponse se trouvait dans un événement qui s'était déroulé peu après l'affaire de Wiloh. Mais peu avant ça, il avait reçu deux visites. Le Mage s'était isolé chez lui, dans sa propre maison, pour vivre son Deuil pleinement. La première avait été Rhian.

Rhian: Je te l'avais bien dit, avait-il lancé sèchement.

Il avait pensé, cette fois, chacun de ses mots. Dans le petit salon du second étage, Eylion lui avait fait dos, allongé dans l'un des deux divans. Il avait amorcé, d'une voix éraillée.

Eylion: J'aurai aimé te dire à quel point ta sollicitude me touche... Si tu n'avais aucune raison d'être ainsi...

L'Uldien avait soupiré, assis sur le canapé en face. Il avait, malgré tout, apporté une bouteille de Rhum, celle-ci trônant sur la table entre eux.

Rhian: Je ne suis pas là non plus pour t'achever. Juste, j'aurai aimé que tu portes un peu de crédit à ce que je te disais.
Eylion: Et je t'en ai accordé... Mais je n'ai pas su ignorer mes putains... de sentiments. Je voulais y croire... Au moins, essayer.

Rhian avait soupiré de nouveau à ces paroles.

Rhian: N'en parlons plus... Ça aurait pu être pire.
Eylion: Ça aurait pu être pire, oui...

Pour autant, cette pensée n'avait pas semblé le soulager. Un silence pesant s'était alors installé, silence que le médecin avait tâché de briser avec un rire nerveux, en se passant une main sur le côté du cou.

Rhian: Au moins, il y a quelque chose de positif à ça...
Eylion: ...?
Rhian: Tu vas pouvoir boire autant que tu veux...!
Eylion: ...

Le Mage avait tourné la tête pour regarder par-dessus son épaule, à demi-atterré.

Eylion: ... Je ne sais pas ce qui est le pire: que tu y ais pensé ou que je trouve ça presque valable...

Le rire de Rhian s'était fait plus franc alors qu'il se penchait pour servir les deux verres.

Rhian: Je ne suis pas ta petite dose adorée de normalité pour rien!

Un grognement de dégoût avait retenti à la mention.

Rhian: Oui, ne dis rien, je sais que je suis ton grand Amour de toujours, avait-il fait en levant la main de façon exagérée et le ton déconneur à souhait.
Eylion: Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre...

Il s'était relevé pour pouvoir attraper l'un des verres. Bien que toujours morose, les plaisanteries de Rhian avaient su le réconforter un peu, lui faire penser à autre chose.

Eylion: ... Merci.
Rhian: Par Menphina... Le ciel va nous tomber sur la tête, tu m'as enfin accordé un mot doux...!

Le Lunaire avait grogné de nouveau.

Eylion: Non, sérieusement... Merci... Et ne m'oblige pas à développer, avait-il émis, un peu gêné.
Rhian: Les amis sont là pour ça, avait-il dit avec un sourire solaire.

L'Uldien avait avancé son verre pour pouvoir trinquer avec son comparse de toujours.

Eylion: ... Par contre, s'il te plaît...
Rhian: Hm?
Eylion: Évite de m'inciter à sortir...
Rhian: Et te...

Le médecin s'était interrompu à une pensée, repensant au fait qu'à chaque fois que le Mage était sorti sur son impulsion, il était tombé sur des cas difficiles à gérer, dont son ancienne Femme et puis sa première disciple.

Rhian: Hm... D'accord mais... Promets moi au moins de ne pas te cloîtrer.
Eylion: Je vais essayer...

Par la suite, deux jours plus tard, il avait reçu la visite de ses autres proches, que J'reya avait prévenu. En ouvrant la porte d'entrée, après l'activation de la sonnette, il avait été surpris de les voir.

Eylion: J'reya... Kyuuji... Eido...
Kyuuji: Eylion...

Il les avait laissé entrer. Il leur avait expliqué la situation. L'explication donnée, le Prêtre avait demandé, l'air vraiment inquiet.

Kyuuji: Tu vas rester ici du coup?
Eylion: Je ne sais pas trop, s'était-il obligé à dire en tâchant de ne rien dévoiler de ses émotions, en vain. Je me souviens que tu m'avais proposé de venir à Opale...
Kyuuji: Oui, ça tient toujours.

Le Mage avait acquiescé, pleinement conscient de l'inversion de leurs rôles.

Eylion: Alors... Hrm...
Kyuuji: Tu n'y seras pas seul, mais personne ne t'ennuiera.
Eylion: Je... ne suis pas très doué pour... Enfin, je me dis que ce serait peut-être le plus... sage? Bordel...

Il avait soufflé discrètement en se prenant la tête entre les mains.

Eylion: Je n'en sais rien...
Kyuuji: Je le pense, oui... Rester seul dans cette situation, ce n'est pas le mieux...

Le Raen s'était approché, hésitant un instant avant de poser finalement une main se voulant réconfortante sur son épaule.

Kyuuji: Ça va aller... avait-il dit, plein de douceur et d'inquiétude. Si tu veux parler, sans te forcer, n'hésite pas.

Le Lunaire avait sursauté légèrement au contact, pris au dépourvu, sans être choqué à outrance pour autant.

Eido: Eylion, avait-il laissé échapper à mi-voix.
Eylion: Si je parle, je sens... que je vais...

Sur la fin, sa voix avait vibré légèrement à cause de sa gorge nouée. Il n'avait pas osé poursuivre. Il avait secoué la tête comme pour se reprendre, se contenir.

Kyuuji: Tu en as le droit... ça fait du bien parfois.
Eylion: Putain, je suis un peu trop... minable en ce moment, avait-il lancé comme pour tenter de garder sa contenance.
Kyuuji: C'est délicat.
Eylion: Je ne voulais pas vraiment vous exposer ça, putain de bordel de merde...
J'reya: On est là pour toi, tu sais... Tu... n'as pas besoin de te cacher...
Eido: Oui, les amis sont là pour se soutenir.

Le Prêtre avait opiné.

Kyuuji: Nous sommes là pour toi.

Même si Eylion aurait probablement préféré être pendu que de l'admettre, la présence de ses amis lui avait permis de se remettre plus facilement de sa Peine. Il avait aménagé pendant un temps au sein d'Opale, se cloîtrant dans sa chambre durant les premiers jours, à écouter simplement la Vie qui suintait à travers les murs. Les voix, les pas des bénévoles qui allaient et venaient au sein des couloirs. Les rires des passants au-dehors. Les acclamations, le chant des oiseaux, le bruissement du Vent.

Il avait étouffé ses propres pleurs, son Agonie, ses cris. Il avait serré les draps à s'en blanchir les jointures. Il avait refusé de se laisser aller pleinement, luttant contre cette Douleur qu'il avait jugé inacceptable. Il était passé par toutes les étapes. La Tristesse. Le Désespoir. La Colère. La Culpabilité. Le Blâme.

Et c'était lors d'une de ces nuits difficiles que son Esprit fragmenté s'était rappelé à lui. Dans ce Paysage si familier, cette esplanade d'une Académie sous un ciel de ténèbres, aux étoiles moroses. Le souffle rauque, pesant de la Carcasse s'était élevé dans les airs, résonnant au sein de l'endroit, sous les regards fixes et méprisants de ses alter egos. Il y avait eu, après un moment interminable, un geste. La main ensanglantée s'était portée à l'endroit de son cœur, y enfonçant ensuite ses doigts profondément.

La Douleur l'avait incité à relever la tête dans un gargouillis venant des tréfonds de sa gorge.

Carcasse: Gh...!

Mais l’Écorché avait poursuivi, implacable. Cette Souffrance n'était rien comparée à celle qui le tenaillait au plus profond de lui-même. Le sang avait coulé. La chair déchirée avait opposé une résistance futile aux doigts acérés qui s'était frayé un chemin jusqu'au cœur, le séparant de ses artères déchiquetés sous la pression. Dans un effort surhumain, il avait arraché cette partie dans une giclée rougeâtre.

Carcasse: Plus... JaMaiS... avait-il énoncé dans un souffle rocailleux, guttural.

L'organe était encore palpitant, battant au rythme de la respiration difficile de son hôte. L'Enfant avait hurlé à cette vue alors qu'un trou béant s'était formé chez lui, au même endroit, au même moment. Il avait posé ses petites mains fébriles sur l'ouverture sanguinolente tout en tombant à genoux.

Carcasse: PLuS... JAMAIS...!

L'Adolescent, lui, avait applaudi à deux reprises, dans un claquement sonore. Il était ensuite descendu de son perchoir, extatique, et s'était rapproché du mort-vivant tout en esquissant quelques pas de danse et en fredonnant quelques notes cyniques. Une fois à portée, il avait pris une des artères pendouillantes à bout de doigts pour soulever l'organe de la main tendue.

Adolescent: Permettez?

Dans un geste nonchalant, il avait lancé le cœur haut dans les airs.

Enfant: N-non...

Un bâton ornementé était apparu entre les serres de l'Adolescent dont le sourire avait exprimé une Joie des plus démentes. Puis, dans un moulinet violent et précis, il avait frappé sa cible qui redescendait, l'envoyant paître et disparaître dans la lumière aveuglante du portique qui menait aux tréfonds de son Esprit.

Adolescent: Fiouuu, avait-il sifflé, appréciateur, une main en visière. On peut dire, vraiment, que je suis allé au Cœur des choses.

L'Enfant avait éclaté en sanglots. Il s'était reçu alors un regard méprisant de la part du lanceur.

Adolescent: De quoi te plains-tu? C'est toujours une faiblesse de moins.
Adulte: Présomptueux, avait-il énoncé sobrement.
Adolescent: ...?
Adulte: Qui sommes nous pour prétendre de quoi Demain sera fait?
Adolescent: Tch. Et alors? Au moins, là où cette "chose" est, on ne risque pas de se faire avoir de sitôt.

Pendant que la Carcasse s'effondrait, l'Adolescent avait éclaté d'un rire aussi sinistre que maniaque.

Le second événement avait été quand il était allé à l'Abéhys.

Eylion: ... Yunaia est passée? avait-il repris, surpris.

E'loon avait acquiescé derrière le comptoir de l'auberge. Assis devant, Sinnrae et Rhian étaient en train de boire leurs cocktails respectifs.

E'loon: Elle souhaitait explicitement vous voir.
Eylion: ... Est-ce que Lucrétia est au courant?
E'loon: Non et je... Heu... J'ai jugé nécessaire qu'elle n'avait pas besoin de l'être.

Le Mage avait soupiré de soulagement. Il n'aurait manqué que ça, que Lucrétia et Yunaia se rencontrent. Il connaissait assez la Démone pour savoir son avis sur la question et il n'avait vraiment pas envie de vérifier si elle serait, oui ou non, capable de garder le contrôle.

Eylion: Vous avez bien fait...
Sinnrae: Qu'est-ce qu'elle peut bien te vouloir, depuis le temps? avait-elle lancé, nonchalante, en tripotant la paille de son verre.

La Douleur avait repris le Lunaire à cette question qui avait porté une main à ce Cœur qu'il avait mutilé. Lui n'était absolument pas prêt à la recroiser.

Sinnrae: Vous lui avez posé la question au moins? avait-elle enchaîné à l'intention d'E'loon.
E'loon: Oh non... Mais je, heu...

La Solaire avait jeté un œil prudent à son patron.

E'loon: Je pense avoir une petite idée sur la... raison...
Sinnrae: Alors éclairez-nous sur la question! avait-elle dit avec un sourire et un geste grandiloquent, maniéré, de ses ongles vernis.
E'loon: Je ne sais pas si...
Sinnrae: Par les dieux, vous voyez déjà qu'il souffre le petit. Achevez le proprement au lieu de tourner autour du pot.

Le Mage avait fusillé du regard la jeune femme avant d'esquisser un sourire grinçant.

Eylion: Petit...? Amusant de ta part.

La danseuse mesurait, en effet, qu'un simple 1m60 et avait toujours complexé de ces faits et de ses formes menues. Désormais, le Miqo'te la dépassait d'un bon dix centimètres et il en jouait allégrement lors de leurs joutes verbales communes. La pique avait bien arraché une moue à Sinnrae, signe que la contre-attaque avait fait son effet.

El'oon, de son côté, s'était frotté nerveusement les mains.

E'loon: Hé bien... J'ai entendu une rumeur comme quoi elle allait se marier sous peu...

La nouvelle n'avait pas surpris Eylion. Il avait bien eu une pointe de douleur mais pas aussi grande qu'il ne l'avait escompté. Ironiquement, elle était tombée au "bon moment", au moment où le Lunaire avait déjà tellement souffert de sa Perte qu'il en était au stade où ses émotions étaient anesthésiées. S'il avait été encore avec Solid, il en aurait bien plus pâti.

Sinnrae: Oh... En résumé, elle voulait débarquer pour lancer la nouvelle en pleine gueule de celui qui l'a rejeté en affichant bien son bonheur dans sa tronche? avait-elle souligné en portant une main à sa joue, dans un ton décalé avec ses dires.

Il avait sifflé.

Eylion: Yunaia n'est pas comme ça, d'autant qu'elle ignore que j'ai quitté Solid. Elle... pense sans doute que je suis passé à autre chose.

Sinnrae avait pouffé de rire à cette mention, sa dextre au-dessus de sa poitrine.

Sinnrae: Trésor, pas étonnant que tu te fasses toujours avoir si tu n'es pas capable de lire le cœur des femmes. Je vais t'apprendre une grande nouvelle: ta Yunaia est humaine. Je suis humaine, tu es humain. Et quel être humain aime se faire rejeter, qu'importe la raison ou les circonstances?

Il avait serré durement les canines à cette mention.

Sinnrae: Oh, je ne dis pas que tu n'as pas eu raison de faire ce que tu as fait. Et je ne parle même pas de cette idée de trouple... Solid en aurait profité quelques semaines avant d'avoir l'excuse parfaite pour se tirer.
Rhian: Hm, Sinnrae...
Sinnrae: Hé, ce n'est pas lui qui aime quand on est franc?

Eylion s'était contenté de s'asseoir au comptoir, faisant un geste de main pour indiquer à E'loon de le servir. Cette dernière s'était empressée de le faire alors que les mèches de devant du Mage avait masqué son expression à ce moment là. Mais la tension avait été palpable par toutes les personnes en présence.

Sinnrae: ... Hmf, franchement, tu n'y perds rien. Qu'elle le fasse délibérément, qu'elle veuille couper à nouveau les ponts là où ça avait été déjà bien douloureux la dernière fois ou bien qu'elle soit assez cruche pour venir la bouche en cœur pour tenter de t'infliger la torture d'une fausse amitié, dans les trois cas, elle n'en a rien à foutre de ce que tu peux ressentir.
Eylion: Hé... C'est ta façon de montrer que tu te soucies de moi? avait-il lancé avec un sourire morne.

La jeune femme avait été prise au dépourvu sur le coup, l'embarras la prenant aussitôt. Elle avait tenté de protester.

Sinnrae: Je...
Velren: ... pense qu'il a compris.

Une main gantée de noir s'était posée sur l'épaule de la danseuse qui avait sursauté. Derrière elle s'était trouvée la haute silhouette de l'Anrad, un sourire discret et bienveillant aux lèvres. Cette vision avait rendu la première cramoisie.

Sinnrae: V-Vel...
Velren: Navrée pour votre Perte, Eylion.

Il avait répliqué par un grognement sourd. Velren avait alors baissé son regard perçant sur Sinnrae.

Sinnrae: J-Je ne faisais que lui donner quelques avis "amicaux".
Velren: C'est donc pour cela qu'il fait pareille expression, hm? avait-elle "demandé".

La gorge de la danseuse s'était nouée. Le Mage, quant à lui, n'avait pas perdu une seconde de l'échange incongru.

Eylion: Ça va aller et elle a raison... Je préfère encore qu'on me parle franchement plutôt qu'on prenne des gants.

Velren avait soupiré doucement.

Velren: Qu'allez-vous faire, maintenant?
Eylion: ... Je ne sais pas encore.

Il avait marqué un instant de silence.

Eylion: Prendre le temps d'y réfléchir, certainement.
Velren: Une idée raisonnable. Je me permets de vous épargner "ceci".

La haute silhouette avait empoigné avec douceur le bras de la danseuse qui avait protesté.

Eylion: Je vous en prie, Anrad, avait-il répliqué avec un sourire mi-amusé, mi-morne.

Plus tard, en soirée, il y avait réfléchi. Après avoir tourné la question dans tous les sens, une seule lui avait parlé.

Avait-il besoin de ça en ce moment?

Non.

Trois lettres simples et pourtant qui contenaient en elles un poids qu'il en avait assez de porter.

Le Deuil s'était alourdi mais il avait finir par consentir à un compromis. Il ne s'infligerait que le juste nécessaire pour informer Yunaia. Pour prendre sa plume. Écrire ne lui avait pas été simple. Chaque mot, il les avait saigné. Il avait mesuré leur importance. Ce qu'ils impliquaient pour lui. Pour elle.
Lettre d'Eylion
Ici Eylion. Je prends ma plume ce soir car on m'a dit que tu étais passée par l'Abéhys. J'ai entendu les rumeurs et je ne peux que me douter de la raison de ta venue. C'est vrai que je n'ai jamais répondu à ta lettre.

Je ne le pouvais pas.

Le faire aurait été mettre un point final sur tout ce que nous avons vécu ensemble. Une part de moi n'est jamais parvenue à te laisser partir. Aujourd'hui, alors que ma propre vie prend un tournant, je me dis qu'il est temps. Il est Temps de voiler notre Deuil. Il est Temps que je te donne mon présent, celui que je t'ai toujours souhaité: être heureuse.

Je n'ai jamais regretté mon Choix. Apprendre que tu te maries sous peu ne fait que me conforter dans celui-ci. Je suis heureux de me dire qu'au milieu de ces souffrances, quelque chose de beau en est né. Que tout n'a pas été vain, que la Raison a su tenir ma main et que j'ai eu la sagesse nécessaire de faire ce qui devait être fait.

Malheureusement, la Vérité est que je t'aime. Non pas comme un proche, non pas comme un ami mais comme un amant. Jamais je n'aurai dû jouer à ce jeu de l'Amitié, dès lors que je l'avais mis au tombeau pour en extraire les sentiments qui me hantent. Et je ne veux pas le jouer.

Je ne peux pas faire parti de ta vie pour le moment, Yunaia. Je ne pourrai jamais t'oublier si je te revois. Si je m'inflige le fait de te voir dans les bras d'un autre. Si ma Raison sourit à ton Bonheur, mes Émotions saignent.

Un jour, peut-être, si je trouve mon Absolu, en serai-je capable... Je l'ignore. Je ne prétends pas savoir de quoi demain est fait mais je reste confiant. Je ne suis pas seul et j'ai toujours eu la Guerre dans le sang. Qu'importe les épreuves, je saurai me relever et poursuivre sur ma Voie. Je ne doute pas que tu as trouvé la tienne.

Beaucoup de Temps se passera probablement avant qu'on ne soit en mesure de se revoir. Je ne sais pas quel Eylion tu rencontreras alors mais j'espère qu'il aura su passer à autre chose. Qu'il aura été en mesure de garder seulement le souvenir de nos moments passés au bord du lac de Lavandière, quand seule l'Innocence imprégnait nos échanges.

Adieu, mon aimée.
Malgré ses blessures, il avait su relativiser l'ensemble de la situation. D'une part, il était fier. Fier de ne pas avoir succombé complètement à ses Émotions cette fois. D'avoir refusé le trouple jusqu'au bout. D'autre part, s'il n'avait pas rencontré Solid, il n'aurait probablement jamais eu son corps Adulte. S'il n'avait pas rencontré Yunaia, il ne se serait jamais rendu compte à quel point sa Voie était devenue une vocation. Il en était ressorti le cœur brisé mais l'esprit riche d'expériences et de leçons.

Sa souffrance avait tempéré quelque peu ces faits. Est-ce que ces expériences en valaient le prix?

Blanc ou Noir, si seulement les choses étaient aussi simples...

Il avait envoyé la lettre, confiant qu'elle respecterait sa décision. Il n'avait pas eu envie d'extrapoler les ressentis de la jeune femme, d'en rajouter sur l'ensemble. Dès que l'impératif d'un Choix s'était imposé, il avait pris la décision d'en assumer le résultat. Jusqu'au bout.

Ce pan de sa Vie était terminé. Que ça lui plaise ou non, il allait devoir vivre avec.

Quant à la raison pour laquelle il avait autant bu, le soir où J'reya avait dormi avec lui? Tout venait du retour en mission de Kyuuji. Il avait retrouvé le Prêtre au Choix de Buscarron peu après la fin de la quête.

Tout avait commencé avec son agression. Lucrétia, furieuse, s'était élancée au sein de Sombrelinceul pour arrêter celui qui l'avait drogué, sans cacher son aura démoniaque durant le trajet. Ce trajet, sans que personne ne le sache, avait réveillé quelque chose d'enfermé dans la forêt. Cet éveil avait brouillé les communications habituelles entre les Padjals et les Esprits. Ignorant la réelle source d'un tel problème, les soupçons s'étaient portés sur la Démone après témoignages d'élémentalistes qui se trouvaient dans les environs.

Les Padjals, dans leur bienveillance, n'avaient pas condamné Lucrétia sans preuve concrète mais ils avaient jugé sage d'exiler cette dernière de Gridania pour voir si le problème allait être réglé. Ils avaient donné ordre qu'elle soit escortée et emprisonnée auprès du Maelström, à Limsa Lominsa. Solid s'était fermement opposé à cette décision. Sans le savoir, il avait sauvé sa consoeur d'une tentative d'assassinat de la part de gardes zélés, qui n'advint jamais.

Après des négociations difficiles et des Padjals froissés par l'arrogance de Solid, tempérés par Kyuuji, ils avaient consenti à laisser une chance à Lucrétia. Sans l'aide de la Brigade, Kyuuji devait réussir à trouver et éliminer ce qui empêchait les Esprits de parler. S'il échouait, les Padjals lui auraient retiré son cristal de Mage Blanc et fermé la Brigade Rouge. Le Prêtre, mal à l'aise, y avait consenti et avait dû rassembler sa propre équipe. Zaurak et J'reya avaient répondu à son appel. Eylion, quant à lui, avait suivi leur enquête à distance à travers Lucrétia, devant gérer un patient mal en point en parallèle.

Le groupe avait suivi les ressentis de la Démone qui avait refait le trajet depuis le QG jusqu'à l'auberge où Eylion avait été agressé. Elle avait fini par les guider jusqu'à une porte de pierre à moitié cachée par la végétation. Zaurak et Kyuuji avaient pu trouver et décrypter les inscriptions à l'entrée. Des avertissements. La porte enfoncée, ils s'étaient tous enfoncés dans les ténèbres de l'endroit, sous la pression d'une présence ancienne, malsaine.

Ils étaient passés à travers des pièges, posés par l'antique civilisation d'Amdapor. Ils avaient découvert les fresques d'une sombre et gigantesque entité menaçant une ville. Senti la Folie frôler les abords de leurs esprits. Enfin, ils étaient parvenus jusqu'à la salle des sceaux. Au fil du temps, l'un d'eux s'était affaibli.

Suite à un combat âpre contre le gardien des lieux, un énorme golem de pierre, les lanceurs de sorts avaient pu restaurer la puissance du sceau, replongeant l'horreur dans son sommeil séculaire. Les Padjals, satisfaits, avaient reconnu en Kyuuji un Mage Blanc de talent, malgré les réticences d'Aubrenard Sylvemontaix, un élémentaliste patriote qui n'avait pas manqué d'émettre ses avis à l'encontre d'un "étranger et de sa bande de Démons".

Secoué par toutes ces confrontations, Kyuuji était parti, aussitôt suivi par Eylion, inquiet pour son état. Ils s'étaient ainsi retrouvés au Choix de Buscarron, autour d'un verre.

Kyuuji: L'équipe ne tient pas debout... On a failli y rester. Les Padjals nous ont envoyé au casse pipe, soit en connaissance de cause, soit... par ignorance...

L'indignation avait assombri le regard du Prêtre désillusionné.

Eylion: Vous y êtes parvenus malgré tout... et pour une équipe qui ne tient pas debout, je trouve que vous vous en êtes bien sortis. Pour les Padjals, de ce que j'en sais... La réponse est probablement un peu des deux. D'une part, je ne pense pas qu'ils avaient grand espoir que vous trouviez réellement la source du problème. D'autre part, ils avaient tout intérêt à avoir une raison de virer la Brigade de Lavandière.
Kyuuji: Et au pire, ils se débarraissent d'un gêneur. Oui, de deux gêneurs.
Eylion: Ils étaient gagnants, sur tous les points. Que tu réussisses ou échoues.
Kyuuji: C'est bien ce qui me f... m'agace.
Eylion: Bienvenu dans un ordre établi, avait lancé l'ancien Malfrat avec un sourire grimaçant, assez équivoque de son avis personnel.
Kyuuji: Ils auraient pu mettre tout Gridania en danger dans cette opération!
Eylion: Je ne crois pas qu'ils étaient au courant, pour ce temple... Sinon ils auraient déjà envoyé des leurs pour une telle chose. D'après ce que je sais, ils t'ont envoyé enquêter, je ne me trompe pas...?
Kyuuji: C'est...

