[Background] La lance céleste

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Khorijin Dotharl
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[Background] La lance céleste

Message par Khorijin Dotharl » 26 juin 2017, 21:18

/!\ Attention, ce texte peut contenir des spoilers si vous n'avez pas terminé les quêtes dans la Steppe d'Azim /!\
Renaissance


Dans les Steppes d'Azim au Nord du continent d'Othard, les légendes et les mythes forgèrent cycle après cycle les traditions et les cultures du peuple Aora maître de ces terres   ; les Xaela. Une étendue sauvage et vaste qu'ils chérissent et qu'ils respectent, vivant avec la nature qui les entoure sous le regard de leurs divinités variables d'un groupe à l'autre.

Dans la cinquantaine de tribus vivant sur ces terres aussi riches que dangereuses, les Dotharls sont considérés parmi les meilleurs guerriers de la Steppe, de redoutables adversaires d'une violence inouïe ne vivant que pour le frisson du combat et ignorant la peur de la mort, une valeur apprise depuis leur plus jeune âge tout comme le maniement des armes.

On murmure parmi eux une légende d’autrefois, qu'il y a de cela plusieurs lunes, deux guerriers s'étaient démarqués des autres Dotharls de la tribu aux yeux de leur Khan, combattant sans retenue et faisant régner le chaos pendant les affrontements dans un bain de sang. Leur puissant amour l'un pour l'autre n'avait d'égal que leur férocité bestiale au combat, comme deux âmes jumelles, les deux amants avaient développé leurs arts du combat dans une harmonie presque parfaite, accordant leurs mouvements et leurs attaques dans des enchaînements et des frappes d'une efficacité dévastatrice.

Ils étaient Jaghatai et Khorijin, les Amants du Crépuscule.


Dans la même année, les Dotharls entreprirent d'éliminer les prétendants au Naadam afin de s'assurer leur victoire, entraînant de nombreuses confrontations avec les autres tribus aux quatre coins de la Steppe.
Aux cotés de leurs frères et sœurs, les deux guerriers éliminèrent sans retenue ni remords ceux qui s'opposaient à la victoire de leur tribu. Lance et Hache tranchant, brisant, perçant, tuant, jusqu'au dernier souffle de vie dans un balais mortel aux cotés des leurs.

Les Dotharls ne repartaient que quand il ne restait plus qu'une mare de sang que la Steppe buvait et que les cadavres aussi nombreux chez eux que chez leurs ennemis nourrissaient le cycle éternel de leur terre natale.

Toutefois, il y eu un affrontement à l'issue différente des autres alors qu'ils tentaient de se frayer une route sure vers la victoire à grand coup de massacre et que leur nombre s'était amoindri au fil des combats. Interceptant le convoi de déplacement des Oronirs, leurs plus féroces adversaires, les Dotharls s'attaquèrent à la tribu toute entière, bien décidés à en réduire le nombre.

Mais si les Dotharls faisaient bien partie des plus grands combattants de la Steppe, les Oronirs n'étaient pas en reste. En sous nombre, les Xaela sous la bannière bleue tombèrent plus rapidement que leurs adversaires qu'ils avaient provoqués.

Voyant leur Khan en difficulté face aux guerriers Oronir, les Amants du Crépuscule se jetèrent à corps perdu dans la bataille, blessés et à bout de souffle, contre un ennemi aussi ardent aux combats que la plupart d'entre eux.
Les armes s'entrechoquaient dans un crissement de métal sous la lueur de l'astre nocturne et le sang perlait sur leurs peaux sombres recouvertes d'écailles.

On dit que pendant quelques instants, le couple combattit le Khan adverse avec tant d’ardeur que l'issue du combat fut incertaine, alors qu'elle semblait largement pencher en faveur des enfants d'Azim. Se défendant comme un tigre, le Khan des Oronir peinait à tenir tête à la Lance et à la Hache parfaitement orchestrées et synchronisées, jusqu'à que sa propre arme trouve une faille et y enfonce sa lame.

Jaghatai tomba le premier, mortellement touché son corps, chut lourdement dans l'herbe et la terre, ses mains ne parvenant plus à tenir son arme et ses jambes ne pouvant plus le porter.

Hurlant de douleur, Khorijin déchaîna ses coups sur le bourreau, frappant brutalement et sauvagement de sa lance sans la moindre retenue, mais aveuglée par sa haine et son chagrin, le corps de la Xaela ne tarda pas à rejoindre celui de son amant parmi les cadavres sur le sol.

Ce qui restait des Dotharl se retirèrent loin du combat à la vue de leurs deux champions déchus, sauvegardant leur Khan et les guerriers encore vivants qui avaient survécu à l'attaque.
L'on raconte que pendant leurs derniers instants, usant de leurs dernière forces, les Amants tournèrent l'un vers l’autre leurs regards dans un dernier échange sous la voûte céleste, suppliant Nhaama de les ramener ensemble dans leurs prochaines vies. Leurs âmes quittèrent alors leurs enveloppe de chair, et comme dans leurs précédentes vies, les deux Xaelas étaient destinés à mourir et renaître ensemble.


C'est ainsi que dans l'année qui suivit, lors d'une nuit des plus glaciales, deux enfants naquirent à quelques heures d’intervalle et de deux mère différentes. Survivant à la nuit mordante qui avait emporté le jeune bétail, leur Khan plongea ses yeux dans les leurs pour sonder leurs âmes et découvrir quel guerriers étaient revenus parmi eux.

Jaghatai et Khorjin, les Amants du Crépuscule étaient revenus parmi les leurs. Assez braves pour renaître, ils s'étaient réincarnés et devraient être plus prudents que dans leur précédente vie.
Cette nuit là, la tribu célébra leur réincarnation et les retrouvailles avec les leurs sous la grande yourte. Les deux nouveaux nés furent précieusement enroulé dans des couvertures en laine de mammouth alors que les uns et les autres partagèrent l'airag et la viande cuisinée, chassée un peu plus tôt dans la journée sur la mélodie douce d'un Morin Khuur.

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Khorijin Dotharl
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Re: [Background] La lance céleste

Message par Khorijin Dotharl » 03 juil. 2017, 23:40

Cette nouvelle vie



La pointe d'acier arriva à une allure folle vers le visage de Jaghatai avant de terminer sa course dans la poussière. L'arme se planta net dans le sol meuble, la hampe de bois vibrant quelques secondes avant de s’arrêter. Plus loin, se tenait sa propriétaire, droite et fière, les yeux fixés sur son adversaire et les poings serrés. Elle se rua vers le guerrier, se laissant glisser dans le sable dans un dérapage, évitant le coup de hache qui fusait à la verticale.
Le Xaela la dépassant d'au moins deux têtes se retourna vivement, barrant la fuite de la vive lancière d'un bras armuré, la forçant à revoir les options qui lui permettrait de récupérer son arme. Agile comme un serpent, elle tourna son regard azur vers son camarade d’entraînement, le gratifiant d'un sourire à la fois complice et d'une arrogance agaçante, basculant par dessus son bras pour exécuter une roulade et séparer la distance entre elle et sa lance qu'elle récupéra d'un geste leste.

Jaghatai lui rendit un regard de défi mélangé à l'amusement du combat mené, pivotant en même temps que la lourde tête de sa hache, la lançant à la rencontre de la lancière qui esquiva une nouvelle fois d'un bond agile, propulsée par l'élan que lui donna sa lance plantée dans le sable ardent des Steppes.
Ils échangèrent un autre regard, reprenant leur souffle durant quelques secondes de battement alors qu'ils se jaugeaient, chargeant de nouveau l'un vers l'autre pour continuer l’entraînement, encore et encore, des heures durant, jusqu'à que leurs corps ne puissent plus les porter et que leur poumons brûlent sous chaque inspiration.

Pas encore adultes, les deux Xaela étaient pourtant déjà coutumier des entraînements régulier et intenses. Dès le plus jeune âge, les Dotharls étaient rompu au maniement des armes ou aux arcanes, apprenant à exceller dans leurs domaines sous le regard vigilant des autres membres de la tribu, les poussant à s'améliorer et à devenir plus fort de jour en jour.
Si Jaghatai était expert des combats à la hache dans son ancienne vie, Khorijin elle avait manié la lance dans ses autres réincarnations.

