Eylion Grenn

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Eylion Grenn

Message par Ennrael » 11 mars 2018, 22:27

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Thème instrumental / Thème musical / Voix du personnage

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Fiche créée par Ennrael. Cadres, retouches et montage. Les images d'origine appartiennent à leurs artistes respectifs.
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 12 mars 2018, 00:31

Quelque part, dans le passé...
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En haut d'un bâtiment Uldien, le Miqo'te était assis au bord d'un toit plat, ses jambes dans le vide. Dans l'une de ses mains trônait un verre à demi vide de rhum. La fin d'après-midi teintait la cité d'ocre et d'orange. Le soleil mourant se bataillait dans un ciel sans nuages. L'horizon était déformé par les maisons de la Riche Cité.

Il ne savait pas depuis combien de temps il se trouvait là.
A dire vrai, ça n'avait pas grande importance.

Derrière lui, il entendit quelqu'un s'approcher et s'asseoir à côté de lui. L'homme partagea son silence, son air plus concerné qu'assombri par rapport à son voisin.

- C'est fini.

La note finale sur une pièce de théâtre grotesque. Eylion peina pourtant à goûter l'ironie. Le coin de ses lèvres mima un semblant de cynisme. En vain. La dépression avait pris ses droits.

- Tu peux le dire, fit le Miqo'te, amer.
- Dire quoi...?
- "Je te l'avais bien dit". Tu en crèves d'envie, avoue le.

Il se rendait lui-même compte de l'absurdité de son propos. Il connaissait bien trop Rhian. Il savait pertinemment que ce genre de pensées ne lui effleurait pas l'esprit à l'instant présent. Toutefois, le Hyur soupira, se prêtant volontiers au jeu pour lui.

- Je te l'avais bien dit... reprit-il avec un ton torve avant d'ajouter une note de vérité. Elle était dangereuse.

Eyl... Plus que n'importe qui d'autre, j'aurai fêté dignement l'arrivée d'une femme dans ta vie. Comme un frère, nous aurions trinqué ici et j'aurai plaisanté jusqu'à voir la gêne apparaître, jusqu'à entendre tes protestations. Un échange normal si l'heureuse élue l'avait été.

L’œil vide d'Eylion se perdit dans le paysage.

- Tu avais raison. Sur tout, reconnut-il. J'ai été stupide.
- Amoureux.
- Ça revient au même.
- Ne dis pas ça...

Le Miqo'te éclata alors d'un rire amer, un rire qui écorcha les oreilles de son interlocuteur.

- La Vérité est toujours la plus douloureuse, fit-il avec un sourire discordant, carnassier. Comme les autres, j'ai dansé sur sa Toile.
- C'est surtout que tu étais... Tu ne lui étais...
- Plus utile? Hm... L'Image... En fin de compte, c'était tout ce qui comptait. Le Mensonge. La Soumission. Je SAVAIS QUI elle était. Je SAVAIS alors même qu'elle mentait ouvertement devant MOI et j'ai CRU, VOULU CROIRE à ce qu'elle me chantait!
- Hé...!

Rhian posa une main sur l'épaule de son ami, tâchant d'attirer son attention, l'air inquiet.

- Tu ne peux pas te blâmer d'avoir eu confiance en quelqu'un. Tu croyais en elle sans t'écouter, voilà tout. Calme toi, je t'en prie...

Eylion se força à reprendre son souffle, la colère empoisonnant ses veines. Mais il savait qu'une partie de cette colère était avant tout tournée envers lui.

Envers sa faiblesse.
Envers sa naïveté.

- Ce qui ne te tue pas te rend plus fort. J'ai appris, dit-il avec une froideur qui fit pâlir Rhian.
- Tu as appris mais ne te laisse pas consumer par son venin.

Le Miqo'te avait du mal à retrouver sa contenance. Dans sa lutte, il se détourna du Hyur pour engloutir le reste de son verre.

- Je suis désolé de ne pas avoir été plus là... fit Rhian. En même temps, je dois t'avouer que je suis soulagé de te retrouver...

Il tenta ensuite une note d'humour hasardeuse, maladroite.

- ... Et bien heureux de ne plus avoir droit à une menace de mort à chaque "écart" qui ne lui convenait pas.

Eylion eut alors un sourire malgré lui, voire même un pouffement de rire qui prit au dépourvu l'Uldien.

- C'est un gain non négligeable, oui... Pour tout t'avouer, je ne me suis jamais senti... aussi libre.

Le changement de ton ramena l'espoir chez Rhian dont le visage s'éclaira d'un sourire soulagé. Il flanqua ensuite une main amicale sur l'infortunée épaule de son interlocuteur.

- Exactement!
- Gh...! Ne recommence jamais ça! siffla le Miqo'te en se prenant l'épaule touchée tout en la dégageant.

Le sifflement eut le don de provoquer un rire clair chez l'homme.

- Content de te retrouver! Bon, maintenant... Il va falloir que tu sortes un peu, te changer les idées.

Il rencontra alors un œil blasé de la part d'Eylion.

- J'ai vraiment l'air de quelqu'un qui a envie de sortir là actuellement?
- S'il y a du rhum à la clé...?
- ... Qu'est-ce que tu mijotes, Rhian...

Le concerné leva alors le nez de manière exagérée, tirant de sa veste une petite affiche qu'il mit entre les mains du Miqo'te. Ce dernier eut un peu de mal à déplier le papier avant de cligner de l’œil.

- "Fête des damoiseaux"...? ... Tu te fiches de moi, c'est ça?
- Je suis on ne peut plus sérieux, fit Rhian avec un grand sourire tout en croisant les bras.
- Tu te souviens de la dernière fois que tu m'as envoyé à ce genre de chose...?!
- Ah mais de un... Tu n'y participeras pas. Je te demande juste de sortir, prendre l'air, voir le spectacle. De deux, maintenant tu sais à quoi t'en tenir. Je t'aurai bien accompagné mais...

Il mit une main théâtrale à son front.

- Isabella a besoin de mes services.
- ... Tu es incorrigible, lança vertement Eylion avec un air dédaigneux.

Rhian pointa ses deux index vers son ami, pouces en l'air, avec un sourire solaire.

- C'est pour ça que tu m'aimes.
- Je te hais.
- Ce n'est pas la vérité.
- ... J'aimerai qu'elle le soit, maugréa l'érudit.

Après son grommellement, il soupira en se relevant.

- Bon, on va dire que je t'en dois une pour tout ce que tu as traversé par ma faute. Mais je ne ferai que regarder, compris? N'espère pas de moi que je socialise ou quoique ce soit!

L'Uldien leva les mains, satisfait.

- Rien de plus.

Le sourire eut le don de défriser le Miqo'te qui se dirigea vers les escaliers, agacé. Toutefois, après quelques pas, il s'arrêta.

- Merci, Rhian, pour tout, fit-il de dos, d'une voix faible. N'importe qui... aurait choisi de ne pas me dire en face ce qu'elle pouvait être.
- C'est à ça que servent les amis... répondit l'homme avec un sourire attristé.
- En effet...

Il repartit.

- Les véritables...
Dernière modification par Ennrael le 14 mars 2018, 18:23, modifié 4 fois.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 13 mars 2018, 03:51

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Ça faisait depuis quelques minutes que l'Uldien riait aux éclats. Enfoncé dans les coussins colorés autour de la table basse, il se tenait les côtes tant il n'en pouvait plus. Son rire résonnait dans sa chambre à l'ameublement typique de la Cité d'Or. En face de lui, les oreilles baissées en arrière, le Miqo'te le fusillait d'un œil sombre, debout, les bras croisés.

- Ils... Ils ont vraiment...

Rhian repartit de plus belle dans un fou rire, ce qui eut le don d'assombrir davantage l'expression d'Eylion. En quelques pas, ce dernier s'approcha pour saisir l'homme par le col.

- Tu te rends compte que j'ai dû me soûler à mort pour me remettre du spectacle?!
- Pff... Ah, ah! Je... Je regrette tellement de ne pas avoir pu être là...! Du pur art! J'aurai tellement... tellement voulu voir ta tête...! Bwahaha...!
- Admire la alors bien avant que je ne dévisse la tienne! fit le Miqo'te entre ses canines serrées tout en attrapant l'autre pan du col.

Malgré le supplice que lui infligeait son ventre, le Hyur se força à retrouver un semblant de calme en s'apercevant de l'état de son ami. Il leva les deux mains en signe de reddition.

- A-Allons, pff... Ne le prend pas comme ça. Comment j'aurai pu prévoir quel genre de spectacle ils allaient donner?
- La prochaine fois, tu iras. Et seul. On verra ta tête quand tu devras subir des heures de muscles huilés, de costumes minimalistes roses et je ne sais quelle abomination de la même sorte! cracha Eylion en le relâchant de façon à le rejeter brutalement en arrière.
- J'admets que je préférerai plutôt un équivalent féminin mais hé, on aurait pu participer! Je suis sûr qu'on aurait fait un malheur!

Le mage était en train de s'éloigner de quelques pas vindicatifs quand il entendit la dernière affirmation. Ce fut un œil à la fois consterné et psychopathe qui se retourna vers Rhian.

- ... Tu ne VienS pas De Sortir Une AberratiOn PaReille.

L'expression inquiétante arracha un sourire grimaçant chez Rhian qui s'empressa de rajouter, les mains toujours levées. Il préférait ne pas courir le risque de les rabaisser.

- Oh allez, tu n'as pas d'humour! Avec nos corps de rêve, je te jure qu'on aurait remporté le concours ET le cœur de ces demoiselles.

Irrécupérable, ne put s'empêcher de cracher mentalement Eylion.