Il avait détourné le regard en retenant une grimace de colère, assez proche du dégoût.

Kyuuji: Oui... Qu'ils puissent ignorer une telle chose dans le sol de la Sylve...
Eylion: Tu les blâmes de ne pas être télépathes? avait-il musé avec un sourire navré.
Kyuuji: Non! De ne pas connaître les dangers qu'ils sont censé veiller! Et de tenir leur positions inchangées depuis des années. L'interdit sur la Magie Blanche aurait pu nous coûter la vie!
Eylion: L'interdit...?

Le Mage avait resservi son ami pour l'aider à se décontracter un peu.

Kyuuji: Les Mages Blancs sont rares. Et pas seulement à cause de la guerre de la magie ou de la grande inondation. Ils tiennent le secret de cette magie et de ce savoir sous leur juridiction.
Eylion: Je t'avoue que je ne suis pas très au fait des lois gridaniennes... Je sais juste qu'à Ul'dah, la Magie Noire est tabou. Et que, oui, niveau historique, Magie Blanche et Magie Noire ont fait bien des ravages de leur temps.
Kyuuji: La Blanche l'est presque tout autant. Elle est pas interdite purement et simplement, mais sous étroite surveillance des padjals.
Eylion: Ce qui veut dire que tu es...?
Kyuuji: Sous leur tutelle directe. Et surveillé de près, bien plus que les autres, parce que je suis étranger et que je n'ai pas suivi la formation gridanienne.

Le Lunaire avait soupiré.

Eylion: Je crois que je commence à comprendre le tableau d'ensemble... Mais franchement, ne me dis pas que tu t'es restreint, dans ce temple? avait-il demandé, à demi interloqué.
Kyuuji: Je suis pas désiré en tant que Mage Blanc. Je suis un incapable, certes, mais y'a des limites.

La remarque avait fait froncé l'unique sourcil visible de son interlocuteur.

Eylion: Alors déjà, tu vas me retirer ce que tu viens de dire, avait-il maugréé.
Kyuuji: Non! s'était-il exclamé en serrant le verre dans sa main. Commence pas...
Eylion: Oh si, tu n'es pas un incapable. Merde, y'a que toi pour concevoir ce genre d'image, avait-il grogné.

Le Prêtre avait roulé des yeux avant de les fermer un instant.

Kyuuji: Ouais admettons. À mes yeux. Et aussi à ceux des Padjals, visiblement.
Eylion: On s'en fout du regard des Padjals. Il n'y a rien de plus important que ton regard vis à vis de toi-même...!
Kyuuji: C'est pas le problème là.
Eylion: SI, JUSTEMENT, avait-il tonné, défrisé. Tant que tu auras cette considération, ce n'est pas étonnant que tu finisses dans cet état. Tu te tapes TOI-MEME. Il n'y a pas besoin de Padjal, de golem ou bestiole horrible pour ça.

Kyuuji avait serré les dents et les poings. Il s'était efforcé de reprendre une gorgée de son verre d'un geste un peu rigide pour se laisser le temps de répondre, sous l'Azur inquisiteur du Mage.

Kyuuji: Je disais à Zaurak qu'il était temps que ça change, ce sceau. Et à toi que je pensais pouvoir avancer en changeant. C'est peut-être... le moment.
Eylion: ...? Que veux-tu dire?
Kyuuji: J'en ai marre! D'être comme ça, lamentable, pitoyable! Incapable de prendre des décisions! Si c'est ce maudit sceau... Autant le virer!
Eylion: Kyuuji... S'il y a bien une chose dont je suis sûr, c'est que ce n'est pas la faute de ce sceau, avait-il grogné, bassement. Tu n'es pas lamentable, ni pitoyable, c'est juste ta propre perception de toi-même.
Kyuuji: Zaurak a essayé de la changer, ça n'y a rien fait, avait-il dit en détournant le regard.
Eylion: Personne ne peut le faire, pas même moi...! Il n'y a que toi, Kyuuji, qui peut en décider, toi et toi seul...! Tout n'est qu'une question de Choix, de ce qu'on décide de faire ou non. Si tu veux réellement changer, ça doit être ta Volonté et ça commence déjà par effacer ce genre de connerie comme les mots pitoyable, lamentable et je ne sais quel autre saloperie du même acabit...!

Le Raen avait fermé de nouveau les yeux, grognant à son tour.

Kyuuji: Je le veux...
Eylion: Alors fais le, redresse le dos, regarde vers l'horizon et reste vrai à toi-même et à ce que tu veux, avait-il dit en terminant son verre. Je ne te dis pas que ce sera une Voie facile, ni que ça se fera en un jour. Tu t'en prendras des coups dans la gueule. Des décisions difficiles à prendre, que tu voudras bien foutre en l'air ou sur les épaules d'un autre mais que seul toi pourras prendre. Et pourtant, le prix de cette souffrance est la Liberté. Ainsi que le fait de savoir que même si tu as payé un prix dur... Au moins, tu n'auras pas à en regretter les conséquences...

Eylion termina son verre, s'en resservant un autre, l'Azur se voilant à des souvenirs que ses propres paroles avaient ramené à la surface.

Kyuuji: Ouais... Mais pour ça, il me faut une force que j'ai pas... Et me sors pas que c'est que ma vision! Il manque ça!

Le Prêtre avait mimé la Colère d'une main aux doigts cripsés.

Kyuuji: Elle est toujours tournée vers les autres!
Eylion: Et alors... Tu crois que je la retiens la mienne...? Tu crois que je me retiens de gueuler quand je trouve quelque chose d'injuste?

Le Raen avait attrapé la bouteille pour se resservir tout en interrogeant le Miqo'te du regard.

Eylion: Tu m'as déjà vu doux, calme et docile? avait-il lancé avec un sourire éloquent.
Kyuuji: C'est pas ce que je dis. Mais comment tu peux progresser et avancer si tu t'en veux jamais?

Son interlocuteur avait soupiré à la remarque.

Eylion: Ouvrir ma gueule ne signifie pas pour autant que je ne fais pas d'erreur et que je ne les regrette pas... C'est juste que j'essaye au moins d'apprendre d'elles et de ne pas rester coincé dans le passé...

La discussion s'était poursuivie jusqu'à ce que le Lunaire n'expose la situation au Raen.

Eylion: Pour l'ignorance, je ne pense pas qu'ils soient à blâmer. Pour les manigances... Hé bien... Tout est une question de... Comment disait l'Anrad déjà...? avait-il dit en grimaçant. "Perspective". Selon "ta" Perspective, ils auraient dû savoir pour le temple, pour la raison qui troublait la Sylve. Ils auraient dû faire confiance à la Brigade. "Te" faire confiance.

Il avait pris une inspiration avant de poursuivre.

Eylion: Selon "leur" Perspective. La Brigade est une bande de Démons gardés sous étroite surveillance par les Compagnies. Des Démons qui pourraient leur péter à la gueule un jour ou l'autre, l'incarnation même de la Corruption qu'ils affrontent jour après jour. Des monstres qui dévorent l'Éther. Toi? Un étranger, loin des valeurs qu'ils connaissent, un Oriental qu'ils ne connaissent pas, qui possède entre ses mains le pouvoir même de la Magie Blanche, qui fut la perte d'Amdapor. Amdapor, une civilisation dont on est encore loin de connaitre tous les tenants et aboutissants. Intrinsèquement, si on devait voir ça de l'extérieur, vous auriez tous raisons... et tous torts. Si je devais voir selon "mon" point de vue, je serai tout à fait de ton côté pour la partie qu'ils s'acharnent contre les mauvaises personnes car je te connais et je connais la Brigade mais je ne suis pas d'accord avec toi sur le fait qu'ils auraient dû connaître la menace, tout simplement parce qu'on est tous loin de connaître l'ensemble des ruines d'Amdapor et des secrets qu'ils renferment et on ne peut blâmer, à mon sens, une connaissance que tu as mais que d'autres n'ont pas.

Kyuuji avait grimacé.

Kyuuji: Je leur demande pas de me faire confiance! Ils ont bien raison de pa... merde... Un truc aussi énorme, combien d'autres menaces pourraient être ignorées ainsi alors?
Eylion: Hé, pourquoi tu crois qu'il existe de véritables expéditions archéologiques, encore de notre Temps? avait-il dit avec un sourire navré.
Kyuuji: ... Mais merde... ils...

Le Prêtre était passé progressivement de la Colère vers le dépit et l'inquiétude.

Kyuuji: Mais ... Ce sont les ...
Eylion: Ce sont les...?
Kyuuji: Les Padjals, les garants de la sécurité...
Eylion: Oui mais Kyuuji, ça n'en fait pas des dieux omniscients, ni parfaits non plus...
Kyuuji: ... Je... croyais...
Eylion: Je ne doute pas qu'ils feront le nécessaire pour protéger la Sylve mais qui nous dit que ce n'est pas, parfois, au détriment d'autrui? Qu'est-ce qui est le plus important pour eux? La sécurité de l'harmonie entre Gridania et Esprits.
Kyuuji: Ouais...

Le Raen avait détourné le regard, puis il avait terminé d'une traite son verre.

Eylion: Kyuuji, selon moi, les héros n'existent pas. On est tous humains et imparfaits... Mais... je ne crois pas que ça empêche certains de prendre en main leur propre vie et d'essayer de faire de leur rêve une réalité...

Zaurak était alors entré en saluant le patron au passage.

Eylion: Et on dirait que Zaurak possède un sixième sens pour te trouver, où que tu ailles, avait-il souligné, amusé, en remarquant l'arrivée de son confrère.
Zaurak: Pas eu besoin de beaucoup chercher...
Eylion: Je crois que Kyuuji a besoin d'un câlin, avait-il lancé avec un sourire décalé.

Zaurak avait haussé un sourcil pendant que Kyuuji avait écarquillé les yeux.

Kyuuji: Un quoi?!

Le Mage avait eu alors un léger rire, même si sa mine livide ne lui permettait pas de sourire du fond du cœur. La véritable raison de cette remarque avait été de détourner le Raen un peu de ses sombres pensées.

Eylion: Ça valait le coup pour voir ta tête.

Zaurak s'était installé, perplexe, pendant que le Prêtre avait baissé le nez sur son verre... vide, à son grand regret.

Eylion: Allez, haut les cœurs, comme je te l'ai dit, la Sylve t'est reconnaissante, autant que tu en profites pour faire passer le message que tu veux passer.

Ils avaient continué à boire et à parler jusque tard la nuit. Zaurak avait été aussi étonné que choqué de voir comment Kyuuji pouvait être ivre. Il avait appelé J'reya pour raccompagner Eylion pendant que lui raccompagnait le Raen. C'était ainsi que la Solaire s'était retrouvée dans le lit du Lunaire.

La période qui avait suivi celle-ci avait été riche en petites quêtes diverses et variées même si la plus importante avait été sa rencontre avec l'agent du Maelström, Ivault Seilent. Kyuuji avait été chargé, à la base, d'enquêter sur le responsable derrière l'agression d'Eylion mais après les événements du temple amdaporien, il n'avait pas été en état de faire quoique ce soit. Le Mage l'avait déchargé de cette affaire mais, incapable de supporter l'idée que le commanditaire s'en sorte, il l'avait reprise, bon gré, mal gré.

Il avait repris la piste du Raen qui était un reçu possédé par Ivault. L'agent enquêtait alors sur un possible officier corrompu du nom d'Einar Turner, qu'il soupçonnait d'organiser un coup d’État contre Merlwyb Bloefhiswyn pour réinstaurer la piraterie telle qu'elle était avant. Officier des douanes, Einar profitait de son poste pour détourner des marchandises qu'il revendait ensuite sur le marché noir ou qu'il mettait de côté en faveur de ses plans.

Eylion avait aidé l'enquête en échange d'une information. Une commande envoyée à Einar d'une variante de Somnus, la drogue qui avait servi à l'embrumer. L'officier avait fini par être arrêté, les preuves rassemblées contre lui avec un appui de la guilde des surineurs, dont l'un des membres avait été assassiné durant l'affaire. Ivault avait pu demander en récompense une affectation à la même section où était son père autrefois, à savoir celle médicale.

Revenir sur le terrain, combattre les hommes d'Einar, avait fait un bien fou au Mage qui avait constaté, avec amertume, qu'il suffisait parfois d'une bataille pour lui faire oublier tout le reste.

J'ai toujours eu la Guerre dans le sang.

Il avait enfin eu la réponse qu'il cherchait. La commande était venue du Noir Désir. L'établissement de Valia Sarined. Il n'avait pas cru à la coïncidence. Il s'y était bien rendu. Et ce qui se passa là-bas ne fut connu de personne. L'Arcaniste n'en avait pas touché un mot à quiconque durant cette période.

Puis, une nuit, il avait reçu la visite impromptue de Lucrétia. Il se trouvait alors dans le petit salon attenant à sa chambre, affalé dans le divan, son poison ambré à la main.

Elle était entrée par la fenêtre ouverte en peinant à faire passer l'ensemble de sa robe immaculée. Le Mage avait sursauté à cette vue inattendue.

Eylion: ...! Bordel, qu'est-ce que tu fous là?!

Elle avait esquissé un sourire amusé tout en réajustant sa tenue, ses doigts lissant les plis de sa traîne.

Lucrétia: Je n'ai pas le droit de venir te voir?
Eylion: Q... Tu sais quelle heure il est? avait-il grogné entre ses canines.

Elle s'était redressée, une fois satisfaite de son apparence. Elle s'était ensuite rapprochée de lui. À la vue de son expression, celle d'Eylion s'était assombrie.

Eylion: Quoi? avait-il sifflé, blasé. Tu es venue jubiler de la situation, c'est ça? C'est sûr que ça doit te combler...

Elle s'était penchée sur lui en conservant son sourire, ses mains dans son dos.

Lucrétia: Ce serait te mentir que de dire le contraire, mon Lunaire. Et je sais à quel point tu as, en horreur, le Mensonge.
Eylion: ...

Il s'était redressé de son côté de façon à être presque nez à nez avec elle, son mépris tirant ses traits.

Eylion: J'aime Solid et Yunaia. Qu'importe que ce soit voué au Néant, ça ne change pas ce fait.

Le sourire de la Démone s'était d'abord fait plus fin, exquis, avant de se teinter d'une forme de cruauté. Ses doigts graciles s'étaient avancés pour se refermer sur l'épaule du Mage, chacun se pliant à la façon d'un geste de piano. Elle l'avait incité lentement à se rasseoir en continuant de se pencher sur lui. Il avait frissonné, malgré lui, à ce contact qui le renvoyait plus de vingt ans en arrière. Cette même position, lui, un gamin encore de seize ans.

Elle, griffes plantées dans son épaule gauche. La Terreur, il l'avait encore une fois éprouvé, avec la même vivacité que par le passé. La nausée n'avait pas tardé à rejoindre cette sinistre farandole quand il s'était aperçu, et avait senti, à quel point elle avait savouré la pensée de ses doigts sur sa Marque. Sur cette Cicatrice qu'elle lui avait laissé dont elle s'était mise à suivre à demi le sillage à travers sa chemise.

Ses lèvres rosées s'étaient inclinées vers son oreille pour articuler soigneusement, avec une satisfaction pleine.

Lucrétia: Combien de fois ta précieuse Yunaia a soupiré le nom de Djin...? Combien hurleront celui de Solid...?

Un haut-le-coeur. Il l'avait repoussé brutalement, par réflexe. Elle était tombée à la renverse, sur son séant, sans quitter son expression.

Lucrétia: Aaah, mon Écorché. Oui, nous y voilà...
Eylion: Tu n'as pas changé, avait-il lancé, écœuré.
Lucrétia: Change t'on réellement? Mais si tu veux savoir la réelle raison de ma venue...

Elle s'était relevée en ramenant sa longue chevelure blanche derrière son épaule.

Lucrétia: On dit qu'après avoir été empoisonné, un corps devient plus endurant face à ce poison. C'est ce que je suis venue faire, mon Lunaire. T'empoisonner. Oh, je pourrai faire mieux, bien sûr. Si je le voulais...

Elle avait écarté les bras comme pour mettre l'emphase sur ses suivants dires, avec un ton de plus en plus extatique.

Lucrétia: Je pourrai devenir celle que tu souhaites que je sois. Partir dans la nuit et arracher, avec minutie, tout ce à quoi tu tiens. Te forcer à penser à moi, jusqu'à effacer la moindre pensée que tu pourrais leur accorder. Te ramener sans cesse et sans cesse à moi. T'obliger à courir, à me suivre, oui, mon Lunaire, me suivre... et nous danserons alors, jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce que nous soyons unis pour l’Éternité.

Elle les avait aussitôt rabaissé après avoir énoncé sa terrible perspective. Elle avait goûté cet avenir, savouré l'Obsession qu'elle aurait pu créer chez lui.

Lucrétia: Oui mais... vois tu... Je veux me faire aimer de toi. Alors je viens t'empoisonner... et te rappeler que je suis la seule. La. Seule. à t'avoir aimé pendant plus de vingt ans. Aucun de tes prétendus amants ne t'a jamais accordé ce fait.
Eylion: La ferme... avait-il énoncé, de manière inaudible.
Lucrétia: Je suis la seule à pouvoir me battre à tes côtés. La seule à pouvoir t'accorder ce que tu désires. Oh, je sais ce que tu espères, en me mettant à la tête de l'Abéhys...

Elle s'était penchée de nouveau sur lui.

Lucrétia: Mais si Solid n'est jamais parvenu, en des siècles, à oublier Deep Star, qu'est-ce qui te fait dire... Oui, mon Lunaire... Qu'est-ce qui te fait dire que ce sera le cas pour moi?

Il avait serré des canines.

Eylion: La ferme...
Lucrétia: Alors... Toujours pas réveillé?

Il avait écarquillé l'Azur à cette mention. Quand il avait compris, tout à fait compris ce que ça impliquait, il avait poussé un hurlement de rage en sautant à la gorge de la Démone. Ils étaient tombés au sol, lui la surplomblant, les doigts autour du cou pâle.

Eylion: Je. T'interdis, avait-il vociféré avec haine.

Elle avait esquissé à nouveau un sourire. Ce sourire, comme il avait eu envie de lui arracher. Elle lui avait passé une main sur son bras, dans une caresse.

Lucrétia: ... Qu'est-ce que tu attends...? Serre.

Elle l'avait émis avec une telle sensualité qu'un nouveau haut-le-coeur avait pris le Mage, le faisant autant hésiter que l'inverse.

Lucrétia: Pauvre Solid. Après tout ce qu'il a fait...
Eylion: Ne me tente pas, avait-il soufflé, écoeuré.

Le sourire s'était accentué.

Lucrétia: Mais ce serait renier tes convictions. Ce serait nier ma chance. Je n'ai tué personne depuis que je suis là. Une chance que tu aurais accordé à n'importe quel être.

Il avait hurlé à nouveau. De frustration. De fureur.

Eylion: Je te hais, Lucrétia.
Lucrétia: Tant que je suis dans tes pensées, mon Lunaire, avait-elle susurré, comblée.

Il l'avait relâché brutalement, avec dégoût.

Eylion: Rien que pour ça, je devrais te tuer. Tu es entrée dans mon esprit.

Elle s'était contentée de continuer à sourire. L'empoisonner. Oui, ça avait été son objectif depuis le début. Et elle était y parvenue.

Eylion: ... Jusqu'où?

Jusqu'où était-elle allée? Avait-elle été à l'origine du Rêve ou avait-elle été simple spectatrice? Elle s'était relevée, satisfaite, pour retourner vers la fenêtre.

Eylion: Lucrétia...!

Elle avait refusé de lui répondre, se contentant de sortir et de disparaître dans l'obscurité de la nuit. Il s'était précipité, mains sur le rebord. Il avait hurlé son nom. Il l'avait invectivé de tous les termes, d'autant plus atteint...

... Que tout ce qu'elle avait dit avait été la plate Vérité.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 28 août 2019, 22:09

Image
À travers la fenêtre de sa chambre, les rayons de la matinée l'avaient tirée de son sommeil. Elle s'était redressée sur son lit en étirant ses bras, ravie. Elle s'était attardée pour profiter du soleil sur son visage. Enfin, brusquement, elle était sortie des draps, ses pieds nus sur le parquet de bois.

Lucrétia: Quelle magnifique journée! ♪

Elle avait tourné sur elle-même, sa courte robe de nuit blanche suivant son mouvement. Elle s'était sentie bien, si bien...! Et quand elle se sentait aussi bien, il lui fallait...

Chanter!
Elle s'était mise à danser tout en faisant ses tâches quotidiennes.

Faire les draps ♪
Faire sa toilette. Bien brosser ses cheveux. Être présentable, c'est important pour une demoiselle! ♪
Se vêtir de sa plus belle robe ♪
Ouvrir les fenêtres de la maison pour aérer. Chanter avec les oiseaux ♪
Passer le balai ♪
Se préparer pour aller au travail ♪
Saluer son voisin avec un geste de main et un sourire ♪

Tout avait semblé lui sourire, du soleil radieux aux passants. Sa journée, elle l'avait passé à papoter avec les clients de l'Abéhys, se tenant au courant des derniers ragots. Qui était marié avec qui. Qui fêtait son retour de mission. Qui hésitait à avouer ses oublis. Comme elle aimait son métier!

Tout en préparant un cocktail, en chantonnant gaiement, elle avait repensé à la dernière fois qu'elle avait vu Solid. Comme ça avait été savoureux...! Ce fut devant un Kyuuji choqué qu'elle avait embrassé son confrère en se hissant grâce à ses ronces. Pas choqué pour un sou, le Démon s'était exclamé.

Solid: Tu l'as fait une fois au moins. Coquine!

Durant la discussion, Kyuuji avait été le seul à remarquer que le comportement de Lucrétia avait été des plus étranges tout comme son sourire, qu'elle n'avait su réprimer tout du long, à demi de compassion, à demi de jubilation. Le Prêtre avait cru que les émotions d'Eylion s'étaient superposées avec celles de Lucrétia là où les faits étaient aussi sombres que simples.

De par son Lien, à ce moment, elle savait que le Mage était en train de rassembler son courage pour quitter son compagnon. La Victoire était sienne. Alors elle l'avait fêté de la manière la plus malsaine qu'elles avaient pu trouver. Poser la main sur son rival. Effectuer l'ultime affront vis à vis du Lunaire, le tout dans son dos.

Elle n'avait tourné autour de Solid que pour une chose: elle savait pertinemment qu'Eylion lui accordait une grande importance. S'ils ne se quittaient pas, elle aurait pu forcer la relation en passant par une "cible plus facile". Malgré tout, elle avait assez estimé son confrère pour l'avertir, tout comme Kyuuji.

Lucrétia: Après tout, je l'ai dit à Solid... Il me plaît bien, oui... mais autant je le veux, autant je suis aussi sa rivale.

Elle n'avait jamais été son amie.
Tout au plus une alliée.
Une rivale.

Qu'elle ait pu passer par lui ou qu'Eylion le quitte, elle était gagnante sur tous les fronts.

Et encore, quelque part... elles savaient que si le Lunaire apprenait la Vérité, l'entière Vérité, les coulisses derrière certains événements... Oui, il la tuerait. Elle jouait à un jeu dangereux.

Et elles adoraient ça.

D'ailleurs, bien avant sa visite nocturne, elle l'avait accompagné pour aller voir Valia. Le Miqo'te avait creusé et fouillé les affaires de l'Élézéenne, trouvant des preuves accablantes sur son implication dans son agression. Ce fut ainsi qu'ils l'avaient attendu dans son cabinet du Noir Désir. Sitôt le seuil de la chambre passé, une Bourrasque avait refermé la porte derrière Valia. Assis devant la coiffeuse, la chaise tournée vers l'entrée, Eylion l'avait accueilli avec un sourire froid.
Image
Eylion: Bonsoir... Valia, si je ne me trompe pas? C'est vrai que nous n'avons jamais vraiment eu le... loisir de discuter depuis notre dernière rencontre.

Interdite, la gérante du Noir Désir s'était figée pendant que la Démone avait attendu son Heure à proximité, dans le recoin sombre de la pièce.

Valia: Grenn, avait-elle émis, crispée. Que me vaut votre visite?
Eylion: Je pense que vous le savez déjà, avait-il dit en conservant son sourire.

Il avait fait tourner sa main dans les airs.

Eylion: J'espère que vous éviterez de me faire perdre mon temps en niant l'évidence.
Valia: Et pourtant, je... ne sais pas de quoi vous voulez parler.