A dire vrai, elle n'avait pas le moindre souvenir de son dernier combat, celui qui l'a sépara de Jaghatai et des siens. Mais elle connaissait par cœur les récits de ses aînés sur sa vie passée. De longues soirées sous les yourtes à se remémorer l'avant comme une vielle légende, les deux Xaelas écoutaient avec la plus grande attention leurs anciens exploits, buvant leurs paroles, s'imaginant chaque scène des combats qu'ils avaient menés et la façon dont ils les avaient emportés. Leurs forces, leurs caractères, mais aussi leurs erreurs et leurs faiblesses, celles qu'ils ne devaient pas répéter dans cette nouvelle vie et qui les rendrait plus forts encore.

La jeune Xaela peinait davantage à saisir le lien qui la liait à Jaghatai. On lui avait parlé d'eux comme des âmes jumelles qui ne pouvaient vivre l'une sans l'autre, destinés à vivre et mourir ensemble dans leurs anciennes vies comme dans les prochaines. Si elle avait grandi avec lui depuis son plus jeune âge et qu'elle lui portait une grande affection, elle ne saisissait pas encore les subtilités des sentiments les plus forts.
Le temps lui laisserai le découvrir et la jeune Xaela ne manquait pas de répondant dès lors que l'on venait à défier son ami.

Khadagh Dotharl, un autre Xaela de leur âge était née deux années avant leur retour dans la tribu. Ardent comme le soleil et fougueux comme un tigre, il n'avait de cesse de provoquer des confrontations avec les autres guerriers de la tribu, donnant aux entraînements amicaux une dimension plus risquée. On l'appelait autrefois le Brasier d'Azim, belliqueux et fier il entretenait avec Jaghatai une relation compétitive qui n'avait de cesse d'augmenter en violence avec les années.
L'amitié d'enfance se muant en une féroce rivalité avec le temps et les années. Khorijin s'était alors plusieurs fois interposée, repoussant Khadagh de sa lance, surpassant et courrouçant le guerrier qui parvenait pourtant systématiquement à mettre Jaghatai au sol.

Les interventions de la jeune lancière ne faisaient qu'augmenter la frustration de Khadagh et alimentait le feu de la rivalité qui l'opposait à Jaghatai. Si ces confrontations n'étaient pas du goût de tous dans la tribu, les Dotharls savaient aussi que dans ses autres vies, Khadagh n’était pas bien différent. Têtu et arrogant, il aimait se mesurer aux autres pour asseoir sa force et sa puissance. Bien qu'il respectait la place du Khan, il était parfois tenté de se mesurer aux autres par pure fierté. Mais au delà de cela, il s'était démarqué dans ses autres vies par son indéniable maîtrise de la hache et une efficacité lors des combats qui fit pencher la balance pour la victoire plusieurs fois.
On tolérait alors ces querelles de jeunes Xaelas, permettant sans doute à l'un comme l'autre de s'améliorer et de retrouver leur forces du passées.

Khorijin venait ensuite relever son ami alors que Khadagh bouillonnait encore, ravalant durement sa fierté devant sa défaite. Elle décelait chez Jaghatai dans ces moments une ombre dans son regard, une honte qu'il peinait à dissimuler, même à elle.

Les plus âgés de la tribu de répétaient souvent qu'il fallait du temps et beaucoup d’entraînement pour retrouver les capacités de leurs anciennes vies. C’était un long chemin difficile et parfois douloureux que chaque jeune de la tribu devait affronter lorsqu'ils revenaient. Les aînés étaient là pour les guider et veiller sur eux jusqu'à qu'ils trouvent leur place.

Khorijin répétait alors ces même paroles que les aînés, essayant d'encourager son âme sœur à continuer les entraînements. Il était calme, d'une force tranquille comme un blizzard des saisons froides, les provocations de Khadagh n'avaient pas d'effet sur lui, mais le métal mordant de sa hache lui, n'en avait cure. Il devait gagner en force et évoluer, ou il resterait faible et à la merci des plus forts.

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Khorijin Dotharl
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Abandon

Message par Khorijin Dotharl » 10 juil. 2017, 18:07

Abandon


En âge de participer aux chasses et aux assauts depuis quelques années, Khorijin et Jaghatai étaient à présent assez forts pour chevaucher la Steppe avec un petit groupe vers les affrontements que menait la tribu. Intrépide, la Xaela aux cheveux immaculés galopait en tête du petit groupe envoyé en reconnaissance, s'accroupissant sur le dos de son cheval, elle cherchait l'équilibre au galop, tenant d'une main la crinière et de l'autre sa lance, comme déjà prête à bondir et à se battre.
Jaghatai, lui, chevauchait un peu plus en retrait dans une posture plus confortable pour les longues chevauchée, son tempérament n'avait pas changé avec les années, calme et froid comme le pic de glace qui surplombait la Steppe, une force tranquille.

La Xaela appréciait l'air frais des montagnes d'Azim, en cette année, la tribu s'y était déplacée. On lui avait dit que c’était ici qu'ils étaient revenus, lors d'une nuit glaciale qui les avait vu renaître parmi les Dotharl et que le froid les avait bercés au lieu de les emporter.
Khorijin lança un regard par dessus son épaule, roulant des yeux en apercevant le sourire idiot de Khadagh, puis fronçant ses sourcils en posant ses yeux sur Jaghatai.

La Xaela avait intensifié les entraînements avec son compagnon depuis quelques temps, ne lui laissant que de rares moments de répit. Alors que son propre style était devenu à la hauteur de son ancienne vie, celui de Jaghatai semblait stagner et traîner derrière la vive Xaela.
Refusant de le laisser à un niveau médiocre et malgré toute l'affection qu'elle lui portait, Khorijin acculait son compagnon de reproches puis d’entraînements forcés, le harcelant continuellement de sa lance pour qu'il s'améliore, mais en vain.
Si il était endurant et capable de tenir de longs affrontements, Jaghatai n'avait littéralement aucun répondant: Trop lent pour riposter ou créer ses opportunités de contre attaque, les adversaires plus rapides que lui ou simplement plus compétents le battaient toujours à l'usure tandis qu'il paraît leurs attaques, ou accusait le coup de parades ou d'esquives sans parvenir à faire mouche, Khadagh en profitant pour railler de toute son arrogance l'acharnement inutile de la Xaela et la faiblesse évidente de son compagnon. Elle ne tardait pas à répondre d'un coup de lance menaçant, mais la honte et la faiblesse ne se chassaient pas aussi facilement.

Plus que de la honte, elle était rongée par diverses sensations contraires. A la fois éprise d'un attachement puissant pour son compagnon avec qui elle avait grandi et passé toute ses vies jusqu'à la mort, mais également de la crainte que ce dernier ne soit trop faible pour s'en sortir seul.
Si il mourrait misérablement, elle mourrait tout aussi misérablement. Et alors, l'un comme l'autre ne pourraient de nouveau renaître sans avoir pu resplendir sur le champ de bataille. Ils ne seraient plus digne alors d'être des Dotharls et leurs âmes seraient perdues.

Khorijin capta du regard la petite pierre noire et lisse accroché au cou de son aimé. Elle lui avait offert en présent après le dernier affrontement avec une tribu rivale dont ils n'avaient laissé que les cadavres mutilés au milieu de la Steppe. Elle avait trouvé la petite amulette sur l'un des corps qu'elle avait mis à terre et l'avait offert comme présent à Jaghatai, comme pour partager sa victoire avec lui, qui avait lutté et peiné avec moins d'ennemis que sa compagne. Elle espérait que le présent lui inspire la force qui l'animait, elle. Il ne devait pas tomber, pas avant d'avoir pu atteindre de nouveau cette force qui le caractérisait tant dans son autre vie.
Il était un grand guerrier parmi les Dotharls avec elle à ses cotés, si elle était exigeante avec lui, ce n’était que pour s'assurer qu'il soit assez brave au combat.

Elle fini par remonter lentement ses yeux d'azur vers les siens, échangeant un regard silencieux avec lui, avant de fixer de nouveau l'étendue blanche qui défilait devant elle.

