Eylion Grenn

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 01 mai 2018, 19:13

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Un Choix.

Voilà ce qu'Elle lui avait demandé. De Trancher une bonne fois pour toutes.

- J'étais prête à vous laisser du temps, je le suis toujours. Je ne vous demanderai rien, je me contente même de vous voir qu'une fois par semaine alors que vous me manquez tous les jours, que j'ai ce vide immense que je n'arrive même pas à combler avec mes livres qui est pourtant ma première passion. Mais si, durant ce laps de temps... je dois supporter cette attitude et ne plus pouvoir retrouver celle de mon ami qui faisait un effort pour être plus accessible et plus doux, m'aidant à apprendre sans me brusquer alors... Je ne vois pas l'intérêt de continuer, au final, je ne vais rien apprendre.

Pour mettre des distances, il avait imposé à sa disciple un seul cours par semaine. Le premier depuis leur départ du refuge. Il avait espéré qu'ainsi, elle aurait le Temps de décanter ses sentiments pendant qu'il décantait la situation, ignorant qu'il possédait déjà les mots depuis le début. Qu'il avait déjà la Réponse entre ses mains. Mais une part de Naïveté avait espéré que les choses tournent autrement.

Les Émotions font fi de la Raison.

La "Raison", ou plutôt les Conventions, avait chanté les mérites de K'alyanni. Jeune ingénue au cœur tendre, au Verbe parfois maintenant aussi tranchant que son Professeur. "Vois", chantaient les Conventions, "Vois comme elle est belle et désirable. Quel Homme serait assez fou pour refuser un tel Amour?".

Bien entendu qu'il l'aimait... mais comme un Père, chose qu'il avait déjà tenté de communiquer. Mais la Chute, à ce stade, était inévitable.

Et ils en payaient le Prix.

Il avait essayé de lui expliquer. Essayer de lui expliquer ce qu'il ressentait. Elle chantait en retour son Amour, sans comprendre.

- Je... peux rester votre élève et votre amie, chantait-elle. Le reste, je... finirai par le ravaler et passer à autre chose avec le temps j'imagine, puisque vous brisez l'espoir et semblez faire votre choix. Je ne serai pas une véritable amie si... je ne l'acceptais pas. On ne peut pas forcer quelqu'un à tomber amoureux ou à nous aimer. C'est surtout ça qui serait cruel.
- ... Comme ce serait cruel de vous imposer ma présence.
- Vous ne voulez même plus me revoir ou m'enseigner? Même qu'une fois par semaine?
- Merde...!

Il s'était levé, impacté au dernier degré.

- ... Je ne peux pas vous imposer ça, avait-il dit d'une voix sourde.
- Je... Je peux contenir ce que je ressens, c'est... 'fin, c'est surement pas la première fois qu'une fille est amoureuse d'un homme qui ne la veut pas et pourtant on en meurt pas hein, je... peux très bien gérer ça, avec le temps. Vu que ce n'est pas réciproque, c'est plus facile pour moi de m'y faire que d'attendre de savoir si vous voulez de moi ou non.
- Je suis passé par là, ça ne fonctionne pas aussi facilement.
- Je ne suis pas vous et je ne suis pas comme les autres cruches non plus, j'ai plus de force de caractère et je suis déterminée, comme je suis déterminée à vous aimer quand même, sans rien en retour. Peu m'importe mais vous n'avez... pas le droit de choisir à ma place si je souhaite ou non poursuivre mes cours. Vous ne savez pas si je suis capable ou non et peut-être que c'est pas le cas mais je veux au moins essayer. Je serais sérieuse, disciplinée, je ne taquinerai plus. Je n'essaierai plus de vous faire rire ou sourire. Ce sera purement scolaire, un cours et au revoir, rien d'autre.
- Et comment je dois, moi, me comporter par rapport à tout ça? avait-il craché, excédé.
- Hé bien comme un con, c'est ce que vous faites le mieux, non? avait-elle lancé en fronçant des sourcils. Un professeur dur et antipathique et je tenterai de faire avec et d'oublier ce que je connais de vous et ce que j'aime chez vous. Comme ça, en plus de ça à la fin de ma formation, je serai surement une personne de plus que vous aurez repoussé et qui vous détestera sûrement aussi. C'est mieux comme ça, non? C'est biiiien mieux que d'avoir une amie et de profiter de moments agréables en étudiant. Puisque vous n'en voulez pas, faisons donc à votre manière.

Il avait soupiré.

- ... Ce qui n'est pas... mon objectif.
- C'est quoi votre objectif bon sang, vous me rendez dingue, Eylion!

Face à un tel degré d'incompréhension, il avait éclaté.

- Bien sûr et je dois agir comme je le fais naturellement, à avoir de l'attention pour vous, quitte à ce que ce soit des maladresses immondes par rapport à vos sentiments! Si ça ne concernait que ma petite personne, ce serait beaucoup plus simple mais je pense à VOUS, Kaly, merde, si vous n'arrivez toujours pas à comprendre!

Il n'avait pas eu le temps de réagir.
Il n'avait rien vu venir.

Dans la seconde, un souffle désespéré s'était pressé contre le sien dans un baiser qu'elle pensait être celui de la dernière chance. Le Stupre et la Tentation avaient foudroyé ses veines tandis qu'Elle lui arrachait ce qu'il n'avait accordé jusqu'ici qu'à une seule Femme. Et avec eux, vinrent la Honte et le Choc chevauchant la Confusion. Combien le Manque, féroce, inassouvi, se jouait de sa Solitude, de ses failles misérables...!

Le Vice, éclatant, ne fit que révéler davantage la cruelle Vérité.

La Passion et la Tendresse étaient absentes.

Il étouffait.
Il se noyait.

Elle le relâcha finalement, susurrant contre ses lèvres.

- Ose me dire maintenant... ou même plus tard, que tu n'as rien ressenti Eylion, et je disparaitrais de ta vie.

Il ne pouvait pas.
Non, il ne pouvait pas gérer ça.

Il se détourna d'elle pour se diriger vers la sortie, la laissant s'effondrer derrière lui.

Il ne se retourna pas.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 04 mai 2018, 20:10

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Ça faisait des heures qu'il devait se trouver sur un toit quelconque, choisi au hasard de ses errances. L'horizon familier des maisons d'Uld'ah s'offrait à sa vue. Il n'y avait que lui, sa conscience et son fidèle... rhum. Le ciel, dégagé, dévoilait une lune pâle. Une journée s'était passée depuis son départ. Il avait eu le temps de se rendre ivre et de dessoûler avant de savourer au soir quelques verres.

Il ne pouvait pas blâmer l'acte de sa disciple, quand bien même il ne pouvait s'empêcher de maudire l'ensemble des idées reçues. Le baiser volé, geste considéré comme du plus haut degré de romantisme... Là où lui considérait qu'il y avait des limites à ne pas franchir sans sentiments réciproques. A la décharge de son ex-Femme, elle lui avait menti, elle l'avait manipulé, isolé, provoqué, charmé, défié. Mais pour tous les supplices qu'elle lui avait fait subir, Eylion devait lui reconnaître au moins un mérite: Jamais elle n'avait outrepassé les limites qu'il n'avait été prêt, de lui-même, à franchir. Dans la pénombre de la Caverne, il avait saisi le menton de la Sorcière, assise au cours d'eau, et s'était penché. Il lui avait octroyé la victoire qu'elle attendait.

- Voyez ça comme une marque de félicitations... Pour m'avoir séduit mais ce sera la seule "Morsure" que je vous accorderai, lui avait-il susurré contre ses lèvres. Je ne toucherai pas davantage une femme déjà prise.
- ...! Tu te trompes, je ne suis pas avec Calwyn, s'était-elle empressée d'avancer.

Tout aurait pu s'arrêter là si ça n'avait été pour ce simple Mensonge.

Il continua, soigneusement, de faire la peau mentalement au reste des idées reçues. Il éprouvait ce besoin maladif de déverser sa Colère sur quelque chose, même sur des concepts complètement abstraits. Les propos de Merydwen lui revinrent durant sa diatribe silencieuse.

- Écoute... Vos prochaines discussions ne seront très certainement pas une partie de plaisir... Mais tu dois faire ce qui te semble le plus approprié... Ce qui causerait le moins de dégâts aussi bien de ton côté que du sien...

Il le savait. Il savait très bien ce qu'il devait faire. Mais savoir ne l'aidait pas, pour autant, à aller mieux.

Au matin, il savait qu'il devrait revenir auprès de Kaly. Il savait qu'il serait solennel et ferme. Il serait clair, précis. Il ne s'étendrait pas sur l'ensemble de la Vérité hormis un seul pan: Un au revoir inévitable.

Il se rassurait, quelque part, sur ce point. Ce n'était pas un Adieu. Ce n'était qu'un Au Revoir.

Kaly n'aurait aucun mal à trouver quelqu'un pour l'aimer. Pour guérir la plaie qu'il lui laisserait. Ce serait un homme bien, elle aurait la jugeote nécessaire pour écarter les avides et les beaux parleurs. Elle sourirait de nouveau et peut-être alors sera t'elle prête à le revoir. Il préférait se concentrer sur cette image positive plutôt que sur la perte.

Et lui?

Pour le prix de cette blessure, pour la remercier proprement de son affection, il se promettait de poursuivre ses efforts. De ne pas se laisser prendre par l'obscurité de son passé. De continuer à échapper à l'ombre de son ancienne Femme.

Peut-être même qu'il aimerait lui-même à nouveau?

Ce n'était pas le plus important pour lui. Sa Solitude ne l'empêchait pas de vivre. Elle était lourde et pesante mais il choisissait de ne pas en faire un fardeau. Il avait décidé de faire confiance au Destin. Qu'il trouve ou non l'Absolu qu'il cherchait, il continuerait de vivre. Il continuerait d'être lui-même. Il ne céderait pas aux Conventions, au Vice.

Il était avant tout le Mage. Le Voleur.
L'Adulte. L'Adolescent.
La Carcasse, le Survivant.
Le Patient, l'Impatient.
Le Chaotique, le Loyal.

Tant qu'il ne perdait pas de vue son Humanité et ce qu'il voulait alors il ne perdrait pas son chemin.
Sa Voix brisa le silence de la Nuit alors qu'il chantait d'un ton mesuré une vieille mélodie tout en arrangeant les paroles à la volée. Il chantait pour le courage, il priait pour conserver sa résolution même durant les Heures les plus Noires. Lui et ses qualités. Lui et ses défauts. Lui à l'Humanité si défaillante.

Demain serait une nouvelle Aube. De nouvelles épreuves. Des bonjour et des au revoir.

Et pour ce soir, il trinquait à sa disciple.

À un meilleur Avenir.
Dernière modification par Ennrael le 22 juin 2020, 23:03, modifié 1 fois.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 07 mai 2018, 19:14

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Ishgard, la Sainté Cité d'Halone.

La première chose qu'Eylion avait pu noter, c'était le froid saisissant, si loin du climat plus que clément d'Ul'dah. Son souffle embué se mêlait au vent glacial. Le Coerthas ramenait le Miqo'te deux ans, presque trois, en arrière, quand il avait été recueilli dans la neige, agonisant, par Rhian.

...! Hé, vous m'entendez? Tenez bon!

L'Académie était loin des grandes portes, située plus vers la frontière du Mor Dhona. Le seul endroit qu'il avait jamais considéré comme une demeure malgré la haine de ses confrères. Il savait qu'il ne pourrait plus jamais remettre les pieds là-bas. Trop de souvenirs, trop de visages connus. Trop de douleur. Un sentiment que semblait partager son meilleur ami puisque ce dernier n'avait pas hésité à déménager à Ul'dah avec lui.

Après le froid et la nostalgie, l'architecture imposante de la ville s'imposa à l'esprit du Mage. Les hautes tours et les maisons droites, serrées, semblaient vouloir écraser les passants. Il s'était déjà senti petit mais entouré par les pierres grises et interminables de la ville, il se sentait d'autant plus insignifiant.

Parmi les silhouettes qui s'affairaient à leur quotidien, il tâcha de se concentrer à nouveau sur la tâche confiée: prendre des nouvelles de la nourrice de Merydwen. Il avait promis de laisser le moins de traces possibles alors il ne pouvait pas se permettre d'aborder les passants ou même se présenter directement à la demeure Frözz. Le plan de celle-ci résidait dans son sac, remis par la guerrière selon les souvenirs qu'elle en avait. Il n'avait plus qu'à se trouver une auberge et se préparer pour une longue reconnaissance, ce qu'il fit.

L'auberge trouvée, le Miqo'te avait repris ses anciens réflexes de Voleur. Prendre note des alentours du lieu visé. Explorer. Surveiller. Chercher les opportunités. Noter les rondes, les passages, les habitudes.

Le château des Frözz se mariait parfaitement avec le reste de l’architecture d’Ishgard, loin de se faire remarquer par une quelconque extravagance.
Assez éloigné de la grande place, il était situé légèrement en hauteur de la Sainte Cité. La demeure était plus haute que large, composée de trois étages et d’un rez-de-chaussée ainsi que d'un terrain d’entraînement couvert situé à l’arrière de la bâtisse. L’agencement des lieux et les nombreuses fenêtres permettaient au Miqo’te de déterminer facilement la disposition des pièces depuis le plan détaillé de Merydwen, la chambre de Miranda se trouvant au premier étage, dans la partie est du château.

Durant son inspection, il put constater que la sécurité était parfaitement gérable. Seuls deux gardes statiques à l’entrée surveillaient les allées et venues. Deux patrouilles standards faisaient régulièrement des rondes, selon un trajet et des horaires précis. On pouvait suivre le quotidien des habitants par le biais des grandes fenêtres des façades, proches des autres bâtisses.

Eylion prit plusieurs jours pour récolter les informations qu'il voulait avant de mettre en œuvre son intrusion, en plein milieu de la nuit. Le Miqo'te mit à profit ses talents d'Arcaniste pour atteindre les toits sans s'essayer à une escalade dangereuse sur des surfaces gelées. Une ruelle déserte, un sort et il n'avait plus qu'à faire le reste du trajet jusqu'à atteindre une corniche surplombant la chambre supposée de Miranda. Il s'était vêtu de façon à masquer son identité et se fondre avec la couleur des toits, capuche, armure légère en cuir et demi-masque assorti.

Depuis sa corniche, il renouvela son sort aérien pour rejoindre le bord de la fenêtre. Une fois son assise sûre, il raccrocha son grimoire à sa taille et s'employa à vérifier si la fenêtre était verrouillée ou non. Elle s'ouvrit sous ses mains, grinçant à cause du bois gelé. Le bruit l'incita à ne pas forcer une ouverture trop large, préférant se glisser discrètement par celle qu'il avait réussi à obtenir. Il ne manqua pas de la refermer pour éviter d'attirer l'attention des gardes durant leur ronde.

Dans la chambre modeste, plongée dans la pénombre, l’œil du Miqo'te parvint à distinguer une forme dans le lit. Discrètement, il s'approcha de la vieille femme endormie, plaquant une main devant ses lèvres pour la réveiller tout en l'empêchant de crier. Le réveil brutal fut suivi d'une lutte paniquée pour se dégager de son étreinte, l'obligeant à placer une lame sous la gorge pour inciter au calme.

- Ne m'obligez pas à m'en servir, murmura t'il d'une voix sourde. Si vous répondez à mes questions honnêtement, je partirai aussi vite que je suis venu.

Le contact froid de la dague figea instantanément la vielle femme. Affichant des yeux ronds comme des billes, le souffle rapide, elle supplia du regard son agresseur.

- Bien, pour commencer... Êtes-vous Miranda? Hochez la tête pour oui, secouez pour non, dit-il, froidement.

Elle fronça légèrement les sourcils, visiblement un peu perplexe, avant de secouer la tête plusieurs fois. Cette affirmation eut le don de surprendre Eylion.

- Très bien... Je vais avoir besoin d'explications. Voilà ce que je vais faire, je vais retirer doucement ma main. Criez et ma lame vous fera taire aussitôt. Sommes-nous d'accord?

Elle s'empressa d'acquiescer, prête à coopérer.

- Quand j'aurai retiré ma main, vous vous présenterez et vous me direz si vous savez ce qui est arrivé à Miranda.

Il enleva ensuite celle-ci, la laissant parler. La domestique mit un court instant à se remettre de sa frayeur, déglutissant péniblement avant de prendre la parole d'une voix fébrile.

- Je... Je ne suis qu'une simple domestique, vous savez...? Je m'appelle Ladria, je... remplace Miranda depuis sept ans maintenant...
- Sept ans... Miranda a été renvoyée...?

Elle hocha la tête en retour.

- Elle a été... accusée d'avoir aidé la fille de Messire Nohrlak... à s'enfuir du domaine, il y a de cela des années... Elle a eu de la chance... qu'il se contente de la renvoyer... Mais il manquait de preuves...
- Est-ce que vous savez où elle habite actuellement...?
- Je... je l'ignore... Elle est probablement... retournée chez son fils... Solan... Je crois bien qu'il habite toujours à Ishgard... à l'époque, il était menuisier, au sud de la ville il me semble...

Il hocha la tête à l'information.

- Parfait, maintenant Ladria... Je vais vous dire ce qui va se passer. Comme promis, je vais m'en aller comme je suis venu et vous... Vous aurez deux choix... Soit vous vous rendormez paisiblement. Soit, bien entendu, vous pouvez aller prévenir les gardes. Mais ce ne serait pas très conseillé, vous savez pourquoi? fit-il avec un ton doucereux, bien trop doucereux.
- Je... Je ne dirai rien...! Je vous en prie, je ne suis qu'une vieille femme qui travaille ici pour gagner sa vie, je... Ne me faites pas de mal...! le supplia-t-elle d'une voix tremblante de par son vieil âge et la peur qui la gagnait.
- Vous semblez avoir de la jugeote et un bon instinct de survie. Croyez moi, il vaut mieux que vous "oubliez" ma visite. Vous ne savez pas d'où je viens, ni qui je suis. Mais moi, Ladria... Je sais qui vous êtes et où vous vous trouvez. Si vous parlez, je le saurai et je reviendrais terminer le travail, dit-il avec une perfidie froide, calculée. Je ne peux pas... laisser après tout un acte impuni... Sommes-nous d'accord?

Les lèvres tremblantes de peur, la vieille femme acquiesça, la gorge nouée.

- T-Très clair... Je ne parlerai pas... Je le jure.... fit-elle de manière presque inaudible.
- Parfait.

Il ôta sa lame de la gorge de la vieille femme et s'en alla par là où il était venu, laissant la domestique terrifiée dans son lit. Le chemin du retour, sans heurt, lui permit de revenir dans sa chambre d'auberge, par la fenêtre qu'il avait laissé non verrouillée. Il en profita pour se changer et reprendre la route. Il ignorait si Ladria tiendrait parole mais il préférait ne pas courir le risque d'être pris au dépourvu.