Il avait fait mine de soupirer en entremêlant ses doigts devant lui, coudes sur les bras du fauteuil.

Eylion: Bien, avant qu'on n'aborde le moment où je vais devoir vous rappeler à quel point votre Éternité ne tient qu'à un fil... Je voulais vous poser des questions. Vous savez... J'ai pas mal cogité et je me demande pourquoi personne n'a posé la question jusqu'ici mais...

Il avait incliné la tête de manière très imperceptible sur le côté.

Eylion: Comment vous avez su, pour Lucrétia?
Valia: Pardon? avait-elle répliqué, à demi-interloquée.

Il avait redressé son inclinaison et son regard.

Eylion: En général, quand on souhaite invoquer un Démon, il est assez rare qu'une invocation soit "spécifique". On prévoit le nécessaire pour en invoquer d'un certain type pour un certain besoin. C'est un domaine de recherche en lui-même. Oh, je ne dis pas qu'il est impossible d'invoquer un Démon bien précis mais ça suppose une chose...

Valia avait réprimé un tic du coin de ses lèvres à cette mention, ses doigts se refermant inconsciemment sur eux-mêmes.

Eylion: Que l'on sache "Qui" on veut invoquer. Et Comment. En ce qui concerne Lucrétia, je sais que je n'ai jamais rien trouvé dans les ouvrages qui la mentionnent de près ou de loin. Si on sait, de plus, qu'elle était bloquée au sein de son Manoir et qu'elle n'avait jamais posé, jusqu'ici, un seul pied sur ce Monde, on pourrait facilement se douter que niveau témoignage...

Il avait ensuite levé un index.

Eylion: Le seul cas de figure qui me viendrait à l'esprit... C'est que je ne suis pas le seul rescapé du Manoir. Mais alors, pourquoi ce manque d'informations? Il devrait bien exister un livre, un journal, quelque chose s'il y avait eu d'autres évadés au fil des siècles... Et puis, c'est là que cette incohérence m'est venue à l'esprit. Le fait que vous soyez passée directement par la case "Menace". Vous dites avoir entendu dire de quoi je suis capable. Vous saviez ce que j'avais fait à mon ancienne Femme. Or... À part les personnes impliquées lors du Procès et certains Immortels, personne n'est au courant. Ce qui veut dire que vous avez obtenu l'information de quelque part.

Il avait pris le temps d'une inspiration avant de reprendre avec un sérieux glacial.

Eylion: Mais mettons que quelqu'un ait pu relater ce fait... Qu'est-ce que ça vous aurait appris sur moi? Vous n'aviez aucun moyen de savoir le degré de moralité que je peux avoir, ni si j'allais refuser une offre alléchante d'argent ou de faveurs en échange de mes "services". Avant de menacer quand on souhaite ce genre de chose, on essaye déjà de négocier. Ce qui n'a pas été votre cas. Alors dites moi si je me trompe Valia...

Les traits de l'Élézéenne s'étaient faits de cire.

Eylion: Mais vous avez agi pour le compte de quelqu'un qui venait du Manoir. Qui m'a connu. Et qui, pour une raison qui m'échappe, a orchestré tout ça.
Valia: Ce n'est pas vraiment une question, avait-elle dit entre ses dents.
Eylion: Il y en a pourtant bien deux. Qui et Pourquoi, avait-il répliqué en se levant, terrible.
Valia: Vous ne savez pas à quoi vous avez affaire.
Eylion: Je vous en prie, ne me faites pas venir à la partie "Vous me faites perdre mon temps", avait-il dit en esquissant un sourire froid.

Lucrétia était alors sortie de l'ombre. La vue de celle-ci avait augmenté la nervosité de Valia d'un cran.

Eylion: ... Surtout en sachant que je serai prêt à vous livrer à Lucrétia sans l'ombre d'une hésitation.
Valia: Je... Ce... C'est... un certain Henrich... Ulroni... Un habitué de l'établissement et au... fil du temps, on a commencé à mieux se connaître. Il a fini par savoir ce que je souhaitais et il m'a alors parlé du Manoir. De Lucrétia. De vous. Il... m'a chanté une histoire de vengeance puisque vous n'aviez rien fait pour une certaine Lacie à qui il était attaché.
Eylion: Henrich...

Le nom ne lui avait rien dit. Les "Visiteurs" n'avaient jamais manqué au sein du Manoir.

Eylion: Je ne me souviens pas d'une personne de ce nom qui aurait pu être proche d'elle.
Valia: Je ne fais que vous dire ce que je sais, avait-elle grincé en retour. Je peux... vous donner son adresse. Vous l'interrogerez vous-même.
Eylion: Je n'y manquerai pas. Vous me donnerez tous les détails et puis... vous vous rendrez aux autorités. Le motif m'importe peu, que vous vous accusiez de trafic de drogues ou d'autre chose, vous servirez votre sentence.
Valia: ...!

Le Mage avait retrouvé son sourire froid.

Eylion: Si ça ne tenait qu'à moi, je vous aurai fait goûter à ce que ça fait d'être le Jouet de Lucrétia pour l’Éternité.

Sourire qui avait disparu tout aussi vite.

Eylion: Mais Solid n'aurait pas approuvé. Croyez moi, seuls des barreaux vous épargneront ma Rage. Mais si je peux vous donner un avant-goût du type d'Enfer que je pourrai vous infliger en cas de récidive...

Son Azur s'était tourné vers Lucrétia qui avait acquiescé joyeusement. Elle s'était ensuite approchée, faisant reculer Valia jusqu'à ce que le mur l'en empêche.

Valia: ...! Vous... Vous la détestez. Vous... ne trouvez pas que c'est hypocrite de l'utiliser à votre convenance?! Lucrétia, vous vous rendez compte qu'il vous utilise, n'est ce pas?!
Eylion: Oh, je le sais très bien mais voyez-vous...

Il avait offert un sourire d'une cruauté peu commune.

Eylion: Je me fiche du moyen utilisé quand on atteint une certaine limite. Et je sais que Lucrétia peut vous infliger le pire cauchemar d'une personne de votre espèce.
Lucrétia: ... Et si je peux me faire apprécier davantage de mon Lunaire ainsi, ce n'est pas grave s'il m'utilise ♪

Des ronces étaient sorties de son dos pour couper tout espoir de fuite. Valia allait hurler mais la main "gracile" de la Démone s'était emparée de son cou, le serrant jusqu'à l'étouffement. Le fond de son Œil Carmin était alors passé du blanc au noir. Le grincement sinistre des aiguilles d'une horloge fantomatique s'était mis à résonner au sein de la pièce pendant que l'Élézéenne griffait le bras pour tenter d'échapper à son emprise. La peau, à partir du cou, s'était progressivement flétrie. Des rides étaient apparues jusqu'à déformer entièrement la beauté de l'infortunée.

Lucrétia l'avait ensuite traîné devant un miroir pour qu'elle puisse s'y mirer. Un début de hurlement s'était amorcé, aussitôt étouffé par une ronce sans épines devant les lèvres craquelées. Les ravages du Temps avaient transformé Valia en une version âgée des plus grotesques.

Eylion: Imaginez une Éternité sous cette apparence, s'était délecté le Mage.

L'horreur avait tourné dans les yeux de la concernée. La Démone avait maintenu l'effet autant de Temps que ses réserves d'Éther lui permettaient. Puis elle l'avait relâché, Valia retrouvant sa jeunesse tout en chutant à terre sous le regard empreint du mépris du Lunaire.

Eylion: Vous vous rendrez aux autorités. Vous ferez le nécessaire pour passer quelques années à l'ombre, de refaire votre vie par la suite et de ne jamais... Jamais recroiser ma route ou celle de mes proches.

Elle avait toussé, choquée.

Eylion: Je me suis fait bien comprendre?
Valia: O-oui...
Eylion: Parfait.

Il s'était relevé et s'était dirigé vers la porte.

Eylion: Un plaisir de faire affaire avec vous, Dame Sarined, avait-il lancé avec un ton décalé, d'où suintait son Cynisme.

Lucrétia avait suivi le mouvement, offrant un sourire satisfait, un clin d’œil et un petit "Désolée" mignon, chuchoté en coin, main en cache-lèvres.

Par la suite, Valia s'était effectivement rendue aux autorités. Quant à Eylion, il était bien allé à l'adresse qu'elle lui avait donné... pour tomber sur un Hyur pendu. Ce dernier s'était suicidé entretemps, avec un message empli de haine à son encontre. Un message mentionnant une vengeance accomplie. Le Mage avait trouvé l'ensemble un peu gros pour être vrai. Il avait fouillé la demeure, trouvant bien des éléments qui liaient Henrich au Manoir comme un journal ou encore des dessins semblant issus tout droit d'un esprit brisé. Mais rien qui ne lui avait permis de calmer cet étrange malaise qu'il ressentait depuis le début de cette affaire.

Faute de pistes, il avait dû finir par abandonner tout en se tenant sur ses gardes. Il avait rassemblé tous les éléments écrits en rapport avec le Manoir avant de laisser le soin aux voisins de remarquer le suicide avec l'aide d'une rumeur bien placée.

Plusieurs jours plus tard, Lucrétia avait fait sa rencontre nocturne pour "l'empoisonner". Il n'avait pas laissé, par contre, cette dernière. Dès le lendemain, il s'était rendu à l'Abéhys pour tenter de savoir si oui ou non elle avait été responsable de son Rêve. Elle avait feint l'innocence malgré la fureur du Mage, Mage qui avait dû lâcher prise quand des clients lui avaient fait des remarques sur son comportement vis à vis de la "douce et pétillante gérante".

En l'absence de preuves, il n'avait pas pu pousser davantage.

Lucrétia goûtait d'autant plus sa position. Il ne pourrait pas se débarrasser d'elle aussi facilement maintenant qu'elle était une figure reconnue de la taverne.

Certaines nuits, elle aimait faire des escapades nocturnes sur les toits. Le Miqo'te l'avait parfois remarqué en train de le "veiller" ainsi de loin. Mais il ignorait qu'une fois, elle s'était perchée à proximité du Tapas. C'était peu après qu'elle ait été habituée à sortir. Comme elle avait goûté sa présence sur le même Monde que son Lunaire...!

Elle qui avait été impuissante si longtemps. Elle qui n'avait pu être que spectatrice de sa vie. De devoir subir la vue de tous ces vautours autour de lui.

Mais c'était fini désormais.
Désormais, elle était à ses côtés.

Comme elle avait goûté la perspective de s'emparer de Yunaia, de lui infliger ce qu'elle aurait voulu infliger à Nitrischa. À Solid. À tous ceux qui avaient approché SoN Lunaire de près ou de loin. Elle se rappelait encore avec délectation de son expression alors que Lacie hurlait pour son crime. Que le Sang coulait à flots. Laquelle aurait-il fait si c'était Yunaia cette fois? Oh, entendre les cris de cette dernière...

Mais elle s'était contenue. Yunaia n'était plus une menace et les risques étaient bien trop grands de mettre à néant tout ce qu'elle s'était efforcée de construire.

Alors, au lieu de ça, elle s'était permise au moins de fêter dignement la "libération" de son Lunaire. Depuis le toit de sa maison, assise, sous une lune pleine, elle avait chanté d'une voix aussi enchanteresse que démente.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 08 sept. 2019, 23:30

Image
Une respiration rapide. Sourde.

Du Temps s'était écoulé. Il avait fait son œuvre.

Le Mage se fixait dans le Miroir. Il était plus livide que jamais. Plus mal en point qu'il ne l'avait été depuis son évasion du Manoir. Et pourtant... Pourtant...

Il était toujours là.

Eylion: Tu n'as pas réussi à m'avoir, Menphina, lança t'il avec hargne.

À côté de lui, délaissée sur un tabouret, sa coule de Deuil. Il la saisit, son ouvrage à proximité s'ouvrant sur l'impulsion de sa Volonté. Quelques incantations plus tard, le vêtement fut soulevé dans les airs. Les flammes grondèrent entre les doigts du Mage. Le Vent répondit à son Appel. Dans une sphère contrôlée, le Feu dévora la Coule jusqu'à ce qu'il n'en reste que des cendres, l'Air achevant de les envoyer dans une corbeille non loin.

Sa chemise blanche fut guidée par la même énergie surnaturelle à ses épaules, qu'il put revêtir de quelques gestes précis. Sa cravate fut ajustée autour de son cou. Son long manteau noir serré sur l'ensemble. Ses mitaines tirées. Le grimoire attaché à la taille. Et enfin, le cache-œil, le rejet même de l’œil Carmin conféré par Lucrétia.

Jamais ses convictions n'avaient été aussi fortes. Il était, désormais, totalement investi dans sa vocation de Docteur de l'Occulte.

Plus de doutes, plus d'attentes, plus d'heures interminables à tenter de déceler le Vrai du Faux. Sans doute au prix de sa propre Malédiction. Il avait décidé de garder assez de Cœur pour ses amis et ses patients. Le reste, il l'avait mutilé, dans l'espoir de ne plus jamais traverser à nouveau ce qu'il considérait non plus comme un Bienfait mais comme un Tourment.

La Mort, il ne la craignait pas, pas plus que la Torture ou toute forme équivalente. Les Démons, les Horreurs Nocturnes ne le faisaient pas plus frissonner. Il allait à leur rencontre avec le sourire extatique de quelqu'un qui n'avait plus rien à perdre si ce n'était la Vie. La seule chose qui était en mesure de le terrifier était bel et bien ce pan qui l'avait tant brisé.

Ce n'était pas pour autant que Menphina ou bien Nymeia en avaient fini avec lui. Loin de là.

L'une de ces Ironies allait prendre la forme de ce qu'il allait appeler la "Saison des Mariages". Des invitations à de multiples mariages, certains d'inconnus, d'autres de gens qu'il connaissait à peine. Au mariage arrangé de hauts dignitaires orientaux, il avait accompagné Kyuuji, l'air aussi joyeux que s'il était allé à un enterrement. Au mariage d'Houdi et Eku, il avait tâché de faire de meilleure figure. Toutefois, il y avait eu un mariage auquel il avait assisté avec joie.

Eylion: Kaldriss!

Le Démon lui avait accordé un sourire tout en entrant dans la maison du Lunaire avant d'avoir un air plus soucieux.

Kaldriss: Je suis allé à la Brigade pour venir te voir mais ils m'ont dit que...

Eylion avait hoché la tête avec un faible sourire en retour.

Eylion: Installe toi, dis moi ce que tu veux boire, avait-il dit en l'invitant d'un geste de main.

Ils s'étaient assis dans un coin du hall, sur des divans, chacun avec son verre. Le Mage lui avait raconté ce qu'il s'était passé, son ami compatissant à sa Perte.

Kaldriss: Je... Du coup, je me dis que je viens au mauvais moment...
Eylion: Hm?

Le Démon avait esquissé un sourire d'excuse, empreint d'appréhension.

Kaldriss: Je... voulais t'inviter à mon mariage. En tant que Témoin.
Eylion: ...!

Le choc de la nouvelle avait été telle que le Lunaire s'était relevé d'un coup.

Eylion: Tu...
Kaldriss: Ah... Beaucoup de choses se sont passées mais... globalement, Hélène a décidé de m'accepter comme je suis... Que je n'étais pas responsable de ce que l’Écorcheuse m'avait fait. J'ai refait ma vie sous le nom d'Arthur Sombreval. Et heu... du coup, heu...
Eylion: L'enfoiré!
Kaldriss: ...!!

Dans l'instant qui avait suivi, le Mage s'était précipité pour lui coller les mains sur les épaules, l’Émotion lui nouant la gorge. Après vingt ans de calvaire dans le Manoir. Après plusieurs années à croire Kaldriss mort, à avoir dû annoncer la nouvelle à sa famille. Après la pensée que son ami était resté vingt ans de plus à être torturé dans le Manoir pour en revenir en Démon sanguinaire. Tout prédisait une fin des plus tragiques. Pourtant, ni ses amis, ni les Shields avaient lâché quoique ce soit.

Et c'était le résultat de leurs efforts.

Kaldriss avait pris le poignet de son ami pour le serrer, tout aussi ému.

Eylion: Enfoiré, tu l'as fait... avait-il balbutié.
Kaldriss: Oui... C'est grâce à toi et à tes amis. Je ne saurai jamais assez vous remercier tous. Vous aurez toujours une place chez nous. Je... Heu... J'en déduis que... tu veux bien?
Eylion: J'essaierai d'être le plus aigri possible, promis, avait-il émis dans un rire troublé par la surcharge d'émotions.

Rire que le concerné avait accompagné à son tour. Ils s'étaient étreint brièvement. Une tape dans le dos puis le Mage s'était redressé, un sourire sincère aux lèvres.

Eylion: Félicitations.
Kaldriss: Merci, avait-il dit, radieux.

Eylion s'était rassis par la suite. Kaldriss, lui, s'était fait plus sérieux.

Kaldriss: Je voulais aussi te parler de deux choses hormis ça. La première est que j'ai fait un Pacte avec Hélène.
Eylion: ...?
Kaldriss: De ma par nature, je sais que je ne vieillirai jamais mais l'idée d'être, un jour, séparé d'elle... Alors j'ai fait le choix de lier ma Vie à la sienne. Le jour de sa Mort sera la mienne.

L'Azur s'était écarquillé à cette mention.

Kaldriss: Désolé, Kr... Eylion, je ne serai pas là pour voir ce que l'Avenir réserve à ce monde. C'est pour ça que... je voulais te demander une faveur. Je sais combien elle te sera cruelle mais... J'aimerai que tu sois le parrain de mes enfants. De ma lignée. Je ne te demande pas de veiller sur eux en permanence mais... Si un jour il nous arrivait, à moi et Hélène, malheur avant l'Heure... Ou que, même après ça, mes descendants abusent de la nature que je leur laisserai... Ça me rassurerait de savoir que tu puisses veiller sur eux.

Eylion avait grimacé malgré lui au fur et à mesure des paroles. Son regard s'était baissé sur ses paumes. Un long moment de silence avait alourdi l'atmosphère avant qu'il ne prenne la parole, ses doigts se refermant.

Eylion: En effet... C'est beaucoup me demander...
Kaldriss: Désolé... Je le sais très bien mais...

Le Démon avait baissé les yeux à son tour, contrit.

Eylion: ... Très bien.
Kaldriss: ...!

Le Mage avait relevé la tête vers le Démon en même temps que celui-ci, bien conscient du poids de sa décision.

Eylion: Très bien, si c'est en mon pouvoir, j'essaierai de faire en sorte que ton Bonheur ne soit pas la source d'un Mal à l'Avenir, avait-il énoncé avec un faible sourire attristé.
Kaldriss: Merci, Eylion... Merci...

Le mariage s'était déroulé sans accident cette fois. Il avait même été des plus somptueux. Arthur Sombreval et Hélène Meaubant s'étaient unis devant Halone sans que personne ne se doute de la nature du marié. Le Mage avait fait un témoin des plus exemplaires, même s'il n'avait pas raté l'occasion d'émasculer verbalement les invités qui avaient le malheur de jouer les langues de vipère derrière le dos du couple.

Les autres Ironies allaient arriver plus tard, des petites notes durant ses aventures.

Entretemps, l'Abéhys avait pris son envol. Il en avait fait un bastion de magie, un refuge éventuel et temporaire pour ceux qui en avaient besoin. Cependant, il avait appris à quel point certains "chasseurs" pouvaient se montrer fanatiques. De façon à pallier aux problèmes à venir, il allait se mettre en quête d'alliés et de sources de connaissances potentielles. Sa route allait ainsi croiser celles de plusieurs organisations dont le Rouage Éthérique, Éclipse, le Codex ou encore l'Ordre de Rivesthern. L'Arène Illusoire de l'auberge lui permettait également de repérer les combattants et mercenaires en mesure d'être engagés.

Ce fut durant cette période qu'il allait recevoir une surprise inattendue qui lui reviendrait à l'esprit plus tard.

Une Douleur l'interrompit dans ses pensées alors que, dans le miroir, une larme de sang se mettait à couler le long de la joue de son reflet, depuis le cache-œil. Il avait fini par comprendre d'où venait ces symptômes. Ce qu'ils impliquaient pour lui. Pour son Humanité. Pour le moment, tant qu'il s'en rappelait...

Du pouce, il essuya le sillon rougeâtre avant d'en goûter les teintes aussi cuivrées que corrompues.

Tant qu'il s'en rappelait...

Il finit par délaisser cette réflexion pour tourner ses pensées sur comment marquer la "fin" de son Deuil. La réponse n'avait pas tardé à se formuler. Un bon verre de Rhum. Il sortit de la salle de bain dans l'intention de se rendre à l'Abéhys sans savoir ce qui l'attendait.

Sa première rencontre avec Éclipse.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 04 mars 2020, 16:19

Image
Il s'approcha du comptoir pour s'y asseoir en soupirant. Derrière, J'reya s'était retournée en l'entendant approcher.

Eylion: Tu pourrais me servir un Réconfort d'Azeyma?

Quand elle vit sa tenue, un certain air de satisfaction se peignit sur ses traits, malgré une absence de sourire.

J'reya: Tout de suite.

Il avait posé, entretemps, ses coudes, mains jointes devant lui, l'Azur songeur sur un point invisible du mur à proximité. Il fut réveillé par le verre posé devant lui, le bruit faisant tilter ses oreilles de manière presque imperceptible.

Eylion: Oh, merci...
J'reya: Ça va?

Il saisit son soulagement, le portant à ses lèvres pour en savourer une première gorgée.

Eylion: Je suis vivant, je suppose que c'est une bonne chose... Et toi? À en croire ta tête, on dirait que quelque chose de bien s'est passé...?
J'reya: Hmpf...

Elle eut un semblant d'hésitation avant d'énoncer, de façon détachée.

J'reya: Je suis juste contente que tu te sois habillé comme ça.

Il haussa son unique sourcil visible, perplexe.

Eylion: Vraiment... Moi qui pensais que je faisais fureur avec ma coule... lança t'il avec un humour et un sourire grinçant.

Elle roula des yeux en s'appuyant sur le comptoir à son tour.

J'reya: T'es bête...
Eylion: La présence du grimoire à mon flanc dit le contraire, fit-il, avec le même sourire.
J'reya: Tu peux être intelligent et bête à la fois.
Eylion: Hm, je me demande bien comment un tel paradoxe pourrait exister, poursuivit-il, peu sérieux au vu de son ton.

Consciente qu'il la menait en bateau, elle se mit à le fixer, lèvres pincées pendant qu'il lui offrait un petit souriant défiant et insupportable en attendant la réponse. Elle finit par regarder ailleurs, acceptant la "défaite".

J'reya: ... T'es vraiment un crétin quand tu t'y mets...
Eylion: Moi qui te pensais plus combattive que ça, musa t'il à demi en reprenant une gorgée de son poison de prédilection.

Son amusement était bel et bien teinté par son Deuil même s'il tâchait de montrer bonne figure. Un Masque.

J'reya: Si tu veux voir ma "combativité", je peux grimper sur ce comptoir et te faire un plaquage, lança t'elle, détachée.
Eylion: Je t'en prie, fais, je serai assez curieux de savoir ce que penseront les clients qui pourraient venir, répliqua t'il avec le même sourire insupportable en demi-teinte.

Elle le fixa un moment, puis elle commença à monter sur le comptoir. L'oreille droite du Lunaire, en face, tilta légèrement à cette vue, son unique sourcil s'arquant sous l'effet de la perplexité.

Eylion: Sans blague...? fit-il avec un rire bas.
J'reya: Ne me défie pas, Eyl'... Tu sais que je vais le faire.

Elle esquissa un sourire en coin qui étira ses lèvres alors qu'elle se préparait à bondir.

Eylion: J'ignorais que tu étais du genre à sauter sur le premier homme venu, fit-il en retour, toujours muni de son demi-sourire infernal.

En guise de réponse, elle lui sauta dessus. Le Mage essaya aussitôt de s'esquiver mais avec une demie-seconde de retard. Il avait presque réussi à se décaler quand la main de la Solaire parvint à attraper son col et à l'entraîner dans sa chute.

Eylion: Mer...!!
J'reya: ...!!

Le verre de rhum éclata au sol non loin, les deux Miqo'tes à terre, le tabouret renversé. Ce fut pile à ce moment qu'un groupe arriva à l'autre bout de la salle.

Valka: Ah! le comptoir était ici.

Valka eut un air surpris en voyant la scène.

Valka: Oulah. Besoin d'aide?
Eylion: Urgh...
J'reya: Aïe...

Quand J'reya vit les gens arriver, la honte se mit aussitôt à teinter ses traits là où Eylion était encore un brin sonné par la chute. Quand ce dernier prit la pleine mesure de la situation, il se félicita d'avoir réussi à éviter en partie le plaquage. Deux Miqo'tes à terre, c'était une chose. Une Miqo'te à califourchon sur lui, ça, ça aurait été autre chose à expliquer à des purs inconnus.

