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par Arkel Luhtnen » 21 janv. 2018, 18:58
Un soldat Garlemaldais vint dans la salle du trône, au cœur du château de Doma. Le petit fils de l'empereur et Général de la 12eme légion impériale Zenos Yae Galvus discutait avec ses officiers. C'était un Garlemaldais pur, avec son troisième œil sur le front et à la stature impressionnante. Il avait pourtant une voix douce et de longs cheveux blonds. Il lança un regard au garde qui se dépêcha de lui présenter ses respects et de lui donner la nouvelle.
-Mon seigneur, nous avons interrogés la plupart des rebelles qui s'étaient infiltrés dans le château. Il ne reste plus que ce demi-lupin étrange.
Yotsuyu fut traversée par un doute quand elle entendit cette expression. Elle connaissait bien un certain « demi-lupin ». Il s'agit en fait d'un Miqo'te qui avait grandit dans la région. Mais la plupart des soldats d'origine Domienne n'avaient pas forcément vu beaucoup de personnes de cette origine. Elle se rappelait par ailleurs leur première rencontre alors qu'ils étaient de jeunes adolescents. Elle ne savait pas ce qu'il était et elle l'avait appellé « Demi-Lupin ». Les Lupins étaient une race d'humains bipèdes au corps recouvert de pelage et à tête de loup. Ils étaient assez peu appréciés en général. Et dans cette société, si une personne était à la fois Lupine et Hyur, vous pouvez facilement imaginer le scandale. C'était en effet ce que j'avais vécu durant mon enfance. On me prenait pour un demi-lupin, à ma place nulle part, sauf dans ma famille qui m'avait adopté et accepté.
Yotsuyu coupa le garde.
-Je vais me charger de l'interrogatoire personnellement.
Zenos sourit, satisfait de la fougue nouvelle de son informatrice qu'il avait récemment nommé Vice-Gouverneure.
-Très bien, je le laisse à vos soins. Ensuite vous pourrez les exécuter une fois que vous vous serez lassée d'eux.
J'étais dans une cellule avec un minimum d'éclairage. Le sol était dur, parfois recouvert de paille. J'étais attaché au mur par une chaîne qui m'entourait les bras. J'étais à genoux, juste habillé de mon pantalon blanc. La porte s'ouvrit et un visage familier ordonna qu'on nous laisse seuls. Les gardes s'éloignèrent. Je la regardais. C'était une grande femme brune, aux longs cheveux lisses. Elle était vêtue d'un kimono rouge et noir. Sur sa chevelure trônait une fleur blanche. Son regard gris se posait sur moi. Je la sentais qui essayait de maintenir une illusion d'assurance. D'habitude elle n'essayait pas de me mentir... enfin le croyais-je.
-Yotsuyu ?! Qu'est ce que tu fais ici ?
-J'allais te poser la même question mon vieil ami.
Je ne ressentis aucune rancune dans ces mots. Cela me rassura un peu. Car oui, nous nous connaissions depuis l'enfance. Elle continua.
-Il n'y a qu'une personne que l'on traite de demi-lupin. J'aurais vraiment espéré que tu te tiendrais à l'écart de tout ça. Pourquoi t'es tu mêlé de tout cela ?
J'étais encore sous le choc de la surprise.
-Mais... Et toi ? Que fais tu là ?
-Shun, si tu veux avoir une chance de survivre je te conseille de me répondre rapidement !
Sa voix avait changé. Son conseil sonnait comme un ordre. Je n'étais plus vraiment rassuré à ce moment.
-Yotsu... J'ai ...Fait ce qu'il me semblait juste.
-Mais qu'est ce que tu foutais avec eux ?! Tous ces ratés, ces faibles ! Tu vaux tellement mieux !
-Je … ne comprends pas.
-Tu m'as trahis toi aussi ? Vous étiez venus pour attaquer les officiers impériaux. Tu allais me tuer ? Me battre comme les autres ?!
-Yotsu, qu'est ce que tu racontes ?
-Ce n'était pas votre mission ?
Elle était au courant... Des gens avaient été au courant et avaient divulgués ces informations. Etait-ce elle ? Je ne voulais le croire.