Il revêtit une tenue brune, moins suspecte, capuche néanmoins relevée sur la tête et il partit vers le quartier désigné par la servante. Il interrogea des passants tardifs pour s'assurer de l'adresse du menuisier. Arrivé devant la porte, il frappa à celle-ci assez fort pour réveiller la maisonnée. Celle-ci était modeste, signe que les affaires n'avaient pas l'air de marcher très bien pour l'homme.

Après un instant, le menuisier, âgé d'une quarantaine d'années, finit par apparaître après quelques instants, non sans avoir grogné quelques injures auparavant. Il posa son regard émeraude sur le Miqo'te, visiblement très contrarié d'être dérangé à une heure pareille.

- Que voulez-vous...? Par Halone, est-ce que vous savez quelle heure il est?!
- Je sais quelle heure il est et je ne serai pas là si ce n'était pas important, dit-il avec un ton bas. J'ai besoin de parler avec votre mère.

Le regard colérique de l'homme flancha un instant avant qu'il n'afficha un air plus dur encore.

- ... Que lui voulez-vous, à ma mère? demanda t'il sombrement, méfiant.
- Je viens de la part d'une amie à elle qui a besoin de lui transmettre un message et je préférerai autant ne pas rester dans la rue pour en parler, dit-il, tâchant de garder un ton calme, assuré.

Solan resta silencieux un long moment, fixant l'intrus avec un air indéchiffrable.

-... Ma mère n'est pas ici. Rentrez chez vous, étranger, fit-il durement en commençant à refermer la porte.

Le Mage, loin de donner son dernier mot, la bloqua de la main. Il devait, à tout prix, parvenir à attirer l'attention de l'homme.

- Je sais que Frözz a renvoyé votre mère. Si vous acceptez de m'écouter, vous n'aurez plus besoin de vivre dans la misère comme actuellement.

Solan rouvrit la porte, le regard furieux.

- ... Vous croyez que j'ai besoin de votre charité...? Il n'y a rien à dire! Je vous ai dit que ma mère n'était pas ici, vous arrivez quelques années en retard! À présent, foutez le camp de chez moi ou j'appelle la milice!
- Ce n'est pas une question de charité, pesta le Miqo'te. J'essaye sincèrement de vous aider et je n'ai aucun gain, ni intérêt à le faire, réfléchissez deux secondes. Si je vous voulais du tort, ce serait déjà fait. Laissez moi entrer et m'expliquer, vous pourrez également m'expliquer aussi ce qu'il se passe.

L'homme crispa sa mâchoire, une certaine envie de dégager Eylion à coup de pied au derrière se lisant clairement sur son visage. Toutefois, il finit par se décaler pour le laisser entrer.

- ...Je ne vous accorderai pas plus de dix minutes, j'ai autre chose à faire que d'accueillir les étrangers chez moi en plein milieu de la nuit, fit-il froidement
- Dix minutes, pas plus, acquiesça t'il en entrant.

Une fois à l'intérieur et la porte refermée, il se retourna vers Solan.

- Vu votre colère et votre réaction à la mention de votre mère, j'en déduis que... quelque chose lui est ou vous est arrivé suite à son renvoi...?

Pendant sa question, l'homme était allé s'asseoir dans une vieille chaise en bois, d'une facture probablement artisanale. Il posa les mains sur la table, croisant les doigts entre eux, un air dur sur ses traits.

- Ma mère s'est faite virer par ce salopard comme une malpropre alors qu'elle a veillé sur sa putain de fille depuis sa naissance... au point d'en négliger sa propre famille. Elle est morte il y a trois ans. Elle n'avait plus rien, plus de travail, plus sa protégée. Et bien sûr, vous vous doutez bien que cet enfoiré de Frözz s'est bien arrangé pour nous mettre plus bas que terre. Elle était âgée, elle est tombée malade et moi, j'ai été incapable de lui offrir un traitement convenable avec mes affaires qui dégringolaient en flèche, expliqua t'il avec un ton détaché mais clairement empreint d'amertume.

L'oeil du Mage s'écarquilla au récit, bouche bée. Après un tel voyage, comment allait-il pouvoir bien expliquer ça à Merydwen...? Suite à un long moment de silence, il baissa la tête tout en serrant le poing.

- ... Merde...

Solan fronça les sourcils au juron, une légère grimace déformant ses traits.

- ... Vous êtes qui au juste? Vous venez de la part de qui et pourquoi maintenant?

Eylion retira alors sa capuche, l'air accablé.

- Je suis un ami de Merydwen... Je lui avais promis de prendre des nouvelles de votre mère et... Elle ne le sait pas mais je comptais aussi faire en sorte qu'elles se revoient.

Il marqua un instant de silence avant de s'asseoir face à Solan. Il sortit une bourse de sa sacoche qu'il posa sur la table.

- Je suis votre porte de sortie hors d'Ishgard. Je n'en ai pas l'air comme ça mais je possède quelques commerces. Je peux vous offrir une nouvelle vie, un nouvel atelier.

Solan plissa le regard à le mention de Merydwen, une lueur indéchiffrable traversant son regard. Il observa la bourse que le Miqo'te avait posé sur la table, se levant pour l'attraper. Il la regarda un instant pour finalement la lancer vers Eylion pour qu'il la reprenne. Ce dernier la rattrapa au passage.

- Vous pouvez reprendre votre argent... et aller dire à cette sale petite privilégiée qui vous sert d'amie que si elle tenait vraiment à ma mère, elle aurait dû se réveiller bien avant... souffla-t-il d'une voix étranglée, dans une colère froide.
- Merydwen n'avait pas les moyens de revenir. Elle est partie d'ici, seule et a dû affronter le monde hors d'Ishgard, trouver sa place, survivre. Quand elle m'a parlé de Miranda, j'ai vu à quel point elle était inquiète pour elle. À quel point elle tenait à votre mère. Elle n'avait aucun moyen de savoir comment elle allait. C'est bien pour ça que je suis ici.

Il marqua un court instant de silence pour reprendre.

- Personne ne peut réparer ce que Frözz vous a fait... mais je pense que votre mère aurait aimé que quelqu'un aide son fils. Vous êtes menuisier, vous devez être fier de votre travail et pourtant vous étouffez ici à cause d'une rancune née... d'un vice maladif. Je ne vous offre pas la charité. Je vous offre une opportunité de faire honneur à votre travail et votre mère. Vous n'avez pas mérité ce qui arrive.

Il replaça la bourse sur la table d'un geste assuré. Il pouvait comprendre la fierté du menuisier. Lui-même souffrait de ce défaut.

- Je ne fais que rétablir ce qui devrait être. Et si ça ne vous convient toujours pas... Échange de bons procédés, travaillez pour moi et faites vivre votre talent.

À ce discours, l'homme se leva et lui tourna le dos pour se diriger vers les carcasses de bûches qui gisaient au fond de la petite cheminée. Il posa une main sur la pierre froide avant de regarder brièvement le Miqo'te par-dessus son épaule.

- Pourquoi faites-vous cela...? Vous ne me connaissez ni moi, ni mon travail.
- C'est vrai mais vous m'avez tout dévoilé durant nos échanges, dit le Mage, nonchalant, en levant l'index. Quelqu'un d'avide se serait arrêté directement à la mention d'argent et aurait pris sans scrupule la bourse dès son apparition. Votre colère était éloquente. Et l'état de votre atelier montre la véracité de vos propos. Quant aux meubles qui le constituent, ils parlent également pour vous.

Il termina ce qu'il disait en croisant les bras.

- Enfin, vous êtes le fils de Miranda. Pour ce que je sais d'elle et ce qu'elle a fait... et quand j'ai su qu'elle était retournée auprès de vous... Je ne pense pas qu'elle serait retournée auprès d'un fils cruel. Quant au pourquoi je fais ça... Hmm, je le fais pour vous, Miranda et Merydwen, ça me paraît évident.

À nouveau, l'homme mit un certain temps à reprendre la parole, en pleine réflexion.

- ... Peut-être aurais-je dû être un fils cruel...? Après tout, elle l'a choisi elle plutôt que moi... "Elle avait plus besoin d'elle que je n'en avais besoin", qu'elle disait. fit-il avant de laisser échapper un discret rire amer. J'ai dû me débrouiller par mes propres moyens, 'ne voyais jamais ma mère puisqu'elle ne quittait jamais ce foutu château pour s'occuper de cette gamine avec qui elle n'avait aucun lien... Et maintenant que tout part en vrille, c'est moi qui me retrouve de nouveau bloqué dans cette cité maudite, seul comme un rat, ruiné, et méprisé par tous ces crétins qui écoutent ces rumeurs sans queue, ni tête...

Il marqua une pause et soupira.

- Mais le fait est que plus rien ne me retient ici et je n'ai plus rien à lui apporter, alors...

Il se retourna, le regard bas et légèrement éteint.

- Je suppose qu'il serait idiot de refuser votre proposition...
- ... Je n'ai pas grand chose à redire à ça. Je n'ai jamais connu mes parents, dit Eylion avec un sourire désabusé et contrit. Je ne peux pas vraiment... savoir ce que ça fait même si... l'abandon...

Il prit une inspiration.

- L'abandon et l'envie sont des choses que je peux comprendre. Vous aurez peut-être aussi l'occasion de rencontrer cette femme que votre mère chérissait tant. Vous avez vos raisons de lui en vouloir mais... Vous ne la connaissez pas et vous savez, au fond, que ce n'était pas de sa faute. Vos discussions ne seront pas simples mais... Peut-être que ça pourrait vous aider tout comme l'aider à résoudre des choses, à comprendre, à exorciser.

Le menuisier leva son regard émeraude sur Eylion, le regard plissé.

- Je ne sais pas si je serai capable de lui parler... Mais vous m'avez l'air d'être quelqu'un de bien pour entreprendre un tel voyage dans le seul but d'aider cette femme... Si vous êtes prêt à le faire pour elle alors je veux bien croire qu'elle est différente de sa famille pourrie jusqu'à la moëlle...

Le Mage tiqua un peu à la mention "quelqu'un de bien" mais la discussion, jusqu'ici, prenait un tournant positif. Il ne pouvait pas se permettre de tout gâcher par sa simple envie d'objecter.

- Vous avez vu ce dont est capable sa famille. Vous pouvez alors comprendre pourquoi on aurait envie de la fuir... dit-il en laissant ses propos en suspend tout en soutenant le regard du menuisier.
- Je le peux, mais... Je dois admettre que cela ne rend pas ma situation plus facile à digérer pour autant, fit-il, à la fois triste et amer. Cependant, si vous m'offrez réellement l'opportunité de refaire ma vie loin d'ici et de travailler pour vous... Je peux au moins vous garantir que je ne vous décevrai pas.
- Je comprends... Alors ce que nous allons faire, à partir de là... C'est que vous allez rassembler vos affaires et partir, à l'aube, au Glas des Revenants, en même temps que le départ et les arrivées des marchands itinérants. A partir de là, au Glas, vous achèterez des vêtements et vous vous changerez à l'auberge, dans une chambre sous un faux nom. Vous sortirez de l'auberge par une fenêtre, à capuche relevée et vous prendrez le premier attelage en direction de Gridania. L'argent dans cette bourse vous permettra de faire tout ça. Vous prendrez une chambre là-bas et je vous y rejoindrais sous cinq jours, le temps de régler l'achat et les détails de votre nouvel atelier.

Face à l'air décontenancé du menuisier face à toutes ces informations, le Miqo'te ajouta avec un maigre sourire désabusé.

- Si vous me demandez pourquoi toutes ces précautions, c'est que je veux faire en sorte que les Frözz ne vous retrouvent pas. De faire en sorte qu'il n'y ait aucun risque.

L'homme gratta alors sa barbe fournie, une main sur la hanche.

- Bien, bien, je ferai toutes ces choses, si vous pensez que c'est nécessaire... J'espère ne pas faire une connerie en vous suivant aussi aveuglément mais... Je n'ai plus rien à perdre de toutes façons...
- Vous en faites pas, fit le Miqo'te assuré. Et si jamais quelqu'un vous demande qui vous emploie, vous n'aurez qu'à dire que vous êtes employé par l'unique, magnifique, grand et beau...

Il leva l'index avec son habituel sourire impertinent.

- Marquis de Caratcha.

Il n'avait pu s'empêcher le plaisir de faire référence à l'un de ses contes préférés. Face à l'affirmation, Solan haussa un sourcil perlexe.

- ... Un pseudonyme, je suppose ? souligna t'il avec un certain pragmatisme.
- En quelque sorte, dit-il sans se démarquer de son sourire. Je ne laisse rarement les choses au hasard.

Il se leva par la suite.

- Je devrais y aller sinon. Vous avez des préparatifs à faire et les dix minutes sont écoulées.
- Hmm, en effet...

Le menuisier se massa alors la nuque, embarrassé.

- À ce propos, je m'excuse pour... mon accueil... Je ne reçois pas souvent de la visite et quand c'est le cas, c'est rarement positif...
- Excuses qui seront acceptées le jour où je verrai vos plus beaux ouvrages, lança le Mage en se dirigeant vers la sortie, avec un sourire.
- Vu les moyens que vous êtes prêt à mettre à ma disposition, je peux vous garantir que vous ne serez pas déçu... dit-il en le raccompagnant jusqu'à l'entrée.

Après les saluts d'usage et la capuche rabattue, Eylion rejoignit les toits, bien décidé à veiller sur la demeure du menuisier en cas de mauvaise surprise. Le reste de la nuit fut longue et pénible pour le Miqo'te épuisé mais il parvint à mener à terme la surveillance, suivant discrètement Solan jusqu'à sa sortie de la ville, à l'aube. Conformément à sa parole, le menuisier avait suivi les instructions de son nouvel employeur à la lettre.

Son devoir fait, le Mage n'avait plus qu'à récupérer ses affaires à l'auberge et rejoindre la prochaine caravane en direction d'Ul'dah. Ce ne fut qu'une fois à l'intérieur de la carriole qu'il s'endormit profondément, exténué, porteur de la nouvelle tragique.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 08 mai 2018, 12:33

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Le retour à Ul'dah fut l'occasion pour Eylion de reprendre un peu ses marques. Il eut tôt fait de rejoindre sa large demeure qu'il avait laissé aux soins de Merydwen. Rhian, parti vivre chez Suzie, la moitié de celle-ci ne servait plus à grand chose. Il s'était arrangé avec la combattante pour lui laisser cette partie au lieu de rôder d'auberge en auberge en échange du fait de ne jamais entrer dans sa chambre.

En ouvrant la porte d'entrée, il savait donc qu'il n'aurait aucun mal à la trouver et il la trouva effectivement dans le salon, assise dans un fauteuil. Elle touillait pensivement son thé quand son attention fut attirée par son approche. Elle se leva aussitôt, les yeux grands ouverts, avec une expression mêlant impatience et appréhension.

Cet air eut le don de poignarder le cœur du Mage, sachant ce qu'il s'apprêtait à lui dévoiler.

- ... Tu devrais te rasseoir, fit-il avec un sourire navré en posant son sac de voyage par terre.

Le visage de Merydwen se décomposa sous l'inquiétude qui la gagnait tandis qu'elle se rasseyait sans le lâcher du regard.

- ... Eylion, dis-moi que tu as pu la voir... dit-elle d'une voix nouée par l'angoisse.

Il s'assit... et secoua la tête.

- Elle est morte... il y a trois ans, dit-il, le plus sobrement possible.

Elle se figea sous le choc de la nouvelle. Son regard fixait l'œil unique de l'Arcaniste, comme cherchant à y percevoir une quelconque blague de très mauvais goût. Tout ce qu'elle trouva était un sérieux parfait. Placide. Il la laissa digérer avant d'enchaîner doucement.

- J'ai rencontré son fils. Elle...

Il ferma son œil unique, accablé par ce qu'il s'apprêtait à faire... mais il ne pouvait pas déroger à son Principe et il savait, dans tous les cas de figure, que le Mensonge serait bien plus terrible à terme. Il finit par le rouvrir.

- Elle a été renvoyée, peu après ton départ. Ton père la soupçonnait de t'avoir aidé mais, sans preuves... Il se contenta d'un "simple" renvoi, de manière officielle. De manière officieuse, il a tout fait pour couler le commerce de son fils. Dans la misère... elle est tombée malade et ils ne pouvaient pas payer le traitement...

Les yeux de l'Ishgardienne s’humidifièrent au fur et à mesure qu'il parlait. Elle le fixait, contenant de toutes ses forces les sanglots qui l'étranglaient déjà. Lorsqu'il eut terminé, il lui fallut un certain temps avant de vraiment assimiler l'information, baissant la tête et pinçant ses lèvres tremblantes. Une larme glissa finalement sur l'une de ses joues pâles. Elle secoua la tête, comme refusant d'y croire, prenant par la suite son visage dans ses mains. Les sanglots vinrent secouer ses épaules voûtées, accablées par la tristesse.

- ... Non, c'est pas possible... parvint elle à articuler dans un murmure sifflant, dévastée, la voix étranglée.

Il baissa la tête, meurtri. Son poing sur l'accoudoir se ferma entretemps, ses doigts se serrant jusqu'à pâlir davantage les jointures.

- Je suis désolé... souffla t'il.

La guerrière ne parvenait pas à contenir ses sanglots, ses mains glissant dans ses cheveux, les serrant avec frustration et culpabilité. Peinant à restreindre sa tristesse devant l'Arcaniste, elle se leva précipitamment pour se diriger vers la chambre de Rhian qui était maintenant la sienne. Le geste soudain eut le don de le surprendre, sur le coup.

- ...!

Il courut aussitôt après elle mais il s'arrêta au seuil de la chambre alors qu'elle s'apprêtait à claquer la porte. Son but n'était pas de l'arrêter. Ce n'était ni son rôle, ni le moment, ni sa place. Il ne voulait, en rien, empêcher l'isolement dont elle avait besoin. Tout ce qu'il voulait faire, c'était offrir une simple Présence. Merydwen hésita dans son geste en le voyant, ne comprenant sans doute pas ses intentions.

- ... Je suis désolée, Eylion... Je peux pas... s'excusa t'elle en secouant la tête, la voix brisée.
- Je sais, Merydwen... Je sais, dit-il avec un sourire contrit. Je... reste là si tu as besoin de quoique ce soit.

Elle ne répondit pas, fermant doucement la pièce. Un court instant de silence s'ensuivit avant que sa douleur n'éclate à nouveau. Le Mage, quant à lui, se laissa aller contre la porte jusqu'à terre, laissant simplement sa présence se laisser deviner. Il ne prononça pas un mot alors que les pleurs étouffés derrière lui se prolongeaient à la pensée que, jamais plus, elle ne reverrait celle qu'elle avait considéré comme sa mère.