U'eku: Est-ce... ça va?
Eylion: Urgh, ça va... aller... fit-il dans une grimace.
J'reya: Ça... Ça va... Je vais nettoyer ça, désolée.

Sans oser regarder l'assemblée, elle se leva pour aller chercher de quoi nettoyer le sol. Le Lunaire tâcha de se relever de même en réajustant sa veste.

Valka: Eh bah, je ne pensais pas que ça faisait de la lutte dans les tavernes de la Coupe.
Eylion: Un léger... accident... pesta t'il.

Il se mit ensuite à observer le groupe qui était de plus en plus nombreux. Un, deux, trois... Au final, une dizaine de personnes avait envahi l'endroit, lui arrachant un air étonné.

Valka: J'imagine bien.
Eylion: Hrm, bonsoir...
Hyckit: Bonsoir.

Un Solaire à la chevelure mi-longue immaculée s'avança avec un sourire, suivi de près d'un Lunaire roux aux traits encore empreints de jeunesse.

U'houdi: Bonsoir, on avait une petite envie de voir ce qu'il y avait par ici. Je ne sais pas si tu te rappelles de moi mais je me suis dis que ça serait intéressant de passer faire un coucou vu qu'on est habituellement à la Coupe.

Eylion reconnut ce dernier, le saluant d'un hochement de tête.

Eylion: Ah, hm... Il me semble qu'on s'était croisé au Kenkyo, non...?
U'houdi: Si, c'est ça. D'ailleurs je te présente mes collègues de ma compagnie dont Hyckit et mon compagnon Eku.

Ils s'étaient croisés le jour de la Valention. Le Lunaire était allé boire après avoir essuyé les lourds sous-entendus de son ancien compagnon. Il avait passé la soirée à discuter avec Bran, Houdi, Eido et J'reya. Une soirée somme toute calme. Houdi lui avait laissé une impression neutre, peut-être trop social pour le grincheux qu'il était.

Eylion: Oui, oui, je me souviens... Hé bien, ne restez pas debout, fit-il dans un soupir, faisant un effort en tant que propriétaire de l'endroit. Prenez place, J'reya va s'occuper de vous si vous voulez boire.
U'houdi: J'aurai pu prévenir par perle mais disons que je l'ai malencontreusement broyé.
Eylion: Broyé...?
U'eku: Heu...

Le Solaire souffla un rire en guise de réponse.

U'houdi: Elle avait un sifflement plutôt énervant, répondit-il avec un sourire décalé.

Sourire décalé qui lui valut un petit coup de coude de la part d'U'eku alors qu'Eylion esquissait un léger air incrédule.

Eylion: Un sifflement...

Houdi tourna la tête vers son voisin.

U'houdi: Quoi, c'est vrai.
U'eku: T'appelles ça un sifflement? répliqua t'il, malicieux. Je dirais qu'elle saturait plutôt.
U'houdi: Une garce que j'ai failli rappeler où était sa place, précisa t'il au Mage perdu.

U'eku hocha la tête.

U'eku: Alors, où est-ce qu'on s’assoit??
Eylion: Où vous voulez... Je ne sais pas s'il y aura assez de place au comptoir mais il y a des tables, dit-il en désignant les alcôves.

Une partie du groupe alla s'installer à une table, une autre au comptoir, laissant les deux Miqo'tes s'expliquer, encore debout. Après quelques échanges de mondanités, le Solaire se pencha vers Eylion.

U'houdi: ... Enfin passons. J'y pense, tu es toujours dans tes affaires dont tu nous avais parlé l'autre soir? Je risque peut-être d'avoir besoin de toi.
Eylion: Besoin de moi...?

Son oreille droite tilta.

Eylion: Pour?
U'houdi: Protéger un lieu d'une intrusion et de tes connaissances pour des objets qui semblent pas si ordinaires que je l'aurai cru.

En arrière-fond, J'reya essayait, tant bien que mal, de gérer l'afflux de clients. De plus en plus monde arrivait, au point qu'Eylion dut se pencher à son tour pour pouvoir mieux entendre Houdi. Eku, lui, survolté, enchaînait cocktail sur cocktail, les goûtant chacun avec gourmandise.

Eylion: Protéger un lieu... Des objets...

Sa Curiosité fut pleinement piquée.

Eylion: Vous voulez en parler en privé ou...?
U'houdi: Humm.

Le Solaire regarda vers son groupe.

U'houdi: Je peux peut-être te proposer qu'on en parle avec eux?
Eylion: Ce sont des gens que vous connaissez donc.
U'houdi: Bien sûr, c'est mon chef et mes collègues. Ce sont mes frères d'armes et ils ont été mêlés indirectement à ce dont j'aurai envie de te parler.
Eylion: Très bien, alors allons les rejoindre.

Ils rejoignirent la table où le groupe se trouvait. Il fallut quelques acrobaties pour qu'ils puissent s'installer à leur tour. Une fois assis, le Mage posa les coudes sur la table, mains jointes.

Eylion: Mêler indirectement... Alors, de quoi s'agit-il?

Ce fut un Hyur qui répondit.

Hyckit: Nous avons une compagnie de mercenaire installée à la Coupe.
Eylion: Une compagnie de mercenaires...?
Hyckit: En effet. Hommes à tout faire en quelque sorte. Ça va de sauver le monde au chaton dans l'arbre.
Eylion: Je vois... et quel est le nom de votre groupe?
Hyckit: La compagnie Éclipse.
Eylion: Hm... J'en ai entendu vaguement parler et quand je dis "vaguement", je dis bien seulement le nom.

Le Mage prit alors un ton plus professionnel et détaché pour sa suivante question.

Eylion: Que puis-je pour vous?
Hyckit: Disons que l'on a eu pas mal de visites et que nous avons dû faire... des choix tactiques pour que tout fonctionne chez nous.
Eylion: Des choix tactiques...?

Durant leur échange, le groupe commandait leurs boissons et plats. Quand J'reya passa à leur proximité pour les servir, le Lunaire lui offrit un maigre sourire d'encouragement, bien conscient qu'elle était débordée avec la petite foule présente. Celle-ci déposa un rhum devant lui qu'il n'avait pas commandé, une attention qui ne manqua pas de le faire autant dépiter que sourire davantage. Elle commençait à bien trop le connaître.

En arrière-fond de leur table, la taverne résonnait du poids de toutes les conversations des clients qui affluaient.

U'eku: Merci dame!
Hyckit: Disons que quand je vois une gangrène, je coupe le pied.
Eylion: Vous voulez dire... Comme des personnes à problème?
Hyckit: Exactement.

Houdi confirma par un hochement de tête.

Eylion: Je vois...

Le Lunaire attendit que ces derniers développent, attentif.

Hyckit: Je ne développerais pas sur eux. Disons qu'ils sont venus... Ils ne se sont pas adaptés... on s'en est donc séparé.
Eylion: Un rapport avec votre histoire?
U'Houdi: Un peu dirons nous car, au final, nous avions parmi eux des personnes qui auraient pu nous aider à trouver des réponses mais plus j'y pense, plus je me dis qu'on sera mieux de voir ça avec toi.
Hyckit: Tiens Houdi, je te prie, enchaîne un peu que je profite de mon café chaud.
Eylion: Hm... Pouvez vous développer depuis le début? Quel a été le facteur initiant votre affaire?
U'Houdi: Disons que, dernièrement, nous avons reçu la visite de personnes ayant pillé notre camp lors de notre séjour d'entraînement au Coerthas. Les voleurs savaient parfaitement ce qu'ils venaient chercher et c'était deux de mes objets les plus précieux.
Eylion: Deux objets précieux donc...
U'houdi: Sauf que je les tiens de mon défunt compagnon. Une longue vue et une boussole qui, jusque là, étaient juste ses affaires. Mais elles ne peuvent pas être ordinaires. Les voleurs n'auraient pas pris le risque de venir les prendre si c'était juste des simples affaires sentimentales d'un mort disparu depuis quatre ans.
Eylion: Défunt compagnon...?
U'houdi: Il était un archéologue originaire de Sharlayan qui pratiquait l'Astromancie.
Eylion: C'est ce qui vous fait dire que ces objets sont spéciaux?
U'houdi: C'était des objets qu'il avait toujours avec lui depuis que je le connaissais, je les ai gardé avec moi comme toutes ses affaires car je sais qu'il y tenait. Au début, je pensais qu'ils étaient ordinaires puis son cristal m'a choisi et depuis peu, j'ai décidé de... l'écouter, dirons nous. Et depuis c'est flou dans ma tête... Mais étrangement, lors de ma visite à Ishgard, j'ai certaines personnes qui ont connu mon compagnon et qui m'ont fortement incité à leur laisser le cristal.
Eylion: Incité? reprit-il, légèrement surpris. Pour quelle raison?
U'houdi: Je sais pas... C'est le lendemain que nous avons été cambriolés.
Eylion: Ils ont bien dû avancer des arguments pour tenter de vous prendre ce cristal, non?
U'houdi: Justement l'Astromancie étant un art qui s'ouvre aux autres cultures, pourquoi vouloir me le reprendre alors que j'ai souhaité l'apprendre? C'est justement ce qui fait que je me demande si c'est pas en lien avec les objets et les recherches de mon compagnon. Ils m'ont balancé le blabla faux cul de "il nous manque".
Eylion: Aucun argument vala...
Hyckit: Excusez moi, dit-il en se relevant.

Le groupe tourna la tête vers l'intéressé avec des regards interrogateurs.

Hyckit: Houdi, je te laisse continuer. Je reviens vite.
U'houdi: D'accord.

Le Mage acquiesça sobrement, le Hyur s'éloignant vers un nouvel arrivant non loin. Il revint ensuite à son interlocuteur.

Eylion: Ainsi, on a cherché à s'accaparer votre cristal... et le lendemain de votre visite à Ishgard, on a volé deux objets de votre défunt compagnon... Comment est-il mort d'ailleurs?
U'houdi: Je...

Il hésita un instant, pensif.

U'houdi: J'ai longtemps pensé que c'était à cause d'une attaque d'Amalj'aas... Mais, finalement, je commence à me dire que j'étais tellement effondré que j'ai même pas pris le temps de voir vraiment comment il était mort.
Eylion: Mon "instinct" me dit qu'il y a bien plus que ça... Pouvez-vous me dire comment vous l'avez appris? Ce qu'on vous a dit... Avez-vous vu le corps?
U'houdi: Humm...

Le Solaire se passa une main dans les cheveux tout en cherchant dans ses souvenirs.

U'houdi: Ce jour là, Ïhyan semblait avoir une idée sur un lieu à visiter dans le désert de Sagolii sauf que j'ai dit que j'allais, avant, chasser avec mes sœurs et que ça pouvait attendre car ça faisait cinq ans que c'était ce genre d'idées qu'il avait régulièrement sans véritable piste exploitable... Ce jour là, au retour de la chasse, c'est ma petite sœur qui est venue m’annoncer qu'Ïhyan était parti en avance.

Le Mage l'écouta, attentif, sans l'interrompre.

U'houdi: Bien sûr, comme dans tout couple, on se chamaille et là, c'était un brin rageux que je suis parti le rejoindre. Mais j'ai mis du temps à le retrouver. Il répondait plus à la perle, ni rien. Jusqu'au moment où j'ai retrouvé sa piste... dans un camps d'Amalj'aas, mort... De rage, J'ai fait quelques morts au passage, pris Ïhyan et suis rentré au camp... Après ça, j'ai perdu la tête donc j'ai pas fait ce qu'il fallait pour connaître la vérité.
Eylion: Vous avez donc supposé que les Amalj'aas étaient responsables de sa mort...?
U'houdi: Oui, ce qui est courant chez nous est d'être pris en embuscade par leurs guerriers.
Eylion: Hrm...
U'houdi: Au final, je ne sais même pas s'il a trouvé ce qu'il voulait...
Eylion: Désolé mais je vais devoir demander... Avez-vous noté quelque chose de particulier vis à vis de ses blessures?

Houdi secoua doucement la tête tout en baissant ses oreilles. Eku, à ses côtés, lui jetait de temps à autre des regards tout en buvant son cocktail en silence.

Eylion: ... Savez-vous ce qu'il cherchait? Avait-il un journal?
U'houdi: Il doit sûrement avoir un journal, enfin il en avait! Mais trop, c'était le genre de con à en foutre partout et tout me placarder sur les murs et étaler au sol de son bureau.

Le Lunaire ne put s'empêcher de toussoter discrètement à cette mention comme si ce cas de figure ne le concernait pas. Le capharnaüm de sa chambre témoignait allégrement du contraire.

U'houdi: Et je... Depuis que j'ai son cristal, j'ai compris que ce qu'il cherchait était un élément important pour les anciennes âmes qui ont eu le cristal. Comme si une volonté s'était transmise.
Eylion: Une volonté... Laquelle...?
U'houdi: Retrouver une relique de Sharlayan si j'ai bien compris, sans doute liée à l'Astromancie.
Eylion: Une relique... La boussole et la longue-vue doivent peut-être permettre de la localiser...
U'houdi: Avec cette boussole et la longue vue, il y a un astrolabe que j'avais gardé à la maison, précisa t'il.
Eylion: Vous l'avez toujours?

Houdi fouilla dans sa sacoche, sortant l'objet pour le déposer devant le Mage. Ce dernier le saisit afin de pouvoir le regarder sous tous ses angles.

Eylion: Puis-je l'analyser...?
U'houdi: Oui... Fais.

L'Arcaniste déposa l'objet sur la table avant de dégainer son grimoire qu'il ouvrit à côté. Les pages virevoltèrent sous l'effet de sa Volonté, main au-dessus de celles-ci, jusqu'à s'arrêter au sortilège qui l'intéressait. Il prononça alors quelques incantations, l'ouvrage se mettant à réunir l'Éther nécessaire pour lancer son sort d'analyse magique. Les symboles sur la page s'illuminèrent, prenant un bleu luminescent, une luminescence qui imprégna son Azur. Sa vision était désormais parcourue de symboles arcaniques. Son sort "traduisait" les phénomènes magiques en symboles arcaniques qu'il devait ensuite déchiffrer. Là était tout l'avantage mais aussi la difficulté de son sortilège.

Son action lui valut l'attention des personnes aux alentours, certaines se posant des questions sur ce qu'il se passait à la table du groupe.

Eylion, lui, fit défiler quelques symboles de quelques gestes précis, en écartant certains pour pouvoir avoir une meilleure vue sur d'autres. Après un moment, il put comprendre qu'il s'agissait bel et bien d'un artefact refermant quelques détails particuliers. Son Azur toujours luminescent, il ne tarda pas à reprendre sa conversation à voix basse.

Eylion: Intéressant... Ce n'est pas un objet ordinaire...

Il porta une main sur la surface de l'Astrolabe, ses doigts s'arrêtant au centre.

Eylion: Il y a une matéria à l'intérieur... Mais elle ne semble pas complète.

Il releva la tête vers le Solaire.

Eylion: Que savez-vous de la relique à trouver?
U'houdi: Rien... En fait, on est revenu depuis peu du camp et le cristal... Je n'ai réussi à m'ouvrir à lui que depuis peu... Je ressens plutôt un savoir et un nom me revient.
Eylion: Un nom?
U'houdi: Oui mais j'arrive pas vraiment à le comprendre clairement... Comme si c'était juste un vieux souvenir d'enfance, comme si je l'ai très bien connu, mais j'arrive pas à mettre un mot dessus.
Eylion: Peut-être qu'avec le Temps, vous aurez d'autres murmures... En tout cas, vous devriez faire très attention... Si on vous a volé deux objets déjà, il ne faut surtout pas que celui-ci tombe entre les mains de vos ennemis.

Il prit l'Astrolabe, tentant de le manipuler pour voir s'il y avait des gravures ou des emplacements secrets dessus.

U'houdi: C'est pour ça que j'aimerai protéger mon territoire déjà.
Eylion: Votre territoire?
U'houdi: Notre maison à ma Tribu et moi même. Mais aussi celle qui est notre tribu principale au désert de Sagolii. Non loin, j'ai enterré Ïhyan...
Eylion: Je vois, c'est là que vous gardez vos affaires et celles de votre compagnon défunt, je présume.
U'houdi: Oui.

Il eut un demi-sourire intéressé. Demi car il était encore sous le contrecoup de son Deuil et son expression ne pouvait pas entièrement le cacher. Malgré tout, il lui était difficile de ne pas montrer un semblant d'enthousiasme face à autant de mystère.

Eylion: Alors je suis votre homme, lança t'il, à demi bravache. Avec un peu de chance, vos ennemis tenteront de voler les objets restants et c'est là qu'il sera plus facile de les choper avec de bons pièges.

Le Solaire souffla un rire à la réaction de son comparse, esquissant un sourire à la fois triste et soulagé.

U'houdi: Franchement vieux ... Si tu m'aides à trouver des réponses, je te revaudrais ça, crois moi.
Eylion: Je ne fais pas payer mes services, j'ai plusieurs sources de revenus pour ça... Ma Voie est ma Voie, pas un métier. Après, ceux qui le souhaitent peuvent me fournir quelques cristaux d'Éther mais ce n'est pas une obligation.

Auparavant, il en récoltait pour les Shields. Maintenant, il le faisait pour pouvoir nourrir Lucrétia. Intérieurement, ça le débectait de devoir faire ça pour elle mais c'était ça ou courir le risque qu'elle s'en prenne à des innocents.

U'houdi: Franchement? Je pense qu'avec ce qui se profile, ce sera plus que des cristaux qu'on trouvera.
Eylion: Je me doute et je suis toujours à la recherche de connaissances... D'ailleurs, il me faudra l'accès aux affaires et notes de votre compagnon... Je pense que c'est un bon départ, il a forcément dû noter des choses sur ce qu'il cherchait. Quant à votre territoire... Je proposerai de poser des protections magiques et d'organiser des tours de garde... Pièges et surveillance discrète, pour tomber sur les intrus.
U'houdi: Alors chez moi niveau surveillance mes sœ...

Le Solaire grimaça alors, se rappelant de son nouveau rang.

U'houdi: Femmes sont... Enfin, on a du monde à la maison en continu et elles sont des combattantes donc elles seront attentives.

La mention interpella le Lunaire qui arqua son unique sourcil visible.

Eylion: Vous êtes Nunh?
U'houdi: Oui, dit-il dans une petite moue. C'est assez récent et c'est pour donner un refuge aux U de passage sur Uld'ah et celles qui veulent avoir la paix.
Eylion: Je vois...

À la vue de la moue d'Houdi, il rajouta.

Eylion: Ce n'est pas moi qui vous jugerai sur la question si ça peut vous rassurer.

Assez globalement, le Mage se fichait de ce qu'il se passait dans la couche des uns et des autres. Pour lui, tant que les personnes impliquées étaient consentantes et que ça ne venait pas l'emmerder explicitement, ça ne le regardait pas. Il savait très bien comment les Nunhs étaient perçus selon la culture Hyur, sans parler que la globalité des femmes Solaires hors tribu l'étaient souvent pour fuir un tel système. Mais ça ne voulait pas dire, pour autant, que tous les Nunhs profitaient de celui-ci.

Sa philosophie était donc de voir au cas par cas. Le Temps lui dirait bien ce qu'il en était d'Houdi.

U'houdi: Je sais...

Leur attention fut alors interpellée par l'approche d'une Hyurgoth.

Mallorn: Bonsoir.
Eylion: Une amie à vous...?

Houdi la salua avant de lui répondre.

U'houdi: Voici Mallorn, notre meilleure pisteuse mais celle-ci a eu du mal à retrouver ceux qui ont volé les objets. Une Éclipse aussi.
Mallorn: Ravie.

Eylion acquiesça, légèrement surpris.

Eylion: Vous êtes sacrément nombreux. Enfin, c'est le minimum qu'on doit attendre d'une compagnie, j'imagine.
U'houdi: Nous sommes maintenant un groupe encore plus efficace, dit-il avec un sourire fier.

L'Arcaniste ne répondit pas au "Ravie". Comme d'habitude, il ne s'épanchait pas en politesses, surtout vis à vis des femmes envers qui il nourrissait toujours une grande méfiance. Bien que J'reya avait adouci ce pan, sa présence n'avait pas, pour autant, effacé des années de mauvaises expériences.

Eylion: Aucune piste, hm... Ça ne m'étonne pas vraiment mais ils reviendront, je n'en doute pas... Si on vous a approché pour votre cristal.

Il rendit l'astrolabe à Houdi qui le rangea à nouveau dans sa sacoche.

U'houdi: Oui, je suis l'attire-emmerde du groupe en ce moment donc je me dois de m'assurer que mes frères d'armes et ma tribu soient correctement protégés.
Eylion: Si on ne peut pas les suivre alors appâtez les mouches avec du miel et elles accoueront. Je peux aussi vous proposer des protections magiques pour votre territoire.
U'houdi: Intéressant comme idée faudrait en parler avec les fonda d'Éc...

Il fut interrompu par Eku qui avait enfoui sa tête dans son cou. Le Lunaire roux avait enchaîné cocktail sur cocktail depuis le début de la conversation, ce qui faisait que son état actuel d'ébriété avait atteint un degré assez catastrophique. Celui-ci se releva tout aussi vite tout en s'exclamant.

U'eku: J'ai chaud! Je vais d'hors! s'exclama t'il en allant tanguer hors de la table, d'un pas incertain.
J'reya: Je... Ouh là, intervint-elle depuis le comptoir. Eh, m'sieur.

Eylion, lui, suivit brièvement du regard, un brin compatissant. Il ne connaissait que trop bien les effets de l'ivresse.

U'eku: C'est Houdi qui paye!!

J'reya se dirigea vers Eku, prête à le rattraper.

J'reya: Ça va aller? Tombez pas, hein...

Houdi regarda la scène, peu rassuré, avant de tourner la tête vers Mallorn.

U'houdi: Mally... Il en est à son combien?
U'eku: Ç'vaaaa, j'suis un moine moi! J'ai l'équilibr-whooh! ... L'équilibre!
Mallorn: Je ne sais pas, deuxième?
J'reya: ... Vous êtes sûr que vous voulez pas vous asseoir?
Eylion: Je crois un peu plus... Vous devriez peut-être aller le soutenir...
U'eku: Ça va! Vraiment! dit-il avec un grand sourire.
Mallorn: Le porter!

Incrédule, la serveuse demanda.

J'reya: ... Mettez-vous sur une jambe, et mettez votre index sur votre nez.
U'eku: Hein? Heu...

Il essaya de faire ce qu'elle lui avait dit mais il manqua de tomber. Il secoua la tête et tenta de recommencer aussitôt sous les airs à la fois perplexe et inquiet de l'assemblée, provoquant de nouveaux murmures. Houdi, lui, bascula la tête en arrière, consterné.

U'houdi: Rahhh. Je sais pourquoi... Enfin, voilà une des conséquences de toute cette histoire.
Eylion: Pourquoi...?
J'reya: Ouais, bien ce que je pensais...

Le Nunh ne lui répondit pas, se levant pour aller soutenir son compagnon.

Eylion: Hrm...

Pendant son trajet, le Mage revint au reste du groupe.

Eylion: Je ne sais... pas trop s'il va revenir mais... quoiqu'il en soit, je suis en mesure de poser des pentacles d'entrave au cas où.
Mallorn: Mage?
Eylion: Arcaniste, dit-il en hochant la tête. Et Docteur de l'Occulte pour ma Voie.

Une fois le Solaire auprès du rouquin, celui-ci lui saisit les épaules avec précaution.

U'houdi: Je prends le relai, merci à toi, dit-il à J'reya avec un petit sourire gêné.

La combattante soupira en retour en les laissant passer. Le duo revint à la table.

U'houdi: Allez, viens p'tit Astre.
U'eku: Désolé... j'ai fait une scène devant un homme important pour notre cause? fit-il, ses oreilles s'abaissant.

Sans lui répondre, il l'installa à côté de lui et Mallorn, tournant ensuite la tête vers Eylion.

U'houdi: Pardonne moi, fit-il avec un sourire au Mage.
Eylion: Hrm... Est-ce qu'il va bien? demanda t'il avec une légère grimace.

Pour une fois que ce n'était pas lui à cette place...

U'eku: J'vais parch... par... J'vais bien.
Eylion: Il n'y a rien à excuser... Je comprends les attraits de l'alcool, dit-il en secouant la main.

Il ajouta par la suite, de manière plus inaudible, à part.

Eylion: Et ses déboires...

Murmure que l'Astromancien saisit au vol avec un sourire en coin.

U'houdi: Ohh, je me rappelle.

Soir de la Valention. Après six verres.

J'reya avait pris le verre d'Eylion après une provocation de sa part incitant ses comparses à boire.

Eylion: ...??! Hé...!