- Je t'aurai tué bien avant et je me serai suicidé ensuite.

Le Miqo'te se mit alors à masser le côté de sa tempe en rajoutant, consterné.

- Rappelle moi déjà pourquoi je te fréquente.
- Parce que je suis ta dose d'optimisme! s'écria sans hésitation Rhian en écartant les bras.

Eylion se contenta de soupirer.

- Je dois être en train de rêver. Tu viens d'affirmer que tu es ma dose d'optimisme. Je me demande vraiment comment tu as pu survivre jusqu'à présent.

Rhian rabaissa les mains, levant un regard pétillant vers son ami. Celui-ci pouvait presque deviner des oreilles de chien sur les côtés de sa tête.

- Parce que tu protèges mes arrières?

Le Miqo'te soupira à nouveau.

- Il n'y a que la Vérité qui soit dure à encaisser...
- Oh allez, détend toi un peu! Tu as fait des rencontres intéressantes là-bas?

Voilà LE sujet qui intéressait l'Uldien. Le mage grimaça face au visage plein d'attentes de Rhian.

- Pas grand chose. J'ai dû m'exposer quand l'un des participants s'est fait frapper par une espèce de... Je ne sais même pas si on peut qualifier ça de femme. Une vraie colosse. Comme je m'y suis attendu, pas un dans le public s'est décidé à bouger son derrière. Peut-être trop occupés à critiquer ce qu'il se passait et se targuer d'être les grands détenteurs de la "véritable virilité". Les imbéciles.

A la mention de "véritable virilité", le Miqo'te mima les guillemets avec ses doigts, un mépris détaché dans son expression.

- Ouh... J'espère que ce n'était pas trop grave...
- Non, quand je suis allé le voir pour proposer mes soins, il allait bien. Il a été rapidement pris en charge par le reste des candidats. Va savoir pourquoi mais ça a attiré l'attention d'une Miqo'te qui s'est assise à côté de m...
- Elle était jolie?!

Eylion fusilla du regard l'Uldien. Il commençait à regretter d'avoir entamé le sujet.

- Je n'ai pas pris la peine de regarder, jeta t'il en effectuant quelques pas dans la pièce. Elle m'a baratiné quelques minutes avant de comprendre que je n'étais pas intéressé par sa petite personne.

La remarque eut le don de faire hausser un sourcil chez Rhian. Il secoua ensuite la tête, l'air navré, quand il comprit.

- Eylion...
- Quoi? siffla le Miqo'te en tournant la tête vers lui.
- Et tu n'as pas songé qu'elle voulait peut-être juste faire connaissance avec toi? souligna l'Uldien en levant les mains.
- Je ne prétends pas savoir ce qu'elle voulait, chose qui est d'ailleurs le cadet de mes soucis, répliqua t'il avec un sourire peu amène.
- Toutes les femmes ne sont pas tes ennemies.
- Une grande majorité est d'une subtilité et d'une hypocrisie qui ne donne pas vraiment envie de faire de distinction.

Rhian soupira.

- C'est exactement ce que je craignais.
- Quoi encore...?
- Je sais ce que tu as traversé et je reconnais que c'est atroce mais je ne peux pas fermer les yeux et voir ça te consumer, tu sais.

Le silence retomba, les deux hommes s'avisant l'un et l'autre. Le mage finit par soupirer à son tour tout en présentant une paume à l'Uldien.

- Je t'entends, Rhian, je t'entends... Mais... Je ne peux pas.

La réponse tordit d'inquiétude les traits du concerné.

- Eylion...

Le Miqo'te se détourna pour se diriger vers la sortie de la pièce d'un pas rapide.

- Je ferai mieux de partir.
- ...! Attends!

En ouvrant la porte, Eylion regarda en arrière, main maintenant l'ouverture.

- Je te remercie de ton inquiétude mais je n'ai besoin de personne pour vivre.

Sur ces mots, il quitta la pièce sur un claquement criard. De nouveau avec lui-même, l'Uldien soupira tout en se laissant aller contre ses coussins, épaules baissées.

- Menphina, Azeyma, je vous en conjure, veillez sur lui...

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 14 mars 2018, 18:29

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Les fleurs d'un délicat rose lilas avaient envahi l'endroit entier. De véritables buissons laissaient échapper des pétales sous un vent printanier. Il était impossible de marcher sans enfoncer son pied dedans et le voir disparaître. Au milieu de ce décor paradisiaque, une table raffinée recouverte d'un drap blanc présentait un ensemble à thé complet en porcelaine coûteuse, théière, petites assiettes et mets délicats.

Assise devant ce buffet, Elle portait sa petite assiette dans l'une de ses mains fines et pâles, l'autre maintenant la anse de sa tasse. Son sourire était radieux.

Mademoiselle est heureuse!
Mademoiselle est comblée!
L'a t'on jamais vu aussi joyeuse?
chantait le chœur des voix fantomatiques.

Le printemps est arrivé!
Le printemps est arrivé!


Quelques notes cristallines s'échappèrent des lèvres rosées. Elle chantonnait, rayonnante, tout en savourant son thé et ses biscuits. Son impressionnante chevelure immaculée flottait autour d'elle, portée par un vent surréel. Un homme essoufflé arriva alors devant Elle, hagard. Ses vêtements de voyage juraient avec le reste de l'endroit tout comme son visage sali par la poussière des routes. Il regarda l'adolescente en face de lui, interdit.

- Que... Hm, bonjour...?

Elle releva son regard dissemblable vers l'intrus. Dans son œil gauche, il pouvait voir son propre reflet sur la surface rougeâtre de celui-ci. Après la surprise, elle esquissa un sourire chaleureux en reposant sa tasse sur la petite assiette qu'elle tenait.

- Bonjour ♪

Malgré l'apparence étrange de son interlocutrice, le voyageur sembla soulagé.

- Je... Je suis désolé de vous déranger mais je crois que je me suis perdu.
- Oh? dit-elle en levant une main pudique devant ses lèvres.
- Pour une raison que j'ignore... Je... n'arrive pas à m'approcher de la sortie.
- Parce que vous voulez quitter cet endroit?

La question le prit au dépourvu. Malgré son air, elle continua d'afficher un sourire radieux.

- C'est l'Heure du Thé.

C'est l'Heure du Thé!
C'est l'Heure du Thé!


Le chœur soudain, invisible, fit sursauter l'homme qui se mit à regarder autour de lui.

- Vous voulez boire avec moi? demanda t'elle en indiquant la chaise en face d'elle.
- Heu...
- Vous ne voulez pas? reprit-elle aussitôt sans se départir de son sourire.
- Si...! Si... Ce serait avec plaisir mais... je ne dois pas tarder vous savez. J'ai un colis important à livrer.
- Vous n'allez pas courir le ventre vide, n'est-ce pas? fit-elle avec un léger rire amusé.

Malgré le ton enfantin et agréable de l'adolescente, un malaise commença à tordre les boyaux du livreur. Était-ce la façon dont elle souriait...? A moins que ce ne soit plutôt son regard... La façon dont elle regardait, qui jurait maintenant avec son innocence précédente. Un instinct primaire le prit. Il ne devait pas rester là.

- Je... dois vraiment y aller, dit-il en reculant de quelques pas.

Quelques notes cristallines formèrent un rire fin.

- Vous êtes mon Invité maintenant. Un bon Invité ne quitte pas la fête avant sa fin, non?

Un nouvel Invité!
Ça faisait depuis si longtemps!


Elle finit par soupirer avant que ses yeux ne devinrent humides, son sourire radieux laissant place à une peine enfantine.

- Il ne veut pas jouer avec moi. Vous... ne voulez pas jouer avec moi? Suis-je si méchante que ça?

Le changement soudain d'attitude le prit au dépourvu, accentuant son malaise. Il leva ses deux mains.

- Non, non! Pas du tout! Je veux bien... prendre une tasse de thé, oui, et... Vous me conduirez à la sortie ensuite?

Elle pencha légèrement la tête sur le côté, pensive.

- Vous n'êtes pas Lui... Vous m'ennuyez. J'étais bien, si bien...

Elle sembla alors avoir une idée, son expression changeant du tout au tout. Elle leva un index, ravie de son idée.

- Je sais! On va jouer à Cache-Cache.

Quelle merveilleuse idée!
Mademoiselle a toujours de bonnes idées!


Un concert de rires discordants éclata de toutes parts. Elle reposa son thé sur la table et se leva ensuite.

- Comme je suis très gentille, je vous laisse une avance! ♪
- Que...
- Vous devriez vraiment en profiter, chantonna t'elle en mettant ses mains dans le dos.

Elle se mit alors à énumérer d'une voix claire, charmante.

- 100... 99... 98... 97... 96... 95... 94...

Sous les fleurs, des ronces difformes se dégagèrent pour menacer les jambes de l'homme. Quand il s'aperçut de cette anomalie, la peur termina de poignarder ses sens et il prit aussitôt la fuite sous des rires criards et éthérés. Avant la fin du sinistre décompte, il était parvenu, sans mal, à disparaître à l'angle de l'imposant manoir devant lequel se tenait le jardin paradisiaque.

- 9... 8... 7... 6... 5... 4... 3... 2... 1... Prêt ou pas, nous voilà!

Des craquèlements inquiétants se firent entendre, sourds, imposants, comme si le manoir entier se mettait en branle. Elle écarta les bras vers le ciel azur qui vint aussitôt se couvrir de nuages sombres. Elle était heureuse, si heureuse! Plus jamais...

Plus jamais Il ne prononcerait son Nom.