Il attendit un moment d'accalmie, ce moment où le souffle ne suivait plus. Où les poumons brûlaient et le cœur, meurtri, réclamait grâce.

- J'ai engagé son fils. Solan. Il est hors d'Ishgard et de portée de ta famille désormais, dit-il d'une voix mesurée, bras sur les genoux.

Après un instant de silence ponctué de reniflements, la voix de Merydwen se fit entendre. Elle s'était, elle-même, laissée glisser, dos à la porte. Elle avait été incapable de rejoindre son lit.

- ... Comment...va-t-il...? articula t'elle péniblement.
- Il... Aussi bien que sa situation le permettait... Je lui ai parlé de toi, dit-il en tournant la tête sur le côté.
- Je n'ose même pas imaginer... à quel point il doit nous haïr... ma famille et moi...
- Il a beaucoup de rancune, oui. Mais je lui ai fait comprendre que tu n'étais pas comme eux... Après, le truc, c'est... ... Qu'il a une jalousie vis à vis de toi surtout.
- Une jalousie...? fit-elle en reniflant. A propos... de Miranda...?
- Oui, comme quoi elle s'occupait plus de toi que de lui. Là encore, j'ai essayé de lui faire comprendre que tu n'y étais pour rien mais... Je me dis... qu'un jour, peut-être, quand il sera bien installé et que tu iras mieux... Peut-être que vous pourriez parler... dit-il doucement.

Un instant de silence suivit les paroles d'Eylion et il put entendre la guerrière contenir quelques sanglots à travers la porte.

- Miranda... me parlait souvent de Solan... surtout... lorsque j'étais plus jeune... Elle m'a toujours dit... qu'il était très dégourdi et indépendant... Mais au final, lui aussi... ne demandait qu'à avoir l'attention de sa mère... fit-elle d'une voix étranglée, poursuivant après un court instant. Je ne sais pas si... si j'aurais le courage de le confronter un jour... après avoir causé tout ça...
- Tu n'as rien à te reprocher, dit-il d'une voix sourde. Tu as fait ce qu'il fallait pour te sortir de là. C'était ça ou être l'esclave de ces salopards. Ton sacrifice n'aurait rien amené à rien hormis à la souffrance de tes futurs enfants...
- Je sais, mais... Je peux pas m'empêcher... de me sentir responsable... J'aurais tellement aimé... ne pas être la cause de tout ça... Je ne voulais pas impliquer Miranda, c'est... la dernière chose que je souhaitais...
- Ça aurait pu être Miranda ou n'importe qui. Ton père avait besoin d'un responsable, d'un bouc émissaire, de faire un exemple. Tu-n'as-rien-à-te-reprocher, dit-il entre ses canines.

Merydwen laissa de nouveau échapper quelques sanglots, ne parvenant toujours pas à croire qu'elle ne verrait plus jamais le visage de sa nourrice.

- Je te remercie... d'avoir découvert la vérité... Je crois qu'au fond... Je crois qu'au fond, je savais... que mon père aurait des soupçons. Il... en a toujours eu... Il n'appréciait pas... ce lien que nous avions...
- Tout ce qui échappe à son contrôle...

Pour le moment, il ne pouvait pas se permettre de se disperser davantage. Les Frözz étaient influents mais ils étaient aussi loin. Malgré ça, Eylion se promit que, s'il y avait une opportunité, il la prendrait pour donner les rênes de la famille à Merydwen. Cette dernière ferma les yeux, la tête appuyée contre le bois de la porte. Elle resta silencieuse un long moment avant d'entrouvrir les paupières, la mâchoire crispée.

- ... Est-ce que... tu veux bien chanter quelque chose...? N'importe quoi...

La demande le prit au dépourvu, ses oreilles se dressant. Il avait du mal à concevoir qu'on pouvait connaître son talent pour le chant alors qu'il chantait souvent sans s'en apercevoir ou se soucier de qui pouvait bien l'entendre. Mais au-delà de ce fait, la demande éveilla une antique douleur.

Chante, mon Araignée, chante...

Merydwen ne pouvait pas le savoir mais il avait déjà eu un besoin semblable. Sa voix avait supplié celle qu'il avait cru pouvoir être sa Femme. C'était peu après sa première Fois.

Quel genre d'Homme frôle la Mort durant sa première Fois?

Sa Passion avait été à son image, Démente. Il avait donné à la Créature, sans compter, son Éther dans un baiser ardent qui avait failli lui coûter la vie. Seule l'intervention de l’Écorcheuse lui avait permis de s'en sortir, dans une vision et un chant aussi hargneux que perverti. Il avait supplié sa Femme de l'exorciser, quand bien même elle avait dû souvent chanter pour Elazar, forcée par son obsession.

Ah, l'Ironie.
Merydwen n'osait pas reprendre la parole, regrettant un instant sa demande. Elle ramena ses jambes contre elle, les entourant de ses bras, le visage enfoui dans ceux-ci. Suite au silence, quelques paroles commencèrent à s'élever, hésitantes, incertaines. Elles formèrent les contours d'un chant funéraire aussi teinté de chagrin et de respect pour les disparus que de pensées pour les vivants. Les notes s'enchainèrent, prenant de l'ampleur, de la stabilité jusqu'à atteindre l'équilibre qu'elles cherchaient.

L'Ishgardienne releva la tête, surprise. Ce ne fut que quand elle comprit qu'elle afficha un très léger sourire à la fois peiné et reconnaissant, laissant les larmes reprendre leurs droits alors qu'Il chantait et chantait. Il continua de le faire, enchaînant d'autres chansons aux mélodies calmes, parfois en rapport avec le voyage, parfois avec le chagrin et d'autres, au renouveau. Le cœur du Mage menaçait de céder face au Chagrin. Au Souvenir. Aux divers Pertes.

Mais il emportait au moins ça avec lui, sa voix constante. Jamais il n'avait chanté pour son ancienne Femme car jamais elle ne s'était appuyée sur lui. Jamais elle ne lui avait donné l'Inspiration, l'étincelle nécessaire pour inciter la véritable Joie ou Peine. Jamais leurs Voix n'avaient résonné ensemble. Que ce soit maintenant pour Kaly, Solan, Merydwen, Miranda ou Rhian, leurs pensées nourrissaient Son Chant.

Il continua de chanter jusqu'à ce que sa gorge, fatiguée, ne l'enjoignit à arrêter.

Les Heures s'égrenèrent jusqu'à ce que, épuisés, ils s'endormirent contre la porte. Une nuit courte mais Merydwen avait pu trouver un semblant de paix suite aux divers Chants qui avaient accompagné sa douleur. À son réveil, elle trouva une note à ses côtés, glissée sous la porte.
Je te laisserai de quoi manger dans le hall. Des fruits secs, du saucisson, de l'eau... Tu pourras ainsi descendre quand tu veux, ils ne sont pas facilement périssables. Je ne sais pas si on va se recroiser mais je devrais sortir probablement en journée pour régler plusieurs affaires. Si tu as besoin de quoique ce soit, j'ai ma linkperple sur moi.

E.
La note lue, l'esprit endolori par les épreuves, elle se leva péniblement pour aller prendre une douche. Le regard éteint, elle laissa l'eau couler sur son visage et son corps, toujours hantée par la perte de sa nourrice. Quand elle ressortit, elle s'habilla d'une simple robe de chambre avant de descendre. Dans le hall de l'entrée, elle retrouva le Miqo'te à proximité d'une table où il avait déposé les victuailles mentionnées dans son écrit. Celui-ci consultait son courrier, pensif.

Merydwen s'arrêta au pied de l'escalier.

- Hm... Bonjour, Eylion... finit elle par dire d'une voix légèrement cassée, bras croisés dans une posture bien moins assurée qu'à l'accoutumée.

Il releva la tête, papiers en main, le côté de l'autre devant le menton.

- Ah, hm... ... Bonjour... dit-il, maladroitement.

Il marqua un instant de silence, rabaissant la main qui se trouvait devant son menton. Son œil dévia sur le côté, légèrement gêné.

- Tu as pu... dormir un peu?
- Grâce à toi, oui... répondit-elle en s'avançant doucement. Et toi...?

Il revint à elle en lui offrant un sourire contrit.

- Un peu, oui, dit-il en hochant la tête.

Il ne semblait pas savoir quoi dire d'autre par la suite, toujours quelque peu gêné. Elle hocha la tête, s'approchant de la nourriture pour attraper un fruit sec et l'enfourner dans sa bouche.

- ... Je suis désolée, tu n'as pas vraiment dû... avoir le temps de te reposer depuis ton départ...
- Ça va, juste le temps de m'occuper de l'atelier de Solan et de négocier avec l'Anrad pour qu'elle continue de prendre en charge Jaroud... et je m'octroierai un peu de vacances, dit-il avec un maigre sourire. Ça ne te ferait pas de mal non plus quand j'y pense.

Elle resta silencieuse un instant, mâchant ce qu'elle avait dans la bouche, hésitante.

- Hrm... À ce propos... Je tenais... sincèrement à te remercier pour tout ce que tu as fait... Pour le voyage, pour Solan, et... le reste... Je sais que tu as bien d'autres problèmes à gérer...
- Hé, tu sais bien que je l'ai fait pour le rhum, dit-il avec un sourire mi-amusé, mi-navré.
- ... Vraiment...? fit-elle en haussant un sourcil peu convaincu, tentant un mince sourire qui disparut rapidement. Hrm, non écoute, ce que je veux dire c'est que... Tu as fait tellement pour moi ces derniers temps... Plus que la plupart des gens qui me sont les plus proches, et... même si j'admets qu'ils se comptent sur les doigts d'une main... Ça compte pour moi, et... Bref... Tu peux compter sur moi en retour... Pour quoi que ce soit...
- Si jamais j'ai une hystérique à la porte avec des chaînes, je ne manquerai pas de hurler à l'aide, dit-il avec le même sourire.
- ...Je ne suis pas certaine de suivre ton humour matinal... Et je ne suis pas certaine non plus de le vouloir d'ailleurs, avec tes histoires de chaînes.

Elle secoua la tête, perplexe, dans un maigre sourire teinté de tristesse.

- Il vaudrait mieux, ça veut dire que tu es encore saine d'esprit.

Il tâcha de plier ce qu'il tenait soigneusement.

- Tu as... besoin de quelque chose sinon?
- ... Non, je suppose... que je vais passer ma journée à manger du saucisson tout en réfléchissant au sens de la vie... fit-elle avec une pointe de cynisme et de tristesse.

Elle s'employa à couper un morceau dudit saucisson tout en parlant avant de le montrer à Eylion pour souligner ses propos. Elle le mangea ensuite, enchaînant sur des questions.

- ... C'est quoi, toutes ces choses que tu dois faire aujourd'hui...? Je peux peut-être t'aider...?
- Hrm, je dois passer voir Jaroud, histoire de le maintenir en laisse. Ensuite, je dois aller voir comment se porte le commerce que je lui ai piqué et me familiariser avec le gérant. Après, je dois préparer mon départ pour Gridania, histoire de pouvoir négocier au plus tôt l'atelier pour Solan. Si j'ai le temps, il faudra aussi que je vois un Apothicaire pour qu'il me dise ce que font exactement les potions que j'ai acheté... Il faudrait vraiment que je fasse les courses au marché aussi... Mais il ne faut pas que j'oublie d'engager une femme de ménage qui sache cuisiner... Même si, vu la journée qui s'annonce, je passerai probablement au Palais Gourmand. Sans parler qu'une partie de mes vêtements sont au sale...

Il grommela, ajoutant.

- Je me demande si la femme de ménage ne sera pas une priorité...

Les potions mentionnées trônaient dans la cuisine. Lors d'un vide-grenier, juste avant son départ en Ishgard, il en avait acheté à un marchand qui s'était avéré être un escroc. L'un des clients, un mercenaire du nom de Yuuta, l'avait appris à ses dépends en testant directement son achat. Incapable de parler, bavant abondement, il avait dû son salut à un antidote donné par le marchand affolé. Le Miqo'te s'en était sorti avec un remboursement tout en gardant les produits: Une potion de Force, deux de Vérité, deux d'Esprit et un Philtre d'Amour pour la plaisanterie.

En l'état, il était bien incapable de savoir ce que les produits défectueux faisaient exactement.

- Je peux m'occuper des courses et du ménage, ce n'est pas un problème. Je peux aussi m'occuper du linge, mais... Si ça te gêne, je peux l'amener à quelqu'un pour qu'il s'en occupe. Si ça peut te faire gagner du temps, je peux également emmener nos potions chez l'Apothicaire.

Il la regarda, quelque peu gêné.

- Pourquoi pas pour les potions... Pour les courses et le ménage, seulement si ça ne te dérange pas et c'est en attendant que j'embauche quelqu'un. Pour le linge, oui, ça m'arrangerait que quelqu'un d'autre s'en occupe. Pour l'argent, ce n'est pas un problème comme tu t'en doutes.
- Bien, pas de problème, je m'occupe de tout cela... Ce sera toujours mieux que de rester dans ma chambre à broyer du noir. Quant à l'argent, je te l'ai dit, je ne tiens pas à me faire entretenir, et je te rappelle que tu m'as donné une somme d'argent conséquente.

Il grommela un peu.

- Pas besoin d'employer le mot "entretenir", hrm, dit-il, gêné. C'est juste que, pour mon linge, ce sont mes affaires donc c'est à moi de payer...
- ... Hrm...

La combattante sembla s'apercevoir de la nature du terme employé, la gêne la prenant à son tour.

- ... Ce n'est pas grand chose... comparé à ce que je devrais dépenser normalement, je peux bien faire ça... Et puis ce n'est pas parce que c'est ta maison que tu dois prendre toutes les décisions, Monsieur-le-mage-qui-a-la-science-infuse, fit-elle sur un ton faussement contrarié.

Il semblait de plus en plus gêné, son courrier terminant broyé progressivement et de manière discrète entre ses mains. Il avait presque l'impression qu'ils parlaient comme un vieux couple marié depuis vingt ans. Ça faisait quoi de lui alors? Le mari machiste qui entretenait financièrement sa femme qui faisait les courses et le linge...? Il tenta, vaguement, d'évincer le malaise en essayant de se montrer nonchalant.

- Hrm, hé bah quoi...? Ça me paraît juste... normal... dans le cadre de mes affaires... Enfin, bref, comme tu veux, grommela t'il.

Merydwen devait partager exactement la même impression car elle se mit à tripoter nerveusement ses mains, la mâchoire crispée.

- Hrm... Bon, laisse moi gérer cela pour cette fois et... nous verrons par la suite... fit-elle doucement, mal à l'aise. J'emmène quelques petites choses à grignoter dans ma chambre et je vais... aller me reposer encore un peu...

Le Mage hocha la tête tout aussi nerveusement.

- Je vais... sortir de mon côté. Je... devrai être de retour au soir... En principe...

Sur ces mots, ils repartirent chacun de leur côté, bienheureux de mettre fin à la conversation et d'avoir leurs tâches à faire.
Dernière modification par Ennrael le 10 mai 2018, 15:27, modifié 1 fois.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 10 mai 2018, 15:26

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Quelques jours s'étaient passés depuis sa conversation avec Merydwen, le Miqo'te la laissant en paix et à son deuil. Le quotidien avait repris entretemps ses droits. Eylion avait pu se rendre à Gridania pour acheter l'atelier au menuisier et rencontrer ce dernier, le tout se déroulant sans accroc. Il en avait profité pour passer à la Cave et faire quelques paris autour des combats organisés.

Ce soir là, il avait recroisé la route de Tomoyo, la prêtresse et C'Thay, le médecin. Il fut le premier étonné de ne pas avoir passé la soirée seul, faisant même la connaissance d'un des membres du personnel des Bains d’Émeraude. Hormis ce point, il avait perdu tous ses paris contrairement aux autres fois. Une occasion de se féliciter de ne pas parier des sommes trop outrageuses. En même temps, le Miqo'te ne pariait jamais sur les combattantes. Les vieilles habitudes avaient la peau dure et sa rancune avait des racines profondes.

Quelques temps plus tard, son chemin l'avait mené à retrouver Chu'luun, son premier patient depuis le "Procès", à l'Antique. Le Miqo'te lui avait donné des pistes pour régler sa malédiction, le Xaela assurant par la suite qu'il avait tous les alliés qui lui fallait pour s'occuper du reste.

- J'ai failli perdre deux de mes compagnons. Mais j'ai réglé toute cette histoire. Et j'ai réglé cette histoire de rival.
- Je serai... curieux de savoir comment ça s'est passé.
- Nous pourrions en discuter dans un endroit plus propice.

Le pragmatique guerrier lui avait narré, par la suite, l'ensemble de son récit, à l'abri des oreilles indiscrètes. Celui-ci eut le don d'apaiser les questions que le Mage se posait depuis leur dernière rencontre. Il avait, enfin, le fin mot de l'affaire et il pouvait, lui-même, la clôturer mentalement.

- Vous parliez à l'instant de... Félicitations? avait fini par demander le Xaela.
- J'ai cru comprendre que vous étiez ensemble?

Eylion avait compris, durant sa soirée à la Cave, que la prêtresse et le combattant s'étaient trouvés durant cette épreuve. Il n'avait pas été surpris outre-mesure, ayant noté des subtilités dans leurs comportements respectifs durant leurs quelques rencontres. Au-delà de ça, le Mage avait toujours eu une bonne intuition et certains événements dramatiques lui avaient appris à s'y fier.

- Espérons que ça se passe bien pour vous, lui avait-il souhaité, n'y croyant qu'à moitié.
- Il n'y a pas de raison que ce ne soit le cas.

Il avait confié à Chu'luun avoir noté une discordance, sans être en mesure de pouvoir développer ou expliquer davantage cette intuition. En même temps, Tomoyo avait le don de parvenir à lui donner des frissons d'appréhension. Il n'avait jamais été à l'aise en sa présence.

Elle pourrait continuer à sourire de la sorte même en menaçant de mort quelqu'un.

La discussion s'était terminée sur quelques nouvelles échangées avant que chacun ne prenne congé.

Sur le chemin du retour, une affiche attira son attention.
La Compagnie du Masque et de la Plume vous convie à l'inauguration de son théâtre: le Kyogen, le 12ème jour de la 3ème Lune Astrale. Ce soir, l'habit fait le moine! Déguisement obligatoire, incarnez votre personnage tout au long de la soirée.
Le théâtre...

Grand amateur de littérature, il avait déjà lu de nombreuses pièces mais il n'avait eu que, rarement, l'occasion de les voir jouer.

