Bobo, c’est le nom qu’elle m’a donné. C’est ce que les humains disent quand ils ont mal. Elle a mal lorsqu’elle vient me voir. Elle me parle. Elle me dit qu’elle a mal. Elle me dit qu’elle a peur. Elle me dit des choses qui me dépassent. Les oiseaux et les animaux se rassemblent autour d’elle. Certains humains sont comme ça. Je comprends les autres animaux. Les humains sont différents en eux. Mais certains nous ressemblent à l’intérieur. Elle a de nous en elle. Nous sentons ces choses là.
Les enfants humains ont peur quand ils voient de grands goobbues. Elle n’a pas eu peur en me voyant. Elle nous voit souvent traverser les plaines. Les humains disent Noscea. Quand je l’ai vue, elle avait beaucoup d’animaux autour d’elle. Des moutons. Des dizaines. J’avais faim. Un mouton ou deux. Elle a agité son bâton. Un cure-dent. Pas eu peur. Elle est rentrée dans ces choses où dorment les humains. Elle a parlé avec une autre humaine. Plus grande. L’autre humaine est assise. Elle fait quelque chose avec le poil des moutons. Elle prend le poil d’un côté de la chaise, elle laisse tomber un long fil de l’autre côté. L’enfant humaine est revenue. Elle m’a donné un cuissot et m’a dit «part». Je suis parti.
Quand je l’ai revue elle saignait un mouton. Pourquoi protéger puis tuer ? Elle m’a vu. Elle a agité une chose brillante avec du sang. Les humains sont étranges. Ils protègent les moutons pour mieux les tuer. Je n’ai pas bougé. Elle a soupiré et elle a dit : «T’es un drôle d’animal toi». Je l’ai regardé. Les soleils et les lunes ont tourné. Je la regardais. Toute la journée elle restait au milieu des moutons. Parfois elle en tuait un. Parfois elle leur enlevait leurs poils. Parfois elle faisait sortir un petit de sa mère. Parfois elle parlait à deux autres humains, un mâle et une femelle. Plus grands. Parfois elle me parlait. Elle a dit : «Pourquoi tu restes là ?». Elle a dit : «Tu peux attendre autant que tu veux, tu n’auras aucune bête !».
Les soleils et les lunes ont tourné. Elle a dit : «Tu vas mourir si tu restes comme ça…». Elle m’a donné à manger. Elle m’a tapé avec son bâton. Trop petit. Pas mal. Elle a dit. «Allez va t’en !». Elle a tapé sa patte contre moi. Elle a crié : «Ouille ! Bobo ! Bobo !». Elle a soupiré et elle a dit : «T’es pas possible toi…». Elle a souri. Elle est partie là où dorment les humains. Je suis parti.
Quand je l’ai revue elle a dit : «Encore toi ? Décidemment t’es un drôle de goobbue…». Elle m’a donné à manger. Elle a soupiré et elle a dit : «Papa m’a ramené un livre de la ville. Ça parle d’un petit chien qui cherche un ami… Tu cherches un ami toi aussi ?». Papa doit être le mâle humain. Parfois il part et il ne revient pas avant que le soleil et la lune aient tourné de nombreuses fois. Elle a dit : «Si tu ne touches pas à nos moutons, on peut devenir amis. Mais j’en ai jamais eu, alors on apprendra ensemble.» Elle a souri, et elle m’a appelé Bobo..