Houdi avait regardé le petit groupe de Bran, J'reya, Eylion et Eido avec un air perplexe.

U'houdi: Ah ben, j'ai choisi mon jour, tiens.

Elle avait recraché sa gorgée sur l'instant.

J'reya: C'est dégueulasse!
U'houdi: Visiblement, elle aime pas.

Le Mage n'était pas parvenu à esquiver une partie du crachat, grimaçant à l'impact du reste de rhum sur son bras.

Eylion: Putain d'bordel d'merde...! Un peu d'respect pour le rhum, merde quoi!

Eido n'avait pas pu cacher un sourire, aussi amusé que content que l'alcool ne plaise pas à la Solaire, se disant intérieurement que ça ferait une personne de moins qui boira de l'alcool.

J'reya: Oh, ça va toi! avait-elle répliqué en reposant le verre, dégoûtée.
Bran: Hey doucement.
Eylion: Putain, c'est ma meilleure veste... avait-il dit en tirant sur sa manche, écœuré.

Il s'était ensuite exclamé en pointant un doigt vers elle.

Eylion: Toi, tu m'dois un nettoyage et une excuse pour le rhum! Non, même, une excuse AU Rhum...!
J'reya: T'es assez rond pour que je doive faire des excuses à une boisson? Sérieusement?

Bran, lui, s'était empressé d'aller chercher une serviette qu'il trempa dans l'eau chaude. Il avait tendu celle-ci au Mage ivre.

Eylion: ...? Oh...

Pâteux, le Lunaire l'avait saisi difficilement.

Eylion: Merci...
Bran: C'est du rhum, pas du vin, ça partira facilement.
Eido: En soit, ça fait une personne de moins qui risque de prendre ton rhum, s'était-il empressé de dire pour essayer d'apaiser la tension.

Eylion avait tapoté la tâche avec la serviette avant de "fusiller" J'reya de l'œil.

Eylion: Le rhum, c'n'est pas qu'une boisson, merde... T'imagine pas tout c'qu'il faut faire pour... pour en faire...! avait-il grommelé.
J'reya: Je suis sûre que tu vas me faire un cours dessus.
Eylion: T'en es pas assez digne.

Oui, Houdi se rappelait bien de cette soirée. De retour au Présent, il eut droit à un regard blasé de la part du Mage alors qu'Eku laissait son front tomber lamentablement sur la table pour profiter du frais de celle-ci. Un air extatique peignit les traits du rouquin qui semblaient exprimer un "Aaaahhh, fraaaiiiiiis, ça fait du bien".

U'houdi: Et lui, je pense que c'est parce que cette histoire me fait retomber dans un sombre passé et, du coup, le pauvre en subit les conséquences.
Eylion: Les conséquences...?

Mallorn, de son côté, s'employait à tenter de redresser Eku. Le Nunh rapprocha alors son compagnon de lui.

U'houdi: Laisssee Mallorn, dit-il avant de revenir à Eylion. Hé bien, cette histoire me travaille et fait que je pense à mon amour passé... J'aurai pas aimé être à sa place.
Eylion: Vous êtes ensemble, c'est bien ça...?

Houdi acquiesça, ce qui incita le Lunaire à avoir un bref sourire à la fois attristé et compatissant. Un soupir de la part d'Eku attira leur attention, celui-ci tâchant de raccrocher le peu de conscience qui lui restait pour éviter de faire une scène. Il essaya de se redresser par la suite pour montrer un brin de dignité.

U'houdi: La raison de pourquoi j'ai accepté de m'ouvrir au cristal, c'est que je pensais que j'avais enfin fait mon Deuil.
Eylion: Ce n'est jamais simple quand on n'est pas la première flamme de sa moitié, lança t'il, semblant parler d'expérience.

Combien de fois l'avait-il payé, que ce soit avec son ancienne Femme et puis, son ancien compagnon maintenant? Lui-même, était-il parvenu à oublier complètement Nitrischa? Même s'il voulait le nier, il portait encore les cicatrices qu'elle lui avait infligé. Ces plaies, béantes, suppurantes, contre lesquelles il continuait encore de lutter. La touche de Solid n'avait été qu'un peu de sel supplémentaire.

La seule chose qui le sauvait était sa Hargne. Sa Volonté de ne pas se laisser aller. De claquer la porte à ce passé et de ne pas s'y attarder. De se dire qu'elle ne méritait pas une seule de ses larmes, une seule once de souffrance ou de pensée.

Plus facile à dire qu'à faire.

U'eku: 'rrêtez, p'rlez moi... j'suis là... et pis... j't'ai dit pas ab'donner... faut que t'trouve cette relique...
U'houdi: Je sais... dit-il en détournant le regard, ses oreilles s'abaissant de nouveau. On est là pour ça...
Eylion: Une étreinte et quelques mots rassurants, je ne connais pas de meilleurs remèdes.
U'houdi: Oui et je n'y manquerai pas. Mais une fois que je l'aurai jeté dans le bain.
Mallorn: Glacé le bain, renchérit-elle, amusée.
U'houdi: Owiii, lança t'il, le sourire sadique.
U'eku: Noooon... pas glacé... je déteste le froid... s'exclama t'il d'une voix plaintive.

C'était donc à ça que ça ressemblait de se trouver de l'autre côté, ne pouvait s'empêcher de penser le Mage.

Eylion: Ne... soyez pas trop rude avec lui. Parfois, un instant d'ivresse permet d'ôter ses pensées noires, que ce soit la bonne solution ou non.
U'eku: M'rci! vous êtes g'til vous! s'exclama t'il en tendant les mains vers Eylion.

Le Mage eut une brève grimace. S'il y avait bien un qualificatif avec lequel il avait du mal, c'était bien celui-ci.

Eylion: Hrm...

Il préféra revenir à Houdi.

Eylion: En tout cas, vous me direz quand je pourrai venir chez vous, fouiller dans les affaires à la recherche d'indices.
U'Houdi: Enfin, du coup, on tente de faire tout le côté protection quand tu voudras, d'accord?
Eylion: Oui, je parlais de pentacles d'entrave, si ça vous disait... Et pour la surveillance, je vous conseillerai de faire croire qu'il y a des lacunes, de faire de la surveillance discrète dans ces "brèches" là.

Le Solaire approuva avant d'enchaîner.

U'Houdi: Et toi... La dernière fois, tu n'étais pas en forme. C'est lié au deuil actuel? Je me permets de demander car tu me tends une main et je trouve dommage de ne pas faire de même aussi de mon côté.
Eylion: ... C'était les prémisses de la Vérité que je me refusais à voir, dit-il avec un faible sourire de façade, préférant montrer de la force plutôt que de la faiblesse.

Le rouquin, pendant ce temps, s'était affalé à moitié sur son compagnon, ronflant et bavant sur son bras. Houdi se laissa faire, se contentant de caresser le côté du bras d'Eku.

Eylion: Ça va aller, seul le Temps... Malheureusement... pourra panser ces plaies. Pour le moment, je veux juste que Menphina me foute la paix.
U'Houdi: Qui est-ce?
Eylion: Menphina... La déesse de l'Amour... C'était une Métaphore.
U'Houdi: Oh, pardon, j'étais loin là... Ouai, elle joue des tours pas cool... Mais bon, depuis peu, je vais la remercier quand même.
Eylion: Ah ça, je ne peux que souhaiter les meilleurs bienfaits aux autres.

Mallorn préférait rester silencieuse, se faisant oublier en fixant un point invisible sur le sol à proximité.

U'Houdi: Et à toi.

Il eut un bas ricanement en réponse.

Eylion: Je crois qu'il est stipulé quelque part qu'elle me hait et m'a conféré un mauvais goût pour choisir mes partenaires...
U'eku: Buuh... Menphina... C'l'a dé'sse... des lunaires, siiii!

Après cette intervention soudaine et éclairée, l'ivrogne retomba dans son coma éthylique. L'effort surhumain arracha un sourire mi-navré, mi-impressionné au Mage.

U'Houdi: Maissss nannnnnn, allez, tu verras, la roue va tourner... Regarde, j'en ai eu au cul mais je craignais le pire à chaque fois, ça n'a pas loupé. J'en ai même une qui m'a sorti un: Va te suicider PD... Ma foi, celle là, Menphina a oublié qu'elle était surtout à éviter de me la mettre sur la route. D'où l'histoire de la perle brouillée.

Cette mention eut le don d'arracher un air interloqué au Lunaire dont l'Azur se mit à cligner malgré lui.

Eylion: Ah... ouai...
U'Houdi: Et regarde! J'ai enfin trouvé mon p'tit Roux qui a encore beaucoup à apprendre mais, depuis, j'ai trouvé une raison de me lever avec le sourire.
U'eku: RRRR... j't'aime... moa... rrrrr... zzzzz... fit-il en serrant le Solaire.

Ce fut là que l'une des personnes attablées se mit à évoquer les noms de Djin et Yunaia. Ce fait obligea Eylion à expliquer en partie l'histoire. Comment il en était venu à devoir choisir entre deux personnes aimées avant de devoir couper les ponts quand ça lui était devenu impossible de concilier Amour et Amitié. Hyckit était revenu entretemps pour entendre l'histoire.

U'Houdi: Je vois... Je connais, fit-il, le récit terminé. C'est comme la fois où j'ai rencontré Leiji, la première fois, et, au final, entre Leiji et Eku... Disons qu'un des deux a vraiment assumé et montré une grosse volonté de me démontrer son amour. Le second baroude, il est de la tribu et reste mon Oméga, on va dire... Mais mon cœur a décidé d'être dévoué à Eku.

Eylion regarda le Solaire, étonné mais il n'était pas au bout de ses surprises car Hyckit se décida alors à prendre la parole.

Hyckit: Moi Kaly. Mais pas amoureusement.
Eylion: Kaly...
U'houdi: Kaly? Elle est avec... Hein? Elle a tenté avec toi?
Hyckit: Il n'y a rien eu.
Eylion: Kaly comme... K'alyanni?
Hyckit: Exactement, monsieur.

L'émotion prit le Mage. K'alyanni, sa première disciple, celle qu'il avait toujours considéré comme sa fille.

Eylion: C'est... mon ancienne disciple.
U'houdi: Ah!
Hyckit: Vous?
U'houdi: Ah ben, tiens.
Eylion: Oui... Comment va t'elle? demanda t'il, concerné.
Hyckit: C'est vous qui l'avez sortie de la rue?

En guise de réponse, Eylion hocha faiblement de la tête, une myriade de questions y passant dans le même temps.

Hyckit: Hé bien... elle est venue chez nous, un temps, pour monter une bibliothèque.
U'houdi: C'était d'elle dont je parlais qu'elle avait un savoir qui aurait pu nous servir mais qu'elle a fait parti de ceux qu'on a... dû se séparer.
Eylion: Pourquoi...?
Hyckit: Disons qu'elle... n'acceptait pas le côté militaire d'une compagnie de mercenaires. Elle... m'a abandonné du jour au lendemain... se... prétextant ma sœur... pour accomplir son désir de fonder sa bibliothèque avec Aezen. Un Samouraï sorti de nulle part.

Le Mage fronça son unique sourcil visible. Le nom ne lui était pas inconnu. Il avait vu ce Samouraï rôder autour de Yunaia mais aussi autour d'autres femmes. Il n'ignorait rien de sa réputation de séducteur et de manipulateur.

Eylion: Aezen...
Hyckit: Un ronin.
U'houdi: Ce qui, au final, est dommage car il nous manque à présent une partie plus magique à la compagnie... On manque de savoir sur le domaine et donc de connaissances pour les protections ou façons de combattre ce genre de choses... Mais bon...
Eylion: Tch...

La Colère et l'Inquiétude peignirent ses traits.

Eylion: Il est donc auprès d'elle...
Hyckit: Oui, il est tout le temps dans son ombre. Dans son départ, elle a non seulement ébranlé ma foi en l'amitié... mais aussi ruiné un jeune archéologue qui a donné tout ce qu'il avait pour une expédition avec elle... Elle l'a planté... le soir même avant qu'ils ne partent. Le pauvre Blake a tout perdu.
Eylion: Ça... ne ressemble pas à la Kaly que j'ai connu... fit-il, interloqué.
U'houdi: Ben, moi, j'avoue que j'ai vu un changement chez elle... J'ai trouvé que son intervention durant la réunion que j'animais était étrange. Comme Hyckit, j'ai connu Kaly pétillante et sûre d'elle... intelligente et douce... et elle a tourné le dos à tout le monde pour son projet.

Une combattante Lunaire s'approcha à ce moment du groupe. Après avoir demandé le sujet de la discussion, elle tiqua au nom de Kaly.

Ihna: Oh, vous parlez de celle contre qui j'ai un sacré croc.
Hyckit: Oui, Ihna. Assis toi.

Le Mage s'était pris, en parallèle, la tête entre ses mains, sous le choc. Il n'arrivait pas à croire ce qu'il entendait. Son ancienne disciple, capable de manipulation? De se retrouver avec autant de personnes à dos? Qu'est-ce qui s'était donc passé depuis la dernière fois qu'ils s'étaient vus?

Eylion: Je...
Ihna: Ah oui, ça fait du bien de se poser, lança t'elle en prenant place.
Eylion: Par Azeyma...

Il finit par relever la tête, catastrophé, culpabilisant toujours de ce qu'il vivait comme un abandon de sa part. Pendant ce temps, le reste du groupe se saluait et faisait en sorte que tout le monde trouve sa place autour de la table.

Hyckit: Mais attention. Kaly a eu ses raisons que je comprenne ou pas. Je ne veux pas lui jeter la pierre.
Eylion: Je ne savais pas... Je pensais qu'elle avait trouvé sa moitié... qu'elle était heureuse.

Il se souvenait que Yunaia lui avait parlé de ce point quand elle travaillait encore à l'Antique Café, ce qui l'avait rassuré sur le coup.

Hyckit: Qui donc?
Eylion: Je ne sais pas trop... Je l'avais appris par des tiers, disons que... Hrm... Je me suis éloigné d'elle car elle était tombée amoureuse de moi... mais je la voyais plus comme ma fille... Pour lui permettre de faire son Deuil et ne pas lui donner de faux espoirs, lui donner le Temps de trouver sa moitié...
Ihna: À croire qu'elle court après tout ce qui bouge et qui est mâle.
Hyckit: Je sais que ça l'a chamboulé. Elle m'en a parlé.
Eylion: Oui...

Il porta une main sur le bas de son visage, d'autant plus interloqué par les dires d'Ihna.

Eylion: Je me demande souvent si... Si seulement je n'avais pas quitté ses côtés...
Hyckit: Elle est indépendante et elle est heureuse en vivant ainsi, le rassura t'il. Pourquoi la juger autrement. Elle a ce qu'elle veut.
Eylion: Hrm... Je m'inquiète en sachant Aezen à ses côtés... Cet homme...

Il secoua la tête.

Eylion: Il avait déjà tenté de séduire Yunaia ET d'autres femmes.
U'houdi: Attend, attend, attend, Eylion! Tu vas pas t'imaginer responsable de ses changements, non? Elle semble heureuse et épanouie. Elle a trouvé sa voie. C'est une grande fille accompagnée d'un Hyurgoth semblant très protecteur et puissant alors t'en fais pas pour elle, tu as été la quand il fallait.
Ihna: Hé bien, on les fout ensemble et problème résolu, répliqua t'elle, implacable.
U'houdi: Hein?
Ihna: À moins que ça file sur du libertinage mais ça reste leurs fesses.
U'houdi: Rolalalaaaa... Ça me dépasse tout ça.
Hyckit: Je vois... intéressant pour un homme qui s'est présenté en nous disant qu'il a perdu sa femme, il y a 16 ans et qu'il ne cherchait personne d'autre. Je n'aime pas du tout... le concept de voir ailleurs.
Ihna: Moi non plus mais, au final, si ça touche ni tes fesses, ni les miennes, on s'en fout.

Eylion regarda Houdi, son instinct paternel maltraité.

Eylion: J'avais déjà tenté de mettre Yunaia en garde... Bon, heureusement, elle a plutôt choisi Djin même si je ne le connais pas. Mais Kaly... ... Enfin, je suppose que... C'est son Choix...

Il eut un air douloureux, se sentant bien impuissant sur le coup.

Hyckit: Kaly prône sa liberté. Elle aime sa vie comme ça. En libertinage.
Eylion: J'avais entendu parler de sa bibliothèque...
U'houdi: Ça l'est, vieux, alors ne te mets pas cette mine. Tu as fais ce qu'il fallait, elle trouve sa voie.
Alun: "Libertinage"?
Eylion: Je me demandais si j'allais aller la voir pour voir comment elle allait, maintenant que le Temps a fait son oeuvre...
Hyckit: C'est un concept où des couples se font et se défont souvent pour une nuit en sachant que ce n'est que pour la nuit.
Ihna: Et qu'en gros, tu couches avec qui ça te chante.
Alun: Ah oui...? Je trouve ça un peu étrange comme idée.

Le mot "Libertinage" coula le long de l'échine du Mage dans un frisson de dégoût et de mépris. Combien de fois... Combien de fois avait-il eu affaire à ces gouffres émotionnels? Ses deux précédentes relations avaient marqué la leçon au fer rouge: ne jamais confier son coeur à une libertine. Jamais.

Hyckit: Vous devriez y aller, dit-il en revenant à Eylion. Je vois pas en quoi son mode de vie change la personne qu'elle est.
U'houdi: Va la voir quand même... Tu n'as, là, que notre version d'un côté et, au moins, tu auras fait un pas vers elle et tu n'auras plus rien à te reprocher.

Le Lunaire hocha doucement la tête.

Eylion: Je ne la pensais tout de même pas capable de tromper des gens...
Hyckit: Non, non!! Elle ne trompe pas. Les gens savent! Ce n'est pas de la tromperie.
U'houdi: Elle endort, je dirai.
Eylion: Vous avez parlé d'un certain Blake.
Hyckit: Oui, lui, c'est different... Elle a commencé quelque chose... et a abandonné.
Eylion: Quelque chose... Un début de relation?
Hyckit: Il avait tout misé sur une expédition avec elle.
Ihna: Blake n'a rien à voir avec ces histoires de cul, cracha t'elle, agressif.

Le ton vindicatif surprit le Mage qui ne put s'empêcher de se demander ce que Kaly avait bien pu faire pour attirer tant de haine de la part de certains membres d'Éclipse.

U'Houdi: Oui, donc elle endort les gens via sa fragilité et sa passion, charmant sûrement et, ensuite, une fois qu'elle a tiré ce dont elle avait besoin, elle part.
Hyckit: Ihna... Houdi, non!
Ihna: Quoi?

Le Mage eut un air confus, son Azur passant d'Hyckit à Ihna puis à Houdi, se demandant qui croire.

Hyckit: Kaly et blake avaient un but commun, tenta t'il d'expliquer. Blake a voulu l'enmener en expedition qui se devait d'être lucratif. La veille de partir ensemble pour explorer une île perdue... Elle l'a planté.
Ihna: Oui car elle pensait plus à coucher avec.
Hyckit: Elle a monté sa bibliothèque... Blake a dû trouver un moyen de relever la tête.
Ihna: Son désir d'exploration était réel mais les désirs profonds étaient tout autre.
Hyckit: Ça suffit Ihna!
Ihna: Elle a blessé deux personnes à qui je tiens beaucoup.
U'houdi: Attention, c'est juste mon impression. J'ai vu ses changements et entendu ce qui est dit mais rien n'est confirmé, ni gentil, je sais. Moi je reste déçu sur plusieurs points.
Hyckit: Leur histoire plus intime ne regarde qu'eux.
Eylion: ... J'irai la voir et je me ferai ma propre idée... Même si le Temps a passé...

Ses oreilles s'abaissèrent.

Eylion: Je la considère toujours comme ma protégée.

Si la discussion se poursuivit bien, elle se recentra sur le premier sujet pour lequel Houdi était venu le voir. Le Mage accepta le fait de travailler avec Éclipse en tant que consultant et de poser des protections magiques aussi bien à leur QG qu'à l'Annexe de la tribu des Ua. L'organisation et les dates posées, le groupe partit, laissant Eylion et J'reya seuls. Ce dernier alla se poser au comptoir, le moral alourdi par tout ce qu'il venait d'apprendre. En voyant ça, la Solaire s'empressa de préparer et de poser un verre devant lui.

Eylion: Je vais éviter de boire un troisième verre...
J'reya: Tiens, surprenant... T'as la tête du gars qui en a trop entendu.

Il se prit la la tête entre les mains, coudes sur le comptoir.

Eylion: Sans blague...

Elle soupira en s'appuyant sur le meuble à son tour, en face de lui.

J'reya: Tu veux en parler?
Eylion: Ce n'est rien, j'ai... juste eu des nouvelles de Kaly... Mon ancienne disciple...
J'reya: Et?
Eylion: ... Je ne sais pas quoi en penser.
J'reya: ... Peut-être que je peux t'aider.
Eylion: ...?
J'reya: Je peux... Te donner mon avis, peut-être.
Eylion: Ce serait difficile... Tu ne la connais pas.
J'reya Noga: Justement. J'imagine que ne pas la connaître, ça me ferait avoir un avis plus... Comment on dit, déjà?
Eylion: ... Hrm... Disons que...

Il prit une inspiration.

Eylion: Peu après le Procès de mon ancienne Femme, j'étais... ... anéanti... Je devais faire mon Deuil sur la base d'une Femme qui m'avait trahi... D'une Passion qui n'était que Mensonge... Rhian a essayé de me faire sortir... C'était lors de la fête des damoiseaux de l'année dernière. Lors de cette fête, j'ai croisé une Miqo'te Solaire... K'alyanni Hia... Ma vision des femmes était au plus... horrible... Autant dire qu'elle a eu les pires remarques que je pouvais balancer. Je l'ai retrouvé plus tard à la Coupe, elle était seule et visiblement, des personnes l'avaient fait chuter pour se moquer d'elle...

Il soupira.

Eylion: Je l'ai incendié sur sa passivité et de fil en aiguille, au fil de la conversation, j'ai fini par lui proposer de lui apprendre à se défendre, sur la base d'un conseil de Rhian... de tenter de "m'ouvrir un peu aux autres". De ne pas être comme mon ancienne Femme. Le Temps a passé, elle apprenait bien même si on a été mêlé à une Affaire... d'un marchand véreux qui la désirait... Pour être réglé, son compte l'a été. Mais sur la fin de cette Affaire, elle a commencé à montrer des signes qu'elle était intéressée par moi. Des signes de plus en plus probants jusqu'à ce qu'il me soit impossible d'avoir des doutes... Je me demandais, de mon côté, ce que je ressentais pour elle... Il était certain que j'avais un attachement mais j'avais du mal à la désirer, elle était jeune, gentille, je la voyais plus comme une enfant que comme une femme...

Il se passa brièvement une main dans sa chevelure d'ébène, l'autre entourant le verre intouché tandis qu'il se perdait dans ses souvenirs. J'reya, de son côté, l'écoutait attentivement, bras croisés.

Eylion: Au final, j'ai fini par comprendre que je l'aimais comme ma fille et j'ai tenté d'instaurer de la distance. Je pensais qu'elle avait juste une simple attirance ou, du moins, je l'espérais... Que ça lui passerait. Jusqu'à ce qu'elle me confronte et j'ai alors compris que c'était du sérieux. Je lui ai alors dit que je la considérais seulement comme ma fille. Et comme je me souciais de son bonheur... J'ai compris qu'il fallait que je coupe les liens, les ponts... Il m'était impossible d'être moi-même auprès d'elle sans la blesser à terme. Si elle pleurait par exemple... Comment je pourrai rester indifférent et ne pas la prendre dans mes bras pour la consoler? Et voilà qui aurait pu nourrir de faux espoirs... Toute attention de ma part n'aurait fait que nourrir la plaie... C'est ainsi que nous avons coupé les ponts...

Un dernier soupir clôtura le récit qui le pesait.

J'reya: Et ces gens t'ont parlé d'elle?
Eylion: Oui... Elle a été, un temps, dans leur compagnie. Et le portrait qu'ils en ont fait... Je ne sais pas... quoi en penser...
J'reya: Qu'est-ce qu'ils ont dit?
Eylion: Comme une sorte de profiteuse pour certains, libertine pour d'autres...
J'reya: Hmm...
Eylion: Je me demande si elle n'est pas devenue ainsi parce que...

Il fut déboussolé sur le coup, perdant ses mots.

Eylion: Enfin, si c'est vrai, enfin...
J'reya: ... Je vais... Te donner mon avis, d'accord ? Tu n'es pas obligé de... D'être d'accord, dit-elle avec prudence.
Eylion: Je t'écoute, maugréa t'il un peu, encore confus.
J'reya: Hm... Tu as dit que quand tu l'as retrouvée... Elle était en train de se faire embêter par des gens, c'est ça?
Eylion: Elle avait été... Je l'ai trouvé sur un banc après sa chute. Je n'étais pas là quand c'est arrivé.
J'reya: Et tu as joué les chevaliers blancs en lui proposant de l'aider à apprendre à se défendre. Eyl... C'était une jeune fille, visiblement un peu seule de ce que tu me racontes. Forcément, un type comme toi, qui vient l'aider et qui lui donne de l'attention... Je me mets à sa place et je pense que j'aurais aimé ça aussi.