Eh bien! Oui, c'est mon vice.
Déplaire est mon plaisir. J'aime qu'on me haïsse.
Mon cher, si tu savais comme l'on marche mieux
Sous la pistolétade excitante des yeux!
Comme, sur les pourpoints, font d'amusantes taches
Le fiel des envieux et la bave des lâches!


L'antique morceau de l'une de ses pièces favorites ne pouvait que lui revenir. Kaly n'avait pas saisi l'admiration du Mage, ne comprenant pas le sacrifice du protagoniste principal pour un amour passionnel.

Du théâtre...

Ça va, juste le temps de m'occuper de l'atelier de Solan et de négocier avec l'Anrad pour qu'elle continue de prendre en charge Jaroud... et je m'octroierai un peu de vacances.

Peut-être que c'était l'occasion de délaisser un peu le fardeau de son passé, de l'oublier dans un costume.

Un rôle dans un rôle.
Pourquoi pas, après tout?

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 04 août 2018, 20:16

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[ Le texte suivant est l'intégralité du BG de base d'Eylion. Il est accessible aux personnages à qui le Miqo'te pourrait éventuellement se confier :)]
SPOILER
L'Arcaniste s'installa de manière plus confortable avant de vous observer un instant du coin de son œil azur.

- Quand il faut y aller... J'espère que vous ne vous endormirez pas au passage. J'essayerai de faire le plus bref possible.

Il vous offrit alors un sourire en coin qui pouvait presque ressembler à une grimace. Visiblement, parler de son passé n'était pas un sujet sur lequel il aimait s'attarder.

- Comme vous avez dû le noter, je ne porte pas de nom "traditionnel". Je n'ai pas grandi au sein d'une famille mais dans un orphelinat à Ul'dah. On m'y a donné le nom de Kris. Vers l'âge de six ans, j'ai surpris une conversation entre la directrice et l'un des employés. C'est là où j'ai découvert que l'orphelinat n'était qu'une couverture. Ils vendaient les gamins aux plus offrants et j'étais parmi les prochains. Je me suis enfui le soir même en compagnie d'une fille de mon âge, Hilde. Nous avons erré dans les rues jusqu'à tomber sur une bande d'orphelins qui nous a recueilli.

Son œil dévia un instant sur le côté, comme pour se recentrer sur ses souvenirs.

- Notre quotidien était un mélange de vols et de fuites constantes. Au fil du temps, je me suis aperçu à quel point nous étions vulnérables. Quand on ne mourrait pas de maladie, certains des nôtres disparaissaient dans les ruelles sombres d'Ul'dah. Hilde est d'ailleurs morte du premier fait. Pour notre petit groupe, c'était un peu comme perdre la mère qu'ils n'avaient jamais eu.

Au souvenir de son teint maladif se mêlaient ceux d'un temps où la petite fille s'occupait des orphelins sous sa charge, accordant tendresse et affection comme elle le pouvait. Eylion ne pouvait que laisser deviner les multiples batailles infantiles des garçons tentant d'attirer son attention par tous les moyens. Un temps où l'innocence découvrait les premiers émois, les contours d'un premier amour et ceux des premières rivalités.

La disparition d'Hilde avait imposé au groupe les concepts de Mort et de Deuil.

- Mais ce n'est pas sa mort qui m'a poussé à prendre des mesures...

Il marqua un temps d'hésitation, son œil revenant alors vers vous comme pour vous jauger.

- Un jour, j'ai tenté de voler le mauvais type. Je n'ai appris que plus tard que son nom était Caleb. Une brute épaisse, un colosse. Il a réussi à me choper.

Je vais te passer l'envie de voler, petite fouille-merde!

Le ton du Mage se fit plus laconique alors qu'il dégageait son épaule droite pour révéler la trace d'une brûlure laissée par un cigare enfoncé profondément.

En fait, à bien y regarder de plus près, tu n'es pas dégeu...

- Visiblement, j'étais à son goût mais mes camarades ont réussi à arriver à temps avant qu'il ne parvienne... à quoique ce soit. Je devais ma peau à Claus, mon plus proche ami à cette époque là.

Le bruit des pierres lancées, l'odeur rance de la main imposante dans sa nuque, la voix de Claus à travers le souffle rauque à son oreille. Il avait retenu malgré lui chaque pan, chaque détail.

Kris, dégage toi de là!

- Après ça, je me suis aperçu que je ne pouvais plus continuer comme ça. J'étais petit, frêle. Je ne sais pas combien de fois j'ai pu entendre dans mon dos qu'un garçon comme moi ne dépasserait pas les dix ans. J'ai cherché une protection, quelqu'un auprès de qui je pourrai assurer ma survie.

Toi, tu as un regard qui me plaît, petit.

- C'est comme ça que j'ai rencontré Alev. Il était alors le chef d'une petite bande de malfrats qui avait réussi à se faire un petit territoire dans les recoins malfamés d'Ul'dah. Je les ai rejoint en tant que voleur à la tire. Peu de temps après, ma route croisa celle de Tibarn, un Miqo'te Solaire à peine plus âgé que moi. J'en avais dix, il en avait treize. Au début, je me faisais discret. L'ouvrir sans réfléchir, c'était un coup à se prendre des revers dans la gueule. Tibarn était le seul qui ne me regardait pas de haut, le seul à me tendre une main, à tenter de discuter. Nous étions pourtant déjà opposés en tout point. J'étais Lunaire, il était Solaire. J'étais terre à terre, il était rêveur. J'étais calculateur, il était spontané.

Il s'autorisa un faible sourire à certains souvenirs.

- Ça ne nous a pas empêché de profiter de cette Vie du mieux que nous le pouvions. Je crois que deux Immortels doivent toujours se souvenir du baiser torride qu'ils ont involontairement partagé quand on s'est esquivé à temps de leur passage.

Ne vous interrompez surtout pas pour nous! avait lancé, hilare, le futur Arcaniste.
Pas la peine d'envoyer des invitations pour le mariage! avait renchéri son comparse Solaire.

- Malgré tout, ce n'était pas suffisant pour moi. Je ne voulais pas rester un Voleur toute ma vie et encore moins un larbin qu'on pouvait égorger au moindre caprice. Il m'a fallu du temps mais j'ai réussi à montrer que j'avais des idées. De l'ambition. C'est ainsi que je suis devenu progressivement le cerveau de la bande. Le second d'Alev. Celui qui planifiait les coups. C'est ainsi que la bande s'est agrandie. Tibarn s'en était sorti entretemps, ayant obtenu la protection de l'Arène grâce à une personne influente.

Il prit une inspiration courte.

- Je crois que j'avais un peu plus de douze ans quand on est allé piller la maison d'un Arcaniste. Quand je suis tombé sur sa bibliothèque, j'ai cru que j'avais trouvé là la clé de ma Liberté. L'Arme qui me convenait. Je n'ai pas eu de mal, au retour, à convaincre Alev l'intérêt d'avoir un Mage dans ses rangs. La bande s'est alors efforcée d'enlever des Arcanistes pour me servir de professeurs et de me fournir en livres. C'est quand j'ai commencé à lancer des sorts réellement consistants que la bande a pris son essor... Et que je me suis pris au piège de mes propres ambitions et craintes. C'est facile d'idéaliser les lanceurs de sorts, de croire qu'on peut atteindre un haut niveau facilement et rapidement.

Il eut un sourire désabusé tout en claquant des doigts.

- Sauf que la Réalité est différente. L'Arcanisme demande du Temps, de l'Abnégation, de la Patience. Des choses dont j'étais dénué. Dans ma petite tête, je pensais que dès que je serai en mesure d'abattre dix hommes, je pourrai sortir de la bande. Devenir assez puissant pour ne plus être asservi, tel était mon objectif. Je me suis donné le nom de famille de Valere dans ma prétention. Valere pour "Valeur". Sauf que les années se sont écoulées et je me suis aperçu que j'étais tout juste bon à... quoi? Servir d'Exécuteur, d'outil à intimidation pour Alev? Lancer quelques flammèches?

Il secoua brièvement la tête.

- Ça a duré jusqu'à mes seize ans. J'avais fait mon premier meurtre à mes quatorze... Caleb, que j'ai traqué dès que j'ai pu avoir l'ascendance de la Magie sur lui.

L'azur s'était fait glace à cette énonciation. Les murs de la maison abandonnée avaient menacé de s'écrouler après l'envoi brutal du colosse à l'intérieur.

P-pardonne moi, petit...!

- C'est après ce fait que je me suis attelé à faire fermer l'orphelinat par des moyens indirects comme donner les preuves nécessaires à un enquêteur qui était sur l'affaire. Nous n'avons jamais eu des contacts directs et il n'a sans doute jamais su qui j'étais... Vers mes quinze ans donc, la bande a déménagé de la ville pour s'installer dans une grotte et s'était lancée dans le banditisme de grand chemin. Mais Alev voulait plus de profit alors il s'est lancé dans l'esclavagisme. Quand j'ai appris ça, je l'ai confronté immédiatement. Une dispute a éclaté puis un combat. Autant dire que mes chances de survie étaient minces. J'ai tout fait pour éviter de me faire submerger par mes "camarades". Je dois ma survie au fait que ça faisait depuis un moment que les Immortels et des aventuriers étaient sur notre cas. Ce jour-là, une expédition cherchait notre repaire dans les environs. Le bruit des combats leur a permis de nous trouver plus vite. Une vraie bataille générale a éclaté à leur arrivée.

Le Mage se souvenait de la lame alors pointée sur sa gorge. De l'odeur âcre du sang, de la fumée et de la Mort. Celle de sa Colère, de son Impuissance, de sa Peur.

Si j'étais toi, gamin, j'arrêterai de gigoter.

- Les Immortels et les aventuriers ont fini par avoir raison d'une bonne partie du groupe. Alev, moi et quelques rares survivants, on a été embarqué. Durant le trajet, je suis parvenu à m'enfuir. C'était une nuit de Veillée des Saints. Une tempête avait éclaté plus tôt. Il était impossible d'y voir à plus de deux mètres. Mon pied a fini par se dérober sous moi et j'ai amorcé une chute interminable jusqu'à perdre conscience. Quand je me suis réveillé, je me trouvais... ailleurs.

Il prit le temps de souffler. Il savait que ce pan allait être difficile à raconter pour lui mais il retrouva après un moment sa contenance. Il releva alors son œil vers vous.

- Je me suis réveillé devant une sorte de... Manoir. J'étais transi, trempé et je ne pigeais pas ce qui m'arrivait. J'ai cherché en premier lieu à voir s'il y avait des gardes, un moyen de m'introduire à l'intérieur pour voler ce dont j'avais besoin. J'ai découvert que je me trouvais au milieu d'un terrain entouré d'enceintes assez hautes pour être qualifiées de remparts. Mon exploration m'a finalement amené à me retrouver à l'intérieur...

C'est l'Heure du Thé!
C'est l'Heure du Thé!

- Alors que j'errais dans les couloirs, un concert de voix fantomatiques m'a pris au dépourvu et... ce fut comme si tout le Manoir prenait vie. Le parquet se mit à grincer sous mes pieds et les murs à littéralement respirer. Au bout du couloir, quand j'ai vu une masse gigantesque, informe, indescriptible envahir le couloir, je n'ai pas demandé mon reste pour courir jusqu'à finir dans le sous-sol. Ce fut là, à travers la masse de ronces qu'Elle m'est apparu.
- Elle a l'apparence d'une adolescente mais il ne faut pas s'y tromper... Cette Chose a l'entier contrôle du Manoir. Quand elle m'a trouvé, elle m'a arraché l'œil et l'a avalé comme si c'était une friandise.

Il dégagea alors l'épaule gauche pour dévoiler une cicatrice profonde de griffes monstrueuses, difformes, assez grandes pour prendre l'ensemble de l'espace jusqu'au cœur. C'était la trace qu'elle avait laissé quand elle l'avait rattrapé. Des griffes de ronces s'étaient enfoncées dans sa chair, lui arrachant des hurlements de douleur. Le moment, gravé, résonnait encore des échos de sa Terreur.

Tu as des yeux magnifiques ♪

- Je ne le savais pas encore à ce moment-là mais ce n'était que le début des vingt ans de souffrance que j'allais devoir endurer auprès d'Elle. Quand vous atterrissez au Manoir, vous ne pouvez appartenir qu'à deux catégories: les Invités et le Personnel. Les premiers servent "d'amusement" à celle que j'ai surnommé l’Écorcheuse. Bien qu'elle possède bien un nom, vous m'excuserez si je ne le prononce pas. C'est une vendetta personnelle de ma part. Je suis toujours parvenu à refuser ce caprice et je compte bien poursuivre... Pour en revenir aux Invités, ils ne vivent pas en général très longtemps. Parties de cache-cache mortelles, jeux vicieux, les "Invités" sont des proies qui ne sont là que pour combler Son Ennui. Pour donner un exemple... Elle pourrait très bien vous demander de trancher le doigt de l'homme à côté de vous et de le préparer en amuse-gueule assez "mignon" pour la satisfaire.

Il marqua une pause avant de reprendre.

- Si vous parvenez à survivre et que l’Écorcheuse vous apprécie, vous aurez peut-être la chance de rejoindre le Personnel: Majordomes, Cuisiniers, Femmes de ménage... C'est un rôle délicat. Si vous êtes trop soumis ou trop rebelle ou trop quelque chose, il se peut qu'elle vous tue par Ennui. "Lunatique" est un mot faible pour la désigner même si elle a ses habitudes qu'elle ne change jamais, à savoir... Qu'elle a des Périodes d'Éveil et de Sommeil. Elle "sommeille" heureusement assez longtemps, ce qui laisse du Temps pour explorer le Manoir ou se préparer pour sa phase d'Éveil. Enfin, je me disperse... Le Manoir est un lieu complexe, avec ses propres... "règles". Je pourrai sans doute facilement en parler pendant des heures mais ce n'est pas le sujet ici.

Il hocha la tête, se décidant à recentrer le récit.

- Allez savoir pourquoi, je lui ai Plu dès le premier regard. Je suis devenu son Majordome personnel et elle m'a Figé à l'âge que j'avais alors... seize ans. Oui, vous avez bien entendu, Figé. Je n'ai compris le sens de ses paroles qu'après des années et ce n'est qu'après longue analyse que j'ai pu déterminer ce qu'elle m'avait fait. Je ne souffre pas... d'une malédiction à proprement dit. Une malédiction vise après tout à nuire à celui qui est touché. Non, elle a simplement fait en sorte que mon Corps retourne régulièrement à la même Heure. Tout Changement qui pourrait m'être fait... Blessures, membres coupés, coloration, musculation... Tout finit par se résorber jusqu'à ce que je revienne à l'état où j'étais au moment où le sort a été lancé. Ce n'est pas un processus... immédiat. Plus le Changement est Important, plus il met du Temps à disparaître. Et je suppose que si on me fait assez de dommages, ça m'étonnerait que ça me sauve la vie mais... Comme vous devez vous en douter, je n'ai jamais essayé d'aller jusque là.

Il eut alors un sourire discordant.

- J'ai donc le privilège d'avoir la vie éternelle... au prix de devoir ressembler à un gamin gringalet. J'ai fêté récemment mes trente-neuf ans... Inutile de me demander si j'ai essayé de trouver des solutions. Vous ne savez pas le nombre de jours, mois, années que j'ai passé à m'aliéner sur mon cas. Pour le moment, tout ce que j'ai pu en tirer, c'est que si je venais à essayer... d'altérer le sort, je pourrai bien risquer de me buter... ou bien de réussir, m'amenant directement à l'âge que j'ai, ce qui n'est pas une perspective réjouissante. J'ai donc vécu ainsi vingt ans dans ce Manoir, à... tenter de survivre de mon mieux. J'y ai gagné et perdu un nombre incalculable de connaissances, d'amis potentiels... Fomenté tout ce que je pouvais pour trouver un moyen de tirer tout le monde de là.

Je vous en prie, aidez moi...!
Je ne peux rien, je... Elle arrive, ne perdez pas de Temps!

- Il y a bien des moments où j'ai cru... perdre la Raison... Me laisser entraîner dans la Folie générale, tout lâcher... Sans la ténacité de Kaldriss, je ne serai sans doute pas là pour en parler. Kaldriss était... un noble qui a atterri dans cet Enfer au cours du voyage qui allait le mener au domaine de sa fiancée. Il est parvenu à rejoindre le Personnel du Manoir et à survivre à mes côtés.

Tant que nous nous rappelons de notre Humanité, nous pourrons trouver un moyen de sortir d'ici.

La Culpabilité saisit alors le Miqo'te à la gorge.

- Nous avons fini par trouver un moyen de sortir de là... d'activer une sorte... de portail... mais l’Écorcheuse s'est réveillée plus tôt que prévu durant nos préparatifs... Nous n'avons pu que les accomplir en pleine fuite et à la dernière seconde... Elle a réussi à agripper Kaldriss au moment où le portail s'activait...

Il marqua un instant de silence en baissant la tête. Malgré les années, la perte de l'Élézen l'affectait toujours autant. Il mit au silence son périple jusqu'aux portes de la famille de ce dernier. De devoir annoncer sa Mort. De devoir broder une explication viable, plausible pour pouvoir être cru. De voir l'expression de ses parents, de sa fiancée.

- Je suis réapparu aux frontières du Coerthas, agonisant. C'est là où Rhian m'a trouvé, dans la neige... à rire comme un dément. Je crois que j'avais perdu la Raison à ce moment-là. Juste avant de perdre conscience. Quand je me suis réveillé, j'étais dans une chambre de l'Académie Trahène, une Académie semi-indépendante dans laquelle Rhian étudiait la médecine. N'ayant aucun repère, j'ai fini par les rejoindre et j'ai pu apprendre que seulement deux ans s'étaient déroulés depuis ma disparition. C'est ainsi que j'ai pu comprendre que le Temps se déroulait différemment dans le Manoir.

Il releva alors l’œil vers vous.

- Un an et quelques mois se sont passés. Peut-être l'année la plus paisible de ma vie. Ils me détestaient peut-être là-bas mais tant que je faisais mon travail, on me foutait la paix. C'est durant cette Période que j'ai travaillé pour l'Enclave d'Estenn en parallèle et que j'ai rencontré l'une de leurs fondatrices, Velren. J'avais pris un nouveau départ, une nouvelle vie sous le nom sous lequel vous me connaissez. Eylion Grenn. Une façon d'enterrer mon passé, de repartir... comme je le pouvais sur de nouvelles bases... Vous savez, Rhian et moi, au début, ce n'était pas trop ça. On ne s'entendait même pas trop. J'avais... du mal avec les gens après cette période dans le Manoir... J'avais du mal à me réadapter à un monde qui n'avait plus été le mien pendant longtemps. Et Rhian était mon antipode, solaire, social... et d'une passion pour les Femmes que je n'arrivais pas à comprendre.