Il fallait trouver un endroit propice à l’installation d'un camp,un premier groupe était parti vers le Nord Est et eux se dirigeaient vers le Nord, plus haut dans les montagnes.
Aucune tribu ni bête n'avaient encore croisé leurs routes, mais ils savaient ceux qui étaient susceptible d'établir leurs camps dans les environs. Le pas des chevaux se ralentit alors qu'ils s'approchèrent d'un passage étroit entre les montagnes, long de quelques yalms.
C'était l'idéal pour une embuscade, Mais si les lieux étaient aussi bien gardé, les richesses qu'ils pourraient trouver serait un trésor pour la tribu en cette période de l'année.

Khorijin eut un bref moment d'hésitation avant de lever sa lance, intimant ses quatre autres compagnons à avancer dans le passage. Et quand ils furent tous engagé dans le défilé, une première salve de flèches visa leurs montures,épargnant par chances les cavaliers Dotharls mais affolant et blessant certains de leurs chevaux.
Le regard de la lancière se tourna rapidement vers la fin du défilé, à quelques foulées au galop devant eux, elle brisa la hampe de flèche sur la croupe de son cheval affolé, lui tapotant sur l'encolure avant de le lancer au galop droit dans le passage. Suivie par les autres cavaliers, les archers tentèrent d’empêcher l'assaut droit sur eux sans succès.
Le petit groupe de Dotharls passa le défilé, se retrouvant nez à nez avec un autre groupe de Xaela à la peau brune, halée par le soleil, brandissant leurs armes pour se défendre.

En sous nombre, les Dotharl engagèrent l'escarmouche. Khorijin pointa sa lance vers un homme tenant une hache pendant que les sabots de son cheval martelaient la pierre des montagnes. D'un geste, son poing refermé sur le crin tira vers la droite, forçant son cheval à serrer la paroi rocheuse et piégeant dans le procédé l'un des Xaela entre sa monture et la montagne, avant qu'il ne puisse tenter de s'extirper du piège anticipé par la cavalière, la lance de la Dotharl le percuta au torse de plein fouet. Basculant lourdement sous le choc, sa chute entraîna avec lui la lancière, accrochée à la hampe de son arme et perdant sa monture qui continua sa lancée un peu plus loin.
Se redressant sans lâcher prise, la Xaela termina d'enfoncer sa lance sur sa victime jusqu'à qu'elle ne bouge plus, au son de son agonie se mêlait le combat qui se déroulait derrière elle.

Elle aperçut d'un œil les silhouettes des siens se battre férocement contre les éclaireurs des montagnes. Deux étaient déjà au sol en ajoutant sa propre victime mais ils restaient encore en sous nombre et ne devaient pas relâcher leur attention si ils voulaient finir victorieux. Elle se redressa avec sa lance en main, chargeant vers une nouvelle cible qu'elle prit à revers, enfonçant la pointe de métal dans un mollet qui fit automatiquement plier un genou à son adversaire. Voyant à présent par dessus l'épaule de sa victime, Khorijin aperçut Jaghatai en mauvaise posture, concentré mais blessé.
Trois Xaela à la peau d'ambre l'entouraient alors qu'il avait posé un genou à terre, sa hache tenue à deux mains en travers de ses ennemis, une blessure souillait ses cheveux blancs et son manteau de peau tandis qu'il peinait à contrecarrer les attaques des trois adversaires et ne tentait même pas d'en abattre un quand l'occasion se présentait.

Le temps autour d'elle sembla se ralentir et se figer alors que ses yeux écarquillés fixaient la scène qui se déroulait devant elle. Ses mains crispées sur sa lance, elle en oublia l'homme dont elle avait empalé la jambe au bout de son arme, toute son attention tournée vers le Xaela qui brandissait sa hache au dessus de Jaghatai pour l'abattre vers sa tête.
Le regard de son compagnon trahissait la crainte, absent de cette fureur combative qui anime les Dotharls. Le souffle de la Xaela se coupa, son cœur bondissant dans sa poitrine comme si il allait s'y arracher.

Mourir ainsi, impuissant, comme le bétail que l'ont abat pour nourrir la tribu. Jamais il ne retrouverait les siens, son âme se perdrait et il serait oublié, loin d'elle et des Dotharl à jamais.
Et elle ? Reviendrait elle si son âme sœur mourrait ainsi ? Serait elle aussi destinée à disparaître et mourir sans bravoure ?

Elle ne parvint pas à savoir quel fut le sentiment le plus fort qui la sortit alors de sa paralysie. La peur de l'abandon, celle de l'oubli, la honte, la colère ?
Elle sentit son sang bouillir en elle, retirant vivement sa lance des chairs de son ennemi, envoyant la hampe heurter brutalement le visage du Xaela qui brandissait un poignard vers elle en réponse à son attaque. Se redressant d'un geste, elle arma son bras et lança son arme droit vers le bourreau qui approchait sa hache de Jaghatai, la lance venant rencontrer son thorax alors qu'il basculait en arrière sous l'impact brutal.
Un coup de genoux rappela à l'homme à ses pieds qu'elle avait encore le dessus, lui arrachant sa dague alors qu'il était encore hébété par le choc et l'enfonçant droit dans son buste.Dérapant dans la neige pour se lancer à l'assaut du dernier éclaireur, elle croisa fugacement le regard éteint de Jaghatai, toujours à genoux dans la neige teinté de son propre sang.

L'archer des montagnes décocha une flèche qui transperça l'épaule de la furie en la voyant débouler sur lui, enragée elle tituba à peine, abattant la dague volée dans un geste imprécis mais brutal qui déstabilisa ses appuis. De sa main libre, elle récupéra sa lance, joignant ses deux mains sur la hampe pour l'abattre sur son dernier opposant dans un souffle rauque.

Autour d'elle ses compagnons mettaient fin à l'affrontement et elle resta ainsi, haletante, interdite, jusqu'à que le calme reviennent. Khadagh et les autres tournèrent un bref regard vers la scène, conscient de ce qui venait de se dérouler, mais préférant s'occuper du pillage et de leur mission première.

Khorijin se tourna finalement vers Jaghatai, sa voix brisée et incertaine venant d'adresser à lui, murmurant.

«Je ne veux pas mourir à cause de toi, pas cette fois, pas comme ça.»

Le guerrier brisé leva son regard vers la Xaela sans rien ajouter, son souffle court et son regard las.
Elle reprit alors, sa voix tremblante.

«Tu es trop faible Jaghatai»

Seul le souffle glacial des montagnes répondit au silence pesant qui s'était installé, les Amants du Crépuscule se tenait l'un devant l'autre, immobiles et interdits durant des minutes qui semblèrent une éternité.
A l'instant ou elle avait prononcé ses mots, elle eut l’impression que son corps se déchira en deux de douleur, pourtant il n'y avait que cette maudite flèche plantée dans son épaule. Elle finit par plisser son regard, laissant couler deux perles glacées sur ses joues avant de se détourner. Elle récupéra la bride de son cheval et après un bref moment d'hésitation, le reste du petit groupe suivit à son tour avec leurs montures respectives.

Jaghatai resta lui au milieu du manteau blanc de neige parsemé des corps de leur ennemis, avec pour seule compagnie sa solitude.

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Les âmes perdurent

Message par Khorijin Dotharl » 17 juil. 2017, 11:46

Les âmes perdurent



Une peau de bête sur ses épaules, Khorijin fixait au loin d'un air las. Elle surveillait le coté Ouest du camp au sommet d'un rocher planté dans le décor, une tâche ennuyeuse où elle ne pouvait pourtant pas se permettre de relâcher sa vigilance. Elle eut un soupir, observant son souffle se geler en un petit nuage épais devant ses lèvres qui se dissipa dans l'air glacial quelques secondes plus tard.

Une main sur sa lance, ses yeux azur fixaient au loin, essayant de percevoir à travers la brume épaisse le retour d'un certain cavalier plus qu'un potentiel danger. De retour au camp, elle avait préféré être silencieuse sur l'absence de Jaghatai, mais ses compagnons n'avaient pas tardé à informer la Khatun de ce qui s'était déroulé, courrouçant leur chef et blâmant l'attitude de la lancière.