Elle se mit à danser pendant que la pluie éclatait dans une bruine soudaine. Les gouttes, à la fois chaudes et visqueuses, ne semblaient pas l'atteindre alors que de nombreuses vies tremblaient dans les recoins sombres du manoir. Dans une armoire, une femme tentait de retenir péniblement son souffle pour ne pas se faire repérer. Une autre tentait de défoncer une porte close à s'en briser l'épaule. Un enfant hurlait sa terreur dans un couloir, sa jambe prise dans une planche. Le voyageur tentait désespérément d'atteindre les hautes murailles grises à l'arrière du bâtiment.

A la Danse, Elle joignit le Chant, accompagné de temps à autre du Chœur invisible, d'une voix aussi enchanteresse que démente.
Dernière modification par Ennrael le 09 avr. 2019, 00:55, modifié 2 fois.

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 15 mars 2018, 19:58

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Il se sentait bien, si bien... Ses bras entouraient une taille gracile, sa joue contre l'une des deux courbes généreuses. Tant de volupté, moment rare de paix et ce parfum... Ce parfum...

... De la tombe?

Il ouvrit les yeux, surpris du constat. Des doigts insidieux lui prirent les joues.

- Il est temps de se réveiller, mon amour, lui susurrèrent des lèvres rouges de stupre.

Paniqué, il tenta de s'extirper de l'étreinte mais il ne fut pas assez rapide. Deux mains puissantes lui saisirent la gorge et l'entraînèrent dans leur sillage. Il sentit son dos heurter le rebord d'un balcon, l'horizon infini d'une ville sans fin dans le vide qui l'attendait. Il prit les poignets implacables, peinant à lutter contre leur emprise.

- POURQUOI! Pourquoi ne pouvais-tu pas te taire?! lui hurla une voix hystérique.
- Gh...

Pourquoi, oui, ma douce... A moins que je ne me sois trop tu...?

- Pourquoi n'es-tu pas comme les autres?! Pourquoi cherches-tu à me réparer comme si j'étais un mécanisme cassé?!
- ... Gh... Parce que TU L'ES!

Un hurlement de banshee lui répondit alors qu'ils passèrent par-dessus bord.

- Ne viens pas me faire rire, tu pensais vraiment que je pouvais t'aimer, toi qui prétends être un homme sans en avoir l'apparence, ni les moyens?! Je ne changerai pas pour toi, ni pour quiconque!

Il éclata d'un rire tonitruant alors qu'ils continuaient à chuter sans fin toujours plus loin, toujours plus profond.

- Alors ne change pas. Reste cruelle. Reste mesquine. Reste narcissique, je t'en prie, mon amour. Je t'en prie, continue d'arracher les cœurs sur ton passage. Je t'en supplie, ne change surtout pas. Laisse intacte l'Image infecte que tu m'as laissé.

Il la repoussa avec violence pour se retrouver seul. Enfin seul. Son corps heurta le sol avec un choc peu commun. Ses os se brisèrent, leurs cris d'agonie se répercutant dans sa conscience. Il se retrouva dans une cour familière. L'esplanade bleutée qu'il avait sans cesse rêvé. Sa version Adulte eut tôt fait de le surplomber, vêtu de ses atours élégants. Comme à l'ordinaire, son visage présentait une sévérité peu commune.

- Et te revoilà. Au Point de Départ.

L'Adolescent était perché non loin derrière, les pans de son manteau de mage pendant en même temps que ses jambes dans le vide. Le fond de ses yeux était d'un noir démoniaque, tout comme son sourire. Devant la carcasse brisée, face à l'Adulte, l'Enfant pleurait de toutes les larmes de son corps, à genoux, en se tenant ses frêles bras. Ses haillons sales portaient le témoignage d'un passé oublié.

- Je ne voulais pas tout ça, se lamentait la petite voix. Tout ce que je voulais, c'était la rendre...

La Carcasse écarquilla les yeux en entendant ça. Mû par une Haine peu commune, il parvint à se relever pour saisir l'Enfant par la gorge et le plaquer au sol. Il leva son autre main, ses doigts se mettant à crépiter de flammes alors que l'Enfant hurlait sa Terreur. Son geste fut arrêté par la poigne ferme de l'Adulte.

- Tant que je serai là, je ne le permettrai pas, fit-il, implacable.

Un éclair de glace fendit soudainement l'air dans le dos de l'Adulte qui parvint à lever une main derrière lui, invoquant un bouclier.

- Qu'est-ce que tu fais? lança t'il à l'Adolescent en fronçant les sourcils.

Le Cynique eut un ricanement sinistre depuis son perchoir. Il en descendit dans un mouvement ombreux.

- Ce que j'aurai dû faire depuis toujours. Ses plaintes et tes sermons commencent sérieusement à me fatiguer. Si on en est à là aujourd'hui, c'est à cause de vous. Au final, Elle avait raison... La faiblesse n'a pas sa place dans ce monde.
- Et tu crois que devenir comme Elle est une solution?! vociféra l'Adulte en relâchant sans ménagement la Carcasse.
- Il n'y a que la Vérité qui blesse, fit l'Adolescent avec un sourire cruel.

C'était la première fois qu'il les voyait ainsi. S'entredéchirer. Sa fragile Harmonie n'était plus.

- ... lion.

L'Enfant agrippa la manche de la Carcasse.

- Ne m'abandonne pas, le supplia t'il. Pas toi...

- ... io...!

L'Adulte et l'Adolescent se firent face, l'un entouré d'une aura bleutée, l'autre d'une aura rougeâtre.

- EYLION!

Le hurlement le ramena brusquement à la Réalité. Deux mains le tenaient par le côté des bras. Sa conscience embrumée ne parvint pas à suivre son corps qui porta ses doigts à un bracelet sur lequel était gravé les algorithmes d'un unique sort. Il en extirpa l'Ether nécessaire pour le lancer contre l'ennemi supposé. L'individu fut projeté vers le mur avec la force d'un ouragan.

Sauf qu'il ne s'agissait pas d'un ennemi.

Eylion écarquilla son œil unique quand il s'aperçut de sa méprise.

- RHIAN!

Le Miqo'te descendit du lit à toute vitesse. Engourdi par son sommeil, ses jambes manquèrent de le lâcher. Il accourut auprès du Hyur et se laissa aller à ses côtés.

- Mer... Rhian! Tu m'entends?! fit-il, paniqué en lui prenant la nuque.
- Urgh... Arh... Tu... Tu n'y vas vraiment pas... avec le dos de la cuillère... niveau sécurité...
- Je suis désolé! Merde... Comment ça se fait que tu as pu entrer, espèce d'abruti?!
- Ta porte... était ouverte... tête de linotte.

Eylion prit une inspiration. Il relâcha doucement son ami avant d'aller chercher son grimoire. Il revint ensuite auprès de lui, cherchant la bonne page pour lancer un sort de soin. Il ne fallut pas longtemps pour que Rhian se redresse, toujours aussi pris au dépourvu par les changements soudains d'état.

- Ah, merci! Ça va mieux.
- Tu peux te relever?
- Oui, je crois. Bon... Je crois que ce n'est pas la peine de te demander comment tu vas, fit-il avec un sourire désabusé.

Un grommellement fut l'unique réponse alors que le mage s'attelait à se relever tout en accrochant le grimoire à sa taille. L'Uldien prit le temps de se mettre debout à son tour tout en s'époussetant. Un silence pesant s'ensuivit, Eylion incapable de regarder Rhian en face. Cette attitude inhabituelle eut le don de faire hausser un sourcil à ce dernier.

- Ça, c'est nouveau, remarqua t'il en mettant ses mains sur les hanches.
- Quoi? maugréa le Miqo'te en le regardant en coin.
- Ces lèvres fermées et tout... cet air fuyant, fit-il en entourant le visage d'Eylion avec un index évasif.

Eylion se détourna en grommelant, l'air blasé.

- Je suppose que tu veux un verre?
- Ah là, ça me parle!

Le mage s'attela à chercher deux verres et une bouteille de rhum qu'il alla disposer sur une table non loin.

- ... Je voulais m'excuser, dit-il finalement avec un ton réticent.
- Menphina bénit les siens! Enfin, même si j'ai aucune idée du pourquoi tu t'excuses. C'est par rapport à mon vol plané? demanda Rhian en s'asseyant.
- Non, ça, je me suis déjà excusé, lança vertement le Miqo'te avant de reprendre, plus calmement. C'est... par rapport à mon départ de la dernière fois. Et avant que tu ne dises quoique ce soit, tu me laisses déjà nous servir.

Rhian mima un air d'enfant sage pendant qu'Eylion s'exécutait. Ce dernier regarda ensuite la surface ambrée de son propre verre.

- ... Je sais que tu t'inquiètes sincèrement pour moi. Ma dernière remarque... Je ne veux pas que tu la prennes pour toi. On s'est sauvé la vie assez de fois pour perdre le compte. Sans toi, je crois... que j'aurai complètement perdu pied depuis longtemps. Je ne peux pas te promettre que je ne vais pas perdre la tête. Je ne peux pas te promettre que je vais aller mieux.

Il releva son œil unique vers son ami.

- Mais ce que je peux faire... c'est te promettre d'essayer...

L'Uldien eut un air interdit au discours. Puis il commença à avoir les yeux humides avant de bondir sur le mage pour l'emporter dans une étreinte des plus "viriles". Face à la masse, le Miqo'te ne put s'empêcher de pousser un cri de surprise avant de plaquer une paume sous le menton du Hyur, l'autre main repoussant l'épaule.

- CA NE VA PAS, NON?!
- C'était trop beau! Je te dis, c'est le POUVOIR DE L’AMITIÉ!
- Bordel, je REGRETTE TOUT CE QUE J'AI DIT, LÂCHE MOI! hurla t'il en mettant un pied sur le ventre de Rhian pour accentuer la distance.