Son regard se perdit vers un souvenir. Des cris derrière une porte. Les apprentis dans le couloir qui s'esquivaient, ne voulant pas s'en mêler.

Tu ne peux pas me faire ça, PAS À MOI!

- Les choses ont changé quand l'une de ses amantes a... craqué si on peut dire. Personne ne voulait aider Rhian. En voyant ça, je suis intervenu avant qu'elle ne le poignarde.

L'arme et sa propriétaire avaient fini à terre face au Mage furieux qui s'était interposé, grimoire en main.

Je te donne deux secondes pour dégager hors de ma vue avant que je ne me décide à faire en sorte que ta face soit à l'image de ce qui est à l'intérieur...

- Depuis lors, Rhian ne m'a... plus lâché, fit l'Arcaniste avec un sourire mi-amusé, mi-désabusé.

Le sourire disparut bien vite quand il dut passer à la suite.

- Et ce fut vers le printemps suite à cette année que je rencontrais celle qui allait devenir mon Tourment. Vous savez... Sur tout ce que je vous ai raconté, ma vie sentimentale a été plutôt un désert. Ce n'est pas que je ne m'intéressais pas ou que je ne me suis jamais intéressé aux Femmes... J'ai déjà eu... des occasions plus jeune. J'ai grandi dans la rue après tout et ce ne sont pas les prostituées qui manquaient sur les trottoirs ou dans les endroits que je fréquentais. Mais justement... C'est peut-être à cause de ça ou de ce qui m'est arrivé enfant... Je ne voulais pas de cette... sorte d'Amour. Et plus je devenais littéraire, plus j'ai aspiré à autre chose... de plus Grand. Alors que ma soif de Connaissances grandissait, le besoin d'un Absolu s'est imposé de même...

En voyant votre perplexité, il se reprit alors.

- Ce que j'entends par Absolu est ce que beaucoup désigne sous le terme d’Âme Sœur. Coucher pour coucher ne m'intéresse pas. C'est pour ça que mes premiers intérêts ne se sont exprimés que tardivement... Durant le Manoir, autant dire que c'était impossible. Toute Femme qui m'approchait de trop finissait entre les griffes de l’Écorcheuse. Il y a bien eu cette... Lacie avec qui j'aurai pu devenir proche mais... elle n'a pas survécu. Durant l'Académie, une certaine Samia a tenté de m'embobiner pour le compte de son petit ami que j'avais froissé. Sans Rhian, je crois que j'aurai fini à devoir rentrer à l'Académie sans mes vêtements. C'est à partir de là que ma méfiance des Femmes s'est forgée... mais ce n'était rien comparé à ce qui m'attendait...

Eyl'... Quelqu'un souhaite te voir.

- Nitrischa Artyom. Brillante médecin ishgardaise au passé méconnu. Elle m'avait repéré suite... à une Foire aux célibataires auquel Rhian m'avait obligé à aller. Oui, inutile de me regarder comme ça, c'était l'un des moments les plus humiliants de ma vie... C'est dans l'une des bibliothèques de l'Académie que nous nous sommes rencontrés pour la première fois.

- Pourquoi être passée par Rhian pour me demander?
- J'avais... besoin d'avoir votre entière attention.

- Rien que là, je sentais une entourloupe... et elle avait tous les allures d'une Sorcière. De l'attitude à la robe noire, de ses formes à son regard indécent... Un combiné de Manipulation et de Tentation réunies dans une seule personne.

- Tout d'abord, j'aimerai savoir si vous êtes seul.
- En quoi c'est important pour l'affaire que vous me demandez...?
- Je n'aimerai pas vous savoir... distrait.

Il roula son œil, déjà nauséeux rien que de devoir repenser à ce pan-là de ses souvenirs.

- Elle m'a engagé pour pouvoir trouver un remède à une sorte de... corruption mais à condition que j'effectue mes recherches à l'endroit de son choix. Elle m'a provoqué juste assez pour que j'accepte, jouant sur ma fierté d'Arcaniste. Me voilà donc dans un cabanon au beau milieu d'un marécage sordide, à devoir endurer ses chants chaque nuit. Le début parfait d'un mauvais conte, n'est-ce pas...?
- Ça a été le début d'un long... combat de Vérités et de Mensonges. Elle faisait tout pour masquer le véritable but de mes recherches. Elle me testait en permanence, jaugeant mes réactions, cherchant à voir où étaient mes limites, ce que je pouvais ou non... accepter. Elle me laissait être témoin de scènes étranges... comme ce prétendant en train de l'embrasser, déclarant sa Passion ardente pour elle en pleine nuit, sous l'arbre mort à proximité. De mon côté, j'étais sur la Réserve la plus totale. J'avais criblé le cabanon de pentacles cachés. Je ne pouvais que garder au maximum mes Cartes, parer chaque tentative pour me percer à jour.

Il soupira.

- Et puis, progressivement, elle cacha de moins en moins son intérêt pour moi. Autant dire qu'elle ne m'attirait pas du tout et je le lui faisais bien comprendre. Pourquoi ne pas avoir tout arrêté à ce moment-là, vous me demanderez...? Ma conscience professionnelle. Elle souffrait bel et bien d'un mal et je ne pouvais pas la laisser à son sort même si j'aurai dû prendre mes jambes à mon cou. Enfin... Quoiqu'il en soit, c'est durant mes recherches que j'ai rencontré son fils adoptif. Un gamin de treize ans qu'elle avait recueilli sur un champ de bataille. Ce dernier était... complètement en admiration pour sa "mère", un amour presque... malsain mais je dirai... comme tous ceux qui entouraient cette Femme. En la voyant aussi portée sur moi, sa jalousie n'a cessé d'augmenter... jusqu'à finir par éclater.

Si... si je vous fais disparaître, elle reviendra vers moi...! À cause de vous, j'ai... tout perdu, jusqu'à mon Nom!

- Il a débarqué au cabanon avec un poignard, bien décidé à me faire la peau... Mais je savais que ce n'était qu'un gamin paumé. Je n'ai pas eu de mal à le gérer... Mais alors que j'allais pouvoir enfin le ramener à un semblant de Raison, il s'est écroulé soudainement devant moi, le teint presque violet, à baver, à s'étouffer. J'ai compris qu'un sort était en train de l'impacter. J'ai aussitôt fait opposition même si tout ce que je pouvais faire, c'était de stopper la progression du mal. Elle est alors entrée dans le cabanon comme si de rien n'était.

C'est inutile, il y a longtemps, je l'ai lié à moi.

- Cette... garce folle avait lié le garçon à elle, de façon à pouvoir avoir toute emprise sur lui, siffla t'il entre ses canines. Elle l'a utilisé en tant qu'otage pour essayer de me faire chanter alors que je tentais de le maintenir en vie... et elle de le tuer.

- Je ne sais pas exactement ce que vous me proposez au juste mais quoique vous me vendiez, je ne suis pas intéressé. Ma liberté n'est pas négociable. Nous pouvons résoudre ça de manière pacifique ou de manière plus violente. Votre choix.
- La pacifique est que tu baisses ce putain de mur et que tu me laisses finir ce qui est dû. La violente est que tu sois mien à ton Trépas.
- La pacifique, c'est que je vous rende un service dans les limites de mes moyens et que vous laissiez ce jeune coq tranquille. La violente, c'est que je vous expulse à travers le mur de ce cabanon et que je m'en aille avec ce que vous jetez aussi aisément, c'est à dire lui.


- J'aurai dû de suite l'envoyer à travers le mur au lieu de négocier... Finalement, j'ai accepté de la "revoir" si jamais je venais à finir mes recherches. Elle se doutait déjà que ma seule envie était de la fuir. Une envie qui ne me quittera jamais réellement... Elle épargna ainsi son fils. Elle affirmera plus tard qu'elle n'avait jamais eu l'intention d'aller jusqu'au bout mais je sais, au fond... que si j'avais été sans Scrupules comme elle, si j'avais été conforme à l'Image qu'elle avait cru voir de mon Cynisme, si j'avais fermé les yeux sur le sort du garçon... Elle l'aurait tué. Sans hésitation.

Il prit le temps de souffler, se passant les mains sur son visage jusqu'à masquer le bas de celui-ci, coudes sur les jambes.

- Vous me demanderez alors... Comment j'ai pu Succomber...? Comment ça se fait, après tout ça, que j'ai pu accorder mon Cœur à cette Chose? Hé bien... Par la suite, elle est repartie, me laissant à mes recherches. Je ne devais apprendre que plus tard qu'elle s'était rendue à l'Académie pour séduire Rhian et le droguer de façon à avoir accès à ses affaires. Elle put ainsi remonter les pistes nécessaires pour découvrir mon passé... Kris Valere, le Voleur, le Malfrat, recherché pour ses crimes. Elle attira de la même façon l'attention d'un officier qui n'avait jamais lâché l'affaire à mon sujet, ce qui allait avoir... quelques conséquences par la suite. Quand elle revint, elle m'entraîna de force dans une caverne à proximité pour m'obliger à dire la Vérité à mon sujet.

Il se passa une main dans sa propre chevelure d'ébène.

- Une violente dispute a éclaté entre nous. Elle a presque failli virer en combat de mages. Mais la Vérité a fini par écraser nos hostilités communes. Nos deux Passés ont été mis à jour. C'est ainsi que j'ai appris qu'elle avait été auparavant une femme tout ce qu'il y avait de plus normal avant de subir l'obsession de son ami d'enfance, Elazar. Ce dernier s'est mis à la tête d'un culte vénérant sa propre... divinité sombre. Il voulait faire en sorte qu'un nouvel Primordial naisse... et que ce Primordial s'incarne dans celle qu'il considérait comme sa future Femme. Elle a été séquestrée, torturée, piégée par un complice d'Elazar, un homme qu'elle a profondément aimé... peut-être même... le seul qu'elle ait jamais aimé.

L'amertume était audible dans le ton du Miqo'te.

- Ce qui grandissait en elle menaçait de la corrompre entièrement, corps et esprit. Elle avait déjà des pertes de mémoire au niveau de son enfance et de son adolescence, des pertes qui se seraient aggravées jusqu'à ce que l'Oubli ne la consume entièrement... et qu'elle devienne le réceptacle parfait pour leur divinité. Elle ne pouvait déjà plus se nourrir autrement qu'en aspirant l'Ether des autres. J'étais son seul Espoir... Même si elle a admis qu'elle ne m'avait vu que sous l'optique d'un Outil. Un Outil pour sa Guérison... peut-être potentiellement pour sa Vengeance. Mais à ce moment-là, j'ai cru voir les restes de cette femme brisée. J'ai cru voir autre chose sous le Masque de l'Araignée. Et ce fut ma Perte.

Il marqua une longue pause, tâchant de contrôler ses Émotions comme il le pouvait. La Douleur. L'Amertume. Le Regret. La Haine de Soi.

- Je me suis alors donné à Elle. Je pensais... de manière totalement idiote, présomptueuse, que mon Amour suffirait à l'aider... Mais c'était déjà trop Tard. Son Cœur était de trop noirci et fermé depuis longtemps. Mais sur l'instant, bien entendu, j'étais trop fixé sur le Combat qui nous attendait contre le Culte. Je n'avais qu'une seule obsession: les réduire en cendres. Et j'y suis parvenu mais à quel prix... J'avais la Clé de sa Guérison et le choix de la rendre à son Humanité... ou bien d'exploiter ce qui était en train de la ronger et de changer son cours... la transformer en un être "supérieur"...

Par ce symbole, je t'entrave.

- Elle était extatique à cette idée. Seule la Vengeance comptait pour elle. C'est à partir de ce moment-là que j'aurai dû comprendre...

Toi qui erre parmi les ombres, brise la Réalité, déchire le Voile.

- ... Qu'Elle avait déjà jeté son Humanité depuis longtemps.

À jamais je te prive de repos.

- Grâce à sa nouvelle... puissance, Elle a pu prendre le contrôle du culte, faire valoir son rôle de divinité avant de les massacrer. J'ai... laissé faire... Je ne le regrette pas vraiment, étant donné toutes les horreurs qu'ils avaient pu faire mais... Ce que je regrette, c'est de l'avoir laissé s'enfoncer un peu plus dans son... Inhumanité...

Il souffla encore un coup.

- Nous avons dû rester un temps dans l'antre du culte. Les autorités me cherchaient, les conséquences des recherches sur mon passé. C'est à ce moment-là que les choses... se sont dégradées progressivement entre elle, moi et... même notre fils adoptif. Les derniers événements l'avaient rendu instable et il avait... de plus en plus des pulsions... psychopathes que j'avais du mal à réfréner. J'étais moi-même à bout de nerfs, n'ayant pas eu une minute de repos et je n'avais jamais été aussi... vulnérable. Je cherchais le réconfort de ma Femme qui y voyait là un reflet des demandes d'Elazar, m'obligeant à me mettre sur le retrait. Elle avait de plus en plus d'exigences, cherchant à voir si j'étais toujours aussi maniable. Le pire test... était un jour où j'étais rentré d'une sortie pour prendre l'air.

Il avait ouvert les doubles portes de la chambre de l'ancien Maître des lieux ce jour-là, épuisé.

- ... Elle dansait dans la pièce, vêtue d'une robe Indécente... Distrait, perplexe sur le coup, je n'ai pas remarqué de suite les pieds qui dépassaient de derrière le lit... Quand je les ai enfin noté, j'ai découvert deux cadavres vidés de leur Ether. Et elle... Elle minaudait, pensant sans doute que je n'aurai rien à faire de deux "inconnus sans importance". Autant dire que j'ai éclaté et réclamé des explications. Quand elle a vu ma réaction, elle a changé tout de suite de discours... Parvenant même à me faire culpabiliser en stipulant que c'était parce que je n'avais pas été auprès d'elle. J'ai fermé les yeux... Tout m'était plus supportable que l'idée que ma Femme... ait pu faire exprès... de tuer deux hommes pour me tester... Et si vous me demandez comment je le sais... C'est simple... Si elle avait été vraiment horrifiée par ce qu'elle avait fait, elle serait venue à moi, paniquée, déboussolée...

Il prit une profonde inspiration.

- J'ai détruit les corps... Et puis, un jour, elle a rencontré un... homme influent qui était attiré par elle. Un bien meilleur parti que moi mais au lieu de me le dire et de mettre fin simplement aux choses... Ça m'aurait blessé mais j'aurai accepté... Non, il fallait qu'elle parte en tant que la Victime. À partir de là, un véritable calvaire a débuté pour moi. Essayez d'imaginer d'avoir affaire à quelqu'un qui est décidé à déformer tout ce que vous dites dans le but de vous faire passer pour le connard de service et de vous provoquer. À tout hasard, "tu sais, un couple, ça ne dure rarement plus de six mois...". Impossible d'avoir une conversation normale et je devais lui fermer toute opportunité d'obtenir ce qu'elle voulait. Un véritable duel psychologique.

Il leva ensuite une main lasse.

- Quand elle a vu que ça ne servait à rien, elle s'est décidée à passer à la vitesse supérieure: Me livrer aux autorités et rajouter Sa plainte. Je n'étais plus seulement un Voleur, non... J'étais l'infâme qui l'avait séquestrée, prise de force et je vous passe tous les détails sordides et imaginatifs qu'elle a pu pondre... J'étais... Brisé. En miettes. Je tenais seulement par le peu de Volonté qui me restait. C'est là où Velren est intervenue.

Je ne vais pas vous donner de faux espoirs, Eylion. C'est fini. Vous accrocher est honorable mais cherchez au fond de votre cœur. Cherchez et osez me dire que vous n'avez jamais eu de doutes?

- ... J'avais le Choix de m'évader éventuellement et honnêtement, j'étais tenté... Mais fuir? Ce n'est pas mon genre... Je me pensais fichu mais je ne voulais pas tomber sans un dernier combat, sans un dernier espoir... C'est assez compliqué d'expliquer ce que je pensais à ce moment-là. Une part de moi l'aimait toujours et voulait croire en elle. Jusqu'au bout. Croire qu'elle pourrait rebrousser chemin et tendre la main. Je ne voulais pas avoir de regrets à ce niveau-là. Le regret d'avoir fermé la porte sans essayer jusqu'au bout. Même si c'était idiot. Même si c'était stupide. Je voulais essayer...

Il prit une inspiration courte.

- L'autre ne voulait pas lui donner ce qu'elle voulait. Si elle devait vraiment mettre fin à Tout alors je la forcerai à cramer mes sentiments jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien. Jusqu'à ce qu'elle révèle toute l'Ampleur de son Masque. Et pour ces deux pans... Je n'avais pas d'autre choix que d'être là au Procès... et de rester calme. Quoiqu'elle dise. Quoiqu'elle fasse... et croyez moi que ça demande un sacré sang-froid que de garder son calme quand celle qui vous aime vous crache dessus et balance des abominations. Finalement, quand elle eut terminé de ravager les derniers pans de mon Âme, Velren est intervenue et a retourné le Procès contre elle. Même s'il n'y avait plus aucune preuve, elle est parvenue à en forger et à la faire juger pour les meurtres qu'elle a fait.

Il fendit l'air de ses doigts par la suite.

- Mon ancienne Femme ne s'est pas laissée faire et un combat s'en est suivi durant lequel elle a été maîtrisée et jugée coupable. Pour avoir aidé à préserver les personnes en présence et grâce à certains faits enjolivés, on m'a remis en liberté conditionnelle. C'est ainsi que je me retrouve devant vous aujourd'hui. Une fois libre, j'ai décidé de quitter l'Académie... Trop de mauvais souvenirs là-bas... et de devenir Arcaniste à mon propre compte. Il m'est bien arrivé quelques petites choses depuis entre... ma période de récupération émotionnelle, celle avec ma première disciple et...

Il tira alors un collier ras du cou féminin d'une sacoche à sa ceinture. La pierre au centre était d'un noir obsidien dans lequel l'image du Mage se refléta un instant. Après un long instant d'hésitation, il le rangea avant de vous accorder un sourire.

- Hm... mais tout ça, c'est une autre Histoire...

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 06 août 2018, 05:24

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Suite à la soirée du Kyogen, la vie avait repris son cours. L'entourage d'Eylion avait évolué au fil de ses rencontres, les jours s'égrenant au rythme des saisons. Merydwen était repartie en Ishgard, après avoir remercié ce dernier pour le logement et les services rendus. Depuis son départ, la grande maison de l'Arcaniste lui avait paru bien vide sans colocataire mais il avait fini par s'en accommoder, ayant l'habitude de la Solitude. Une servante s'occupait désormais du ménage, une Xaela aussi discrète qu'elle était silencieuse, allant et venant tel un fantôme durant les matinées.