Les Dotharl étaient peu nombreux, si ils faisaient leur lots de victime pendant leur passage, ils perdaient eux aussi beaucoup de guerrier durant les affrontements et perdre l'un des leurs à cause d'une fierté mal placé, une querelle ridicule et non durant un combat nécessaire n'était pas du goût de leur Khatun. Khorijin fut rapidement congédiée à la surveillance du camp après avoir subi les réprimandes acides, mais probablement justifiées de son aînée.

La scène et les paroles de sa Khatun continuaient à tourner et se retourner dans sa tête, serrant sa gorge et lui donnant une étrange sensation d'inconfort qui parcourrait son corps. Elle revoyait le regard de Jaghatai, comme si il avait renoncé à son destin et à ce qu'ils avaient et auraient pu accomplir. Elle lui en voulait pour cela, de condamner son existence par sa faiblesse. Mais elle ne pouvait aussi s'empêcher de s'en vouloir à elle même de n'avoir pu le rendre meilleur.
Les heures étaient passées et nul cavalier ne se montrait à l'horizon. Bien sur elle avait songé à repartir le chercher, son absence la faisait se sentir incomplète et désarmée, privée son unique âme sœur dans Azim pour l'éternité, mais on lui avait interdit de quitter son poste jusqu'au lendemain. Une bien clémente punition pour avoir abandonné l'un des leurs et qui ne s’arrêterait sans doute pas une fois la nuit passée.

Des bruits de pas dans son dos l'a sortie de ses pensées. Khadagh était monté sur son cheval, équipé pour braver le froid, il l’interpella depuis sa monture d'un simple geste de la main.

«  Je vais le chercher avant la nuit.  »

Le soudain élan de compassion de Khadagh pour Jaghatai fit froncer les sourcils de la Xaela dans une grimace.

«  Je viens avec toi  »

«  Non. Sadu t'a demandé de rester ici, elle dit que tu en as assez fait. Je reviendrais avec lui avant la nuit, contente toi de faire ce qu'elle te dis  »

Le cavalier s'éloigna alors jusqu'à disparaître dans la brume, laissant Khorijin avec un goût amer dans la bouche, ne pouvant plus que se contenter d'attendre leur retour en fixant l'étendu blanche des montagnes d'Azim.



Khadagh n’était finalement rentré qu'au petit matin.

Si Khorijin était en un sens soulagé de le voir rentrer, car un second guerrier perdu par sa faute n'aurait fait que attiser de la colère à son égard, elle du se résoudre à ne voir que Khadagh et son cheval revenir.
Elle attendit quelques secondes immobile, dans l'espoir de voir son compagnon fendre la brume d'un pas lent, mais il n'y eut qu'un souffle de vent froid en réponse.

Khadagh affirmait que l'âme du guerrier avait déjà quitté son corps quand il retourna sur les lieux. Les Dotharl n'enterraient pas leurs morts, ils les laissaient à la Steppe, car un corps sans âme n'était rien d'autre qu'un tas de chair inanimé.
Si le guerrier avait été assez brave au combat et que son âme avait resplendi par ses exploits sur le champ de bataille, il reviendrait dans l'année suivante.

Ca ne serait pas le cas de Jaghatai, mort de ses blessures dans le froid, résigné. La Xalea était alors persuadée d'avoir scellée son destin en même temps que celui de son compagnon, non seulement pour ses futures vies, mais aussi pour sa présence au sein de la tribu. Par sa faute ils avaient perdu un guerrier et ils avaient perdu un temps précieux sans pouvoir établir le camp dans un lieu sur, la tribu devrait alors s’installer sans avoir pu trouver un meilleur endroit, pour reposer les bêtes et commencer à chasser les repas.
Depuis son poste d'observation, elle pouvait voir ses aînés se rassembler sous la tenture colorée les protégeant sommairement du vent et du froid pour se concerter.

Allaient ils choisir de la bannir de la tribu  ? Elle devrait alors errer et survivre seule dans les Steppes, à la recherche d'une tribu plus faible qui accepterait sa présence. Ses idées déjà emmêlées se brouillèrent davantage à la perspective d'être privé de sa tribu, privée des siens, de sa culture, de son aimé. Depuis la veille, elle avait une sensation douloureuse qui lui traversait le corps, sans comprendre pourtant d'où elle provenait, et cette désagréable sensation s'était ravivé depuis le retour de Khadagh.

Elle songea alors à la grotte du Pilastre au Nord de la Steppe, si la tribu redescendait vers les plaines dans quelques lunes, ils ne passeraient pas très loin du lieu ou la Déesse lune tirait son pouvoir. On disait que en se jetant en son sein, on ne faisait plus qu'un avec Elle, mais chez les Dotharl, cela valait aussi de tirer un trait sur la réincarnation.
L'idée lui sembla alors la meilleure solution à sa situation, si elle ne pouvait pas rattraper ses erreurs, il était préférable d'y mettre fin plutôt que de devoir vivre une existence misérable parmi les faibles de la Steppe.

La Xaela attendit alors qu'on la relève de son poste ou qu'on lui annonce son exclusion. Une attente qui fut terriblement longue, car elle resta ainsi avec ses remords et ses idées noires durant une journée de plus. On lui apporta simplement de quoi subvenir à ses besoins.
De nouveau Khorijin lâcha un soupir, observant son ennui et son désespoir former un petit nuage opaque devant ses lèvres.

Sa vie était déjà devenue misérable.



Plusieurs lunes plus tard.


Les lunes étaient passé, mais la sensation d’échec et de vide avait continué de ronger la Xaela jusqu'à qu'elle ne soit plus que l'ombre d'elle même. Celle qu'on avait nommé autrefois la Lance céleste pour sa rapidité et son agilité n'était plus que l'ombre d'elle même, lasse des affrontements et son audace éteinte, perdue dans le froid des montagnes d'Azim.

Malgré leur croyance, malgré leur tradition, chacun vivait la disparition d'un des leurs différemment.

Certain pensaient que l'un des nouveaux nés à naître dans l'année serait l'âme de Jaghatai, d'autres pensaient que le cycle des Amants du Crépuscule s'était à jamais brisé et qu'ils s'agissait probablement du retour de Maa, un autre guerrier mort au combat il y a quelques temps.

Les jeunes mères seraient entourées et protégées jusqu'au terme de la grossesse, car elles étaient garantes de la réincarnation de l'un des Dotharls, portant une nouvelle vie en elle pour la tribu. Entourées de cavaliers et entourées des plus chaudes peaux de bêtes, la tribu s'était mise en route un matin alors que le soleil était encore endormi derrière les pics aux neiges éternelles.

Les jours et les nuits se succédèrent alors que la tribu en mouvement redescendait vers les plaines d'Azim en quête d'un lieu à s'approprier. Les enfants et les mères auraient besoin de se nourrir richement et de se réchauffer, le bétail devrait alors avoir de quoi se nourrir et n'ayant pu trouver un lieu riche dans les montagnes, ils s'étaient rabattus vers des lieux qu'ils connaissaient mieux mais qui annonceraient des affrontements inévitables avec ceux déjà installés.

Khorijin tentait de se faire oublier, tout autant qu'elle oubliait elle même quelle guerrière elle eut été. Elle veillait aux tâches qu'on lui accordait sans rechigner, comptant les soleils qui la séparaient des bras de la Déesse lorsqu'ils passeraient vers la grotte du Pilastre.

Ce ne fut qu'au bout de huit jours de chevauchée épuisante qu'ils atteignirent le bas des montagnes, Khorijin avait profité d'être restée en retrait pour faire faire un détour à sa monture, quittant silencieusement la tribu à jamais, d'un regard par dessus l'épaule pour s'assurer qu'on ne la remarque pas. Elle n'était qu'a une petite demi heure de cheval de la grotte du Pilastre, le temps qu'ils se rendent compte de son absence, elle aurait aurait déjà atteint les bras de la mère.

Somnolant alors que son cheval gravissait le chemin, elle laissa sa monture avancer au pas sur la roche glissante, sursautant parfois quand les sabots de son cheval ripaient sur un cailloux qui roulait ensuite dans une mélodie solitaire en bas de l'escarpement.
Un hennissement strident vint résonner jusqu'à ses cornes, sa monture s'immobilisant un instant les oreilles droites.