Le bruit d'un plateau lâché attira alors l'attention des deux "belligérants". Ils tournèrent leur attention vers la porte laissée ouverte. Une femme de chambre les regardait, interdite, ayant lâché ce qu'elle tenait sur le coup.

- Oh, p-paarrdon, je ne voulais pas déranger... dit-elle, rouge pivoine.

Elle détala par la suite en prenant son plateau, sans demander son reste.

- Génial, fit Eylion, l'air blasé. J'avais vrraiment besoin de ça...

Rhian, quant à lui, relâcha sa prise en riant.

- Ça me rappelle les rumeurs de l'Académie.
- Pitié, ne me rappelle plus JAMAIS l'Académie...
- Roh, laisse les penser ce qu'ils veulent.
- Mais je les laisse penser ce qu'ils veulent, ces IMBÉCILES FINIS...!

Le mage colérique alla jusqu'à la porte pour la fermer proprement, défrisé au dernier degré.

- Bon, voilà, je me suis excusé, on en reste là!
- Oui, oui, fit Rhian, tout sourire.
- Et vire moi ce sourire idiot de là.
- Oui, oui, répliqua l'Uldien en le conservant.

Eylion revint se poser pour avaler d'une traite son rhum. Le reste de la conversation fut bien plus calme, Rhian racontant ses récents déboires avec ses amantes. Les différents récits permettaient au mage de lancer ses piques de temps à autre et de défouler le reste de sa colère. L'après-midi se déroula sans heurt et sur un départ plus paisible. Le Miqo'te omit toutefois de raconter à son ami ses récents échanges à l'Antique Café.

Comment pouvait-il admettre qu'il avait, un instant, baissé sa garde?

S'il était sûr d'une chose, c'est que plus jamais il ne pourrait poser les pieds au sein de l'établissement.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 20 mars 2018, 02:47

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- ... Et lui?
- Il est petit, frêle, chétif. Il n'est pas fait pour les mines, je ne lui donnerai pas deux mois à vivre.
- Je suis sûre qu'il plairait au vieux Rochevatt. On ne lui a jamais vendu de chaton.
- Il a de beaux yeux et il est pas dégeu pour un mioche. Tu as raison, on pourrait peut-être en tirer le double.
- Je le contacterai demain. Pour sa petite copine Hilde, Ulder vient la chercher tout à l'heure. Tu pourrais demander à Mal' de s'en occuper?
- Oui, on a reçu la robe voulue.

Dans le grenier, le Miqo'te retenait son souffle, son œil rivé entre les planches. Sitôt l'information comprise, il se força à se traîner le plus silencieusement possible vers les escaliers. Ce ne fut que lorsqu'il rejoignit le préau de la cour qu'il se mit à courir. Il se heurta à une petite fille sur le chemin.

- ...! !

L'enfant lui saisit aussitôt le côté des bras, catastrophé.

- On doit partir, maintenant!
- Qu'est-ce que tu racontes?
- Tu me fais confiance?
- Oui mais...
- Alors suis moi!

Il lui prit le poignet, l'entraînant à sa suite.

- Ils nous vendent, je les ai entendu en allant au grenier. Tu es la prochaine.

Elle écarquilla les yeux.

- V-vendre, comment ça, vendre?
- On n'est pas adopté par des familles! Matt est mort...!
- Ce n'est pas vrai...!
- On n'a pas le temps pour ça! Il faut que tu te taises.

Il la plaqua au mur à l'angle du préau, masqués par un meuble délaissé. Il lui intima le silence, une main sur les lèvres de sa comparse, l'index de l'autre devant les siennes.

- Laisse moi faire, lui murmura t'il.

Elle hocha péniblement la tête, les larmes aux yeux. La voyant plus docile, il retira sa main.

- J-J'ai peur.

Si elle avait peur, il était terrifié. Le gardien se soûlait toujours à cette heure mais il ignorait s'il aurait le temps d'attraper les clés de la sortie. Et même s'il parviendrait à approcher le gardien tout court. Si petit qu'il était, si insignifiant, si faible...

La confiance...

Son premier goût du sang, entre ses crocs. Le hurlement du gardien. La main épaisse, grasse de celui-ci contre son cou. Sa chair n'avait pas oublié. Les rues sombres de la ville. Les doigts tremblants d'Hilde dans les siens.

- Qu'est-ce qui me prouve que je peux avoir confiance en vous?
- Rien.

L'Oubli était le luxe des lucides. La panacée de la normalité. Sa Chair n'oubliait pas. Son Âme maudite non plus. Chaque rencontre, chaque épreuve était un sillage de plus gravé telles des cicatrices purulentes.

- ... Qui êtes-vous?
- Si j'étais vous, je ferai mieux de courir. Tic, tac.

Des fragments de Passé et du Présent, fissurés et agglutinés, hurlant leurs accusations et leur jugement. Le vent de la Haine soufflait toujours, puissant, implacable. Il n'oubliait pas. Il ne pardonnait pas.

Jamais.

Les paroles de l'Anrad résonnèrent dans son inconscient malade.

- Vous avez deux choix pour vous en sortir, Eylion. Vous pouvez mettre fin à tout maintenant... ou bien vous pouvez emprunter une autre voie. Tout ce que cela vous coûtera...

...

C'est votre fierté.


Il ouvrit son œil unique sur le plafond familier de sa chambre. Sa mémoire se reforma pour lui rappeler les événements récents. A côté de lui, sur la table de nuit, un verre de rhum à demi vide siégeait.

- Quelle putain de nuit, pesta t'il en attrapant le verre.

Il se redressa, la lune se laissant entrevoir par la fenêtre à proximité. Tout en posant son dos contre le mur, il jeta un regard nonchalant vers les rayons bleutés qui témoignaient de l'heure. Il se promit mentalement de garder pour lui tout ce qu'il avait traversé. Il était à peu près sûr que s'il mentionnait à Rhian que deux cinglées avaient tenté de bondir sur lui en le prenant pour un lapin, l'Uldien aurait pleuré de joie en déformant ses paroles.

Il passerait volontiers outre le fait qu'il avait dû aider l'une des cinglées en question à se dépêtrer de l'autre après la chute. Il "oublierait" de dire qu'il avait traqué la dénommée Rashagg à travers le quartier pour éviter qu'elle ne fasse d'autres "victimes". A cause de ça, il avait dû remettre les pieds à l'Antique Café, plus précisément à l'infirmerie. Lui qui s'était promis de ne plus y remettre les pieds... La présence de Shuri n'avait pas aidé à sa "bonne humeur".

Au moins, il avait pu récupérer une "cliente" en la personne de Chu'luun. Le cas de malédiction de cette dernière promettait au moins d'être intéressant et de compléter ses recherches. Il devait d'ailleurs se mettre au travail, même avec le peu découvert. Il détestait en revanche l'idée de devoir travailler avec la prêtresse Tomoyo sur le même cas. Elle était trop calme pour être honnête, chose qui avait tendance à le défriser.

- Hrm...

Lui qui voulait avoir la paix, c'était raté. Sa seconde "cliente", Yunaia, faisait partie du personnel de l'Antique. Encore un cas particulier de magie. Le sourire peste de cette dernière lui revint en tête.

- Vous faisiez votre boulot et je faisais le mien, je serais payée pour ce plateau donc... Si vous me l'offrez, vous risquez de passer pour un type sympa, faites gaffe.
- Vous l'avez touché, ça me suffit pour la refuser.
- Mince, je suis si dangereuse que ça, même avec une pièce?


Il soupira. Non, vraiment, il ne pouvait rien dire à Rhian.

- Cet abruti... soupira t'il.
- Tu m'as appelé?

Eylion leva, surpris, son œil vers l'entrée de sa chambre. Il eut ensuite un air blasé.

- Je ne sais pas ce qui est le plus consternant... Que tu répondes maintenant à ce terme ou bien que j'ai encore oublié de fermer la porte.
- Je sais que c'est affectueux, lança l'Uldien avec un sourire solaire tout en s'approchant.
- Bientôt, tu devras te faire soigner à force d'être à mon contact.
- J'te survivrai, ne t'inquiète pas pour ça, dit-il en s'asseyant au bord du lit.
- Pas faux, on a déjà survécu à la pire chose qui puisse exister sur cette terre après tout, répliqua Eylion avec un sourire acide.

Rhian eut un bref air pensif à la remarque.

- ... Même si je suis tenté de dire oui, je suis sûr qu'on peut trouver pire, reprit-il avant de poursuivre avec un air radieux. Bon, alors, comment ça va?
- Très bien... répondit le Miqo'te avec un air blasé.
- Woh, tu m'as presque eu là! Ça veut dire que ta dose de social est encore insuffisante.
- Oh, crois moi, j'ai assez eu de social pour les trois prochains siècles...

Sans l'écouter, l'Uldien lui fourra un papier entre les mains, ce qui provoqua un regard revolver chez son comparse.

- Je t'avais dit quoi, par rapport à la dernière fois?!
- Allez, c'est un salon de thé sympa à ce qu'on m'a dit. Tu y vas, tu profites de l'ambiance détente et tu reviens. Ce n'est pas plus compliqué que ça.
- Et qu'est-ce qui te fait croire que je vais y aller...? fit-il avec un air mauvais.

Rhian mima alors des yeux de chiot battu, ce qui n'allait absolument pas avec ses traits.