-Yotsu qu'est ce que tu as fait ?! Ce n'est pas toi qui ?
-Qui quoi ? Tu oses me juger ?!
Elle s'était mise à crier et elle enchaîna.
-Tu oses ? Toi !
Elle se retourna d'un geste vif, un couteau à la main. Sous le coup de la colère, et surement aussi de la surprise de me voir ici, elle avait craqué. Je n'avais pas eu le temps de comprendre ce qu'elle avait vraiment ait à l'instant. Puis, tandis qu'elle me tournait le dos, je voyais la lame dans sa main, le bout couvert de sang, une chaleur naissante sur ma joue, puis autour de mon œil qui s'obscurcit. Et enfin la douleur. Le couteau m'avait coupé du front jusqu'à la joue, de haut en bas, frôlant mon œil droit.
Je ne disais rien, encore sous le choc. Elle se retourna, contempla son œuvre et son regard qui semblait être mû par une haine nouvelle s'agita tout à coup. Elle s'en voulait. Ce sentiment de doute ne lui plaisait pas du tout.
-Yotsu...
Elle s'agenouilla près de moi et posa son front contre le mien. On se mit à chuchoter.
-Pourquoi en sommes nous là ? Qu'est ce qui a raté entre nous ?
-Dis moi, Yostu, qu'est ce qu'il s'est passé ?
-Tu étais le seul au courant... Le seul qui ne m'a jamais jugé. Pourquoi les défends-tu ?
-Parce que tout le monde souffre. Je ne voulais pas laisser faire.
-Mais tu veux sauver une société pourrie à la racine. Ils t'ont toujours jugé comme moi, tu n'as jamais rien valu à leurs yeux et aujourd'hui tu les sers comme un chien soumis.
Elle savait trouver les mots. Je pris quelques secondes avant de répondre après une grimace.
-L'Empire n'a rien arrangé. Ils sont de pire en pire. Je peux comprendre que ça soit insupportable pour les Domiens.
-Ces chiens ont la mémoire courte. Tu sais très bien ce qu'ils m'ont fait.
-Je sais. Et je t'ai toujours soutenue. Mais rien ne pourra s'arranger tant que l'Empire est ici.
-Pour eux non, mais moi... La seule chose que je t'ai caché, c'est qu'ils m'ont recruté comme informatrice. Ils sont beaux vos seigneurs à venir dans des bordels et à avoir la langue bien pendue. Ils vivent dans un château, sont soumis aux impériaux mais profitent des femmes de leur peuple sans le moindre respect. Ils me dégoûtent. L'empire m'a payé, pour mes talents. Pour la première fois de ma vie on m'a enfin reconnu des talents, on avait besoin de moi et on le reconnaissait. J'avais de la valeur.
Je baissais les yeux. J'avais envie de la serrer dans mes bras. Mon visage se frottait alors contre le sien, j'essayais d'éviter de lui mettre du sang partout. Elle avait toujours eu de la valeur pour moi. Mais je comprenais que c'était différent.
-Je... comprends... Mais... Non excuse moi. Je n'ai rien à dire. C'était ta manière de t'en sortir. Oui je sais très bien ce que tu as vécu. Tes parents, ton mari et après. Tu as toujours été une battante. Une volonté si puissante que rien ne pourra jamais te terrasser.
-Toi tu as eu de la chance. La famille qui t'a adopté était... la famille que j'ai toujours rêvé d'avoir. Vous habitez dans un coin reculé. Vous n’avez jamais trop eu à subir les choses. Tu avais un cocon où te réfugier quand ça n'allait pas. Mais tu as vécu le racisme des miens. Leur société basée sur l'honneur et la soumission des femmes t'a toujours rejeté.
-Mon passé est ailleurs je le sais mais j'ai grandi avec vous. J'aime cette région, et des gens qui semblent vouloir faire changer les choses. J'ai envie de les croire. Je ne te demande pas d'y croire aussi. Personne n'a jamais bougé le petit doigt pour toi, je le sais bien. Mais ne crois pas que j'accepterai que les choses ne changent pas pour toi également.