Khorijin jeta un regard en arrière par réflexe, percevant alors un second gémissement d'un cheval paniqué puis le fin tintement du métal qui s’entrechoque.

Le temps se figea autour d'elle, lui rappelant cette désagréable sensation d'impuissance et de doute qui l'avait envahie dans les montagnes.
Elle songea à ce qui pourrait arriver si les Dotharl manquaient de défense pour protéger les futurs guerriers à naître, si le bétail venait à mourir pendant l'affrontement, à ses frères et sœurs dans la bataille. La Xaela jeta un regard vers la grotte du Pilastre qui n’était plus qu'a quelques yalms d'elle, hésitante.

Puis serrant les mâchoires, elle se maudit intérieurement de son entêtement. Avait-elle fini par oublier qui elle était à force de se lamenter sur son sort ? Soufflant, elle talonna son destrier, tirant sur la bride pour lui faire faire un demi tour.

Lancée au galop, ses poumons se remplirent de l'air encore frais des montagnes d'Azim d’où elle était née, ses lèvres s'étirant dans un sourire. Ses cornes continuaient de percevoir les sons de l'affrontement, dirigeant son fidèle compagnon à toute allure vers la bataille.

Alors qu'elle commençait à apercevoir des lances et des arcs se dresser au détour d'un rocher, elle fit un léger bond sur le dos de son cheval, s'accroupissant dessus et cherchant le bon équilibre qui lui permettrait de bondir et fondre sur ses futures cibles.

La lance céleste se propulsa de sa monture lancée au galop dans la cohue qui avant commencé sans elle. Des hommes et des femmes revêtue d'une capuche écarlate et d'une tenue légère affrontaient les Xaelas à la tenue bleue. Khorijin atterrit avec fracas sur un homme plus grand qu'elle, son arme fichée dans ses chairs et son regard la gratifiant d'une expression de surprise et de douleur avant que son âme ne le quitte.
Le frisson du combat parcourut de nouveau son corps, les cris de guerre des siens, le chant de l'acier, les Dotharls lancés à corps perdus dans la bataille.
Elle croisa un instant le regard de son aînée au travers d'une flamme brûlante qui fusait vers un archer, récupérant sa lance dans la seconde suivante pour repartir à l'assaut.

Les jeunes mères étaient au centre, protégées par les plus féroces guerriers, elles mêmes munies d'arcs qu'elles n'hésitaient pas à bander vers ceux qui osaient trop s'approcher. En sous nombre comme souvent, les Dotharl parvenaient pourtant à renverser la bataille mort après mort. On comptait hélas déjà pourtant plusieurs Xaela de la bannière bleue tombés, mais eux tous auraient sans nul doute droit à une réincarnation dans l'année.

Dans la cohue, Khorijin perçut le lourd roulement des sabots d'un cheval descendant des montagnes. Son pas écrasait la neige et il semblait s'enfoncer dans la roche à chaque foulée, remuant la Steppe sous ses pas. La Xaela tourna son regard azur vers la créature armuré galopant en leur direction. Monté sur la créature, elle distingua un immense chevalier vêtu d'une armure sombre percer la brume, son épée démesurée tenue à l'horizontale menaçant de trancher net tout ce qu'elle rencontrerait dans sa course.

Ses yeux écarquillés, Khorijin fixait l'apparition incongrue foncer droit vers elle. D’où venait ce cavalier? Ni ses couleurs ni l'harnachement de son cheval ne lui rappelaient une quelconque tribu, la seule pensée proche qu'elle trouva se logeait loin dans ses souvenirs d'enfance, d'une légende ancienne qu'on lui avait raconté ; l'Homme en noir.

Elle dut décrocher son regard pour répondre à une attaque, son observation n'avait certes duré que quelques instants mais l'avait exposée à la lame d'un adversaire qu'elle ne vit arriver que trop tard. La déviant de peu, l'acier mordit ses chairs moins gravement qu'elle ne l'aurait dû, mais la fit basculer au sol douloureusement à la merci du Xaela qui lui faisait face.

Alors que son bourreau levait sa lame pour l'achever, son œil perçut l'immense masse noire armurée se profiler juste derrière son ennemi.

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Briser ses chaînes

Message par Khorijin Dotharl » 25 juil. 2017, 13:25

Briser ses chaînes


- Ce n'est qu'un conflit de plus entre tribu.-

Sa monture au galop, des éclairs obscurs parcoururent son corps en lui faisant cambrer l'échine, tel est le prix du pouvoir. La lame gravée couverte d'un fourreau de symboles était tenue à une main, démarrant en position basse. Un Xaela à cheval lui faisant dos n'entendit pas la charge se rapprocher, la taille oblique traversa la chair de la monture en faisant mépris des os, dans le fracas et les hennissements de douleur qui se plie à la volonté. Tués sur le coup, il ne suivit même pas du regard les corps du barbare et de sa monture alors qu'il se préparait déjà à frapper une seconde fois. Le guerrier Ungud entendit le vacarme dans son dos, tournant lentement sa tête pour ne pas perdre de vue la Dotharl à sa merci qu'il avait eu la chance de mettre à terre. Lorsqu'il aperçut le chevalier, la pointe de sa lame s'enfonçait déjà dans son sternum, l'emportant dans sa charge comme un vulgaire papillon épinglé. Il serra son arme dans sa main, se rattachant à tout ce qu'il avait alors que la douleur inimaginable lui déchirait le torse, puis plus rien, le froid l'avait emporté aussi vite qu'il avait été épinglé.
La poigne du Septième Maître lui arracha la lance des mains, rejetant d'un revers de poignet le corps vidé d'éther, avant de faire pivoter sa monture vers la Dotharl qui en profitait pour se relever. Elle eut un temps de flottement avant de détaler à l'opposée du chevalier, un instant qui lui suffit à faire appel à ses souvenirs.


- C'est Khorijin -

D'une pression des talons, le destrier se remit à accélérer, se lançant à la poursuite de la fugitive en piétinant le tapis de cadavres qu'était devenue la steppe enneigée, annonçant le début des saisons du Tsagan saar. Pendant un instant, il se souvint nettement de Jaghatai Dotharl, le guerrier-brisé. Pendant cet instant, il se remémora l'affection qu'il avait pour cette piquante Xaela. Pendant l'instant, il se dissocia des Maîtres pour reprendre un peu d'humanité.

- Emmène-là -

S'arquant en appui sur un étrier, Jaghatai attrapa la jeune femme au vol et l'installa comme un sac devant sa selle, faisant ensuite bifurquer le destrier pour s'éloigner du combat. Les Dotharl, la Steppe, le Tsagan saar, n'avaient plus la moindre importance, avec ou sans lui, et ils ne présentaient aucune utilité pour l'avenir, tous sauf elle.
Lancé au galop, le chevalier traversa la mêlée pour s'éloigner du champ de bataille, une flamme ardente venant s'écraser contre son armure, faisant rougir le métal.


Le heaume fixé sur son crâne se retourna lentement, affichant une expression figée et sans âme.
Une Xaela aux cheveux immaculés pointait son bâton sculpté en une tête de dragon vers l’intrus qui s'était jeté dans la bataille, ses yeux bouillonnant de rage. Khadagh poussa un cri de défis, se lançant sous l'ordre de sa Khatun vers le Chevalier noir, hache en main. Leurs visages lui rappelaient d'ancien souvenirs, semblant loin et tout aussi insignifiants que leurs vies.
L'épée fit un arc de cercle en même temps que le destrier se retournait, fauchant de tout son poids le corps de Khadagh, lui arrachant une expression de surprise et de douleur alors qu'il glissait, interne, le long de sa lame.
Une autre flamme ardente fusa vers le cavalier sous un hurlement de rage, mais le cheval avait déjà éloigné son Maître de plusieurs foulées.


A distance modérée de l'affrontement, reparti vers les montagnes, il arrêta sa monture quelques instants pour contempler le chaos s'estomper petit-à-petit.


- Regarde -

Les Dotharl avaient eu raison des Ungunds, battant leurs guerriers, ils ne verraient pas les saisons plus clémentes.