- Parce que ça me sauverait de ma terrible inquiétude...?
- J'aurai dit "Bien essayé" mais c'était tellement mauvais que même le plus naïf des gobelins n'y aurait pas adhéré.
- Parce que tu es mon ami...?
- Un titre que tu mets actuellement à l'épreuve...
- Parce que je t'aime...?
- Là, c'est ta vie que tu mets en jeu, siffla le Miqo'te de manière menaçante.
- Allez! Promis, je ne t’ennuierai plus pendant un bon moment après ça.
- ... C'est une promesse?
- Promis, juré! fit-il avec un sourire solaire tout en joignant les mains devant lui, coudes levés.

Eylion soupira en lui rendant l'affiche. Il se leva par la suite pour se diriger vers la sortie.

- Qu'est-ce que je ne ferai pas pour avoir la paix.
- ...! Merci!
- Certains ne risquent pas de te remercier quand j'en aurai fini.
- Tu ne vas pas quand même...

Le Miqo'te lui offrit un sourire cynique quand il ouvrit la porte.

- J'ai dit que je ferai des efforts, je n'ai jamais dit que je changerai du jour au lendemain.

Il referma sur le visage dépité de Rhian. L'Arcaniste ignorait alors combien il se trompait et combien la soirée ne serait pas tendre pour lui.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 23 mars 2018, 16:18

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- J'admets que je me suis déjà trouvé dans des situations improbables mais honnêtement, Rhian... De là à se retrouver en sous-vêtements sur un toit, tu fais fort.

Le Miqo'te s'était mis le bout des doigts sur son front, l'autre main à sa hanche, avec un sourire dépité. Du haut de son toit, l'Uldien tâchait de se maintenir comme il le pouvait pour ne pas glisser.

- Je t'avoue qu'un coup de main pour descendre ne serait pas de refus...! fit-il, quelque peu angoissé par sa position.
- Attends, il faut déjà que j'admire ta bêtise dans toute sa splendeur, lança le Miqo'te avec un bref rire tout en levant la tête.
- Eylion!

Suite à l'interpellation, l'Arcaniste consentit à prendre son grimoire pour invoquer une bourrasque qui porta Rhian de son perchoir jusqu'au sol. Les pieds à nouveau sur le plancher, le Hyur souffla un bon coup en sautillant un peu pour dégourdir ses membres maltraités.

- Elle avait un second prétendant. Pas commode le Roegadyn! Elle m'a planqué sur le balcon mais il insistait pour fouiller les lieux, le bougre. Comme je tenais à ma tête, j'ai pris la seule issue possible pour me tirer de là.

Eylion referma son grimoire tout en écoutant l'explication, son unique sourcil levé.

- Je ne vais pas te rappeler que je t'avais mis en garde.
- Si je t'écoutais, je ne ferai plus rien.
- Je t'ai déjà dit que les femmes seraient ta perte?
- Les femmes ont toujours été ma salvation.
- Dit celui qui finit sur un toit en caleçon à cause d'elles...
- A cause d'un homme, pas d'une femme, fit l'Uldien avec un sourire faussement savant.

Le Miqo'te roula son œil dans son orbite avant d'entamer le chemin du retour. Son comparse emboîta le pas, nullement gêné par les regards des passants vis à vis de son manque de vêtements. Après un moment de marche, Eylion prit une inspiration. Il s'apprêtait à parler quand il s'aperçut qu'il n'arrivait pas à trouver le mot qu'il souhaitait. Perplexe, il plaça un bras sous le coude, l'autre main à son menton, pensif.

- ... Il existe un terme entre "Connaissance" et "Personne qui pourrait être un ami mais qui n'a pas encore fait ses preuves"?.

Rhian fut perplexe à la définition.

- On dit un ami, tout simplement.
- Il n'y a pas de terme intermédiaire...?
- Si tu veux parler de quelqu'un qui a prouvé qu'il était digne de confiance, on parle alors d'un "meilleur ami", précisa le Hyur avec un sourire. Pourquoi?

Eylion ne parut pas conquis vis à vis des définitions avancées mais il finit par reprendre la parole en détournant le regard, gêné.

- ... Il se peut que... je me sois fait une amie.

Il y eut un instant de silence durant lequel le Miqo'te fronça son sourcil.

- Je devine ton sourire sans même le regarder... ôte le de suite, fit-il entre ses dents.

En effet, Rhian affichait désormais un sourire radieux et un regard pétillant. Eylion revint à lui brusquement tout en le pointant de son index.

- Avant que tu ne te fasses de mauvaises idées comme certains imbéciles, elle est déjà prise, enchaîna t'il aussitôt. Il... se trouve seulement qu'on partage certaines choses en commun vis à vis de nos passés respectifs et que je l'aide vis à vis de son don inné. Rien de plus, rien de moins.
- Oh... Hé, Eyl', même si j'espère que tu trouveras quelqu'un de bien, je sais très bien que c'est trop tôt pour ça. Et je t'ai déjà promis que je ne t'embêterai plus à ce sujet.
- Hrm, déjà ça de pris. Si tu veux savoir ma position sur le "sujet" pour reprendre tes mots, j'ai décidé de me marier à mon travail. Au moins, la promesse de mort est plus tangible et sincère.

Rhian soupira.

- Et juste t'amuser, tu y as songé? Pas de prise de tête, pas d'attachement. Ça te décoincerait un peu.
- Coucher pour coucher ne m'intéresse pas et ne m'a jamais intéressé.
- Tu ne vas pas me chanter que tu es frigide.
- Je ne le suis pas. On peut admirer une belle couverture mais ça reste une belle couverture, sans substance. Je suis un mage, Rhian. On souffre du maux de l'Absolu. C'est tout ou rien. Donc non, je ne vais pas m'arrêter à la première qui papillonne des cils. J'ai déjà eu des occasions avant...

Il s'interrompit un instant pour reprendre.

- Mais j'ai toujours refusé. Pour l'autre salope, je n'ai pas écouté mon propre conseil de prendre le Temps. Si je l'avais pris, son Mensonge n'aurait jamais tenu... Maintenant, ça n'a plus d'importance. J'ai l’Éternité devant moi, il m'importe peu de le passer seul mais... Mettons... Si Menphina venait à me jouer à nouveau un sale tour, j'entends bien ne plus me faire avoir de la sorte.
- Je t'avoue que je ne comprends pas ta position. Si j'avais l’Éternité, purée, je le passerai à en profiter...
- Question de choix, Rhian.

L'Uldien leva les mains en signe de paix et de reddition.

- Garde quand même ce que j'ai dit en tête.
- Ne t'inquiète pas, je vais m'empresser de l'oublier, fit le Miqo'te, sarcastique.

Rhian soupira en retour.

- Bon, et cette amie dont tu m'as parlé, comment elle s'appelle? D'où elle vient? Comment vous vous êtes rencontrés?

Eylion lui jeta un œil avant de regarder de nouveau devant lui.

- Yunaia, elle vient de Kugane et elle est serveuse à l'Antique Café. On s'est croisé à l'infirmerie de l'Antique. J'ai dû y rester quelques nuits pour plusieurs cas à traiter. Après analyse de son état, j'ai découvert qu'elle avait des affinités naturelles avec l'Ether alors je lui ai donné des conseils pour les maîtriser. Que tu saches, j'ai toujours autant de mal à... passer outre mon opinion sur les femmes mais je reconnais qu'elle a du cran.
- Je suis vraiment content pour toi. Tu vois, avec un peu d'effort, de belles rencontres sont possibles!

Ce à quoi un grommellement lui répondit.

- Reste à savoir combien de temps avant qu'elle ne me poignarde dans le dos.
- Eylion...
- Hé, je reste réaliste, fit-il en haussant les épaules.
- Pessimiste, reprocha Rhian.
- C'est la définition du mot "réaliste".
- Et c'est moi qui suis irrécupérable.
- En effet, chose que je maintiens.

Ils arrivèrent finalement devant leur maison commune. Il s'agissait d'une bâtisse large sur plusieurs étages. Les deux amis s'étaient répartis les pièces de façon à pouvoir séparer leurs quotidiens tout en ayant la possibilité de se retrouver à l'occasion.

- Ça me fait penser, Eyl'... Mais tu as une mine terrible.
- J'ai eu des cas d'urgence à traiter, difficiles... L'un d'eux a failli mal tourner, j'ai dû veiller pour improviser des formules sur le tas. Il faut d'ailleurs que je rédige ce que j'ai pu observer au plus vite, tant que c'est encore frais alors... Ne t'inquiète pas si tu ne me vois pas pendant un jour ou deux.
- Hé... Il faut aussi que tu te reposes.

Le Miqo'te ouvrit la porte, levant son œil cerné vers son ami.

- Je me débrouille.

Ils entrèrent à l'intérieur, Eylion prenant de l'avance sous le regard inquiet de Rhian.

- J'ai aussi recroisé la Miqo'te de la fête des damoiseaux, finit-il par dire avant que l'Uldien ne dise quoique ce soit.
- Ah?
- ... J'ai réussi à maintenir une conversation sans qu'elle ne prenne ses jambes à son cou. Allez savoir comment.

Il omit, bien entendu, de mentionner le fait que la même Miqo'te avait fini à l'eau à la fin. Motif: Elle le trouvait sympathique. Ladite chute avait été un échec plat puisqu'elle en avait ri plus qu'autre chose.

- Hé, peut-être une future amie en devenir! lança Rhian, extatique. Ça veut dire qu'on va bientôt pouvoir faire des soirées ici?

Il se reçut un regard blasé de la part d'Eylion qui se trouvait déjà près des escaliers.

- C'est beau de rêver.

Loin d'être démonté, l'Uldien mit les mains à ses hanches avec un sourire assuré.