Elle fit une petite pause.

J'reya: Mais ce qu'elle est devenue... Si c'est bien vrai... Ça n'a rien à voir avec toi. Elle se cherche juste un nouveau chevalier blanc... Rien de plus et rien de moins... J'imagine.
Eylion: Un nouveau chevalier blanc...?

Le Solaire acquiesça.

J'reya: Elle cherche de l'attention.
Eylion: Hrm... J'espère juste qu'elle n'a pas hérité de moi mon mauvais goût pour les partenaires...
J'reya: Bah elle a l'air de les tester, vu ce que tu m'en dis...

Elle se pinça alors les lèvres.

J'reya: ... Pardon.
Eylion: ...

Elle eut un air embarrassé, se sentant un peu bête.

J'reya: C'était malvenu.

Il souffla en retour.

Eylion: Je verrai bien ce qu'il en est...
J'reya: Tu comptes aller la voir?

Il hocha légèrement la tête. Il s'était toujours promis de la revoir au moins une fois.

Eylion: J'espère juste...
J'reya: ...?
Eylion: Que c'est raisonnable de le faire...
J'reya: Quand voudrais-tu y aller?
Eylion: Je ne sais pas trop... Bientôt...?

Elle souffla un léger rire.

J'reya: Bientôt... Hm... Si tu veux, je peux... Enfin, je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas, mais... Peut-être que je peux t'accompagner...?
Eylion: Toi, venir? fit-il, perplexe.
J'reya: Bah quoi?
Eylion: Hrm...

Il se mit à réfléchir.

Eylion: Je ne sais pas trop... Je me dis que ça pourrait être une idée d'avoir quelqu'un d'extérieur, au cas où il y aurait un souci mais après... Hm...
J'reya: Après quoi?

Il finit par hausser les épaules. Après tout, quel était le mal de venir avec des amis?

Eylion: ... Pourquoi pas.
J'reya: Je mettrai ma plus belle robe pour ne pas te faire honte, va, dit-elle en allant reposer les boissons finalement intouchées, dans une tentative de le faire rire au moins un peu.
Eylion: ... Le ciel tombera ce jour là, lança t'il avec un faible demi-sourire amusé.
J'reya: À t'entendre, on dirait que je suis un Roegadyn, des fois, eh.
Eylion: Hm, disons que robe et talons ne sont pas vraiment les mots qui me viennent en pensant à toi, dit-il, à demi amusé.
J'reya: Alors qu'est-ce que c'est ?
Eylion: Qu'est-ce que c'est...?
J'reya: Les mots auxquels tu penses quand tu penses à moi.
Eylion: Hmm...

Il fit mine de la regarder.

Eylion: Plaquage, bottes et "délicatesse", dit-il, à demi amusé.
J'reya: Oh, pitié... J'ai encore honte, rien que d'y penser...

Elle se passa une main sur le visage.

J'reya: Ils sont tous arrivés au pire moment...
Eylion: Tu as du bol que tu n'étais pas "sur" moi à ce moment là, hé...

Elle le regarda avec une expression... Indescriptible qui termina sur un embarras plus fort que jamais, le visage légèrement coloré. Cette vue eut le don d'arracher un discret air amusé à son interlocuteur.

Eylion: Oh... Est-ce que ça veut dire que tu comprends enfin ce que je voulais dire?
J'reya: Je n'ai pas dix ans! Je connais ces choses-là, quand-même!

Il mourrut d'envie, sur le coup, de la taquiner. De voir jusqu'où il pourrait pousser l'embarras. Toutefois, la Raison le rattrapa. Pousser le sujet alors qu'ils n'étaient qu'amis était aussi déplacé que dangereux pour la Solaire. À son grand regret, il se décida à plutôt l'avertir.

Eylion: Hrm... Encore heureux, mais j'espère bien que tu te rappeleras de ce point. Je m'en tape de ce que les gens pensent mais de ton côté...
J'reya: De mon côté quoi...?

Il soupira.

Eylion: Homme. Femme. J'ai besoin de te faire un dessin...?

Elle leva les yeux au ciel.

J'reya: Admettons...

Il prit une inspiration.

Eylion: Et surtout, Lucrétia...

J'reya: Hm...

Elle baissa un peu les yeux, bien au fait que la démone ne faisait aucune distinction dans les attentions que quelqu'un pouvait porter au Lunaire.

J'reya: Et si on changeait de sujet, hein...?
Eylion: ... Pour quel sujet?
J'reya: Je ne sais pas...
Eylion: ... Je ne suis pas un grand bavard... Même si j'ai trop parlé à cette compagnie, dit-il en soupirant, contrarié.
J'reya: Ça s'est bien passé?
Eylion: Oui... Ils veulent que je bosse pour eux sur une affaire d'objets magiques à protéger et sur lesquels enquêter.
J'reya: C'est plutôt bien. C'est ton domaine, après tout. Ça va être compliqué ou dangereux?
Eylion: Oh, les deux, dit-il avec un sourire mince comme s'il était impatient.
J'reya: ... Et pourquoi je sens que tu adores ça.
Eylion: Je ne serai pas sur cette Voie si je n'avais pas la Guerre dans le sang.

Elle secoua la tête même si un sourire naquit lentement sur ses lèvres.

J'reya: Incroyable... Incorrigible.
Eylion: Et Fier de l'être, dit-il, mimant le fait de lever un verre imaginaire.

Il s'étira ensuite en se levant.

Eylion: Allez, on devrait plier boutique et rentrer à Opale. La seule chose que je veux actuellement, c'est mon lit.

La Solaire approuvant, ils rentrèrent au QG d'Opale où il put se reposer. Dans les jours qui suivirent ce repos, il se rendit à la Bibliothèque de son ancienne disciple en compagnie de Kyuuji et J'reya. Il découvrit une jeune femme bien différente de la jeune ingénue qu'il avait connu. Si K'alyanni avait gardé son côté pétillant, le Lunaire lui trouva quelque chose de... changé. Sans doute était-ce les épreuves qu'elle avait traversé mais une chose était sûre: l'innocence était perdue.

Si elle admit bien son libertinage, elle lui affirma avoir eu des désaccords avec Éclipse sur leur façon de gérer leurs affaires et être partie en conséquence. Par la suite, elle fit comprendre au Lunaire qu'elle ne souhaitait pas avoir plus de liens, ce qu'il respecta. Il avait accompli la promesse qu'il s'était faite à lui-même: la revoir au moins une fois. Il n'avait été qu'un élément de son histoire et ce fut en inconnus donc qu'ils se séparèrent.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Chapitre 69: Péripéties

Message par Ennrael » 28 févr. 2021, 03:08

Image
L'eau éclaboussa la peau pâle. Il rejeta sa tête en arrière dans une courte reprise de souffle, rafraîchi par le jet qu'il avait lancé sur son propre visage. À côté du lavabo, il attrapa une serviette et s'essuya. Ce fut là qu'il croisa son propre regard dans le reflet du miroir. Pour une fois, ce ne fut pas un teint livide qui lui répondit en retour. Aucune cerne. Dans le miroir, un homme bien portant se tenait, assuré.

Oui, il peinait lui-même à y croire.

Pour une fois de son existence, il était heureux. Ce Bonheur, il ne l'avait pas acquis aisément. Il avait traversé bien des obstacles. Bien des périodes sombres pour en arriver à cette année de joie réelle. Il porta une main sur la surface réfléchissante, vers cet inconnu qu'il peinait à reconnaître. Une voix chantante le tira alors brusquement de ses songes.

???: Ma panthère, mon Brasier? Votre présence maaanque à la mienne, en cet océan de draps...! ... Et j'ai capturé ta cravate en otage, il faudra venir la chercher ~

Il esquissa un sourire amusé à la mention. Il sortit de la salle de bain, main sur l'embrasure de la porte, dans une pose de séducteur.

Eylion: Quel outrage.

Il s'approcha de son opposante allongée dans le lit qui le narguait de son otage. Il lui saisit son menton gracile.

Eylion: Quel châtiment vais-je bien pouvoir infliger pour laver cet affront?

Sans lui laisser le temps de répondre, il vint capturer les lippes carmins des siennes, jouant de celles-ci d'un baiser aussi chaud que langoureux.

Ce Bonheur n'était pas sans ses ombres mais tant qu'elle tiendrait la Promesse qu'elle lui avait faite quand il accepta de se donner à elle, il ne regrettait rien. Rien de ces mois passés en sa présence, à se chasser l'un et l'autre, à s'apprivoiser mutuellement. De cette Paix qu'elle avait réussi à lui donner. De ces nuits paisibles entre ses bras. Des rires et des sourires qu'elle lui offrait et qui semblaient chasser toutes les épreuves de son existence.

Mais plus encore que la femme qui l'envoûtait à cet instant et qui l'emportait dans le stupre de ses malices, il avait gagné des choses tout aussi précieuses. Des alliés. Des amis fidèles, inattendus. De ceux qui restent même quand on est plus bas que terre. Il ignorait quel Douze remercier et il ignorait combien de temps ces joies dureraient mais le Mage ne se voulait pas ingrat envers celles-ci, les chérissant à chaque moment qui passe.

Il se souvenait.

Il se souvenait de l'année d'avant et de celle qui s'apprêtait à s'achever.

Des affaires en tant que Docteur de l'Occulte, il en avait eu. Il avait aidé Kyuuji avec le sceau qui contenait ses souvenirs et sa culpabilité. Celui d'avoir été la cause indirecte de la mort de sa Mère. Il avait aidé J'reya avec le bracelet maudit qui rongeait sa mémoire de façon à en faire un réceptacle parfait pour une succube, cadeau d'un prétendant inconscient. Leurs chemins avaient fini par se séparer naturellement, chacun vaquant à leurs quotidiens.

Il avait exploré bien des Refuges Mentaux, allant de celui d'Ihna à Ajisai en passant par des patients comme William. Des Paysages oniriques extraordinaires, de déserts brûlants aux manoirs familiaux torturés. Il avait affronté des organisations allant des Choisis, des Al'Athanis, la Kabbale de Nemenoth ou encore les Apôtres plus récemment.

Pendant un long moment, il avait séjourné au sein de la tribu des Ua. S'il n'avait pas accepté de les rejoindre, préférant son indépendance, il avait aidé la tribu de son mieux avec leurs divers soucis entre les attaques menées par leurs opposants, les mystères qui entouraient les artefacts de Houdi et les tensions entre certains membres.

Il aida également Houdi et Eku avec leurs problèmes de couple, essayant de les soutenir de son mieux. Quand ils s'essayèrent à une relation avec un maître assassin du nom de Kiliyah, il avait été là à écouter Eku choqué par la violence de ce dernier. Quand ce même Kiliyah cassa le bras de Leiji et menaça sa soeur à cause d'une maladresse, le Mage était intervenu pour poser une limite au conflit, le bannissant de son établissement tout en négociant un traité de non agression.

Mais malgré ces faits, il ne put endiguer la fin du couple. Il ne put qu'être témoin de la discordance grandissante, dont les prémisses s'étaient déjà montrées à la suite d'une simple réunion.

Eylion: Pour le reste, il te faut un second, un vrai... Moi, je reste surtout une aide. Je ne vis pas en permanence ici.
Houdi: Je sais mais tu es cette aide qui aura toujours une vision plus large pour les choses et sûrement celui qui me comprendra le mieux...

Le Nunh avait fourré sa tête dans ses bras.

Houdi: Après Ihyan...

La mention avait eu le don d'arracher un faible sourire désabusé au Mage.

Eylion: Mais je ne suis pas Ihyan. Je ne suis pas un U. Tout ce que je peux faire... C'est si tu as envie de boire un coup et d'arrêter d'être un Nunh deux secondes, ouai... Je peux te prêter mon oreille, mais ce ne sera jamais la même chose qu'un vrai second investi dans une tribu.
Houdi: Pas besoin d'être un U pour m'apporter une véritable présence... Personne ne pourra être Ihyan, ni être plus que lui on dirait... Je rumine peut-être à cause de son cristal mais c'est horrible comme il me manque... Mais toi...

Il avait levé la tête.

Houdi: Je te demande pas d'être un U, je souhaite juste avoir à mes côtés une personne avec qui je peux retirer ma grosse armure et mes grands remparts... Rien que ce soir, ton intervention a suffi pour faire comprendre qu'il y a des limites à pas dépasser et ta présence arrive à faire qu'ils se tiennent à carreau sans même que tu sois un U.

Eylion avait eu un autre faible sourire.

Eylion: Hé bien, je serai là. Tu n'as pas besoin d'être un Nunh en ma présence... En plus, tu me connais, moi et la hiérarchie... Pour le reste, je suis juste moi.
Houdi: Ben oui et ça fait du bien quand même. Ils savent que je te fais une confiance aveugle donc, dans tout les cas, hiérarchie ou non, tu es celui qui fait parti de mes piliers. Change pas vieux, tu es très bien comme tu es et plus le temps passe, plus je me dis que tu es pas dans l'erreur de vivre ainsi.

Le sourire du Lunaire était passé à un léger air inconfortable, peu habitué aux compliments. Sa main avait massé le côté de son cou.

Eylion: Tu y vas fort là.
Houdi: Je suis juste moi, avait-il émis dans un rire.
Eylion: Ouai mais bon, de là à dire pilier... Erh... Putain, j'ai une réputation à tenir, moi, avait-il grommelé.

Houdi avait éclaté de rire.

Houdi: Avec moi, tu peux la mettre de côté.

Eylion avait grommelé de plus belle puis il avait soupiré.

Eylion: En tout cas, erh, vis à vis d'Eku, j'espère quand même que tu arriveras à trouver, hé bien... Que vous arriverez tous les deux à trouver votre équilibre.
Houdi: Oui, j'espère car... Un lit, c'est bien pour une vie de couple mais ça fait pas tout.
Eylion: Ah ça... avait-il répondu, dans une légère grimace. Mais tu as cette chance d'avoir des amours réciproques... Crois moi, tu ne te rends pas compte de ta chance.

Le Nunh avait souri avec tendresse.

Houdi: Ouai, je sais que j'ai cette chance... J'y tiens, c'est pour ça que je prends sur moi quand même. Mais bon, on verra avec le temps si la maturité viendra et comment les choses évolueront.
Eylion: Malgré tout, tu ne devrais pas prendre sur toi, avait-il fait dans un soupir. Essaye d'en discuter tout de même à cœur ouvert avec Eku. Sans imposer d'attentes, en n'essayant pas de le changer. Mais au moins d'exprimer tes besoins et de demander les siens.
Houdi: Je tâcherai d'en discuter au bon moment avec lui mais je ne dois pas délaisser ma tribu, surtout si je laisse faire mon mari et en demande plus aux autres. Ça se fait pas.
Eylion: Ce n'est pas une question de délaisser ta tribu, c'est une question que c'est un sujet important. C'est ton mari, ta moitié, celui qui devrait être ton pilier... Peut-être pas le pilier dans tout mais au moins un pilier quelque part. Si vous ne pouvez pas en discuter en cherchant à vous comprendre l'un et l'autre, à quoi bon? Tu n'aideras personne si tu t'effondres sur toi-même.

Houdi avait esquissé une petite moue qui avait été suivie d'un soupir.

Houdi: Je tenterai de voir avec lui comment faire pour la suite.
Eylion: Tu ne tenteras pas, tu le feras, répliqua t'il aussitôt en levant l'index.

L'assurance du Mage avait arraché un sourire à l'intéressé.

Houdi: Oui, je le ferai.
Eylion: Hrm, mieux, avait-il grommelé en retour. Tu me diras comment ça s'est passé.
Houdi: Oui, j'y manquerai pas.
Eylion: Est-ce que tu avais besoin, hrm, de discuter d'autre chose?
Houdi: Non, je pense que tu as eu l'essentiel de mes idées.

Les discussions s'étaient accentuées par la suite. Eylion ne sut jamais si Houdi avait réellement discuté avec Eku ou non. D'après ce dernier, ça n'avait jamais été le cas et le Mage avait préféré ne croire ni l'un, ni l'autre face à de tels doutes. La seule certitude qu'il tira de cette histoire était que Houdi aurait préféré un homme assuré et mature dans sa vie, un meneur, là où Eku était un artiste social. Leurs différences d'aspiration avaient fini par les rattraper et le Lunaire s'était retrouvé dans la situation inconfortable d'être ami avec les deux.

Durant cette période, les confidences de certains de ses patients avaient renforcé la Douleur de la Solitude qui le hantait. Pendant toute une année, il n'était pas parvenu à faire le Deuil de ses précédentes relations. Des femmes avaient bien tenté de l'approcher mais il n'en avait voulu aucune. Son Deuil n'allait pas être aidé par l'une de ses patientes, Ajisai. Étrange conteuse à la personnalité décalée, elle avait confronté le Lunaire sur le point sensible de ses Plaies à vif. Elle avait toqué à la porte de sa chambre, porte entrouverte par le Mage méfiant.

Ajisai: Salut.
Eylion: Oh, c'est vous, avait-il fait, perplexe.

Il s'était glissé dans la mince ouverture pour, ensuite, refermer aussitôt la porte derrière lui.

Ajisai: Tu m'as déjà dit que tu ne voulais pas que je vois ce qu'il y a de l'autre côté de cette porte, pas besoin de garder une ouverture aussi mince pour passer. Je suis curieuse mais quand même.

La chambre d'Eylion était une vraie ode au Chaos. C'était la seule pièce qu'il n'autorisait pas la femme de ménage de nettoyer. Des piles de livres, de vêtements et de papiers avaient fait du lieu un témoin flagrant que le Mage préférait passer son temps à étudier qu'à ranger. Et il avait horreur qu'on touche à son capharnüm "organisé", masqué soigneusement hors de portée des jugements et des regards indiscrets.

Il avait dodeliné ainsi la tête, roulant son Azur.

Eylion: Je le ferai pour n'importe qui. Qu'y a t'il? avait-il rajouté, peu amène.
Ajisai: Quoi, il me faut une raison pour te rendre visite?
Eylion: Comme je vous l'ai déjà dit, je ne suis pas du genre à parler de la pluie et du be...
Ajisai: Tu t'étais trompé, je ne lui plais pas.
Eylion: "Plais pas"?

Désarçonné par l'affirmation, il avait mis un moment pour recadrer ce qu'elle voulait dire.

Eylion: Ah, ce...

Il avait claqué des doigts, cherchant le nom.

Ajisai: Kiaran.

Il avait pointé l'index après un ultime claquement de doigt, comme pour clouer le nom qui lui avait échappé.

Eylion: Kiaran.
Ajisai: Je crois, par contre, qu'il a une attention toute particulière pour votre amie. Yunaia. Il m'a beaucoup parlé d'elle.

Le nom avait eu le don de le faire réagir instantanément, ses oreilles s'abaissant légèrement, une ombre passant sur ses traits.

Eylion: Il peut toujours espérer, elle est avec Djin, avait-il lancé avec l'air de quelqu'un qui essayait de se convaincre que ça ne le concernait pas.

Il s'était appuyé sur la bibliothèque en arrière, croisant les bras. Ajisai l'avait observé, pensive.

Ajisai: Vous aussi apparemment.
Eylion: ... Moi aussi?
Ajisai: Je ne vais pas m'éterniser sur le sujet, ça ne me regarde pas, mais cette femme ne semble pas vous laisser indifférent vous aussi.

L'Azur avait roulé, blasé.

Eylion: Je vous avais déjà dit toujours concevoir des sentiments, autant pour elle que pour Solid. Même si le Temps a fait son œuvre.
Ajisai: Il vous reste des traces.
Eylion: Je vis avec, avait-il dit en haussant les épaules.
Ajisai: Vous lui reparlez?
Eylion: Non... avait-il répondu en fermant brièvement l'Azur. Je ne supporterai pas de la voir avec Djin, elle le sait.
Ajisai: Oui mais... juste elle, seul à seule. Ça n'est pas parce qu'elle est en couple que vous devez la supprimer de votre vie puisqu'elle reste importante pour vous.
Eylion: ... Vous avez déjà aimé. Imaginez d'être seule à seul dans la même pièce qu'un homme dont vous avez brisé le cœur, autant pour son bien que par fidélité par rapport à votre Choix de base, et que vous aimez, désirez toujours. Le moindre toucher ne serait, en rien, innocent, pas plus que le moindre regard.
Ajisai: Dis celui qui veut que je retrouve Khayshan pour savoir ce qui s'est passé et comprendre comment on est arrivé à ne plus être ensemble.
Eylion: Je n'ai pas dit de le fréquenter à nouveau pour autant mais au moins, avoir une clôturation propre.
Ajisai: Essayez au moins de prendre un café ou une glace, juste pour lui parler un peu.

Le Mage avait émis un mince rire aussi amer que douloureux.

Eylion: Je préfère garder le peu de santé mentale qu'il me reste. Yunaia est heureuse, c'est tout ce qui m'importe.
Ajisai: Comment vous le savez si vous ne lui avez pas reparlé?

Il avait tiqué à la suggestion.

Eylion: ... Il le faut ou je tuerai Djin si jamais il n'a pas tenu sa putain de parole.
Ajisai: Alors allez la voir pour en être sûr.
Eylion: Il est sensé veiller sur elle, ses proches sont sensés. veiller. sur elle là où je ne le peux pas, avait-il grincé entre ses canines.

Tel un poison, les mots s'étaient infiltrés dans ses veines.

Ajisai: Allez prendre un café avec elle, juste pour discuter. Prenez de ses nouvelles. Vous allez être rassuré et à vous voir, ça vous ferait du bien d'être en sa présence.
Eylion: Non, ça ne me ferait pas du bien, énonça t'il douloureusement. Mais...

Il avait marqué un temps de silence. La Boîte était là. Il savait alors qu'il n'aurait pas dû l'ouvrir.

Eylion : Vous, vous le pouvez. Prendre de ses nouvelles et de me les dire.

La jeune femme avait pris une profonde inspiration.

Ajisai: D'accord...
Eylion: ... Merci.

Ce "Merci" lui avait beaucoup coûté. Dans les jours qui s'en étaient suivis, il s'était rendu ivre à de multiples reprises dans l'espoir de noyer ses appréhensions. Les nouvelles qu'Ajisai lui rapporta avaient mené à une période difficile, durant laquelle il avait été confronté aussi bien à sa propre Folie, son Deuil qu'à ses convictions. Une période qui, si elle l'avait mené plus bas que terre, elle lui avait permis aussi de voir des facettes inattendues de celle qui allait devenir sa compagne.

Mais c'était un autre souvenir.

En parallèle de cette période, il avait eu une seconde disciple du nom de Lhona. Une Lunaire maltraitée par des élèves de la guilde des arcanistes, elle s'était réfugiée auprès de lui dans l'espoir d'avoir un professeur bienveillant. Malgré ses réticences, le Mage avait fini par l'accepter sur la demande de sa mère, désespérée de lui trouver un environnement sain. Une semaine. Voilà le temps que la relation maître-élève dura. Un Miqo'te du nom de Dart, un assassin, avait effectué une sombre influence sur la disciple, l'incitant à prendre sa revanche sur ceux qui l'avaient tyrannisé. Malgré tous les avertissements d'Eylion, Lhona était partie, dans son dos avec Dart, dans une expédition qui résulta en la mort de l'une des brutes et la torture des autres. Le Mage l'avait alors renié, l'envoyant vers Velren dans l'espoir que l'Anrad puisse tirer plus sagement les raisons derrière de tels actes. Bien qu'il ignora le détail de leurs échanges, Velren l'informa simplement qu'elle leur avait donné les clés pour résoudre ce qui les hantaient.

Depuis lors, le Mage s'était juré de ne plus reprendre de disciple.

Il avait également croisé la route d'Uhan, un autre amant de Kiliyah qui avait essayé, un temps de s'échapper de ce dernier en allant à la tribu des Ua. Il avait appris qu'Uhan avait été prostitué très jeune et qu'il avait fini par être recueilli par l'ordre de la Griffe Noire et développé une obsession pour Kiliyah. Un soir, le Mage avait été confronté à une crise de la part du jeune homme.

Il se souvenait, oui, de ce soir là. Toute la tribu des U, catastrophée de la disparition de Uhan. Eylion n'avait pas perdu de temps, ayant cerné le profil du Solaire. Avec Eku, il s'était dirigé droit vers les quartiers chauds d'Uld'ah. Comme il s'en doutait, il l'avait trouvé à un carrefour, muni d'un haut de lanières noires qui ne laissaient pas... vraiment de place à l'imagination.