- Par ici -

Il dériva son regard vers le champs de bataille, regardant froidement les Dotharl nettement amoindris mettre à mort les derniers guerriers encore valides.

-Juste là-

Il vit, le cadavre de Khadagh gésir dans la neige. Alors il détourna son regard pour repartir avec son précieux colis. Tôt ou tard, la roue du destin tourne toujours.

- Nous t'avons promis le pouvoir et tu l'as, maintenant brise tes chaînes.-

Il chevaucha pendant peut-être, une heure, avant d'éjecter la Xaela agitée de sa selle, l'envoyant paître dans la neige. Saisissant la lance arrachée dans le combat, il la lança à ses pieds avant de descendre de sa monture et dégainer sa lourde lame, plaçant cette dernière à l'horizontale et pointée vers la femme.
Elle ne se fit pas prier, saisissant la lance pour se ruer sur lui, en vain. La lourde lame lui fit obstacle de nombreuses fois, obstruant, déviant, repoussant. Sa vivacité était toujours aussi impressionnante, mais Jaghatai n'était plus le guerrier lent et défaillant qu'il était autrefois. Sa technique et sa force la dépassaient désormais de loin, et il la poussa jusqu'aux limites de l'épuisement.

Lorsqu'elle finit par rouler dans la neige, le chevalier leva sa lame à la verticale en la tenant d'une main. De l'autre, il se saisit du pendentif de pierre qu'il avait gardé au delà même des portes de la mort, le lançant devant elle. Il lit la surprise sur son visage, avant d'abattre sa lame à deux mains sur la jeune femme exténuée.
Mais ses mains firent pivoter la lame d'un quart en abattant lourdement le plat sur le corps menu et fragile, lui faisant perdre connaissance.


- Est-ce là ce que tu appelles briser tes chaînes ?-

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Le Chevalier Noir

Message par Khorijin Dotharl » 31 juil. 2017, 12:07

Le Chevalier noir


La Xaela s'éveilla lentement, grimaçant et se tordant de douleur. Tout son corps était douloureux, le moindre mouvement, la moindre respiration éveillait une gène sur différentes parties de son corps. Ses jambes, ses cotes, sa tête, son dos.

Elle lâcha un soupir mêlé d'un grognement, sa vision encore floue ne parvenant à discerner qu'une faible lumière vacillante émettant un peu de chaleur. La gorge sèche, elle déglutit lentement, prenant une inspiration plus forte pour tenter de retrouver ses esprits.
Sa main s’agrippa sur la fourrure qui la recouvrait, tâtonnant jusqu’à toucher le sol rocheux sous ses doigts.

Elle inspira une seconde fois, clignant des yeux pour tenter d'observer plus clairement ce qui l'entourait. Peu à peu, la brume dans son esprit se dissipa, lui laissant entrevoir d'abord une masse noire devant elle, qui prit peu à peu des contours plus précis.
Le Chevalier noir lui faisait face, assis et immobile, ses mains croisés devant son heaume de métal à l'allure grimaçante où se reflétaient des ombres vacillantes projetées par le feu de camp entre elle et lui.
Sa sombre armure semblait être fait du meilleur métal qu'elle n'avait jamais vu, recouvrant tout son corps et dessinant des courbes tranchantes ou pointues.

Ses yeux galopèrent vers sa lance de l'autre coté du Chevalier, lui faisant froncer les sourcils. Elle avait été vaincue, mais pour une raison qu'elle ignorait encore, le Chevalier l'avait gardée en vie, peut être pour mieux savourer sa victoire ?



Elle l'observa un long moment, récupérant ses moyens petit à petit tandis que seul le crépitement du feu se faisait entendre. Pas un souffle, pas un mouvement, était-il seulement réel, était-il seulement vivant ?

Les membres crispés, la Xaela inspira de nouveau au bout de longues minutes, trop faible encore pour bondir vers son arme, il fallait qu'elle gagne du temps. Assez pour recouvrer ses forces, elle était peut être vaincue, mais elle ne se laisserait pas faire.

- "De quelle tribu viens-tu ?! Ou sont les Dotharl ?!"

Un cliquetis de métal résonna finalement dans la grotte, puis une inspiration et finalement une voix s'éleva, caverneuse et déformée. Un frisson parcourut la Xaela, sans qu'elle ne parvienne à le contrôler, la glaçant jusqu'à l'échine, elle qui pourtant été née des nuits froides d'Azim et qui ne craignait point la mort.

- " Leur destin ne présente aucun intérêt."

Khorijin resta interdite quelques instants, ses yeux azur écarquillé et fixé sur le Chevalier noir. Sa réponse lui avait glacé le sang, mais quelque chose dans sa voix lui semblait familier, la déstabilisant davantage. Sa tête se remis à tourner, assaillie de signaux d'urgence que lui envoyait son corps : Fuir, fuir le plus loin possible.

Assise sur le sol, ses bras supportaient le poids de son buste, commençant à trembler sous l'effort. Si elle devait fuir, elle n'irait pas bien loin. Elle inspira de nouveau, essayant d'éclaircir ses pensées

- "Tu viens... de la montagne, tu viens du Pic Brumeux... Mais tu n'es qu'une légende..."

- "Toute légende prends ses racines dans une vérité. Laquelle, entre légende et vérité, sera la pire."

Le souffle court, la Xaela luttait contre elle même pour se tenir éveillée, son corps douloureux la lançait et la faim commençait à se faire sentir, creusant son ventre et la rendant plus fébrile encore.

- "Alors qui es-tu."

Le silence vint de nouveau emplir la grotte, l'on entendait plus que le blizzard fouetter la Steppe à l’extérieur, écrasant un peu plus les chances de survie de la Xaela, si elle parvenait toute fois à fuir le colosse d'acier.

Soudain, dans un geste d'une lenteur mesurée, le Chevalier noir porta ses gantelets vers son heaume et dans une série de cliquetis, l'ôta, laissant tomber une cascade de cheveux d'un blanc immaculé sur ses épaulières d'acier en même temps qu'il lui dévoilait son visage.

La Xaela émit un hoquet de surprise, son souffle s’accélérant. Sans s'en apercevoir, quelques larmes roulèrent sur ses joues alors que sa tête se remettait à lui tourner, l’enivrant comme les soirs de fêtes, lorsque l'airag coule à flot.
Fébrile, sa voix s'éleva dans une dernière question avant de sombrer dans l'inconscience.

- "Jaghatai ?"

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Le début d'un long voyage.

Message par Khorijin Dotharl » 07 août 2017, 21:41

Le début d'un long voyage.



Elle s'était allongée sur son corps, contre sa peau froide et pâle. Elle entendait à peine son coeur battre dans sa poitrine, devant retenir son souffle pour le percevoir. Son souffle à lui, l'a soulevait qu'entre de longues intervalles, comme si respirer ne lui était plus nécessaire et qu'il le faisait seulement par habitude.
Enlacée dans ses bras, une étrange sensation de réconfort et de malaise continuait de se mélanger malgré la nuit qu'ils avaient partagés.

Il lui avait apporté de quoi se nourrir et de quoi se réchauffer pendant plusieurs jours, son corps recouvrait peu à peu ses forces, et la Dotharl en avait profité pour retrouver la chaleur de son amant, mais en finalité, cela lui avait laissé une impression différente que dans ses souvenirs.

C'était lui, c'était Jaghatai, mais il manquait quelque chose, comme si était incomplet. Alors qu'elle l'observait la regarder, ses yeux semblaient lui poser des millions question, auxquelles elles n'auraient jamais de réponse.
Il lui apparaissait comme un don rendu par Nhaama et elle craignait qu'à chercher à en percer les secrets et les mystères, elle pourrait le perdre à nouveau.

Il l'avait vaincue, comme une revanche, une réponse à ses années passées ensemble ou la vive Xaela l'avait maîtrise du bout de sa lance et toutes les fois ou elle l'avait traité de faible. Elle abdiquait, reconnaissant et admirant cette force nouvelle qui animait de nouveau son corps.

Jaghatai retira ses mains de son amante, se redressant pour se diriger vers sa lourde armure qu'il commença à enfiler dans une série de cliquetis.