- Ah, ah, ton pessimisme ne peut pas venir à bout du fait que tout est possible! Menphina m'a bien fait vivre une mésaventure pour avoir la chance de te savoir mieux entouré!
- Si je croyais encore en Azeyma, je dirai plutôt que c'est une juste rétribution de tes idioties, lança le Miqo'te avec nonchalance.

Sans attendre la réponse, celui-ci disparut dans les escaliers. Rhian se mit alors une main à son menton, conservant son sourire.

L'Antique Café serait, sans aucun doute, sa prochaine destination.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 25 mars 2018, 15:59

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La Mer s'étendait à perte de vue. Sa surface noire reflétait à peine une lune pleine et moribonde, haute dans un ciel nuageux. Sur le bateau, ombre parmi les ombres, il se trouvait à tribord, en train d'ajuster machinalement un cordage. Le Vent sifflait à travers la voile imposante. Ils étaient nombreux sur le pont mais il ne parvenait pas à distinguer leurs visages. Un seul lui était réellement discernable. Elazar. La Tempête apparut sans crier gare. La lune laissa place aux ténèbres. Les Vagues se soulevèrent, faisant brusquement tanguer le navire. Il tomba au sol, trempé jusqu'aux os, sa vision embrouillée par la fureur des éléments.

Ce fut là que sa Voix s'éleva. Ensorcelante. Irrésistible. Elle avait le Parfum de la Sincérité. La Tonalité Charnelle des Promesses Indécentes. La Puissance d'une Noblesse en peine. Le Charme d'un Besoin Primaire, Viscéral.
Le navire n'était plus qu'une coquille de noix pendant que les ombres se tournaient vers les flots d'où s'élevait la Tentation. Un à un, il les vit plonger sans hésitation. Elazar fut le dernier à se présenter à la Perte, daignant jeter un œil à l'unique survivant derrière son épaule juste avant la Chute. Eylion ne pouvait que s'accrocher au rebord opposé de toutes ses forces. Il ne Céderait pas. Pas comme les autres.

Mais le Chant se poursuivait malgré ses efforts. Elle l'appelait. Elle avait besoin de lui. Tant besoin de lui.

Viens.

Il voulait hurler mais comment résister? Il était à la fois le marin en perdition mais aussi le mage. Oui, le Mage qui s'était trouvé à ce Belvédère. Oui, ce jour de sa déclaration. Il l'avait conduite jusque dans les ruines antiques d'une ville oubliée. Ils avaient grimpé les marches interminables du rempart jusqu'à ce belvédère à la piste imposante. Il s'était vêtu d'une longue cape noire, une broche en serpent fermant le côté. Il s'était incliné en prenant les doigts insidieux. Il avait choisi son moment, celui où le ciel serait lourd, appesanti par la nécessité d'un Orage. La luminosité idéale pour l'atmosphère que la Sorcière aimait tant.

- M'accorderez-vous cette Danse?

Ravie, elle avait accepté. Comment refuser ce signe d'allégeance? Il plongea à son tour dans les flots noirs, glacés. L'eau engouffra sa vision et son souffle. Il n'était pas seul, il le savait. La méfiance était là mais pas encore la panique. Le Fou. Puis, des ténèbres émergea une silhouette dantesque, le corps serpentin infini surmonté de Son buste. La Sirène le prit dans ses bras, ravie de sa prise.

La Danse commença sur une valse. Il avait appris à Danser pour elle, les heures interminables d'entraînement à jamais gravés dans ses réflexes. Les pas qui se voulaient tout d'abord doux se firent peu à peu plus rythmés, les gestes plus bruts. De la valse, ils étaient passés à un style plus charnel, plus passionnel. La seule différence tenait dans la violence et la hargne qui hantaient désormais leurs échanges.

Le Présent se mêla au Passé, leurs courants se connectant alors qu'il s'était trouvé lui-même à proximité de la Cave, plongé dans les eaux claires de la rivière.

- L'amour est comme une phalène attirée par la lumière. Tout paraît lumineux, parfait au départ jusqu'à ce que vous vous approchiez trop et que vous finissiez, au final, consumée.

Ce à quoi la voix de Yunaia fit.

- Hm... Et si le début est catastrophique, ça peut devenir mieux au final, vous pensez?
- ... C'est encore pire. Ça veut dire que les sources de votre embrasement sont déjà là dès le départ.

La Danse et le Chant se poursuivaient, le rythme s'endiablant. La Sirène et la Sorcière plongèrent leurs griffes au niveau de la poitrine de leur prise, un sang noir s'écoulant de la plaie. Le Passé revint, le souvenir d'un dos acculé au mur d'un cabanon. Elle jubilant de sa position pendant que leurs sorts se bataillaient autour de la vie et de la mort d'un enfant à proximité.

- Que donnerais-tu pour la vie de ce garçon?

Le Marin et le Mage crachèrent le sang corrompu que le cœur ne pouvait plus pomper. Pourtant, le Mage poursuivait ses pas. Le Marin continuait de se débattre, de s'attacher à la vie.

- Vous allez espérer que les choses s'arrangent avec le temps, que votre conjoint changera pour vous. Qu'à deux, vous serez à même de devenir des personnes meilleures. Jusqu'à ce que la Réalité vous rattrape. Que les contes de fée n'existent pas. Que les gens ne changent pas aussi facilement. Pire encore, par présomption, vous vous penserez en mesure de le sauver. Et ce sera votre ultime erreur.

En rassemblant ses ultimes forces, ils repoussèrent la Chose. D'un geste vif, ils attrapèrent son Masque et le lui arrachèrent.

- Alors... je dois faire quoi? Laisser tomber? Attendre? Ou... ne rien tenter et ne rien connaître, rester seule? fit la voix nouée de Yunaia.

A celle-ci, l'accent familier de Velren se mêla.

- Je ne vais pas vous donner de faux espoirs, Eylion. C'est fini. Vous accrocher est honorable mais cherchez au fond de votre cœur. Cherchez et osez me dire que vous n'avez jamais eu de doutes?

Ils poussèrent à nouveau la Sirène et la Sorcière jusqu'à l'acculer à son tour. La réponse vis à vis des questions de Yunaia se mêla au Chant.

- Prendre le Temps. Ce Temps que je n'ai pas pris.

Le Mage arracha sa broche et la lança au loin, sa cape suivant le mouvement.

- J'en renie jusqu'à ton Nom, ton Visage et ton Existence. Tu ne seras que l'ombre d'un rêve, d'un souvenir éteint. J'ai cherché pendant longtemps la raison pour laquelle Elazar n'avait pas versé une larme à ton départ.

Il leva sa main, une bourrasque expulsant la silhouette obscure hors du Belvédère. Le Marin se mit à nager désespérément vers la surface.

- Qui voudrait pleurer pour une Sorcière?

Une fois à la surface, il reprit son souffle. Au-dessus de lui, le ciel clair de Gridania l'attendait. C'était la première fois, depuis longtemps, qu'il prenait la peine de regarder au-dessus de lui. Les étoiles, magnifiques, se gaussaient bien des difficultés ici-bas. C'était la première fois qu'il prenait le temps de faire quelque chose pour lui.

L’œil unique s'ouvrit sur sa table de nuit. Une bourse pleine de gils, témoignage des gains de la veille, trônait sur le dessus, éclairée par les lueurs de l'Aube.

- Hrm...

Il effleura les cordons de la bourse avant de reposer sa main sur l'oreiller. Il referma son œil et se tourna sur le côté. Une grasse matinée ne pourrait pas lui faire de mal après tout...

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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 27 mars 2018, 04:34

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- Pas besoin de votre bouquin... J'obéirais, j'ai trop de respect pour vous tenir tête.

La déception et l'incompréhension avaient défilé dans les yeux de K'alyanni juste avant de sombrer dans l'inconscience. Il avait retenu la Miqo'te, devant délaisser son grimoire. Celui-ci avait chuté au sol, ouvert, dans un bruit mat.

Idiote.

Comment pouvait-elle lui demander de faire confiance? Surtout avec de tels enjeux?

Eylion était revenu dans les rues familières, froides, d'Ul'dah. Il se présenta devant les portes d'une demeure riche, imposante. Il échangea quelques paroles avec les gardes, l'un d'eux se décidant à l'escorter à l'intérieur. Sur le marbre clair, leurs pas résonnaient tout comme les armatures métalliques de la tenue du garde.

- Vous allez faire quoi? Dire quoi? Vos mots suffiront? Je trouve ça très présomptueux. On... a qu'à inventer une histoire qui tient la route. A deux, on aura plus de crédibilité... S'ils vous demandent qui je suis et où je me trouve et que vous ne leur dites pas, ce sera pire.
- Je peux vous obliger à rester ici jusqu'à ce que j'en ai terminé. Ils n'ont pas à savoir "qui" vous êtes à part que vous êtes ma disciple et que tout ça n'était qu'un malentendu. Songez un peu à votre famille avant de prendre des décisions idiotes.


Il esquissa un sourire cynique d'autodérision. La présomption... Oui, ça lui allait bien. Sourire qui disparut par la suite pour laisser place à un air des plus sérieux. Il savait parfaitement dans quoi il s'embarquait. Tout ce qu'il pouvait espérer, à ce stade, c'était d'aboutir à la meilleure issue possible.

Après un court trajet, ils arrivèrent dans un salon exotique et luxueux. Des tapisseries brodées dépeignaient des chasses prestigieuses dans le désert. Deux divans encadraient une table basse vide. Des vases ornaient le côté des fenêtres grillagées de façon à atténuer le soleil implacable d'Ul'dah. A l'instant, elles ne donnaient que sur les ténèbres de la nuit. Des braseros et des lanternes servaient d'éclairage au lieu. Des servants complétaient le décor, positionnés dans les angles de la pièce. Ils tâchaient de se faire aussi discrets que possible, les mains jointes devant eux.