À leur approche, l'assassin avait pris une pose aguicheuse avant de les reconnaître, se raidissant aussitôt. Il avait ensuite détourné la tête dans un "tsk" agacé.

Uhan: C'est vous...

Le Mage, essoufflé, l'avait gratifié de son plus beau sourire d'un froid cynisme, amorçant la discussion d'une claque mentale.

Eylion: Woah, c'est de ça que vous parliez quand vous disiez de faire des efforts pour vous-même?
Eku: Uhan, on t'a cher-... attend mais c'est mon petit haut ça! Celui que j'utilisais avec Houd-... Oublie.

Le rouquin s'était intimé le silence d'un plissement de lèvres. Eylion lui avait lancé un regard des plus... perplexes... jusqu'à se préserver silencieusement d'un "Non, en fait, je n'ai pas envie de savoir" imprimé à même ses traits. L'assassin, lui, avait détourné le regard tout comme Eku mais pour des raisons différentes.

Uhan: J'vois pas ce que vous voulez dire. Je vais l'écrire cette lettre, j'ai juste besoin... d'oublier, d'm'laisser porter, lâcher prise de la réalité. Comme je le faisais à chaque fois. C'est pas si terrible.
Eylion: Oui, bien sûr, faire le tapin, vous livrer au désir du premier venu, jouer le bouche-trou, ça va "vraiment" vous changer des habitudes, avait-il lancé dans un sarcasme acide, bien décidé à gifler mentalement le concerné jusqu'à ce qu'il se réveille.

La "claque" avait fait son effet, la mâchoire d'Uhan se crispant, les oreilles couchées. Les yeux furibonds étaient brièvement revenus vers le Lunaire pour s'éloigner aussitôt.

Eylion: La Vérité... La Vérité a de ça qu'elle fait mal, hm? Elle frappe dans les zones d'ombre, là où on n'a pas envie de tourner le regard. Vous n'oublierez pas. Vous ne ferez qu'ajouter du sel sur votre plaie. Quelque chose de merveilleux qu'on nomme "autodestruction", ce concept vous est-il... familier?

Impitoyable, il s'était rapproché pour chercher à planter son Azur dans le regard du jeune homme tendu.

Uhan: Au moins, quand on me culbute, j'ai pas à penser à cette putain de chienne de vie.
Eylion: Oui, et le lendemain, vous vous réveillerez... Avec un peu de chance, votre amant du soir se sera montré doux avec vous. Mais honnêtement, je n'y crois pas. Pourquoi aurait-on du respect pour un vulgaire Miqo'te de la rue, hm? Et alors, au petit matin, votre corps endolori se souviendra... de la Douleur. Physique. Morale. De ces mains inconnues, de ces lèvres avides, de ce souffle qui se couplera à tant d'autres... Tant d'autres, tant d'injures à l'oreille, tant de hargne, de Désir imposé.
Uhan: La ferme!
Eylion: C'est ça que vous voulez, Uhan? Revivre ça, encore et encore? D'être un jouet... D'espérer, à chaque minute, que votre amant du soir sera le dernier, celui qui vous brisera enfin. De ne plus vous réveiller un matin? avait-il dit en faisant claquer sinistrement ses doigts.

Il avait pu lire chez le prostitué à quel point ses mots résonnaient en lui, réveillant peu à peu chaque injure. Chaque Plaie. Le réveil, brutal, le frisson qui parcourait les bras nus. Le corps qui se souvenait. La Souffrance au bord des lèvres. La haine envers soi, luisante. L'envie folle de fuir le miroir que le Mage lui brandissait.

Finalement, la question, muette, alors qu'il s'était retourné vers Eylion. La question effrayée: Comment pouvait-il savoir tout ça?

Uhan: ... P'têtre que c'est l'cas... p'têtre qu'on m'finira... j'veux plus avoir ce genre d'espoir. Il m'a tout donné pour tout m'arracher. Peut-être... que tout ce que je mérite... c'est d'être traité pour ce que je suis. Je me suis laissé utilisé comme un outil, comme une pute. Je n'étais que ça à ses yeux.

L'Azur froid n'était pas prêt de le lâcher.

Eylion: C'est Votre Perspective. Votre point de vue. Honnêtement, qu'est-ce qu'on est? Rien. Des corps en mouvement si on devait voir ça de manière purement objective. Vous êtes encore là, en vie. Vous respirez devant moi. Que peut-il vous arracher? Il peut vous arracher... Ce que vous voulez bien lui concéder. Vous lui offrez votre Âme sans même y réfléchir, avait-il émis avec un sourire cruel et mordant.
Uhan: Au final... Ça changeait pas d'avant. J'avais juste... un toit.

Mal à l'aise, Eku n'avait su que dire, laissant Eylion gérer la situation alors qu'Uhan se mettait à reculer. Mais le Lunaire ne l'avait pas lâché, avançant pour l'obliger à faire face.

Uhan: ... Parce que... je lui ai fais confiance, il m'avait dit que tout irait bien maintenant que j'étais son régulier, qu'il m'aimait. J'avais besoin de rien d'autre. Je connais déjà les ténèbres alors... plonger avec lui... ne me dérangeait pas si nous étions ensemble. Je n'avais rien... je n'étais rien... il m'a donné un but... du moins j'en avais un mais je ne retournerais pas là bas.
Eylion: Mensonge. Mensonge. MenSoNgE. Vous le savez, le Doute s'est glissé dans les Failles. Alors même qu'il vous tenait dans ses bras, vous avez douté. Et vous doutez. Mais vous savez quoi? Votre Âme est toujours là, entre vos mains. Vous pensez la lui avoir donné mais personne ne peut la prendre pour vous, à part des Entités. Et Kiliyah n'est qu'un homme. Un homme qui vous a piétiné mais franchement... Est-ce la première fois? La première fois que quelqu'un le fait à votre encontre? Vous utilise à sa guise, hm?
Uhan: ... Lui, c'était différent. Les autres, c'est que des types d'un soir, qui viennent et repartent en me laissant des gils. J'attendais rien d'eux, lui, c'était différent... mais... au fond, c'était pas si différent... je le savais que je ne serai pas son unique. Il voulait même me mettre dans un harem... j'étais juste sa pute de luxe.

Il avait baissé la tête, la honte transpirant à travers son addiction.

Eylion: Ça ne change rien que vous avez fait ce Choix. De vendre votre Corps à ces hommes. Puis les deux à Kiliyah. Vous avez accepté ça. Vous et vous seul. Non pas que ça justifie leurs actes, leurs comportements, non... Mais Changer vous appartient à vous et à vous seul. D'accepter ou non de confier votre Vie aux mains de putains de salopards dans l'espoir que ça puisse vous réduire à néant en pensant béatiquement que vous n'êtes, en rien, responsable. Hé bien, non, vous l'êtes. Vous et vous SEUL. Vous pouvez fuir. Vous pouvez enterrer votre tête dans un joli bocal d'horreurs mais ça ne changera jamais ce fait...!
Uhan: C'est pas si simple! ... De changer.
Eylion: Si c'était simple, le monde serait parfait, avait-il grogné. En attendant, vous avez une famille. Des proches. Des gens inquiets pour vous. Des putains de possibilités.
Uhan: ...
Eylion: Combien de temps allez-vous encore détourner le regard?!

Les oreilles du Solaire s'étaient ratatinées, ses traits crispés dans un air mêlant peur, colère et malaise.

Uhan: ... Stop...
Eylion: Alors qu'allez-vous choisir, Uhan? D'être le Monstre qu'il a voulu... et que vous espérez être. Ou être le maître enfin de votre putain de vie?

La réplique avait eu le don de faire effondrer la barrière, les larmes ne tardant pas à secouer le prostitué redevenu un instant un enfant. Cet enfant qui n'avait jamais voulu de tout ça. Cet enfant que le Mage voulait faire sortir. Cependant, maintenant qu'il était là, il fallait lui conférer de l'affection. Et ça... Ça, c'était bien plus délicat pour Eylion quand c'était face à quelqu'un envers qui il n'avait pas entièrement confiance. Le Lunaire s'était tourné vers Eku et avait indiqué de la tête Uhan.

Le rouquin lui avait lancé un air interrogateur avant de comprendre soudainement. Sans aucun mal, il s'était approché d'Uhan et l'avait pris dans ses bras pour le réconforter, non sans lancer un regard équivoque de "Ha la la la, ça fait pleurer et c'est aux autres de réparer ça".

Eylion: Là, ce contact. C'est celui d'un membre de votre famille, avait-il souligné, placide.

Uhan avait cherché à s'échapper et se débattre en premier lieu mais, à bout de forces, il avait fini par céder et accepter le réconfort, épuisé par le rappel de tout ce qu'il avait subi. Il avait enfoui son visage dans la veste du rouquin, se laissant aller.

Eylion: Maintenant, on va rentrer. Vous allez vous coucher. Les jours suivants seront un enfer. Vous allez chialer. Vous allez avoir envie de tout détruire, à commencer par vous. Et c'est normal. Le tout est de ne pas agir sur ces conneries. Juste de les vivre pleinement.

Eku avait eu un sourire compatissant avant de lever la tête vers le Lunaire non loin et d'articuler de façon muette "s'il me morve dessus, tu laves ma veste!". Ce à quoi Eylion avait répondu de la même façon silencieuse un "Tu rêves", qui avait été reçu avec un tirage de langue de la part de son comparse.

Eylion: Vous allez vous blâmer, vous détester, regretter, espérer mais là où sera votre épreuve est de ne pas céder. Et de prendre le temps de, putain, vous reconstruire.
Uhan: Je... me hais... déjà tellement. Je... hais ce corps...
Eylion: Votre corps est intact. Les seules marques que vous avez sont spirituelles. C'est avec elles que vous devez apprendre maintenant à vivre. Finissez déjà proprement les choses avec Kiliyah. Prenez le Temps du Deuil. Trouvez vous un But. Un But qui ne sera pas choisi par quiconque à part vous. Pas par un enfoiré qui voulait vous foutre dans son harem personnel et faire de vous une putain d'arme.
Uhan: ... Si... il est sale... si profondément sale...

Le Mage s'était approché derechef pour pincer le côté du bras du concerné, un pincement menu qui n'avait pas pour but de faire mal mais d'éveiller un picotement. Uhan avait alors poussé une exclamation de surprise.

Eylion: Je ne suis pas parti en fumée et ma main n'est pas plus sale pour autant, avait-il dit, "pragmatique".

Le Solaire l'avait regardé, incrédule et hésitant, comme s'il avait du mal à croire les paroles énoncées.

Eylion: Votre Fierté. Votre Dignité demandent à être construites. Ça ne se fera pas en un jour mais c'est ce dont vous manquez. Qu'importe le Passé. Ce qu'on a pu vous faire ou ce que vous avez laissé faire. Ce qui compte est maintenant. Votre Vous précédent, celui qui écoutait connement Kiliyah, est mort. Votre nouveau Vous a besoin que vous soyez là.

Les paroles avaient semblé calmer le Solaire qui avait essuyé maladroitement ses larmes. Le Mage avait pu le voir dans son regard, son fardeau s'était allégé. De peu mais il l'avait été.

Uhan: ... D'accord mais... je ne sais pas quoi faire... ou comment le faire.
Eylion: Une Idée. L’Étincelle d'une Idée finira par venir mais pas maintenant. Et vous n'êtes pas seul. Vos proches pourront vous suggérer des Voies, des choses à faire mais pas quand vous êtes brisé. Donnez vous le Temps. Le Temps de Souffrir. Le Temps de Guérir.
Uhan: ... Ça prendra longtemps...?

Le Lunaire avait hoché la tête.

Eylion: Ça dépend de chacun mais une Reconstruction prend du Temps, des Étapes. Vous avez un lit, de quoi manger, un toit. Profitez en. Vous n'êtes plus à la rue.
Uhan: ... Je sais.
Eylion: Non. Vous refusez d'y croire. Sinon vous ne seriez pas là.
Uhan: J'ai du mal à... me dire que tout ça est vrai. Que ça ne va pas disparaitre du jour au lendemain.
Eylion: Alors je vous le rappelle.
Uhan: j'ai peur de me raccrocher à un nouvel espoir... s'il se brisait de nouveau... je veux pas tomber de trop haut.
Eku: Beeen non, Uhan! On va pas te jeter dehors!
Eylion: Alors n'espérez pas. Agissez. Profiter d'un lit pour se reposer est un acte. Prendre plusieurs jours pour soi en est un autre. Pour le reste, le Temps vous dira qui est de confiance dans votre entourage et qui ne l'est pas.

Uhan avait soupiré doucement en retour, fermant les yeux comme pour laisser les derniers pans de son malaise se dissiper.

Uhan: ... Pardon. Je suis désolé.
Eylion: Si vous devez être désolé... Soyez le pour vous-même, avait-il grommelé. Rentrons, les nuits deviennent fraîches. Pas envie de gérer un malade en plus.

Ils étaient rentrés, épargnant à Uhan une nuit de perdition. Cependant, le Mage n'avait pas été dupe. Il avait su, dès ce moment, que ses paroles n'allaient être qu'un baume temporaire sur des ruines bien trop grandes. Une seule chose pouvait sauver réellement Uhan. Un homme assez brave, sain et solide pour venir bercer ces ruines et les aider à se reconstruire, à faire fleurir le désert émotionnel de son amour. Et s'accrocher envers et contre tout. Seul un Amour véritable pouvait briser la malédiction du jeune homme.

Sur le chemin du retour, Eylion avait levé la tête vers le ciel étoilé, lourd et accablé de ce savoir. Tant de gens espéraient cet Amour véritable, à commencer par lui... ... Mais qui pouvait bien se targuer de l'avoir? Si peu...

Dans les jours qui avaient suivi, ses prédictions avaient pris vie. Uhan était retourné auprès de Kiliyah, s'accrochant désespérément à son affection. À son addiction. Ce ne serait pas la première fois que le Mage aurait affaire à Uhan ou à la Griffe, une histoire à la tournure bien particulière.

Son passage au sein de la tribu des Ua avait fini par prendre fin à la suite de multiples conflits avec Houdi et ses proches. Ça avait commencé tout d'abord par des soirées "familiales", le Nacré assurant au Mage qu'il n'y aurait que des visages amis. Ce qu'il ne précisa pas, c'est que ce n'était des visages amis que pour lui. À chaque fois, Eylion avait donc la mauvaise surprise de venir décontracté pour découvrir des inconnus parmi les membres habituels, des inconnus qui se trouvaient froissés ou terrifiés par son comportement distant, ce qui résultait en des petits drames qui terminaient les soirées prématurément.

Le Lunaire n'avait jamais été un oiseau social et il avait l'impression, au fil des discussions, que Houdi essayait de plus en plus de le forcer à être ce qu'il n'était pas. La poudrière avait fini par exploser quand le Nunh s'était trouvé un nouveau compagnon en la personne de Tristis, un ancien amant de Kiliyah et médecin. Sans en parler à Eylion, il avait ainsi invité Tristis à une soirée, le laissant avoir plusieurs désagréables découvertes d'un coup. La première fut de découvrir qu'un ancien amant de l'assassin se trouvait désormais dans l'entourage d'Houdi. Le seconde fut d'entendre que Kiliyah avait fourni des mensonges, affirmant que le Mage en voulait à la vie du médecin et l'avait également banni du bâtiment. La troisième d'apprendre, de but en blanc, que Tristis était désormais le compagnon de Houdi, sans présentation formelle, ni explication au préalable.

La méfiance du Lunaire avait eu le même effet que les autres soirées, à défriser Tristis qui était lui-même méfiant. De méfiance en méfiance, de langue acide en langue acide, les incompréhensions se multiplièrent, non arrangées par les personnes alentours qui essayaient de pousser l'asocial à se comporter comme une personne sociale. Finalement, la patience du Mage brisée, il était parti de la soirée, furieux.

Dans les jours suivants, il n'avait pas hésité à attraper le Nacré en privé pour lui dire ses quatre vérités. Si Houdi s'excusa bien et qu'Eylion accepta ses excuses, ce dernier n'avait plus voulu aller de lui-même chez la tribu. Entre ses affaires complexes et la perspective de devoir subir des soirées où on tentait de lui imposer d'être ami-ami d'un coup avec des inconnus, le choix lui avait été facile à faire. Non pas qu'il avait fermé la porte au Nunh mais le Lunaire savait. Il savait que dans le for intérieur de Houdi, celui-ci s'était brodé toute une tapisserie paranoïaque complotiste totalement erronée à base d'Eku le "détournant" soi-disant du Nacré. Et que jamais il n'oserait à nouveau franchir les portes de l'Abéhys par ce fait.

Eku avait été, durant cette année, une surprise agréable pour Eylion. Loin d'être le fainéant pacha décrit par Houdi, le rouquin s'était engagé en tant que serveur à l'Abéhys et avait prouvé être un travailleur plein de bonne volonté. Il n'était certainement pas le plus viril des hommes mais sa sensibilité et son optimisme avaient le don d'éclairer les lieux. S'il n'était pas un aventurier, il était un véritable artiste, aimant discuter et échanger avec les gens, toujours un sourire et une phrase lumineuse aux lèvres.

Le Mage allait découvrir un ami loyal, prêt à braver bien des choses pour son entourage. Le rouquin avait été là durant ses pires dépressions, le soutenant et l'écoutant sans broncher. Chaque acte d'Eku avait fini par lui valoir une considération spéciale chez le Mage qui le compta parmi ses proches.

Nymeia et Menphina, quant à elles, n'en avaient pas fini avec Eylion. Et ce fut avec un humour particulièrement grinçant durant cette année mouvementée qu'elles lui firent croiser la route...

De la Lionne d'Ebène.
Dernière modification par Ennrael le 24 avr. 2021, 22:38, modifié 1 fois.

Avatar de l’utilisateur
Ennrael
Messages : 228
Inscription : 09 mars 2018, 13:21

Chapitre 70: La Lionne d'Ébène (Partie 1)

Message par Ennrael » 10 juil. 2021, 22:49

Image
La première fois qu'il l'avait vu à l'Abéhys ne l'avait pas réellement marqué. C'était lors du premier accident avec l'Athanor. Les duellistes de ce soir là s'étaient trouvés bloqués au sein de l'Arène pour une raison inconnue. Une rapide enquête avait permis de trouver le coupable: un objet enchanté en forme d’œuf qui interférait avec l'artefact, caché parmi les buissons du sous-sol lui servant d'alimentation. Les plantes avaient eu le temps de se faner avant qu'on ne trouve l'objet en question.

La Crépusculaire s'était trouvée parmi le groupe qui s'était porté volontaire pour trouver le coupable. Coupable qui ne fut jamais trouvé et qui fut à l'origine de la première mesure de sécurité prise pour l'Athanor. Le Mage l'avait trouvé à l'image de toutes les femmes: aussi dangereuse qu'elle avait l'air assurée. Il était alors bien loin de se douter que leurs chemins allaient se croiser à plus d'une reprise.

La seconde rencontre avait été un rendez-vous pris par la concernée elle-même. Une Lionne intriguée par les dires de Lucrétia dont elle avait croisé la route à l'auberge du Lion d'Or. Il l'avait reçu dans le bureau de la gérance au sein de la taverne. Assis au fond de son fauteuil, il l'avait attendu, un rhum ambré déjà entamé à la main. Elle était arrivée, vêtue d'amples fourrures luxueuses, en observant attentivement les alentours de la pièce. S'il était déjà méfiant, la vue de ces fourrures n'avait fait qu'accentuer ses appréhensions. La tenue, l'attitude, tout lui évoquait un sinistre souvenir dont les cicatrices étaient encore palpables au sein de son âme.

Sorcière.

Eylion: Vous vouliez me voir?

Elle l'avait salué d'un geste de tête élégant tout en s'approchant, un sourire s'esquissant à la question.

Eris: Bonsoir, merci d'avoir accepté de me recevoir. En effet. J'ai de nombreuses questions à vous poser sur la magie, si vous n'y voyez pas d'inconvénients.
Eylion: Y voir un inconvénient, ça, j'en jugerai, avait-il maugréé doucement. Vous pensez à quoi exactement?

Il avait repris ensuite une gorgée de son verre, sans jamais la lâcher de l’œil.

Eris: Au Néant, avait-elle annoncé simplement en soutenant son regard.

L'Azur s'était plissé à la mention.

Eylion: Un sujet de prédilection pour les vôtres, avait-il répliqué en esquissant un petit sourire en coin empreint d'un mépris hostile.

Semblant habituée, elle lui avait rendu un petit sourire en coin.

Eris: En effet... Cependant, j'ai été... arrachée très tôt à ma famille, et ce n'est donc pas elle qui m'a enseignée cette pratique. Je l'ai découvert par le biais d'un occultiste, et je dois dire que cela m'a beaucoup plu. J'aimerais me renseigner au sujet des dangers du Néant. Particulièrement...

Elle avait marqué une pause, hésitante.

Eris: ... Au sujet des invocations.
Eylion: ... Très tôt à votre famille? avait-il demandé t'il en arquant son unique sourcil visible.

Mal à l'aise face à la question impromptue, elle avait haussé les bras.

Eris: Je ne sais pas si mon passé vous intéresse tant que ça, vous savez. J'ai quitté les grottes quand j'ai voulu percer dans la couture, dans le monde extérieur.

Il s'était mis à la fixer en inclinant la tête légèrement sur le côté.

Eylion: Quitté est un mot différent de "arraché", avait-il souligné avec une nonchalance feinte.

Le regard de la Crépusculaire s'était fait fuyant.

Eris: Vous êtes quelqu'un de plus... attentif que la plupart. J'ai en effet quitté mes parents de mon plein gré mais... des circonstances ont fait que je n'ai pas pu y retourner lorsque je l'ai voulu. J'étais jeune.

Elle avait secoué la tête comme pour chasser un souvenir, son sourire revenant pour l'y aider. Le Mage ne l'avait pas entendu de cette oreille.

Eylion: Quel genre de circonstances...?

Un sourcil frustré et amusé s'était arqué chez Eris à la question lancée.

Eris: Vous êtes insistant, n'est ce pas? En quoi cela va-t-il nous aider à parler de magie?
Eylion: J'aime savoir à qui j'ai affaire, avait-il dit sobrement, placide.
Eris: Je vois. Vous voulez savoir si je suis dangereuse pour vous, hm? Malheureusement, je n'ai pas envie de rentrer dans certains détails, et je ne vous connais pas non plus...

Elle avait marqué un temps de silence réfléchi.

Eris: Un homme m'a proposé de m'emmener en Orient, pour m'exercer dans son établissement. Le même que celui que je dirige aujourd'hui. C'était loin. Très loin. Et je n'avais pas eu la possibilité de retourner chez moi. Je n'ai... vraiment pas envie de vous en dire plus. C'est personnel.

Loin de lâcher l'affaire, il avait esquissé un mince sourire en coin.

Eylion: ... Une affaire de cœur, je suppose.
Eris: Un connaisseur? avait-elle répliqué en conservant le sien.

Dans ces échanges de sourires non dupes, celui du Lunaire s'était alors teinté d'une certaine froideur.

Eylion: S'il y a bien une chose que je sais, c'est ce dont Menphina est capable. Mais... vous parliez d'un établissement. Établissement de couture?

Avec une nonchalance calculée, il avait repris une gorgée de son poison de prédilection, toujours sans la lâcher de l’œil.

Eris: En effet ! Je suis confuse, j'oublie souvent à qui je parle de mon métier. Je dirige l'établissement de couture que j'ai rejoins il y a 20 ans de cela, oui. La maison Charybde.
Eylion: Charybde, hrm... Couture et Occultisme, ce n'est pas un mélange courant, avait-il souligné d'un geste de main.

Ce à quoi elle avait répondu par un léger rire.

Eris: J'hésite à vous faire part de mes plans. Je compte pourtant allier les deux. Il faut des matières premières pour faire des vêtements, et je suis particulièrement amoureuse de la fourrure.

À cet instant précis, il s'était décidé à pousser le bouchon. Voir comment elle allait réagir face à des propos insultants. La tester. Voir ses limites.

Eylion: Je ne sais pas quel genre d'inconscient irait acheter, les yeux fermés, des vêtements tissés par un Occultiste.
Eris: Des clients privés. Je trouverais bien. Tout se vend, rien ne se perd. En attendant, je n'ai vraiment pas envie de me mettre en danger pour cela, et c'est pourquoi j'aimerais faire appel à vous... afin de me prévenir des dangers de l'occultisme et du Néant. Les livres que je trouve sont beaucoup trop vagues.

Aucune réaction. Profil de conciliation. Réponse directe. Précise. Pas de remise en doute des dires de son interlocuteur. Il avait arqué son unique sourcil visible.

Eylion: Vous n'avez pas dit avoir été formée sur la question?
Eris: Non.

Elle avait marqué une pause.