-Shun, il est vrai que beaucoup de choses auraient pu être différentes. Si tu avais vécu en ville, on se serait vu plus souvent et... Tout aurait sûrement été différent.
On se regardait... Le non dit qui nous avait poursuivi depuis des années était toujours là. Elle baissa les yeux et rapprocha ses lèvres des miennes. Elles se frôlèrent et se quittèrent aussitôt.
-Yotsuyu...
-Même si... j'apprécie certaines personnes, tu ne pourras pas m'empêcher de leur en vouloir pour tout. Je ne reculerai plus. Je les ai vu ramper devant moi, j'ai vu leur véritable visage. Je ne pourrai rien oublier.
Je ne savais quoi répondre. Je la comprenais. J'étais triste, j'avais mal. Je tentais de lui offrir un sourire. C'était assez compliqué avec la douleur. Yostuyu se redressa.
-Shun, je vais faire en sorte que tu ne sois pas inquiété mais fais profil bas désormais. L'Empire a gagné. Restez loin de tout ça désormais. Si tu peux, je te souhaite de trouver ta vraie place ailleurs. Mais ne fais plus de folie. Ce monde ne les permet pas.
Elle s'en alla.
Le temps s'écoula sans que je sois capable d'en donner une estimation. J'avais de plus en plus mal , j'étais toujours dans cette position inconfortable. J'ignorais comment elle allait me sortir de là. Et j'avais peur pour mes camarades qui n'auraient certainement pas cette chance. Je repensais à ma famille qui m'avait toujours offert un véritable nid douillet. Oui, dans mon village on avait appris à m'accepter. Grand-mère s'occupait d'une très ancien temple sacré. Ils la respectaient assez pour suivre ses décisions sans les juger. Quelques documents avaient aussi pu montrer que j'étais un miqo'te, une race humaine de l'ouest. J' avais finalement beaucoup moins à me plaindre que Yotsuyu. Je ne pouvais pas la juger.
La porte s'ouvrit et je vis le visage au sourire inquiet de ma petite sœur. Là ce fut moi qui devint très inquiet. Mitsuha avait 6 ans de moins. Elle était d'une taille moyenne pour une Ao'ra, donc bien plus petite que moi. Ses cheveux bruns étaient toujours attachés par des tresses de tissus. Elle possédait des oreilles cornes qui partaient vers l'arrière de son crâne. Enfin, elle avait un regard si expressif, marron et brillant. Elle était suivie par des Ninjas ainsi que les autres prisonniers. Ils me libérèrent et sans attendre.
Nous revoilà au grand bateau. Je suis faible, allongé sur une couchette. Mitsuha me serre fort.
-Tu dois partir pour Eorzéa avec les autres. Tu as été attrapé, ils savent que tu es un des rebelles. Je ne veux plus que tu sois attrapé.
Elle était sur le point de pleurer. Elle avait du avoir si peur. Je l'enlaçais doucement. On m'avait fait un bandage sur mon œil blessé.
-Et toi ? Et grand mère ? Je ne peux pas vous laisser.
-On dira qu'on ignorait tout. Il n'y a rien chez nous qui pourrait nous accuser. Et tu es parti.
-Mais l'empire...
-On sait se défendre, et au pire on pourra déménager. Toi tu n'es pas en état de discuter. Tu fuis avec les survivants. Te savoir vivant, ailleurs ce sera un grand réconfort.
-Mitsuha...
-Au fait... c'est vrai ? Pour Yotsuyu ?
Je n'avais pas le cœur à répondre. Je fis juste un signe de la tête, affirmant ses peurs. On ne dit rien de plus à ce sujet.
Je la serrais fort. Nous allions lever l'ancre. J'allais la quitter. Nous pleurions ensemble mais elle fit mine d'être forte. Elle s'arracha à mes bras et sauta à terre. Le bateau s'éloigna lentement. Nous avions réussi à fuir. Beaucoup avaient laissé une partie de leur vie ici. Moi, les personnes que j'aimais le plus au monde. Nous avions tous peur pour ceux qui restaient à Doma mais c'était leur choix. Sans la moindre assurance pour l'avenir, nos chemins se séparaient dans la douleur.