Assis à l'un des divans, un homme dans la quarantaine, au teint mat, semblait attendre. Sa tenue immaculée affichait des lignes et des motifs dorés. Ses traits coupés au couteau étaient jaugés d'un regard fin, perçant, et son menton présentait une barbe sombre et courte. Malgré son âge, il possédait une prestance et un maintien nobles.

- Je vois que l'un de nos "invités" de ce soir est de retour.
- De son plein gré, lança aussitôt le Miqo'te.

Le Mage s'avança avec assurance jusqu'à arriver à proximité de la table basse.

- Je suis venu donner des explications.
- Aah... A la bonne heure alors. Je vous en prie, asseyez-vous, fit l'homme en indiquant le divan en face du sien.

Eylion ne prit pas place de suite. Il porta une main à son cœur.

- Je suis Eylion Grenn, Arcaniste de mon état. Notre intrusion de ce soir est une erreur de ma part, en tant que mentor. J'entraînais ma disciple aux arts des Arcanes et nous nous sommes laissés emporter par notre enthousiasme. Nous n'avions aucune intention de vous... poser un quelconque problème.

Parler de la sorte répugnait au plus haut point le Miqo'te qui devait rassembler toutes ses forces pour ne pas grimacer. Sa fierté vindicative protestait contre l'ensemble de la situation. L'instinct de la rue, présent dans ses veines, se rebellait contre tout ce que représentait le marchand Jaroud Selafa.

- Un Arcaniste... et sa disciple, voyez-vous ça. Intéressant... Et où est votre disciple, au juste, monsieur Grenn?
- ... Chez elle. Elle n'est, en rien, responsable de l'intrusion de ce soir.
- Un mentor qui prend ses responsabilités, c'est rare de nos jours, fit Jaroud avec un sourire détaché. Je suis enchanté de faire votre connaissance. Vous avez soif, peut-être?

La perplexité prit le Miqo'te à la question. Il parvint, à temps, de se retenir de lancer une pique appropriée.

- Ça... ira, merci. J'espère que vous voudrez bien nous pardonner... notre présomption.
- Vous devriez vous asseoir.

Le ton eut le don d'arracher un frisson de dégoût à Eylion. Ce n'était pas une proposition mais un ordre déguisé sous la convenance. Il ne connaissait que trop bien cette manière de faire.

Songez un peu à votre famille avant de prendre des décisions idiotes.

Lui aussi devrait songer un peu avant de répondre à des défis idiots. Il finit par s'asseoir, nauséeux.

- Monsieur Grenn. Vous me paraissez tendu, ne le soyez pas. Malgré mon statut, je sais être un homme compréhensif. Tout ça n'est qu'une regrettable méprise, je me rends compte. Mais dans toute méprise, on peut toujours trouver des opportunités. Je suis arrivé là où j'en suis grâce à ça. Et vous savez ce que je vois là?

Jaroud claqua des doigts. Un servant accourut aussitôt.

- Non, fit Eylion en retour, retenant à grande peine une grimace de dégoût.
- Apportez à boire, ordonna le marchand au servant.

Le servant partit après une profonde révérence. Jaroud revint à son interlocuteur.

- Je vois l'opportunité de faire plus ample connaissance. Je serai disposé à vous pardonner en échange d'un dîner. Comment s'appelle votre disciple déjà?

Une lueur de consternation passa dans l’œil unique quand il comprit le message et le but du marchand.

- Vous...

Il manqua de se lever sur le coup mais il parvint à se contenir.

- Hm?
- Un dîner, c'est trop d'honneur pour les Arcanistes de bas étage que nous sommes.
- De bas étage, quel terme péjoratif! reprit Jaroud, amusé. J'insiste. Vous n'allez pas me refuser ce plaisir?
- ... Ça ne me dérangerait pas de discuter avec vous des arts que je maîtrise mais je préfère tenir ma disciple à l'écart.
- Pourquoi ça?
- Elle est trop jeune pour la haute société.
- On n'est jamais trop jeune pour se fournir un réel avenir.

Le serveur revint à ce moment avec un plateau muni de deux verres et d'une carafe de vin. Il les servit avant de repartir avec le plateau. Le Miqo'te ne put s'empêcher de se frotter nerveusement les mains, les coudes sur les genoux. Jaroud saisit son verre et commença à le boire, à l'inverse d'Eylion qui ne toucha pas le sien.

- Pourrai-je savoir pourquoi elle vous intéresse autant?
- Elle m'intrigue, voilà tout. C'est vous deux qui m'intéressez, pas l'un et l'autre séparés.

Mensonge.

Il était si évident qu'il en écœura Eylion.

- Ne pourrions-nous pas trouver un arrangement qui laisserait ma disciple en paix...?
- De quoi avez-vous peur, monsieur Grenn?

De vieux coeurls libidineux comme vous, songea t'il.

- Un... mentor se doit de veiller soigneusement au parcours de ses élèves. Si je venais à vous laisser la voir, elle pourrait se détourner de ses études ou pire, se penser capable de se faire une place dans la haute société avec le peu qu'elle a appris.

Le marchand se mit à rire à l'exposé, amusé.

- Je crois qu'elle est assez âgée pour savoir si elle peut accepter ou non mon invitation. D'ailleurs, vous me paraissez un peu jeune pour être son père.

L’œil unique se plissa. Son verbe acerbe sortit malgré lui.

- Pour vous, les Hyurs, les Miqo'tes paraissent tous jeunes. Je suis plus vieux que j'en ai l'air et c'est parce que je me soucie de ma cadette que je ne peux pas accéder à votre demande, trancha t'il sur la fin.

Jaroud fut pris au dépourvu par la réplique qui mit fin au "bon ton" de la conversation. Sa surprise passée, il reposa son verre sur la table.

- Qui êtes-vous pour elle?
- Je vous l'ai déjà dit: son mentor.

Le Miqo'te ne put s'empêcher de soupirer mentalement à la question.

- Je ne compte pas faire le moindre mal à votre élève si ça peut vous rassurer, monsieur Grenn. Je souhaite juste faire connaissance avec elle.
- Ma réponse reste la même.
- C'est... très regrettable. Peut-être qu'un arrangement monétaire pourrait vous faire changer d'avis?
- Vous insistez beaucoup trop pour avoir simplement envie de faire connaissance... répliqua t'il froidement.
- Je dois admettre que j'ai eu... Comment l'expliquer... Une révélation en la voyant. Facilitez mes recherches et je saurai me montrer reconnaissant, en plus d'être magnanime.
- Je suis quelqu'un qu'on ne peut pas acheter, ça doit vous changer pour une fois, fit Eylion avec un sourire à la fois sarcastique et méprisant.

Le marchand fronça des sourcils à la remarque.

- Dois-je vous rappeler votre position?
- Après le miel, le vinaigre? Très inventif. Nous ne vous avons rien volé, ni cassé à ce que je sache.
- Vous vous êtes introduits dans ma demeure. Vous vous prétendez Arcanistes. Si ça se trouve, il n'en est rien et vous êtes, en réalité, des voleurs.
- Une enquête des Immortels saura prouver, témoins à l'appui, de mon travail. Si vous voulez amener ça devant un tribunal, je suis disposé à me rendre tout de suite aux autorités.

Il y eut un instant de silence où les deux hommes se jaugèrent, en chiens de faïence.

- ... Ou je peux, tout simplement, vous "inviter" ici en attendant que votre élève veuille bien se présenter à ma porte d'elle-même.

Eylion se leva aussitôt.

- Vous n'en avez pas les moyens, dit-il, dédaigneux.

Jaroud fit un geste de main vers le garde qui porta une main à sa linkperle. Le Miqo'te grimaça quand celui-ci appela du renfort. Dans la seconde, le grimoire s'ouvrit entre ses mains dont il tira l'un de ses sorts de prédilection. Le Vent Allié se souleva avec violence, formant un tourbillon qui s'acharna sur les bords de la pièce, épargnant le centre. Il eut pour effet d'éteindre toutes les lumières, plongeant le salon dans une pénombre à la limite de l'obscurité. Les quelques gardes qui arrivèrent parvinrent à résister à la pression qui bloquait l'entrée.
Eylion remercia, pour une fois, son héritage lunaire, son œil parvenant à distinguer ce dont il avait privé les Hyurs. Il en profita pour se précipiter vers la sortie, évitant sans mal les silhouettes maladroites.

- Arrêtez le! intima Jaroud.

Dans la suivante pièce, le Miqo'te parvint à prendre de vitesse les personnes en présence en enchaînant sur le même sort. Alors que le Vent s'employait à faire disparaître les lumières environnantes, deux gardes saisirent chacun de ses bras.

- ...!

Tout en se débattant, ce fut au Feu qu'il fit appel pour repousser ses assaillants. Alors que l'obscurité tombait, des flammes entourèrent ses membres prisonniers, forçant les gardes à le lâcher dans des cris de douleur. Dans le même instant, une sphère noire heurta de plein fouet le torse d'Eylion et le propulsa en arrière. Son dos heurta le sol et glissa. Il comprit rapidement qu'un lanceur de sorts se trouvait quelque part dans la pénombre.

Le dos endolori, il se força à se redresser et à lancer une bourrasque en représailles, vers là où il supposait que son adversaire devait se trouver. Un sort de dissipation le contra sans difficulté. Ce fut là qu'Eylion comprit qu'il n'avait pas affaire à un mage ordinaire. Une autre sphère plongea sur lui, qu'il parvint à esquiver en roulant sur le côté.

- Mer...!