Eris: Un client a oublié un jour son livre d'occultisme chez moi, et je l'ai découvert avec plaisir. Mais il n'était pas du tout spécialisé sur le Néant.

Il avait eu un air incrédule.

Eylion: Il est assez rare que le tout venant se lance dans l'Occultisme parce qu'il en avait envie. Ça demande un don inné en la matière.

Elle s'était désignée en réponse, de l'un de ses grands ongles griffus.

Eris: J'ai eu la chance d'être une race généralement douée en la matière. Et mon client m'a bien évidemment donné des conseils en matière de contrôle de l'éther. Mais pour le reste... j'ai dû me débrouiller toute seule. Je ne connais que la théorie dans ce domaine.

Il avait plissé son Azur à la mention.

Eylion: ... Vous avez découvert votre don lors de sa visite ou bien avant?
Eris: Je... je l'ignore, avait-elle répondu, confuse. Je n'y ai jamais songé, à vrai dire. Vous sous entendez que j'aurais pu avoir des signes plus jeune?

Il avait hoché lentement la tête en retour.

Eylion: Devenir occultiste suppose avoir une grande réserve d'Éther en premier lieu et la capacité de la manipuler. Pour certains, ils vivent, en effet, sans être au courant de ce fait. Dans d'autres, ils le découvrent... souvent à leur détriment ou celui de leur entourage.

Elle avait grimacé à la mention.

Eris; J'ai... fait mal à une amie, plus jeune. Une fois. Mais je tenais un objet tranchant dans la main, et j'ai cru que la marque avait été causée par cela. Mais c'est tout. Ce n'était pas très grave.
Eylion: Du mal...?
Eris: Son bras était rouge, avait-elle narré en secouant la tête. Je m'en souviens car elle eut un peu peur de moi pendant quelques temps après. Mais c'est tout. C'était il y a longtemps déjà. Évidemment, nous n'étions pas dans un environnement avec beaucoup de mages, donc si c'était bel et bien de la magie, personne ne l'a fait remarquer.
Eylion: Mais si vous vous en rappelez, c'est qu'un détail vous a troublé, avait-il souligné, placide.
Eris: Ma colère. Ma culpabilité ensuite. Et son bras... ce n'était pas une coupure.

Elle avait cligné alors des yeux pour regarder ensuite son interlocuteur avec un demi sourire provocant.

Eris: J'ai l'impression d'être chez un psy.

Une remarque qu'il avait évincé d'un haussement d'épaule. Son verre vide avait trouvé le côté du divan, tout aussi délaissé.

Eylion: Donc si je résume bien, vous n'avez, réellement découvert votre don que plus tard. C'est... votre "ami" occultiste qui vous l'a révélé? avait-il demandé dans un demi-sourire, couvrant ses deux questions en une.
Eris: Hmhm, en effet, avait-elle fait en plissant les yeux. Vous sous entendez quelque chose, je me trompe? C'était mon amant, aussi, en quelque sorte. Cela expliquerait pourquoi il avait prit le temps pour me l'apprendre. Comme ça, vous savez tout et vous arrêterez de me poser des questions à double sens.
Eylion: Je n'ai jamais posé la question, avait-il répliqué, de son sourire infernal teinté d'un certain amusement. En tout cas, il n'a, visiblement, pas pris la peine de vous apprendre davantage.
Eris: Non, en effet, avait-elle dit, la voix emplie de regrets.

Une pause.

Eris: Et vous? Prendriez vous le temps de m'en apprendre plus? Je peux, bien évidemment, vous payer pour cela.

Ce à quoi il avait répondu par un secouement lent de la tête.

Eylion: Je suis un Arcaniste, c'est tout un autre fonctionnement. Seul un Élémentaliste peut enseigner à un Élémentaliste. Un Arcaniste à un Arcaniste. De même... Seul un Occultiste peut enseigner à un autre. La seule chose que je pourrai enseigner, c'est les bases théoriques sur l'Éther et la teneur des différences entre ces trois écoles. Pour le reste, je pourrai... éventuellement vous mettre en contact avec une Occultiste mais... Sans aucune garantie qu'elle soit de confiance.
Eris: Oh, je vois, avait-elle dit, déçue. Mais un autre occultiste serait intéressant, en effet. Merci beaucoup!

Elle avait pris le temps de se reprendre, croisant les jambes avant de s'accouder sur le fauteuil avec un air séduisant.

Eris: Maintenant que je vous ai bien parlé de ma vie... J'aimerais que vous me parliez de la vôtre. Puis-je demander quelle est votre relation à Dame Lucrétia?

Le coin de la lèvre du Mage avait tiqué de manière imperceptible à cette mention.

Eylion: ... Celle entre un Employeur et son employée, avait-il répondu froidement.

À cet instant, l'apprentie occultiste avait pu lire dans l'Azur une haine assez grande pour gâcher quelque peu le masque placide du Mage. Elle avait plissé des yeux suite à son observation, très à cheval sur les tics de ses interlocuteurs.

Eris: Je vois... J'apprécie beaucoup cette petite, pour le peu que je lui ai parlé. Mais je dois dire que j'ai remarqué des choses inquiétantes dans son comportement. Particulièrement la dernière fois à l'Abéhys, mais aussi la première fois. Je suis peut être obsédée par l'occultisme... mais j'ai la désagréable impression que la petite n'est pas tout à fait maître d'elle même. Peut-être un maléfice? Peut-être plus. Cela m'étonnerait que ça soit une possession évidemment, c'est bien trop extrême. Je... dois dire que je vous soupçonnais d'y être pour quelque chose, jusqu'à ce soir.

La mention qu'elle l'appréciait avait arraché un bref sourire grimaçant au Lunaire. Ça n'y coupait jamais. Tout le monde adorait Lucrétia, ce qui avait de quoi remuer l'amertume et l'agacement chez lui. La si gentille Lucrétia. La pauvre, pauvre Lucrétia, si amusante dans sa folie douce. Aucun n'avait jamais été confronté au Monstre auquel il avait eu droit... Auquel il avait toujours droit, parfois, quand l'obsession ressortait.

Aucun n'avait eu droit à ses caprices. Aucun n'avait vu les corps de ses proches lacérés, torturés. Ni entendu les cris. Tant de cris. Tant de supplications.

Jamais rien n'apaiserait ses nuits, ni ses souvenirs quand il devait repenser à toutes ces années au sein du Manoir. Mais à part ça, oui, pauvre Lucrétia.

Eylion: Si vous avez parlé avec elle, vous avez dû noter qu'elle avait un comportement particulier. Ce n'est un secret pour personne: elle est folle. Pas assez pour être internée mais assez pour agir de la sorte.

Ressortir les bonnes vieilles excuses. Se montrer raisonnable, un bon patron compatissant. Le genre de demi-Vérité nécessaire qui le débectait. Une réponse insatisfaisante pour la Crépusculaire qui avait étiré une moue incertaine.

Eris: Soit... elle l'est peut-être. Mais pourquoi la gardez vous sous votre aile, alors? Et... ses yeux? Son œil.

Tu as de si beaux yeux... ♪

Elle avait remarqué. Il avait pris une inspiration.

Eylion: ... Je ne le fais que par promesse vis à vis d'une personne. Pour ses yeux, oui, ils sont particuliers... mais les vôtres le sont bien.

Elle avait haussé les épaules.

Eris: Ils ne sont pas anormaux chez les Crépusculaires vivants encore dans les grottes. Et surtout... il ne sont pas rouges. Vous ne me convaincrez pas. Et c'est impossible que vous ne soyez pas au courant, s'il y a un quelconque maléfice sur elle. Ce n'est pas pour rien qu'un "docteur de la magie" soit son mécène...

Elle s'était penchée pour lui offrir un insupportable regard innocent qui enjoignit le Lunaire à répliquer par l'un de ses hypocrites sourires "angéliques".

Eylion: Et en quoi ça vous regarde?

Elle s'était penchée vers lui, provocante.

Eris: J'aime me mêler de ce qui ne me regarde pas... surtout quand il s'agit d'une femme aussi plaisante que Lucrétia.
Eylion: Hé bien, j'aurai vécu assez longtemps pour entendre ça de la part de quelqu'un, avait-il grimacé un sourire presque carnassier avant de revenir à un air plus nonchalant. Un Docteur n'en serait pas un s'il se mettait à déblatérer au sujet de ses patients.

Elle avait penché la tête sur le côté.

Eris: C'est vrai... Prenez moi donc en tant qu'apprentie, alors.

Il l'avait regardé aussi interloqué qu'incrédule.

Eylion: Apprentie, une Sorcière comme vous?

Prise au dépourvu par le terme, elle avait littéralement éclaté de rire.

Eris: Une... une sorcière?! Oh, trésor, j'apprécie beaucoup ce terme, mais je ne m'attendais pas à vous l'entendre dire! avait-elle émis avant de le contempler pendant quelques secondes. Je suis une femme curieuse. Je suis riche, je possède tout ce que je veux. Sauf l'art de la magie. Je dois vous avouer que c'est tentant.

Il avait observé attentivement la réaction de cette dernière avant d'esquisser un sourire froid, laissant les cicatrices parler plus que la Raison.

Eylion: Je connais très bien les membres de votre espèce. Et je ne parle pas des Crépusculaires. Je ne doute pas que vous soyez du genre à obtenir ce que vous désirez mais comme un adage le dit, il y a toujours un début à tout. Surtout à faire découvrir que tout n'est pas forcément à disposition.

Elle s'était mordue la joue, inconsciente que ces mots ne lui étaient pas réellement destinés.

Eris: Oh, je vois. C'est ainsi, avait-elle fait beaucoup plus froide. Vous vous méfiez donc des Crépusculaires.
Eylion: Non. Des Sorcières, avait-il répondu en la fixant.

Elle avait esquissé un sourire à entendant à nouveau le surnom.

Eris: Très bien. Alors je vais jouer carte sur table.

Elle s'était levée pour s'approcher doucement de lui.

Eris: Je suis manipulatrice. Je suis fourbe. Je m'intéresse aux arts obscurs. Mais j'ai un cœur, pour les jeunes filles candides. Alors je vous propose un marché.

Elle s'était penchée sur lui, incitant un mouvement de recul de sa part, le dos du Mage se tendant.

Eris: Prenez-moi comme apprentie, ou même comme confidente à son propos. Et vous aurez une alliée de choix.
Eylion: Hrm... Et en admettant tout ça, vous escomptez que je vous accorde ma confiance à l'aveugle? avait-il répliqué avec un sourire grinçant en coin.
Eris: Non, bien évidemment, avait-elle dit en souriant. Vous êtes intelligent. Et les hommes intelligents, on ne peut pas les manipuler facilement. Je vous propose de vous prouver que je suis de confiance avec mes alliés.
Eylion: ... Et comment? avait-il demandé, l'air incrédule.

Elle avait haussé les épaules.

Eris: Ça, je l'ignore. J'ai de l'argent, et des contacts. Et si vous acceptez, je vous en dois une. Appelez, et j’accourrais pour vous aider par tous les moyens... le jour où vous aurez besoin de moi.

Il avait eu un léger rire bas en retour.

Eylion: Vous savez ce qu'on dit sur la valeur des mots. Ils ne pèsent pas grand chose. Ah, les belles grandes promesses... ... Ça ne vaut pas les actes, avait-il répliqué avec un sourire carnassier.

Elle l'avait dévisagé un instant.

Eris: Je n'ai malheureusement rien à vous proposer de plus, qui vous intéresserait.

Sa main avait alors glissé sur la cravate du Mage jusqu'à la saisir et la tirer légèrement vers elle.

Eylion: ...!
Image
Image
Le réflexe avait fusé aussitôt, la senestre du Lunaire venant dégager sans ménagement la saisie intruse, dans un claquement sonore. Un souvenir. Un frisson.

Eylion: Reculez.
Nitrischa: Pourquoi… Ça ne te plaît pas?
Eylion: Pourquoi ça devrait me plaire?!
Image
La bile au fond de la gorge. La Rancune. Le Grief. Le goût acide et nauséabond des Regrets.

Eylion: Pas de ça avec moi, avait-il sifflé, vindicatif.

Il s'était levé dans le même mouvement, faisant fi de la différence de taille pour la fusiller amplement de son Azur froid. Sur l'instant, il n'avait eu qu'une envie dévorante: celle de brûler la "Sorcière" en face de lui. De la faire souffrir, de lui infliger un mal à la hauteur de ses cicatrices. De faire ce qu'il n'avait pas pu faire à Nitrischa.

Une chose l'avait retenue. Sa Raison. Elle n'était pas Nitrischa. Non seulement il était injuste de faire payer à une inconnue ce que quelqu'un d'autre avait fait... mais aussi, quelque part, c'était accorder trop d'honneur et d'attention à un fantôme du passé.

Eris: Je le sais, s'était-elle exclamée en riant. J'adore les hommes qui me résistent. Mais vous semblez bien trop résistant. Quelqu'un vous a déjà posé la main dessus, hm?
Eylion: Trop à mon goût, avait-il répliqué, sa voix suintant de dégoût... et haine cette fois. Je vous conseille de partir. Maintenant.

Elle l'avait observé longuement, sentant l'ampleur du Feu contenu.

Eris: Vous m'intéressez, petit homme. Vous êtes tellement frileux, et tellement... brisé.

Par respect, elle avait fini par concéder à reculer.

Eris: Très bien, je m'en vais. Mais sachez que je m'intéresse encore à Lucretia. Et maintenant, à vous. Bonne soirée.

Elle avait fait demi-tour dans une démarche chaloupée. Sitôt sortie, le Brasier avait enflammé les veines du Mage, faisant fi de toute Raison. Sa main s'était élancée vers le mur à proximité, l'incantation fusant, le sort démultiplié par la rage au fond de lui. Le mur avait explosé et volé en éclat, faible représentation de ce qui le consumait réellement de l'intérieur. Le hurlement de frustration avait suivi l'éboulement.

Il avait espéré qu'il n'allait pas regretter de l'avoir épargné.

Dans les jours qui avaient suivi, il n'avait pas manqué de mettre en garde ses proches et le personnel de l'Abéhys. Il avait besoin de tout, sauf d'une Sorcière à proximité de la Démone qui pourrissait régulièrement son existence. Il n'avait pas manqué d'enquêter sur elle, ce qui lui avait fourni des informations concordant avec ce qu'elle lui avait raconté.

Eris Charybde, Crépusculaire de 42 ans, veuve de Magnus Charybde, de la maison de couture distinguée du même nom. Elle était connue aussi bien pour ses talents de couturière que pour son goût vis à vis des fourrures et du libertinage.

Eylion: Une libertine, évidemment, n'avait-il pas manqué de murmurer à la lecture du rapport, dans un roulement d'Azur.

Après avoir subi deux ruptures avec des libertins, il préférait s'en tenir loin. Il oscillait, en ce temps là, entre l'envie ferme d'un célibat et celle, moins assumée, d'un amour Absolu. Pour les retours qu'il en avait eu, Eris était une grande séductrice, capable de charmer hommes et femmes d'un regard et d'un verbe aussi sensuel que provocant.

Autant de facteurs qui l'avaient enjoigné à se méfier davantage d'elle.

Puis il y eut la soirée de la Veillée des Saints (2019) où le Mage s'était "amusé" à créer un jeu d'évasion basé sur ce qu'il craignait secrètement de devenir si, un jour, Menphina venait à lui donner et retirer ses grâces. La première partie de la soirée s'était déroulée sans heurt, les équipes se déchaînant vis à vis des énigmes. La seconde, en revanche, s'était vu troublée par deux clans de Solaires rivaux, les Nunhs échauffant le conflit jusqu'à inciter à mettre fin prématurément à la soirée pour pouvoir régler le souci diplomatiquement.

Le Lunaire s'était ainsi retrouvé tardivement sur le chemin du retour. La nuit était tombée depuis longtemps sur la Coupe. Devant un carrosse en forme de citrouille, il était tombé de manière impromptue sur Eris accompagnée d'une Hyurgoth baraquée.

Eris: Ah tiens, Eizen. Voilà notre homme.
Eylion: ...?
Eizen: Ah bah... Merde, c'est quoi son nom déjà...

Le Miqo'te les avait dévisagé, aussi suspicieux qu'il était fatigué et grognon dû aux émotions de la soirée mais aussi d'un élancement sourd de crâne qui avait commencé à le prendre depuis un moment.

Eylion: Qu'y a t'il?
Eris: Eylion... avait-elle fait dans un soupir. Eizen voudrait te parler.
Eizen: C't'une longue histoire héhé, avait-elle renchéri en se frottant l'arrière de la tête.

S'en était suivi une explication particulière sur le fait qu'Eizen s'était fait transformé en femme par l'usage d'un Gage expérimental. Il avait joué un mauvais tour à Eris en lui faisant croire que des personnes inconnues en voulaient à sa vie. Lucrétia avait aussitôt pris la défense de la Crépusculaire, un signe de son évolution particulière. La Démone avait commencé à s'attacher, enfin, à d'autres personnes. Eku avait été le premier. Eris la seconde. Sans que nul ne le sache, les multiples conversations au sein de la Brigade Rouge avaient porté leur fruit sur le temps.

Elle avait donc usé d'un Gage volé au sein du laboratoire d'Eylion et de ses capacités temporelles pour rendre l'effet permanent. Blasé, le Mage avait enjoint le malheureux à régler ça avec les deux femmes, en sachant que peu de choses pouvaient interférer avec les pouvoirs de son némésis.

Eylion: Bonne chance pour vous dépatouiller avec elle et oui, un peu qu'elle sait comment faire, avait-il grogné. Franchement, il faut être con pour l'approcher.
Eris: Bon... Nous savons qui recontacter, à présent...
Eizen: Bah... elle ressemble à une "gueule d'ange" pourtant... enfin comme dirait Strap.
Eylion: C'est tout sauf un Ange, avait-il grogné. Tapez plutôt dans l'autre camp. Vous me direz si elle a accepté ou non de ne pas vous pourrir la vie.

Le propos avait eu le don de faire arquer un sourcil à la Crépusculaire et d'arracher un air confus à Eizen. À leurs yeux, Lucrétia était juste la jeune gérante naïve et pétillante de l'Abéhys.

Eizen: Ok...
Eris: Oh, elle acceptera sûrement de me le rendre, si je lui explique que j'en ai besoin pour ma sécurité personnelle, avait-elle dit, assurée.
Eylion: ... Je ne sais pas quel est votre lien avec elle... Mais vous finirez bien par vous en mordre les doigts, avait-il lancé en retour avec hargne.
Eris: Un instant, cher Eylion! J'aurais, moi aussi, une...

Elle s'était efforcée de prendre une inspiration et d'afficher l'air le plus affecté et sérieux possible.

Eris: J'aurais à vous parler. C'est important.

La mention avait retenu l'intéressé qui s'était retourné alors qu'il avait déjà commencé à s'éloigner du carrosse, pressé d'apaiser la fatigue qui semblait peser de plus en plus lourdement sur lui depuis un moment.

Eylion: ...?

Eizen s'était éloigné avec un soupir pour leur laisser un peu d'intimité.

Eylion: Important...?

Elle lui avait fait signe de la suivre, vers le carrosse.

Eris: Je comptais partir, marchons jusqu'à mon moyen de transport, pendant que je vous parle. Cela vous avancera.

Après une hésitation, il l'avait rejoint, méfiant.

Eylion: De quoi vous voulez parler? avait-il grommelé.
Eris: Eh bien... Vous devez vous souvenir de la première fois où j'avais demandé à vous parler.

Il avait levé le regard sur le côté, signifiant qu'il se serait bien passé du souvenir.

Eylion: Et? avait-il repris, toujours sur un ton désagréable.

Durant leur discussion, ce fichu élancement de crâne avait augmenté d'un cran en ampleur. Ce qu'il aurait donné pour son lit...!

Eris: J'ai un problème, et j'ai...

Sa mine affectée s'était faite plus déconfite. L'image même de la femme accablée. Vulnérable.

Eris: J'étais trop fière, à l'époque, pour l'admettre. J'aurais besoin de votre aide. D'une énorme faveur, de la part d'un mage.

Le changement d'attitude avait juste augmenté la méfiance et perplexité de son interlocuteur qui s'était mis à la regarder en biais.

Eylion: ... À propos de quoi?

Ils s'étaient arrêtés près du carrosse citrouille, seule lumière au sein de la nuit noire. La Crépusculaire s'était détournée, comme pour tenter d'éviter le regard du Lunaire.

Eris: Je... J'ai une présence, dont je ressens le besoin de me débarrasser. Soyez certain que je ne demanderais pas ça, en temps normal, mais je commence à craquer.
Eylion: Une présence...?

Il avait commencé à ressentir des palpitations étranges au niveau de son Cœur. Il s'était alors demandé si ses nuits tardives de recherche et de stress n'étaient pas en train de le rattraper. À moins qu'il n'avait trop bu? Il avait essayé de se concentrer de son mieux malgré le malaise qui était en train de l'étreindre.

Eris: Mon... avait-elle amorcé d'un soupir, suivi d'une grimace. Mon défunt mari. Qui me hante, toujours. Je suis convaincue qu'il m'a jeté un sort.
Eylion: Défunt... Mari?

Elle lui avait montré la bague à son doigt.

Eris: Monsieur Charybde, ancien maître de la maison de couture.

Elle s'était mordue la langue, regrettant de s'être aventurée sur le sujet. Mais il fallait gagner du temps. Plus de temps.

Eris: Il... Il me m...

Elle avait serré des dents, frustrée. Quand est-ce qu'il allait donc tomber, cet entêté?! Avait-il seulement bu durant la soirée??

Eris: Il me manipulait, et il pense pouvoir encore me manipuler, même après sa mort!

Le Lunaire s'était dit que c'était bien sa veine. Il se sentait mal et c'était maintenant qu'elle choisissait pour en parler.

Eylion: ... Hrm, c'est donc pour ça que vous tiriez cette tête quand j'avais balancé vis à vis d'un grand amour qui vous a piétiné, avait-il fait en l'observant en coin avec un côté aussi méticuleux, prudent que froid.

La Lionne n'avait pas tardé à mordre en retour du morceau qu'elle avait dû lâcher pour le retenir.

Eris: Pardon? Je me souvenais surtout de la tête que vous faisiez lorsque je vous ai agrippé votre cravate, avait-elle fait avec un sourire aussi victorieux qu'implacable. Vous avez un Esprit, vous aussi, qui vous pèse.

Il avait grimacé en retour au souvenir, bien plus ouvertement.

Eylion: Je regrette de ne pas avoir eu le réflexe de combler un regret à ce moment là. Pour mes fantômes, ils sont très bien dans le placard. Alors... c'est quoi votre histoire de... possession? avait-il grommelé en secouant la main, empressé.

Elle l'avait fixé longuement, sceptique et contrariée. Elle allait finir par conclure qu'il n'avait rien bu.

Eris: Tous les soirs, il me parle. Il pense m'avoir toujours entre les griffes. Et les douze seuls savent à quel point je vous hais, pour avoir à vous dire cela. Je suis désespérée, avait-elle lancé, dans une demie-Vérité.

Il s'était apprêté à ajouter quelque chose mais son souffle s'était fait de plus en plus court. Un premier haut le cœur l'avait figé, puis un second.

Eylion: ...!

Il s'était pris le coeur, choqué.

Eylion: Gh...

Sa respiration n'était plus que des sifflements haletants et hasardeux.

Eris: Oh... Quelque chose ne va pas, très cher?

La surprise, l'interrogation avaient défilé sur les traits exsangus.

Eylion: Je... Arh...

Alors que ses jambes cédaient sous lui, il avait aperçu l'éclat dans les yeux mordorés de la Crépusculaire.

Eylion: Est-ce que...

Un éclair de compréhension avait alors invité la haine, poursuivant la question que ses lèvres appesanties n'étaient pas parvenues à terminer. Il avait senti les serres de son interlocutrice le rattraper.

Eris: Vous ne semblez pas aller bien, avait-elle fait dans un rictus faussement concerné. Je vais vous amener dans un endroit calme.

Elle l'avait entraîné vers le carrosse. Il avait tenté de lutter, sa dextre tentant de se retenir à celui-ci, l'autre à repousser sa ravisseuse. En vain. Il avait tenté d'ouvrir la bouche, de l'invectiver mais sa voix ne lui répondait déjà plus. En désespoir de cause, les doigts drogués s'étaient refermés sur le col de la Cendrée.

Elle avait fini par l'allonger sur la banquette arrière, le forçant à replier ses bras.

Eris: Allons, allons, ne faites pas l'enfant. Je vais bien m'occuper de vous... vous verrez ~

Il avait lutté. Farouchement. Jusqu'à la dernière seconde. Jusqu'au dernier fragment de conscience...
... Jusqu'à ce que son regard ne se révulsa pour sombrer dans les ténèbres...
Sa vision se refermant sur un sourire aussi suave qu'implacable.

Répondre

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 3 invités