Au lieu de manger dehors ou de commander, Eylion recevait désormais les plats faits maison de son amie de toujours, Yunaia. Durant cette période, chaque confidence de la jeune femme à propos de son compagnon, Al'namar, avait eu le don de construire la colère du Miqo'te inquiet pour le bien-être de celle-ci. Tenu au silence à sa demande, il n'avait pu qu'assister, impuissant, à l'évolution d'une relation délétère, aux allures bien trop familières à son goût.
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Rhian avait quitté Suzie entretemps, les deux restant bons amis, et habitaient toujours ensemble en attendant que le médecin se décide à savoir où il souhaitait habiter. Il venait toujours rendre visite de temps à autre à l'Arcaniste, les deux amis partageant leurs inquiétudes vis à vis de Yunaia, de plus en plus enfermée.

Ce fut durant une soirée de la Luciole Ambrée qu'Eylion croisa de nouveau la route de Tibarn, son ami d'enfance. Après la surprise, la joie des retrouvailles s'en était suivie, quoique teintée par leur passé difficile commun. Le Mage découvrit un homme changé par la guerre sous la spontanéité dont il avait toujours fait preuve, un inconnu qui lui fallait désormais découvrir. Leurs contacts échangés, ils s'étaient quittés sur la promesse de se revoir.
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Ils se retrouvèrent effectivement durant un mandat de la Brigade Rouge qui avait réuni des aventuriers de tous les horizons. Durant cette mission, ils affrontèrent ensemble les périples d'une île au loin de Noscea et les épreuves laissées par l'Empire de Mhach pour protéger d'antiques trésors. Le groupe avait réussi à mettre la main sur l'objectif, à savoir une étrange boîte scellée, aux allures ésotériques. À leur retour, après avoir remis l'objet entre les mains du mandataire, Solid Shield, il fut révélé que cette boîte contenait en réalité une ancienne bombe éthérique d'une grande puissance. La révélation incita l'Arcaniste à vouloir s'impliquer dans son désamorçage, incapable de faire confiance aux Grandes Compagnies pour lesquelles la Brigade travaillait.

Ce fut ainsi qu'une longue quête fut entamée pour desceller la boîte, liée à quatre créatures du néant dispersées dans tout Eorzéa, une quête de longue haleine.
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Durant ses recherches pour trouver un moyen efficace de repérer les créatures, Eylion se rapprocha de Solid Shield, venant à découvrir certains des secrets de la Brigade. Y trouvant là tout d'abord une source de connaissances inattendue, le Miqo'te eut la surprise de commencer à tisser des amitiés fortes avec la plupart des membres de la famille Shield.
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Le départ de Yunaia pour son pays natal porta un coup dur au moral du Miqo'te qui découvrait ce que ça faisait de souhaiter un bon voyage à quelqu'un qui allait lui manquer. Un départ temporaire dont le retour allait coïncider avec ce qui allait être un tournant dans la vie de l'Arcaniste. Sans doute le tournant le plus étrange qu'il ait jamais eu à gérer...
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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 07 août 2018, 12:32

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Une journée bien remplie. Voilà ce que se disait l'Arcaniste en rentrant chez lui, fourbu mais satisfait. Tout semblait marcher pour le mieux dans sa vie. Riche, confortable et sa soif de connaissances sans cesse comblée. Au tableau, une Femme manquait à l'ensemble de cette Perfection mais... dans ses penchants misogynes... hé, qui en avait besoin d'une? Il n'y avait rien de tel que le Célibat et la Liberté. Pas de Femme pour lui prendre la tête. Pour le plonger dans le Doute. Pour nourrir ses Incertitudes, pour marcher sur ses Complexes. Non vraiment, qui en avait besoin?

En chantonnant, il attrapa une bouteille de son meilleur rhum avant de se diriger, d'un pas dansant et habile jusqu'à l'un de ses canapés. Il s'y écrasa dans un saut joyeux, levant haut ce qu'il tenait comme pour trinquer avec un ami invisible. Il prit ensuite une gorgée généreuse, se laissant aller dans les bras alcoolisés de son poison de prédilection. Une béatitude qui ne devait durer que le temps d'un songe. La bouteille glissa des doigts qui se crispèrent pour s'éclater derrière le divan.

Une Agonie soudaine l'avait pris à la gorge qu'il saisit. Il étouffait, son souffle cherchant désespérément l'air dont il avait besoin. Le Feu s'ensuivit, ravageur. Bien qu'il n'y avait aucune flamme, il avait l'impression qu'on le brûlait de l'intérieur. Ses muscles se consumaient, hurlant leur Tourment. Au manège des Souffrances, ses os se mirent à craqueler, ses vocalises parvenant à exprimer l'étendue de sa douleur. Il tomba au sol, le dos courbé jusqu'à s'en éclater presque le torse.

Au détour d'un Vertige, son œil tourna et se ferma sur les ténèbres de l'Inconscience.

Il se rouvrit après un Temps inconnu sur un pied de la table. L'Arcaniste avait l'impression qu'on l'avait roué de coups. Avec un gémissement, il prit appui sur la table pour se relever. Son autre main vint se poser sur son propre torse endolori, ses doigts rencontrant alors le contact moelleux d'une courbe généreuse.

... Moelleux? Courbe?

Il se tâta le haut du torse, de plus en plus frénétiquement avant de baisser l'œil brusquement.

Non.

Une magnifique poitrine rebondie accueillit son regard.

Nonononon. NON!

Une longue mèche noire, soigneuse, vint tomber avec élégance sur le devant au geste de tête. Cette vision acheva de l'inciter à se lever brusquement, si brusquement que son genou heurta la table.

- Urgh!

Se prenant le membre endolori, il sautilla un peu sur place, manquant de tomber une nouvelle fois. Il se mit à gémir entre ses dents, entendant des accents bien différents des siens. Après un moment de récupération, il se précipita dans sa chambre pour se mettre devant le miroir de sa commode. Ce fut une Miqo'te à l'air horrifié qui lui apparut. De longues jambes fuselées. Une poitrine ferme, ni grande, ni petite mais bien présente. Des traits si fins qu'ils semblaient issus d'une poupée de porcelaine. Un petit nez retroussé. Une longue chevelure d'ébène.
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Un hurlement strident suivit la Révélation.

- C'est... C'est impossible, fit une voix claire, étrangère.

"Elle" se tâta le visage, atterrée. Comment ça avait pu arriver? C'était un Rêve, non, un Cauchemar, n'est-ce pas? Elle allait se réveiller à tout moment... Elle se donna une gifle. Pour un coup fictif, la douleur était bien réelle!

Du calme... Il lui fallait se calmer. Il y avait forcément une explication rationnelle à cette aberration. Le Rhum...! Elle revint au salon d'un pas vif pour s'accroupir auprès des restes éparpillés de la bouteille. Le contenu formait désormais une tâche brune sur le carrelage. Après un rapide tour des lieux, l'Arcaniste remarqua alors un détail... Sur le comptoir du petit salon, les fameuses potions achetées au Bazar Argenté trônaient fièrement.

Celle du Philtre d'Amour avait le bouchon mal revissé et une partie de son liquide manquait. Une seule personne était au courant de ses véritables effets. Une seule personne aurait pu être en mesure d'avoir accès à son salon.

Merydwen.

La femme avait bel et bien réussi à jouer un tour au Miqo'te.

Elle souffla. Ce n'était rien de grave. La notice de la vérification stipulait que les effets ne duraient qu'une heure. Elle pouvait bien survivre à une heure dans la peau d'une... d'une...

FeMme...

L'humiliation était totale. Pour l'Ego de l'Arcaniste, c'était la pire des insultes. Il devait déjà vivre avec l'idée d'être un éternel gringalet alors lui retirer sa seule consolation, à savoir sa Virilité, c'était de trop. Une Heure. Ce n'était qu'une Heure. Il revint devant le miroir pour constater l'étendue du désastre. Ses mains se portèrent instinctivement vers les deux protubérances charnelles.

- Bordel, ils...

Oui, ils étaient bien réels. La sensation était clairement étrange, pas forcément... désagréable... Il mit quelques minutes à capter qu'il était basiquement en train de se peloter devant le miroir. Il écarta ses mains comme si elles venaient de se brûler, le teint rouge pivoine. Jusqu'où irait sa déchéance? Il se regarda à nouveau ou, du moins, ce visage qu'il reconnaissait sans pouvoir s'y identifier totalement. "Elle" se trouvait un peu trop jeune à son goût mais... Avec un peu plus de maturité... Et même sans ça, son aspect frêle n'avait pas du tout le même impact sur ce corps.

Elle se regarda sous toutes les coutures, quitte à pousser le bouchon loin, assurée d'être à l'abri des regards hormis le sien.

C'était donc à ça qu'elle ressemblait en tant que Femme...

Sa curiosité satisfaite jusqu'à la lie, elle alla s'allonger, l'œil fixé au plafond. Elle finit par le fermer. À son réveil, tout serait fini...

Sa conscience se réveilla sur le plafond de sa chambre. Premier réflexe malheureux, induit par sa peur sous-jacente: vérifier si son service "trois-pièces" était revenu. Absence totale. L'azur se tourna vers son réveil non loin. Trois heures s'étaient passées.

Nymeia, on a un problème.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 23 août 2018, 16:06

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Il resta prostré les premiers jours, se nourrissant à peine. Chaque Heure passée était une confirmation de plus. La perspective de passer l'Éternité dans le corps d'une Femme suffisait pour le plonger dans un abîme de Terreur sans cesse grandissant. Vers la fin du second jour, il se jeta sur ses livres. Au capharnaüm de sa chambre s'ajoutèrent les multiples papiers qu'il griffonna à la hâte pour noter tous les détails sur son état.

Tout y passa, des instruments de mesure aux sorts d'analyse. Il devait trouver la solution, le Remède. IL LE FALLAIT.

Mais malgré tous ses efforts, ses recherches ne menaient qu'à des impasses. Il n'avait aucune connaissance en alchimie. Il ne comprit que tardivement qu'il avait besoin d'une aide extérieure. Ce fut au quatrième jour qu'il arriva à ce constat. Il avait ignoré et oublié, durant tout ce temps, sa linkperle dans le tiroir de sa table de chevet. Linkperle qu'il tira avec prudence.

Qui pouvait-il bien appeler...? Un quelconque alchimiste comme celui auquel il avait fait appel pour vérifier les effets des potions?

Il reposa la perle. Il avait le temps d'y penser...

Il se rendit dans le petit salon attenante à sa chambre pour se servir un verre d'une autre bouteille. Trahi par son plus fidèle allié... L'Arcaniste avait de quoi être dépité. Ce fut à ce moment qu'il entendit des pas derrière lui.

Frederick.

Le combattant, inquiété par l'absence du Mage, s'était introduit dans la maison pour voir s'il pouvait trouver une piste pour le trouver. Sa surprise fut entière de trouver une femme en train de se servir dans les affaires d'Eylion. Incapable de révéler la Vérité, l'Arcaniste se débrouilla pour broder une histoire de famille à la va vite si improbable que le combattant finit par le jeter hors de la maison.

À la rue... Oui, Eylion s'y retrouva bel et bien pendant que Frederick, tel un Cerbère vigilant, veillait sur la Maison. La sienne, sans le savoir.

Sa déchéance était totale.

Il pouvait bien tenter de la reprendre par la Force mais c'était un coup soit à alerter les autorités, soit à devoir baisser son Masque, deux cas de figure peu enviables pour lui. Il dut se résoudre à errer dans la Coupe, la mort dans l'âme. "Elle" finit par s'asseoir sur un banc à proximité d'un bassin d'eau, mains agrippant le rebord, tête baissée.

- Bonsoir!

Elle releva la tête vers la silhouette qui venait de la saluer, surprise. Une surprise qui s'accentua quand elle reconnut son propriétaire : Rien de moins que son mandataire, Solid Shield.

- Oh, heu... Erh, bonsoir? finit-elle par lancer, maladroite et nerveuse.
- Que fait une jolie demoiselle comme vous toute seule ici? Vous étiez à l'Antique?

Le "compliment" eut le don de crisper les traits de l'Arcaniste qui s'obligea à offrir un sourire.

- Pas grand chose, je... prends l'air.
- Je vois...

Solid parut pensif en observant la Miqo'te.

- C'est la première fois que je vous vois par ici, vous êtes nouvelle?
- ... On peut dire ça, oui, dit-elle, toujours en conservant un sourire quelque peu crispé.
- Je ne vais pas vous manger, détendez-vous!

Face à la mention, "elle" mima un rire niais et maladroit, portant une main devant ses lèvres dans une parodie de féminité... Ou du moins de l'idée que l'Arcaniste se faisait de celle-ci.

- Oh, heu... Si vous le dites...
- J'espère que je ne vous gène pas trop... peut-être que vous préféreriez un peu plus de solitude?

OUI, hurla l'Esprit d'Eylion, avec une franchise qu'il s'obligea à ravaler.

- Vous ne... me gênez pas, voyons, dit-elle, toujours quelque peu crispée. Mais oui, je pense que j'ai... besoin de solitude...

Elle rajouta par la suite, maugréant entre ses canines de manière presque inaudible.

- De "beaucoup" de solitude...
- Hum... je vois... fit-il, l'air en pleine réflexion.

Solid était loin d'être idiot, un intellect d'autant plus nourri par des siècles d'expérience. L'attitude inhabituelle de la Miqo'te, la ressemblance frappante jusqu'au cache-œil qui était le même que celui de l'Arcaniste, les vêtements inadaptés à sa corpulence... Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre d'où venait la nervosité de son interlocutrice.

- Si vous voulez, je peux vous apporter un livre, ça aide bien pour tuer le temps. Et j'ai cru comprendre qu'il y en a certains qui vous intéressaient plus que d'autres.

Un vent de panique souffla au sein d'Eylion. Il ne pouvait pas avoir deviné, si?

- Certains qui m'intéressent plus que d'autres...? reprit-elle, sa nervosité augmentée d'un cran.
- J'ai la sensation que ce n'est pas la première fois que l'on se voit, en vrai.

Solid esquissa l'un de ses sourires assurés dont il avait le secret, son regard guettant la réaction de la Miqo'te.

- Ah, ah... dit-elle, se forçant à un autre rire. C'est, erh... Hm, un peu beaucoup utilisé comme expression, vous ne trouvez pas? Je crois que c'est la première fois qu'on se voit.
- Vraiment? Bon, j'ai dû vous confondre avec quelqu'un d'autre alors... mais comme je ne le trouve pas, je vais devoir me débarrasser des livres que j'avais prévu pour cette personne... Quel dommage...

Il accompagna ses dires du soupir déçu approprié. Eylion n'eut aucun mal à voir la manœuvre même si elle était assez efficace pour lui arracher un frisson à la seule pensée de puits de connaissance jetés.

- Q-quelqu'un d'autre...? Je, hm... Je vous fais peut-être penser à mon frère? avança t'elle maladroitement, le ton suintant presque d'une émotion palpable...

La Peur, une vieille amie que le Miqo'te chercha à conjurer comme il le pouvait. Face à la remarque, Solid esquissa un sourire empreint de malice.

- Je pense que vous êtes plutôt un autre personne, en vrai...
- ... Une autre personne? Comment je pourrai être quelqu'un d'autre que moi-même? demanda t'elle, toujours avec ce sourire forcé. Je... Hm... Je m'appelle Kristina. Et vous?
- Enchantée Kristina... Vous pouvez m'appeler Solid... Dites-moi... qui est votre frère?
- E-enchantée... Solid... Mon frère est...

Elle prit une inspiration, courte. Courage... Mais franchement, KRIStina? Il n'avait pas pu trouver mieux?!

- Eylion Grenn, peut-être que vous le connaissez...?

Il acquiesça.

- En effet, c'est à lui que je pense en vous voyant.

Elle se força à un autre rire crispant, main devant ses lèvres. En son for intérieur, "il" bouillonnait de rage et frustration. Ne pouvait-il pas, ce fichu démon, lâcher l'affaire?!

- C'est vrai qu'on se ressemble beaucoup, dit-elle dans une parfaite parodie grinçante de la féminité.

De la féminité... Du moins, vue à travers le prisme d'un homme habitué à en avoir une vision déformée. À cette remarque, Solid se contenta de le regarder d'une manière... fixe, extrêmement fixe, sans dire un seul mot. Devant ce regard d'un jaune perçant, une montée d'angoisse monta au sein de l'Arcaniste.

- Q-quoi... Qu'est-ce qu'i-il y a...? J'ai dit quelque chose qui ne f-fallait pas?

La scrutation se poursuivit. Aucune réponse. La nervosité augmenta d'un cran chez la Miqo'te, une sueur froide coulant le long de sa tempe.

- P-pourquoi vous ne dites plus r-rien...?

Il finit par briser, nonchalant, le silence.

- Pourquoi êtes-vous si nerveuse?
- Ah, ah... Je... J-je ne suis pas nerveuse, voyons... Je suis... Calme... Oui, calme... fit-elle avec une expression qui trahissait son état...

Si on pouvait parler de trahir à ce stade tant c'était évident et grossier... Elle se leva, tâchant de retrouver sa contenance. Sa dignité était en jeu, plus question de rire, "il" devait filer...!

- En fait, ce n'était pas une question, dit-il en ayant à nouveau un sourire assuré. Vous êtes nerveuse. Je ne peux pas mentir.

Elle se massa le poignet, tâchant d'essayer de garder son calme.

- C'est n-normal, vous êtes un inconnu après tout...
- Je continue de penser que vous ne m'êtes pas si inconnue.
- Ce n'est... qu'une impression, dit-elle, faisant un geste de main de bas en haut, presque de diva, toujours dans cette pantomime de féminité.

Une pensée lui effleura alors l'esprit. L'affaire de la boîte...! S'il devait être coincé dans ce corps pendant un moment, comment allait-il pouvoir désamorcer la bombe...? Risquer sa dignité ou la sûreté d'Eorzéa... Telle était la question. Après un instant de réflexion, il décida à se lancer.

- Et c'est... Ah, hm... Solid, vous dites? C'est... vous derrière l'affaire de la boîte?
- En effet, oui, dit-il sans se départir de son sourire.
- Ah, mon f-frère vous a peut-être dit que c'est moi qui allais reprendre sa suite, en attendant qu'il revienne?
- C'est l'affiche qui vous a renseigné sur mon nom? demanda t'il, semblant pensif.
- Non, mon frère.
- Dans ce cas, si vous voulez prendre la suite de l'enquête, je vous propose de venir à notre repaire, on n'est pas très loin d'ici.

L'énonciation du repaire la rendit à nouveau nerveuse. Elle sentait le coup fourré venir... Mais c'était ça ou "il" serait écarté de l'affaire et ça, il en était hors de question.

- Heu, oui... Bien sûr.
- Parfait, allons-y alors!