Il retint un juron en se relevant d'un bond. Plusieurs gardes tentèrent de l'agripper mais le Miqo'te agile continua de profiter de leur handicap pour les esquiver. Son objectif était la sortie mais il y avait encore l'Occultiste qui lui bloquait celle-ci.

- Puisque c'est comme ça...

Face à face, les deux mages commencèrent à s'échanger sort offensif sur sort offensif, abîmant le hall parfait de l'entrée. Eylion parvint à expulser son adversaire contre le mur avec une violence peu commune, juste avant que le duel ne tourna court quand une sphère vindicative toucha la main qui tenait le grimoire, le faisant sauter. Le hurlement de douleur d'Eylion résonna alors qu'il se prenait le poignet.

Malgré la souffrance palpable, il se força à courir. Il pouvait encore atteindre l'entrée, grimoire ou non en main. Ironiquement, ses antiques réflexes de voleur lui permirent de voler littéralement à travers les assaillants, esquivant in extremis un sort au passage.

Il se retrouva bientôt à détaler dans les ruelles d'Ul'dah, les poumons en feu, les vêtements roussis, son grimoire perdu mais... libre au moins. Une courte poursuite s'amorça, durant laquelle ses poursuivants manquèrent bien de le saisir à plusieurs reprises. Cependant, là encore, son passé de voleur permit de le sauver au dernier moment.

Dans un sursaut de désespoir, il rejoignit les toits et atteignit un point qu'il avait bien connu, étant enfant. Le "Gouffre". Le toit de la maison atteinte était si haut qu'il surplombait un gouffre de fils à linge. Les gardes sur ses talons, il n'hésita pas.

Il sauta.

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Ennrael
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Re: Eylion Grenn

Message par Ennrael » 29 mars 2018, 17:53

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La Carcasse reprit conscience sous les applaudissements discrets de l'Adulte. Ce dernier le surplombait, son visage hermétique.

- Retour au Point de Départ. On reprend les mêmes et on recommence.

Au milieu de la place du Sanctuaire, l'Adolescent et l'Enfant étaient à leurs postes. Une seule différence était visible: les murs des enceintes avaient doublé en hauteur. L'Adulte mit un genou à terre et se pencha de façon à être face à face avec la Carcasse.

- Tu bois la Culpabilité comme on boirait le Mensonge. Tu n'as rien appris. Tu persistes à courir vers les mêmes Remparts. A combattre des fantômes. T'a t'elle brisé au point que tu trinques avec l'Oubli et que tu t'étouffes avec l'Orgueil? fit-il avec un mépris sévère.

Le rappel de l'échange avec K'rayne était là, vif.

- Je pensais que tout ça était derrière moi.
- Mouais, bah vérifie... La bonne nouvelle pour toi, c'est que maintenant t'as du monde qui t'aidera à régler tout ça. La mauvaise, c'est que t'as pas le choix. L'autre mauvaise, c'est que tu vas devoir apprendre à limiter tes emmerdes. Limite une amende, un jour derrière les barreaux dans un endroit sûr, ça passe encore. Voire des égratignures, un membre cassé... Je suis pas protecteur au point de l'enfermer dans une bulle et j'suis le premier à faire des conneries. Mais même s'ya pas l'air, je mesure les risques.
...
Même si on me défie.


Un rire maniaque, tonitruant éclata. L'Adolescent, assis sur son perchoir, se prenait le ventre tant il riait, un sourire dément à même les lèvres. L'Adulte regarda en arrière en fronçant les sourcils. Quand le fusillé le remarqua, il tâcha de se reprendre, à grande peine, levant une main sans se départir de son expression cynique.

- Quoi? C'est Hilarant! C'est Grandiose, Magnifique! dit-il en repartant dans un fou rire. Ouvrez le Procès, mesdames et messieurs. A la barre, j'appelle l'Enfant!

Un faisceau de lumière mit en valeur l'Enfant, traumatisé. Il sursauta, paniqué et aveuglé.

- Je...
- Quoi, tu crois vraiment que tu as ton mot à dire, le mioche? Ce n'est pas comme ça qu'on te considère?

L'Adolescent descendit, son air à la fois extatique et perfide.

- Rabaissé, Humilié, Écrasé. Regardez moi ces grands Sages à venir nous faire la Morale, siffla t'il d'une colère cynique. A penser qu'Ils nous connaissent. Qu'ils savent QUI nous sommes.

La voix de Nymelia se joignit au cortège.

Je me prends aussi à vous traiter de manière paternaliste.

- Avons nous été toujours aussi Pacifistes? Avons nous déjà dépendu de qui que ce soit? Avons nous déjà laissé le Mépris et la Condescendance franchir nos Portes sans faire payer le Prix? Tout ça, pour quoi? Une prétendue Faute?! Où est l'Amour Propre, la Fierté, la Guerre?!

L'Adulte se releva, terrible.

- Auparavant, nous n'avions rien à perdre. Nous avons été affaiblis. La Douleur hante nos membres. Nous avons besoin de Temps et nous avons besoin que notre Disciple soit bien encadrée.
- Ah, ah, ah... On a toujours quelque chose à perdre. La Douleur? Nous sommes passés par Pire! A côté de tout ce qu'on a dû avaler, cette Fuite était des vacances à Costa Del Sol! Et cette Disciple, quelle blague, c'est juste une faiblesse de plus. Un fardeau. Une Brèche par laquelle ils se permettent tous d'entrer.
- C'était à Nous de décider si nous étions prêts au Changement.
- JE n'étais pas d'accord, vociféra t'il.

L'Enfant tomba à genoux, anéanti.

- Je vous en prie, arrêtez... Arrêtez de vous battre, fit-il au bord des larmes.
- Alors, c'est Ainsi, poursuivit l'Adulte, sévère. Vas tu reprendre Ses paroles? Que Nous ne changerons pas?
- Oh que si, Nous allons changer... Nous allons reprendre les choses en main. Aller égorger ce type. Arrêter la Brèche. Il est Temps de reprendre les Armes. Une vie tranquille, normale? NOUS EN SOMMES INCAPABLES!
- Nous allons reprendre le Contrôle mais nous le ferons selon MES conditions.
- Ah oui, Grand Père? lança l'Adolescent, sarcastique. Et tu feras quoi quand le Couperet tombera?

Il écarta son col et pencha la tête sur le côté dans une mimique exagérée, la démence aux lèvres.

- Tu tendras le cou? Ou tes Attributs peut-être?
- NOUS sommes plus endurants que ça. Qu'importe les Handicaps, les Épreuves, nous avons Survécu. Nous survivrons à celle-ci. Laissons les penser ce qu'ils veulent. Ne perdons pas de vue ce qui est réellement important. Ce qui est réellement en Jeu.

- T'es gosse unique? avait demandé K'rayne.
- Quel rapport?
- Le rapport d'avoir quelqu'un à protéger au péril de sa vie, en faisant aussi tout pour survivre, évitant par-dessus tout de peiner la personne. De faire gaffe à ce que tu dis, comment tu le dis, ce que tu fais, où et quand.

- S'Il savait, l'Imbécile...
- Tu ne changeras pas d'avis...

L'Adolescent sursauta quand un bruit de Chaîne claqua dans les airs. En baissant les yeux sur lui-même, il vit que son cou et ses poignets étaient menottés par de lourdes attaches de métal reliées à des longues Chaînes. L'Adulte avait la main levée vers lui.

- Je suis Désolé. S'il Me faut renier une partie de Nous pour préserver le Reste, je le ferai.
- Aaahh, on en vient à là alors... D'accord, fit l'Adolescent, suave.

Il prit la Chaîne de son cou et la tendit vers l'Adulte avec un sourire peu amène.

- D'accord, je te laisse les rênes pour cette fois mais Gare... que ces Chaînes ne changent pas de prisonnier.
- Non, fit l'Enfant, catastrophé. Non, non, non, non...
- J'ai Hâte de voir quel sera notre Point de Rupture, ricana l'Adolescent.

Les propos de Nymelia revinrent, tels de faibles échos.

- Les apparences jouent en votre défaveur.
- J'ai l'habitude et comme vous le dites, il n'y a pas que ma vie est en jeu.
- Ainsi le jugement d'autrui s'applique à un enfant irritable et insolent. Niant votre nature propre.
...
Ce n'est pas que vous êtes susceptible... c'est que cela vous semble injuste.


Un Chant s'éleva alors dans les airs, imposant le Silence au sein du Sanctuaire. Horrifiés, l'Adulte, l'Adolescent et l'Enfant s'enfuirent, laissant la Carcasse à lui-même. La voix féminine, éthérée, se rapprocha.
Il se plaça sur le dos de façon à regarder la source du Chant. L'Horreur ne tarda pas à le gagner à son tour quand des souliers blancs s'approchèrent de lui. Une robe aussi immaculée accompagnait les pas légers. Des lèvres roses continuaient à sortir les paroles aériennes. Elle arriva près de lui et lui prit les joues, ravie.

- Même si tu étais sens dessus-dessous,
Je serais à tes côtés,
Et même si ton monde était une chose étrange,
Je serais à tes côtés.
J'irai là où tu iras, je serai partout où tu vas,
Tu auras toujours ta place dans ma maison,
Alors reviens, je t'en prie, reviens,
Mon Cher, mon Tendre, mon Doux
Écorché...

- Non...

Un rire cristallin lui répondit et elle déposa un baiser gracile sur son front. Il fut pris d'une nausée soudaine alors que le Réveil l'arrachait à ses délires. Il se redressa sur son lit, couvert de sueurs froides. Il plaqua une main à son cache-oeil, haletant.

Je ne sais pas pour combien de temps j'en ai...

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