Ou avait il trouvé cette armure, ce cheval, cette épée, ce heaume ? Tout la ramenait vers cette légende de ses jeunes années, mais les réponses qu'elle pourrait avoir l'effrayaient plus que l'envie de les connaître.
La voix de Jaghatai rompit finalement le silence.

- Habille-toi, nous partons, ton corps s'est suffisamment reposé.

La Xaela fronça légèrement les sourcils, entreprenant de récupérer son heaume et sa tenue de peaux tout en l'observant enfiler sa lourde armure, un procédé complexe qu'elle ne parvenait pas encore à saisir.

Elle récupèra la nourriture et son arme, enfilant ses vêtements avant de s'enrouler dans la peau de bête qui lui avait offert un peu de chaleur.

- Tu penses que la tribu va nous laisser revenir ?

Le Xaela qui la dépassait largement de plusieurs têtes termina d'enfiler son armure à l'exception de son heaume, se dirigeant vers la sortie de la grotte d'un pas lent.

- Nous n'allons pas les rejoindre.

Khorijin écarquilla un peu les yeux, le rattrapant de quelques foulées rapides et s’arrêtant devant son cheval à l’extérieur. Elle plissa les yeux, observant l'animal massif et armuré. Avait-il toujours été la à attendre dehors? Elle n'avait pas le souvenir d'avoir vu sa silhouette dans le blizzard, ni de l'avoir vu venir se réchauffer avec eux près du feu.
Jahgatai saisit la Xaela par la taille, la soulevant comme si elle ne pesait rien pour l'installer sur sa monture. La Lancière se débattit un peu, enroulée dans la peau de bête et répliquant ;

- Mais ou allons nous alors ?!

Le Chevalier fit un dernier aller retour vers la grotte, récupérant son heaume qu'il tenait entre ses deux mains armurées. Son regard se releva vers sa compagne.

- Nous allons là ou le feu prendra.

Khorijin fronça ses sourcils, soufflant et gratifiant le Chevalier d'un regard noir.

- Je veux retourner dans la tribu.

Les deux amants s'observèrent dans le blizzard longuement, aucun des deux ne semblant avoir pour idée de céder à l'autre. Jaghatai leva lentement ses bras pour enfiler son heaume qu'il fixa dans une série de cliquetis réguliers, effaçant son visage et son humanité derrière un visage figé et grimaçant.
Sa voix déformé résonna alors dans le vent sifflant vers la Xaela ;

- Alors retournes y.

- Tu viens avec moi ?

De nouveau sa question resta en suspend, engageant quelques pas dans la neige pour monter sur son cheval derrière la lancière. Elle l'observa d'un regard par dessus son épaule, parcourue d'un bref frisson.

- Non.

Déglutissant difficilement, Khorijin détourna lentement son regard du Chevalier, observant l'étendue blanche de la Steppe devant elle, luttant contre cette désagréable sensation qui lui rongeait le corps. Elle resta prostrée ainsi dans le silence durant de longues minutes, la voix sépulcrale du Chevalier l'arrachant à son mutisme.

- Quelle est ta décision.

La Xaela fronça les sourcils, fermant les yeux quelques instants.

- Je reste avec toi.

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Une interminable chevauchée

Message par Khorijin Dotharl » 14 août 2017, 16:47

Une interminable chevauchée


A travers le blizzard, une silhouette se dessinait au loin, galopant, s'approchant de foulée en foulée, ses sabot martelant le sol dans un son étouffé par la neige qui ne cessait de recouvrir la terre.
Un éclaireur Xaela regarda passer le cavalier au loin, plissant son regard et distinguant les deux silhouettes juchées sur l'animal. Ou pouvaient-ils bien aller ?
Il n'y avait rien pour eux de l'autre coté des Steppes, rien qu'un Xaela ne puisse désirer plus que vivre parmi les siens. L'éclaireur en avait déjà vu passer par ici, de nombreuses fois, à moitiés morts et solitaires, sans jamais les voir revenir.

Comme si chacun d'entre eux avait volontairement scellé son destin en quittant la Steppe par les montagnes, que pouvaient-ils bien attendre de plus de l'autre coté ?
Le Xaela fut curieux l'espace d'un instant, puis il observa les silhouettes disparaître lentement dans l'épais brouillard, sachant que jamais plus ces deux la ne reviendraient fouler Azim. Il susurra une prière à la Déesse Lune, comme on le faisait pour les morts avant de porter son regard ailleurs.


Khorijin luttait pour se tenir éveillée, le froid qui mordait sa peau et les douleurs dans son corps ne suffisaient plus à la tenir alerte. Depuis combien de temps cet animal galopait, des heures, des jours ? Elle ne voyait même plus Azim et Nhaama respecter leur cycle, tant le ciel était couvert et épais et le silence de son compagnon n'était accompagné que des roulements réguliers des sabots de sa monture sur le sol d'Azim. Régulier et instoppable.

Etait ce finalement un rêve dans le quel elle s'était perdue ? Peut être s'était-elle finalement jetée dans les bras de la Déesse, peut être tout cela n'était qu'un voyage épuisant et douloureux vers elle, pour tester sa bravoure une fois encore.

Ses paupières finirent par se fermer seule, elle se senti tomber en arrière. Une sensation de confort l'envahissant brièvement, cédant à l'épuisement d'une trop longue chevauchée. Elle eut l’impression de flotter pendant un instant, s'imaginant pouvoir enfin se reposer dans les bras de la Mère. Mais la rencontre avec le sol la ramena durement à la réalité, roulant dans la neige, à la fois glaciale et brûlante sur sa peau. Elle eut le souffle coupé sous l'impact, restant hébétée quelques instants, les yeux perdus dans le vide.

Enroulée dans une peau de bête, elle parvint difficilement à libérer l'un de ses bras, hagarde, cherchant à s'en aider pour redresser son buste. De la neige, à perte de vue, seulement de la neige et aucune âme vivante dans les alentours. Pourtant au fond d'elle, elle savait qu'ils étaient encore en Azim, mais elle savait aussi qu'au delà de ses montagnes qu'ils traversaient depuis des jours, c'était l'inconnu.

Elle perçut le son des sabots de ce cheval infernal s'approcher d'elle lentement, écrasant la poudreuse dans un crissement, un second son plus lourd lui succédant.



Déglutissant, elle restait figée dans le froid glacial, immobile et impuissante. Elle aurait voulu, voulu voir sa terre, les siens une dernière fois, mais il n'y avait qu'un épais rideaux blanc, semblable à n'importe quelle autre montagne. Elle ignorait où Jaghatai les menait, mais elle avait deviné que la Steppe finirait loin derrière eux au terme de leur voyage.

Quelque chose la souleva comme un vulgaire sac de provision pour la ramener sur le cheval infatigable, les bras armurés du chevalier virent l'entourer alors qu'il remontait sur l'animal, bloquant ses futures chutes, puis relançant l'animal au galop.

Elle n'avait plus la force de répliquer contre le Chevalier, ni même l'envie. Puisqu'il était revenu à elle, puisqu'il était venu la chercher alors qu'elle l'avait laissé à une mort sans gloire, tel devait être son fardeau et sa punition. Les Amants de Nhaama devaient vivre et mourir ensemble. Liés pour toujours et à jamais.

Les deux Xaelas passèrent alors au delà des montagnes d'Azim. Ils traversèrent pendant plusieurs soleils une plaine aux couleurs de cendre, ravagée, désolée. Puis des terres plus dangereuse encore, où la Xaela observa pour la premières fois de sa vie des machines de métal et de feu fendre le ciel. Des lunes encore, à traverser ces terres hostiles où le Chevalier ne semblait s’arrêter que pour consentir aux besoins de sa compagne.

Si il lui accordait parfois quelques instants de répit et de chaleur pendant les nuits, il était à son contraire glacial et taciturne pendant les jours, déstabilisant la Xaela qui se sentait déjà noyée dans l'étrangeté et la nouveauté de ce voyage interminable et épuisant.