Il ne leur fallut guère de temps pour rejoindre une éthérite qui les téléporta à proximité du QG de la Brigade Rouge. L'Entité lui ouvrit avec politesse la porte d'entrée. Au seuil de celle-ci, "Kristina" s'arrêta un bref instant... pour finalement le passer, peu à l'aise. Une fois à l'intérieur et la porte refermée, elle se frotta machinalement le bras.

- Vous voulez boire quelque chose? demanda Solid en parfait hôte.
- Oh, heu, un r... jus de fruit?

Solid tourna alors lentement la tête pour fixer intensément du regard la Miqo'te qui avait failli fourcher sur le nom de son poison de prédilection. Elle lui offrit un graaand sourire qui faisait tout sauf naturel.

- Bien, je vais aller vous chercher le jus de fruit, attendez-moi près de la boîte.
- Oui, merci...

Sans y penser, l'Arcaniste suivit le chemin qu'il avait sans cesse effectué. Tourner à gauche par rapport à l'entrée. Descendre les escaliers. Pivoter pour pouvoir apercevoir la "Boîte", un cube volant au-dessus d'un socle, dont les angles et les symboles ésotériques dégageaient une lueur d'un mauve inquiétant. Ce fut devant celle-ci qu'elle attendit Solid qui revint avec deux verres. Un avec du rhum, l'autre avec du jus de fruit.

Il tendit les deux à Eylion qui les regarda, sans comprendre tout d'abord.

- J'ignorai que tu aimais te travestir, Eylion.

Elle sursauta un peu à cette mention. Ses oreilles se dressèrent par la suite.

- C-comment ça, Eylion?
- À moins que ce ne soit cette malédiction?
- Je... ne vois pas de quoi vous parlez!
- Je ne vous ai pas indiqué où se trouvait la boîte, pourtant vous y voici.

Long silence. Puis "Merde" se peigna sur les traits de l'Arcaniste. Il y avait bel et bien eu entourloupe et... Il avait marché en plein dedans. L'expression arracha un rire à l'Entité.

- Pas de souci, si tu souhaites que je garde le secret, je le ferai.
- Je...

Elle essaya de trouver une excuse. N'importe quoi. Presque comme quelqu'un qui se noie. La honte survint ensuite, puissante, teintant sa peau pâle d'un rouge cramoisi, tordant ses traits. Elle serra ses poings, baissant la tête. À la voir, on croirait que Solid lui avait mis un coup de poing au ventre.

- Personne... amorça t'elle de manière presque inaudible tout d'abord.

Puis elle éclata, relevant la tête, désespérée.

- Personne ne DOIT SAVOIR!

La réaction fut à la hauteur des attentes de Solid qui ria de bon cœur.

- Entendu, je ne dirai rien. Promis! Et je ne mens jamais! dit-il en lui faisant un clin d’œil.

Elle se masqua le visage dans ses mains au rire de Solid. Elle aurait certainement voulue être tuée sur le coup à voir son attitude. Un gémissement suivit la pantomime.

- Il a bien fallu que quelqu'un finisse par le découvrir... dit-elle, au bout du rouleau.
- Tu veux qu'on aille s'asseoir pour en discuter de manière plus posée?
- ... Seulement si vous avez une bouteille de rhum pour aller avec
- Oui, on dirait que ce seul verre ne va pas suffire, dit-il en lui tendant le premier verre.

Elle le prit, l'air vidée, avant de le suivre jusqu'à l'étage supérieur. Il y avait un salon avec deux grands divans l'un en face de l'autre, autour d'une grande table basse. Elle alla s'asseoir sur l'un d'eux pendant que l'Entité était en train de chercher, au passage, une bouteille entière qu'il vint confier au Miqo'te anéanti.

- Tiens, je sens que tu en as réellement besoin.

Eylion prit une longue gorgée de son verre et saisit ensuite volontiers la bouteille tendue de sa main libre.

- Merci... dit-elle d'une voix pâteuse.
- Je t'en prie! fit-il avec un sourire, en retour.

Il alla s'asseoir en face. L'Arcaniste, de son côté, continuait de vider son verre par gorgées entières.

- Une femme... de toutes les humiliations...
- Oh, je peux t'assurer qu'il y a pire comme humiliation.
- Vous ne pouvez pas savoir ce que c'est, pas pour MOI, fit-elle avec un désespoir on ne peut plus exagéré mais sans doute pas pour "elle".

Elle termina son verre pour le remplir à nouveau d'une main tremblante.

- Je suis assez curieux de savoir comment tu t'es retrouvé dans cet état là, en revanche.
- Une histoire stupide. Une gageure, une connerie, une...

Elle poursuivit ainsi de manière on peut plus inventive et éloquente pendant au moins une bonne minute. Elle ne prit son souffle qu'après celle-ci et d'autres gorgées, tâchant de rassembler ses esprits.

- Tout a commencé à cause de ce fichu Bazar Argenté... Jour de marché, j'y suis allé et j'ai acheté plusieurs potions qui se sont avérées être faites par la main d'un charlatan. Je l'ai découvert grâce à un mercenaire qui a testé les potions sur place et qui en a payé les frais... Ce n'était pas beau à voir, toute cette bave qu'il ne pouvait s'empêcher de lâcher. J'ai pu me faire rembourser ET garder les potions. Je me suis dit que ça pourrait être utile contre des ennemis à l'avenir. Je les ai faites analyser par un vrai alchimiste qui a pu en déterminer les véritables effets... Sauf que ce n'est pas moi qui les ai apporté là-bas, je n'avais pas le temps... Ce qui fait que je n'étais pas le seul... à être au courant des véritables effets. Parmi ces potions, il y avait une pseudo-potion d'amour dont l'effet véritable, selon les notes, était sensé "transformer quelqu'un dans sa version plus adorable".

Solid écoutait attentivement le récit pendant qu'Eylion poursuivait, avec un air sombre.

- Quelqu'un, je ne citerai pas qui... a cru bon de me jouer un tour et d'en mettre dans ma flasque de rhum...

L'Entité eut un air pensif en observant "la" Miqo'te avant d'avoir un grand sourire équivoque.

- ... C'est vrai que tu es plus adorable comme ça!

Durant sa beuverie, elle fusilla Solid de l’œil à cette remarque.

- Mais j'aimais bien l'autre version aussi, si ça peut te rassurer, rajouta t'il.
- C'est un enfer... Sans parler que cette saloperie de potion... mal faite... est maintenant à "durée indéterminée", certainement à cause de ma "malédiction"...!
- Oh... aucun antidote connu à ce jour?
- Il y a des chances que ça soit toujours temporaire mais impossible de dire quand...

Elle se resservit allégrement, clairement défrisée pendant que Solid était en pleine réflexion.

- Et ce con de Fred... Il m'a foutu hors de chez moi en pensant que j'étais un intrus...!
- Oh... toutes mes excuses, je lui ai demandé d'aller chez toi pour savoir si tu étais toujours en vie. Le pauvre s'inquiétait pour toi.

Elle fit une grimace éloquente à cette mention.

- Je lui ai envoyé une lettre, en espérant qu'il morde au bordel que j'ai écris...
- Vu que je ne peux pas mentir, je pourrai au moins lui dire que vous êtes digne de confiance.
- Il vaudrait mieux, je préférerai crever que ça se sache, dit-elle, l'air humiliée.

Devant l'air dubitatif de Solid, elle ajouta.

- Comment je suis supposé vivre avec ÇA? dit-elle en écartant les bras et en se regardant.
- Et bien... pourquoi ne pas chercher à en tirer profit, en attendant?
- Profit...

Elle le regarda avec un air d'incompréhension total et absolu.

- Tu n'es plus vraiment toi-même, est-ce qu'il y avait des endroits qui t'étaient interdits, par exemple?

Long instant de silence et d'incompréhension.

- ... Pas vraiment?
- Hum... Tu aimes les femmes ou les hommes?

L'Arcaniste le regarda, de plus en plus perplexe.

- Les femmes, c'est une évidence, quel rapport?
- Disons que cela pourrait t'ouvrir une nouvelle gamme de personnes à découvrir de... beaucoup plus près...

Eylion mit un certain temps à capter le message. Quel genre d'endroit pourrait lui permettre de découvrir les femmes de beaucoup plus...

...

Quand il comprit, le Miqo'te vira au rouge vif, terminant son verre d'un coup.

- V-vous ne pensez pas...

Solid laissa un sourire se dessiner.

- C'était une simple suggestion. Voir le verre à moitié plein plutôt qu'à moitié vide.

Elle secoua la tête, presque comme pour chasser quelques pans d'une imagination trop vive, des pans suggérant les allures de plusieurs formes quelque peu trop idylliques pour cette dernière.

- Je d-dis que j'aime les femmes, oui, enfin, c'est... compliqué mais jamais je ne me permettrai un truc pareil...!
- Je vous fais confiance, dit Solid avec un sourire.

Elle soupira.

- Je ne suis pas insensible aux corps féminins mais ce n'est pas ce que je... recherche... et...
- Pas de souci! Je ne veux pas vous pousser à faire des choses que vous n'avez pas envie.

Elle grommela un peu pendant qu'il continuait à sourire.

- C'est une évidence, dit-elle, ses joues néanmoins rouges.

Rouges, à cause de l'Alcool ou bien de la Gêne? Sans doute un mélange des deux.

- Heureusement que vous avez commis cette erreur avec la boîte, sinon je vous aurai dragué jusqu'à ce que vous avouiez, dit-il en riant.

L'Image eut le don de figer littéralement la Miqo'te. Il lui fallut un moment avant de pouvoir baisser la tête, dépitée au dernier degré, semblant complètement écrasée par le désespoir de son état et de sa situation... S'apercevant sans doute des JOIES qui l'attendaient en tant que Femme...

- Tuez moi...

Le démon essayait de cacher son sourire mais c'était impossible face aux différentes mimiques de l'Arcaniste.

- Je vais m'abstenir de faire cela.

Elle se mit à boire but à la bouteille directement, une bonne rasade. L'alcool lui brûla tant la gorge qu'elle ne put s'empêcher de grimacer en reprenant son souffle.

- Ceci dit, il va falloir être plus prudent sur votre démarche, finit par dire Solid.
- C-comment ça? balbutia t'elle quelque peu, l'ivresse s'annonçant.
- J'ai bien vu que vous avez voulu jouer les "filles modèles", sauf que vous n'êtes pas une fille, et ça se voit un peu trop, hélas. Enfin... physiquement il n'y a pas de doute, mais vos manières laissent à désirer.
- Qu'est-ce que j'en s-sais moi? fit-elle d'une voix pâteuse. Cette putain d'potion n'est pas venue avec un manuel de la parfaite petite femme.
- Pas besoin de jouer les parfaites petites femmes en vrai. J'arrive bien à jouer l'humain, après tout. L'important est de ne pas surjouer.
- Si j'garde mes manières... Ça risque d'se remarquer très vite, trop de vraise... vray... vr... de semblance...! Merde, j'sais pas comment vous faites, pour garder votre calme... Moi, j'ne le peux pas.
- Hum... je vois ce que vous voulez dire. Mais vous savez... J'ai eu plus de mille ans pour m'entrainer. C'est encore un peu tôt, vous êtes perdu... c'est normal. Il faut un peu de temps.

Il tâcha de lui offrir un sourire confiant alors que la Miqo'te continuait de boire allégrement à la bouteille, laissant l'alcool dévaster ses sens et sa Raison.

- Putain, ouai, mille ans... C'est clair qu'un jour, c'est pas la même... chose...!
- Juste un jour? C'est vrai que c'est récent...
- J'suis sensé faire quoi, moi...? Hein? Même ces vêtements... J'flotte dedans...

Pensif, l'Entité observait l'Arcaniste avant d'avoir, soudain, une idée.

- Pourquoi ne pas rester ici un peu? Le temps qu'on vous aide dans votre mascarade?

Elle pencha la tête sur le côté, perplexe et visiblement bien atteinte.

- Oh bah... C'serait chouette, oui, chouette... J'ai plus de baraque moi... Ma propre baraque, quel abruti...!

Elle s'emporta quelque peu face à cet "outrage" qu'elle montait en épingle pour pas grand chose.

- On va s'occuper de corriger ça, que vous puissiez avoir de nouveau votre maison. Je peux vous montrer une chambre de libre, cela vous tente?
- Ouai, ça... m'aiderait, oui, beaucoup, chic type... ou chic monstre, je ne sais pas trop... L'autre Anrad, elle n'aime pas le terme de monstre. 'Croyez que c'est une sorte de tabou...?
- Un tabou ? Mais de qui parlez-vous?
- Juste de l'autre là... Sauf qu'elle, elle ment... allégrement, dit-elle en levant sa bouteille pour en reprendre une gorgée, plus courte cette fois. L'a aussi ce truc là... La méta... La... Bref, les visages.

Solid fut quelque peu confus face aux tentatives de communication de l'ivrogne en face de lui.

- La... malédiction?
- Nooon...!

Elle passa la main qui tenait son verre devant son visage à deux reprises avec un geste exagéré.

- Le, la... La métamorphose, voilà...!
- Ah, la potion, oui !
- Mais noon, je m'demandais c'est quoi les coutumes quand on n'est pas humaiiin...
- Oh... J'aurai aimé vous faire une plaisanterie comme quoi on dévore les jeunes demoiselles passé minuit, mais je ne peux pas mentir...
- Merde... ... Même si c'est pas l'cas, ça doit être insupportable... Ça doit crier... Ouai, les femmes, ça crie et pas qu'un peu... Putain... Et j'en suis une maintenant... Merde... J'ai tué le chat de quel Douze pour mériter ça...?
- Malheureusement, je pense que les créatures du néant sont bien trop chaotiques pour avoir des coutumes... pour ce qui est des femmes... certaines ne crient pas non plus, il n'y a pas que des potiches dans ce monde! souligna t'il, manifestement amusé.
- Ooh, potiches, elles veulent l'faire croire...! Mais sont dangereuses oui... Merde... Ça veut dire que j'suis dangereux... dangereuse... eux...?

Elle haussa les épaules et reprit une gorgée. Quitte à être au fond du trou, autant se rachever.

- Tu es qui tu es. Tu n'es pas obligé de jouer la comédie. Pas trop du moins.
- Ouai bah, si je m'écoutais... Fred, il s'en prendrait une là où ça fait mal... On fait pas ça à son ami... Enfin, voilà, y'a des règles...!
- Je doute qu'il pensait à mal... même si les résultats sont assez imposants.

Elle hocha la tête bien qu'elle ne savait pas trop à quoi elle acquiesçait.

- Va m'entendre, moi je t'le dis...! Hé, sinon... T'as déjà essayé?
- D'être une femme ? Jamais, je l'avoue, fit-il avec un sourire en oin.
- Tu es ça... Peux le faire?
- Je n'en ai jamais eu envie, en vrai. En fait, il me faut un modèle pour ma part. Et de son éther.
- Aah, c'est pratique ça... Pouvoir modifier son... sa face comme on veut. Putain, j'en rêverai...! J'aurai pas à vivre comme un putain de gamin... ou d'avoir à me mater dans un miroir... Merde, ME mater dans un miroir...!
- ... Tu t'es déjà maté ? demanda t'il un peu surpris.
- Bah ouai... Pas eu trop... Nan, en fait, j'avais l'choix, balança t'elle, particulièrement éméchée.

Solid avait du mal à arrêter de sourire à ce stade. Bien que c'était tentant, il évita de se moquer. Pendant ce temps, la Miqo'te atteignait les bas fonds de son état.

- Mille ans, ça doit faire du temps pour faire pleiin de... De...

Elle perdit ses mots mais ne sembla pas s'en soucier plus que ça, continuant de vider la bouteille. Quand il constata l'état de plus en plus pitoyable et incohérent de l'Arcaniste, Solid reprit la parole.

- Tu devrais calmer la boisson, maintenant.

À la remarque, elle regarda avec un œil vitreux le niveau de la bouteille.

- ... J'crois... J'commence à en voir trois... Mais bordel, ça fait du bien...!
- Demain, tu ne diras pas ça, je pense...
- Moh... Mal d'tête, ce sera toujours mieux que d'penser à tout ça.

Elle se leva, les jambes flageolantes. Elle essaya de poser ce qu'elle tenait sur la table.

- Ce serait idiot de te réveiller et d'oublier tout ce qui s'est passé depuis... imagine revivre cette journée...encore!

Eylion ne parvint pas à poser de manière adéquate la bouteille qui se renversa sur le côté, le liquide se répandant sur la table pour couler ensuite sur le tapis.

- ...! ... Oups.
- J'espère que le majordome ne découvrira pas que c'est vous qui avez fait cette tâche par terre...
- ... Désolé... dit-elle en s'employant à passer sa manche sur le meuble avec maladresse.

Il vint à la rescousse avant qu'il n'y ait plus de dégâts, ramassant la bouteille pour la poser sur la table. Quand il vit la Miqo'te vaciller, il s'employa à la soutenir, laquelle s'acharnait à vouloir nettoyer ce qu'elle avait fait.

- Avec un p'tit coup, ça partira... tout seuul...
- Ce n'est rien... venez, je vais vous mener à vos appartements pour cette nuit.
- C'est déjà l'heure d'dormir...? demanda t'elle, pâteuse.
- À voir pour l'heure du dodo.

Il la guida jusqu'aux escaliers, parcourant le QG jusqu'au couloir des chambres. Ils eurent tôt fait d'atteindre la sienne alors que, sur le trajet, Eylion continuait de délirer.

- Z'êtes sympa... mais je crèverai sans doute plutôt que de l'admettre...
- Oh... ça fait toujours plaisir à entendre. Mais pourquoi ne pas l'admettre?
- Ça m'fait bizarre, pas l'habitude... des gens... Bah, j'ai ma fiertéé... C'est important ça, la virilité, tout ça...
- La fierté mal placée... un vilain défaut, ça...
- Jamais dit que j'étais parfait... aite? Bordel, j'm'y perds...
- À chacun ses défauts, oui. Vous ne voulez pas vous asseoir?

Ils étaient maintenant à proximité du lit, Solid faisant en sorte de ne pas relâcher trop brusquement sa prise.

- Ouaai, bonne idée... Tout tourne...
- Hum... peut-être vous coucher, alors?
- J'ne sais pas, c'est vous la sagesse *hips* millénaire...
- Dans ce cas, au lit. Je vais rester auprès de vous le temps que vous trouviez le sommeil.
- Ah, ah, ah, avec une berceuse? lança la Miqo'te avec l'humour de son état.
- Je doute avoir des mélodies pour apaiser vos tourments... Mais venez déjà vous mettre à l'aise... si c'est toutefois possible.

Eylion tangua un peu mais elle parvint à s'allonger sans chuter alors que Solid était déjà prêt à la réceptionner en cas de besoin. Il put se redresser une fois l'Arcaniste hors de danger.

- Niveau confort, vous n'allez pas être déçu, au moins.
- Ça m'changera du banc.
- Je ne prendrai pas le risque de vous déshabiller...

Elle regarda son haut à cette mention. Jamais "il" n'avait conçu une quelconque forme de Pudeur vis à vis de son corps de gringalet. Devait-"il" commencer avec un corps différent?

- ...

Elle dégagea son col et une partie de son haut avant d'enfoncer sa tête dans l'oreiller, l’œil vitreux.

- On va trouver une solution, tenta t'il de la rassurer avec un sourire.

- ... J'ne sais même pas s'il y a...

Elle se regarda avant d'appuyer à deux reprises sur le dessus de sa poitrine, comme si c'était une chose étrangère.

- J'veux pas passer l’Éternité comme ça...
- Je ferai ce qu'il faut pour que cela n'arrive pas.
- Merrrci... Z'êtes... un bon squeu...
- Oh, ce n'est pas dit que la solution soit gratuite si j'en trouve une. Les affaires sont les affaires.

Une partie de cette phrase tomba dans l'oreille d'un sourd... ou d'une sourde. Prise de vertige, elle avait sombré dans l'inconscience entretemps. À peine effondrée, un étrange bruit émana du Miqo'te déchu, un mélange entre un ronronnement et un ronflement... converti à la hauteur de l'apparence actuelle.

Quand il constata ce fait, l'Entité le borda de son mieux pour s'éclipser, par la suite, discrètement de la chambre.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 24 août 2018, 21:24

Image
Le lendemain fut à la hauteur de la situation: un maelström infect de maux de tête et de nausées. Après un réveil difficile, Eylion se redressa sur le lit. Que s'était-il passé...? Un rapide coup d'œil sur son haut ouvert lui permit rapidement de comprendre qu'il se trouvait toujours parmi la gente féminine. Une montée d'angoisse suivit ce constat...

Qu'avait-il fait la veille?!

Il y avait eu la discussion avec Solid, oui... La bouteille vidée... Les formes voluptu... Non, ça, c'était le pan évoqué par ce fichu démon. Après de longues minutes interminables, le Miqo'te put, plus ou moins, comprendre qu'il y avait eu fausse alerte malgré son haut défait. Rassuré, il sortit du lit. Pour le moment, sa priorité était de récupérer sa linkperle et son grimoire.

Restait à savoir si Frederick continuait de monter bel et bien la garde... Il n'y avait qu'un seul moyen de le savoir: Y aller. Une fois le gros de sa gueule de bois passé, l'Arcaniste se mit en route vers sa demeure. Ce fut là qu'il découvrit que le combattant menait bel et bien un siège et après un jeu d'infiltration et de cache-cache des plus rocambolesques, Eylion finit par parvenir à soutirer sa linkperle et une bourse de sa maison avant de devoir prendre ses jambes à son cou.

Épuisé, contrarié et essoufflé, il rentra au QG de la Brigade, devant attendre que la lettre falsifiée parvienne à destination et que Solid arrondisse les angles avec Frederick. De retour dans la chambre allouée, il était en pleine réflexion quand sa perle prit soudainement vie, déchirant son ouïe prise au dépourvu.

Dans un geste de panique et après un sursaut, il tenta de l'extirper de sa poche. Dans la précipitation, il faillit la faire tomber sur le coup, jonglant avec le minuscule objet dans les airs. Il finit par décrocher l'appel sans réfléchir, entendant, à l'autre bout, la voix familière de Yunaia. Celle-ci peinait à s'extirper de l'objet, la longue distance instaurant des interférences.

- Eylion... Bonjour... Tu es là?

Il ne pouvait pas répondre. Il ne pouvait pas parler. Elle comprendrait immédiatement qu'il n'était pas lui-même. Sa respiration s'accéléra à l'idée que quelqu'un pouvait découvrir son état.

- Eylion, c'est... Yuna...

La voix de la jeune femme laissait entendre que ce n'était pas la grande forme. N'entendant rien d'autre qu'un souffle précipité de la part de son ami, elle jura doucement contre la perle, pensant sans doute que les interférences empêchaient la communication.

- ... Tu m'entends?

Il se mit à gémir, plaquant une main devant ses lèvres pour le contenir. Yunaia n'allait pas bien. Il pouvait l'entendre, le comprendre. Tiraillé, il finit par opter pour murmurer et déformer sa voix autant que possible.

- Je... Oui? J'ai du mal à... t'entendre...
- Hm... Tu as l'air bizarre, tu n'as rien? demanda t'elle, inquiète, la gorge davantage nouée. Je t'entends mal mais... j'avais besoin d'une voix familière ici, je... je songe à revenir, ça ne se passe pas comme prévu.

"Ça ne se passe pas comme prévu".

- Je...

Il pesta en coin, serrant le poing jusqu'à s'enfoncer les ongles dans sa peau. Jusqu'à sentir la douleur.

- Je suis malade... C'est, hrm... pour ça que ma voix est bizarre et que je ne peux pas... parler fort... fit-il, mal à l'aise avant de demander, plus inquiet. Qu'est-ce... qu'il se passe?

Elle souffla doucement.

- Malade? Hm... quelqu'un prend soin de toi au moins? T'as été voir Thay...?

Elle grommela alors, pestant en hingashien.

- Je ne suis même pas là pour tes plats. J'ai cette sensation de revenir à zéro, d'avoir... à nouveau tout perdu et l'enquête, au final, ne donne rien, et... Namar est parti...

Il put l'entendre déglutir sur la fin.

- ... Parti, comment ça, parti?!

Sa voix s'éleva un bref instant, faisant paraître des accents bien différents de sa voix masculine. Une inspiration courte, paniquée se fit entendre par la suite avant qu'il ne reprenne à voix basse.

- Je, hrm... Je voulais dire... Parti...?

La jeune femme parut surprise sur le coup.

- T'es certain que... tout va bien mise à part ta... maladie ? demanda t'elle doucement, à la fois inquiète et intriguée avant de reprendre. Oui parti... C'est fini. C'est... sûrement mieux ainsi, 'fin je crois.

Elle soupira.

- Je prend l'Éthérite bientôt. Dès demain si j'ai fini ici, une dernière piste à vérifier. Tu as besoin de moi apparemment. Je te connais, tu es trop bizarre, tu ne me dis pas tout. Et comme j'hésitais, je te remercie, je suis décidée, je vais rentrer.
- O-oui, je vais b-bien, je t'assure, Yunaia... fit-il, crispé. Comment ça, fini...? Que s'est-il passé avec cet...

Il essayait de ne pas s'emporter et de se contrôler même s'il était clairement sur les nerfs.

- Ce n'est pas important, Eylion... fit-elle en tentant un sourire. T'en fais pas, je vais bien, je... suis libre en un sens. Dans tous les sens du terme à vrai dire. Mais ce point de départ me fait peur et... je sais pas où le redémarrer, ici ou rentrer, tenter de retrouver une partie de ma vie. Je n'ose même pas retourner à l'Antique, il va me falloir un nouveau travail.
- C'est...!

Il s'étrangla quand il dut s'arrêter dans son élan, ayant du mal à juguler son coup de sang. Il prit le premier objet - un chandelier - qu'il put saisir à portée de main et l'envoya valdinguer à l'autre bout de la pièce sous le coup de la frustration.

- ...!!

Il s'obligea à reprendre son souffle péniblement. Il ne devait pas élever la voix.

- C'est... important...! reprit-il de son ton inaudible, sourd. Ne fais pas comme si tout allait bien... alors que ce n'est... pas le cas...!

Yunaia déglutit à nouveau quand elle entendit la rage du Miqo'te, le souffle se faisant plus court. Un court silence se fit, entremêlé de grésillements.

- Il n'a rien fait de mal, j'ai stoppé... j'ai abandonné, confia t'elle d'une voix faible, honteuse. Et non, je ne vais pas bien mais... te voir dans cet état ne m'aide pas.

Le ton de la jeune femme se fit ensuite plus ferme, plus déterminé.

- Je te rappelle demain, dès que je suis en Eorzéa, je veux te voir. Ne te mets pas dans cet état à cause de ça, mon ami.

Sa dernière phrase fut prononcée avec calme et affection, un maigre sourire audible dans sa voix.

- Rien fait de...

Il dut couvrir la perle un instant pour pouvoir hurler toute sa rage, lancer tous les jurons qui imprégnaient ses pensées.

- Rien... fait de mal... Arrête de dire... des conneries... Il a failli... te tromper... Il t'a isolé... Il t'a abandonné... Bordel... si je le vois... J'en fais...!!

Il tâcha de se reprendre mais ça se voyait qu'il avait un mal fou. S'il revoyait ce Miqo'te, il le détruirait bout à bout. Ses pensées débordaient d'images et de désirs vengeurs.

- Si je suis... dans cet état, c'est au moins... Si tu ne te mets... pas en colère alors... que tu as toutes les raisons... de l'être... Je le serai pour deux...! Bordel...!
- Mais... amorça t'elle en douceur avant de pousser un soupir navré. Eylion, je comprends et... j'ai compris tout ça. Justement, ne devrais-tu pas te réjouir de ce pas difficile que je viens de faire? Et je doute que tu mettes la main dessus. Ne te mets pas en colère, tu vas te retrouver ridé plus vite que prévu.

Elle eut un ricanement léger après cette image, comme pour inviter l'Arcaniste à se calmer. Peine perdue.

- Même si je le voulais, je ne le pourrai pas... pour les rides... Merde... Comment tu veux que je me réjouisse qu'il t'arrive... une saloperie pareille...?
- Hé bien, un mal pour un bien? Je vais me relever Eylion, je le fais toujours, tu sais bien. J'ai connu bien pire mais... perdre un premier amour, aussi malsain était-il, n'est pas facile oui, je suis touchée de ta réaction bien que virulente. Je la comprends mais je ne vais pas me morfondre pour autant, je suis plus forte que ça.

Il y eut un Instant de silence, courte, une respiration saccadée puis un silence plus consistant.

- Je sais... Je ne sais que trop bien ce que c'est... finit-il par dire douloureusement.

Elle soupira doucement.

- Je sais, je suis désolée de te rappeler ces souvenirs. Je vais te laisser, Eylion, je te rappelle demain. Une fois arrivée, j'irais voir Thay, il devrait pouvoir me dépanner le temps de trouver quelque chose. Il a stocké mes meubles. Tu... Ça va aller? demanda t'elle, inquiète et navrée. J'ai l'impression d'avoir fait pire que mieux en t'appelant. Je m'en veux, je suis navrée...
- Arrête de t'excuser... fit-il, agacé. Arrête de te soucier plus des autres que de toi-même. Occupe toi de toi déjà... Par contre...

Il marqua un temps de silence.

- On ne... pourra pas se voir... pas avant... un moment... dit-il, presque douloureusement.

Le souffle de Yunaia se coupa presque à ce propos avant qu'elle ne déglutisse.

- ... Je comprends... finit-elle par dire après un moment, d'une déception dissimulée. Dans ce cas... prends soin de toi également, Eylion.

Une torture. Elle avait besoin de lui et elle ignorait tout de sa condition actuelle.

- Je suis... extrêmement contagieux... Je suis désolé mais... J'ai une sœur...

Il marqua un instant de silence.

- Kris... Kristina... dit-il entre ses canines. Elle pourra... t'aider... Promets moi... d'aller la voir...

Le grésillement perdura pendant un moment, puis...

- Kristina... Hm... D'accord, dit-elle en soupirant, perplexe. Si tu y tiens, j'irais mais c'est d'un ami que j'ai besoin, ta contagion je m'en contrefous Eylion.

Long instant de silence. Inspiration difficile.

- Tu... pourras m'appeler... dit-il, le ton tendu, torturé, une once de désespoir dans le ton de sa voix.

Yunaia se mit à déglutir quand elle l'entendit parler ainsi.

- Eylion...? l'interpella t'elle avec douceur et inquiétude. Tu n'es pas en train de me mentir pour une raison encore sûrement ridicule, hm? Tu sembles souffrir et j'ai du mal à discerner si c'est le fait de tes mots ou de ta... maladie.

Un temps interminable de silence s'ensuivit. Elle ne put entendre qu'une respiration saccadée... jusqu'à, finalement, entendre un long gémissement. Le gémissement d'un... Non, d'une suppliciée. Namar venait de la quitter. Quel genre d'ami était-il pour la laisser seule par... par Fierté? Qu'est-ce qui comptait plus pour lui? Mais la seule idée... La seule pensée du regard de Yunaia posé sur lui dans son apparence actuelle...

- Yunaia, je ne peux pas... reprit-"elle" à voix haute, laissant suinter toute la mesure de son dilemme. De sa honte.

La voix inconnue et féminine interloqua l'Hingashienne qui se mit à jurer par réflexe.

- Bon sang! Qui t'a fait ça? Qu'est-ce qui... Bon, très bien, je prends l' Éthérite ce soir, fit-elle, déterminée.

Elle sembla ensuite comprendre implicitement le dilemme de son ami et ne put s'empêcher de pouffer un peu de rire face à ses réticences.

- Eylion... Tu ne veux vraiment pas me voir parce que... 'fin... Ça m'est égal à quoi tu ressembles ou... Alors, t'as que la voix peut-être ou tout le reste aussi?
- Je ne peux pas... gémit-elle, la honte la consumant "entière". Je ne peux pas te laisser me voir comme ça...

Yunaia soupira et laissa un peu de temps passer. Non loin d'elle, les vagues s'écrasaient sur les rochers de sa terre natale, l'océan offrant au regard un horizon infini. Elle était tout aussi déchirée d'entendre le tourment dans la voix de l'Arcaniste.

- Pourquoi... Je... je ne comprends pas, fit-elle avec douceur, quoique la gorge nouée. On est ami ou on ne l'est pas... non? Est-ce que... les amis ne sont pas fait pour ce genre de situation justement? Mais... Moi, je suis la tienne alors... Si c'est trop difficile pour toi et ton Égo ou ta Fierté de mâle, et crois moi à ce niveau là, je m'y connais...

Elle grimaça, certainement à la pensée des nombreux conflits avec Namar.

- J'accepte, je respecte, tu... n'auras qu'à me prévenir et je viendrais.

Un long instant de silence s'ensuivit. Il voulait hurler, saisir la jeune femme, la secouer. Il n'y avait rien à accepter, rien à respecter, hurlait son For intérieur.

- Je survivrai... J'y survivrai... amorça la Miqo'te, presque comme une litanie, comme si elle essayait de se convaincre. Laisse... Laisse moi juste un peu de temps...

La douleur était clairement audible dans le ton de sa voix. Ah, pour être atteinte, sa Fierté l'était. Dans sa chair, dans le plus profond de son âme, dans ses os.

- Je le fais toujours Eylion, ça aussi, tu le sais... murmura t'elle avec douceur. Prends soin de toi, je rentre et je te dirais où je me trouve une fois arrivée.
- Oui... Je... je te tiens aussi...
...
Au courant...

L'appel terminé, la Miqo'te se laissa choir sur le lit, l’œil fixe. Le souvenir d'une antique discussion lui revint. Ils ne se connaissaient pas encore assez pour se tutoyer même si une certaine complicité était déjà présente. Pour la première fois de son existence, Eylion s'était baigné de son propre chef. Pour se faire plaisir à lui et à personne d'autre. Au-dessus d'eux, les étoiles du ciel nocturne étaient autant de lumières qui accompagnaient celles des lampadaires de Lavandière.

Accoudé au ponton de bois, le Miqo'te discutait avec la jeune Hyur qui trempaient ses pieds dans l'eau.

- L'amour est comme une phalène attirée par la lumière, lui avait-il confié. Tout paraît lumineux, parfait au départ jusqu'à ce que vous vous approchiez trop et que vous finissiez, au final, consumée.

Ce à quoi la voix de Yunaia avait répliqué.

- Hm... Et si le début est catastrophique, ça peut devenir mieux au final, vous pensez?
- ... C'est encore pire. Ça veut dire que les sources de votre embrasement sont déjà là dès le départ.
- Alors... Je dois faire quoi? Laisser tomber? Attendre? Ou... Ne rien tenter et ne rien connaître, rester seule? avait-elle demandé à mi-voix, la gorge nouée.

Il l'avait observé un instant de son œil azur.

- Prendre le Temps. Ce Temps que je n'ai pas pris.

Il le ferma vers la fin de son propos, baissant la tête.

- Et... le Temps va changer quoi? Voir les éventuelles emmerdes arriver? Et puis... Prendre le temps de quoi au juste si... Par exemple, on couche déjà, c'est... Trop tard pour le reste, non? avait-elle dit, visiblement tourmentée pour le coup.
- ... Si vous parlez de l'autre Miqo'te, j'aurai dit de prendre le temps de le connaître avant de tenter quoique ce soit. Une fois que vous vous êtes donnée, vous avez donné ce que la plupart des individus recherchent. Comment pourrez-vous vérifier qu'il est prêt à vous attendre, vous et pas votre corps?
- Oui mais... il est pas parti pour autant, s'était-elle défendue, honteuse. Et... Je crois qu'il m'aime bien quand même. C'est juste... compliqué.
- ... Vous savez, j'ai... souvent fait des choses que j'ai regretté par la suite mais... Je crois aussi qu'on n'a pas vécu si on n'a pas au moins quelques regrets. Le "frisson" comme vous dites.
- Hm... Pour l'instant, je... je n'ai pas de regret, et je crois pas en avoir un jour. Chaque chose qu'on traverse nous forge d'une manière ou d'une autre.
- ... Je ne peux pas vous dire si ça marchera entre vous et l'autre Miqo'te. Si je m'écoutais, pour ce que je vois de lui, je n'y crois pas mais...
- Hm?
- Ce que je peux faire, c'est être... ... là dans une certaine mesure, avait-il fait, réticent. Et si jamais il vous fait du mal, vous me dites juste la température à laquelle je dois le griller.

Ils commençaient à peine à se connaître à cette période. Eylion ressortait tout juste de sa rupture avec son ancienne Femme. La Trahison de cette dernière l'avait rendu d'autant plus méfiant vis à vis des gens. Admettre qu'il puisse apprécier assez la jeune femme pour énoncer ce qu'il avait énoncé avait été un pas difficile pour lui.

Yunaia s'en était bien rendue compte, stupéfaite avant de souffler un rire. Elle s'était pincée les lèvres en l'observant, visiblement touchée.

- Vous feriez ça? Pour moi? avait-elle demandé, perplexe.

- ... Je le ferai bien pour l'autre abruti, avait-il dit, gêné, en détournant le regard, en parlant de Rhian.

Au final, il avait bel et bien eu raison... De retour au moment présent, assis sur le lit, il baissa la tête.

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