Lui ne semblait pas atteint par les même besoins, ni par la fatigue et la faim, ni même par les plaisirs charnels auxquels elle renonçait petit à petit. Le coeur de la Xaela s'était durçi telle la pierre battue par un vent glacial au cours du voyage. Éteinte, aigrie et froide. Elle avait laissé une partie d'elle même dans la Steppe, lorsque leur histoire avait encore du sens, lorsque tout avait encore du sens.

Après un cycle entier à avoir voyagé et chevaucher, la Xaela cessait de se demander où mèneraient leurs pas et se contentait de suivre Jaghatai, comme une ombre, tenace et vive, que seul le désir brûlant des combats animait encore.
Ceux qui avaient tenté de mettre fin à leur cavalcade avaient fini sous le fer de sa lance et de l'épée, comme il en fut autrefois dans les Steppes et dans leurs anciennes vies.

Les combats aux cotés de son aimé avait ravivé une étincelle mourante chez la Xaela qui avait plusieurs fois menacé de s'éteindre pendant leur voyage, réalimentant un feu aussi vif qu'ardent, plus brûlant encore que tous les désirs de chair.

Dans leur interminable voyage, ils atteignirent finalement une terre semblable aux montagnes d'Azim, éveillant un peu plus la curiosité de la Xaela. L'air frais et la neige recouvrant les terres d'un manteaux blanc, alors même qu'ils venaient de quitter des hautes montagnes ou le vent soufflait en rafales..

Une immense statue s'élevait au loin devant eux, semblant représenter un chevalier en armure, tenant entre ses mains une lance ouvragée. La Xaela plissa les yeux, observant le guerrier éternel figée dans la pierre, penchant légèrement la tête, elle observa une silhouette plus vite perché sur la sculpture.

Deux yeux vifs se tournèrent vers les voyageurs, ouvrant une large paire d'aile dans un rugissement.
Les pupilles de la Xaela se rétrécirent, le coeur battant d'excitation et lâchant dans un souffle :


- Un dragon.

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Le frisson

Message par Khorijin Dotharl » 28 août 2017, 15:01

Le frisson


La Xaela souffla, retirant sa lance de la chair de la créature qui n'existait alors que dans de vieux conte des Steppes, la légende de Chaka Zoh, courageuse guerrière qui affronta un dragon pour protéger les siens.
La Dotharl observait la créature rendre son dernier soupir, son coeur tambourinant sa poitrine comme un étalon lancé au galop, peinant à reprendre son souffle tant le combat avait été intense. L'air glacial autour des deux Xaelas continuait de ravager toute vie, pourtant la Dotharl se sentait plus vivante que jamais, tout son corps éveillé et enhardi par ce dernier affrontement.
La Steppe avait sont lot de dangers et de défis à affronter, mais rien qui ressemblait de près ou de loin à cela.

Alors qu'elle étirait un sourire sur ses lèvres, elle observait Jaghatai relever lentement son espadon de la seconde bête. Le hurlement du premier avait dû alerter le second, venant tous deux tenter leur chance d'un repas, probablement.
Le calme retombant, la Xaela vint passer ses doigts sur la peau de la bête, sans rancœur, admirative et émerveillée de toucher ainsi une légende qu'elle avait elle même abattu.
Ses yeux azur s'écarquillèrent, un frisson indescriptible lui parcourant l'échine, ne semblant pas y croire elle même.
Mais d'autres grondements dans le blizzard vinrent l'arracher à son instant d'allégresse. Rapidement, d'autres formes se dessinèrent dans le blizzard, tout aussi large et battant des ailes dans leur direction. Qu'est ce qui avait pu les attirer d'aussi loin ?

Le Chevalier noir se retourna lentement, plaçant sa large claymore en travers, prêt à accueillir de nouveau ses ennemis dans le calme le plus total alors que sa compagne venait se placer dos contre lui, guettant l'arrivée des créatures non sans une pointe d'excitation.

Elle commençait à distinguer leurs contours, leurs larges ailes déployées et leurs griffes de la taille d'un bras aux extrémités. Un mauvais mouvement, de l’inattention et elle pouvait terminer bien vite éventrée sans que la créature ne fournisse le moindre effort. L'adrénaline monta d'un cran dans son corps, accélérant son souffle, ses yeux vifs et attentifs, attendant impatiemment l'instant ou elle lèverait sa lance pour engager le combat.

La gueule de la créature n'était plus qu'a quelques yalms d'elle, faisant monter l'excitation d'un cran, elle sera ses mains gelées sur le manche glacé de son arme, les muscles tendus.
Mais à l'instant ou la wyverne se laissatt tomber de tout son poids sur sa cible, un éclair bleu déchira le ciel un bref instant juste avant l'impact. La Créature poussa un cri de douleur, roulant dans la neige dans un râle d'agonie en laissant derrière elle une large traînée rubis.

La Xaela resta hébétée par l'apparition, se retournant vivement vers un second éclair bleu qui attira son regard vers la droite, tout aussi rapide. Elle distinga une silhouette humaine à nouveau juchée sur un dragon, faisant choir la créature loin derrière l'épais manteau de neige.

Alors que Jaghatai avait repris une posture droite, le ciel se déchaîna de pulsion bleutée dans le ciel, enchaînant un balais avec les formes ailées qui tombaient une à une dans la neige. La Dotharl ne pouvait qu'observer le spectacle qu'elle ne comprenait pas, mais qui réveilla chez elle une nouvelle curiosité, essayant de suivre du regard les silhouettes qui s'affrontaient dans le ciel, venant même à les envier.

La cohue finit néanmoins par cesser. Les grondements des dragons s'étaient tus et il ne restait plus que son propre souffle et le battement du vent à ses cornes. Jusqu'à ce que les silhouettes réapparaissent, annoncées par leurs pas étouffés dans la neige.
Elle recula de quelques pas, se butant au métal froid de l'armure de Jaghatai qui s'était tourné vers les intrus.

Ils s’arrêtèrent à quelques pas des deux Xaela, les jaugeant en silence. Grands pour la plus part, on aurait cru que leurs silhouettes étaient allongées vers le ciel ressemblant à des ombres trop grandes. Ils portaient tous la même armure, recouverts de la tête aux pieds d'un métal brillant, quand il n'était pas souillé par le sang. Des pointes et des piques leurs donnaient une allure plus massive et plus longue encore, presque aussi terrifiant que les dragons qu'ils venaient de mettre à terre.

La Xaela arrêta un regard sur leurs lances, d'une forme particulière rappelant la gueule d'un dragon et fait entièrement de métal.
Elle cligna des yeux plusieurs fois, la curiosité l'emportant sur tout le reste et s'avança vers eux. La réaction ne se fit pas attendre, d'un geste synchronisé, les cinq lancier pointèrent leurs armes vers la Xaela qui s’arrêta net.

Un seul resta aussi impassible que Jaghatai, fixant la silhouette qui s'était approché. Dans une armure dorée, le visage masqué par un heaume ornementé et une longue chevelure noire s'en échappant.
Elle éleva sa voix claire et féminine dans un mot que la Xaela ne compris pas, et tous rabaissèrent leurs armes derrière elle. Khorijin resta droite devant elle, partagée entre l'envie de l'affronter et l'envie d'en savoir plus, balançant vivement sa queue derrière elle alors que son regard azur était fixé sur le groupe de Chevalier dragon.

Jaghatai éleva finalement sa voix dans un dialecte qu'elle n'avait encore jamais entendu.
Si elle n'avait pas été aussi curieuse de cette rencontre, son savoir l'aurait de nouveau perturbé et rendue morne, mais elle était bien trop occupée à observer chaque détail de ces tueurs de dragons qui déchiraient le ciel pour s'en soucier.

L'échange lui sembla d'abord tendu, mais surtout interminablement long. Elle devinait chez les lanciers, à leurs postures et a leurs mouvements que leur présence ne semblait pas souhaitable.
Peut être était ce la une tribu de la région, peut être étaient-ils là chez eux ?

Après un temps qui lui parut une éternité et alors que chacun de ses pas vers les lanciers se soldait d'une menaçante tête de lance pointée vers elle, le groupe se mit à bouger, Jaghatai les suivant.
Naturellement, elle engagea le pas avec eux et après une longue marche, elle aperçut finalement la fumée d'un feu de camp.

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