[Chronique] Le troisième fils

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Eternelle
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[Chronique] Le troisième fils

Message par Eternelle » 14 févr. 2018, 04:10

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Une atmosphère lugubre régnait dans les galeries souterraines de la demeure Kusakari. Seul le crépitement des torches qui éclairaient la route sinueuse à travers le dédale de pierres brisait le sombre silence qui pesait au plus profond des tunnels. Le plafond des grottes était immensément haut, au point qu’on ne put en déceler sa forme tant la pénombre l’obscurcissait. L’air était humide et quelques gouttes perlaient le long des parois rocheuses. Il faisait froid.

Au bout de la traversée, le chemin se scindait en deux parties. En poursuivant celui de gauche, on arrivait aux ruines de l’ancien laboratoire aménagé par le traître Kyokai. L’endroit même où il perdit la vie. De l’autre côté, si on choisissait d’emprunter le sentier de droite, un long couloir menait jusqu’à la crypte familiale. C’est là, depuis la mort de son frère, qu’Eien passait le plus clair de son temps.

Au centre de la pièce trônait le corps inanimé de Kyokai, allongé sur une table d’embaumement. Deux miko s’attelaient à aider l’aînée Kusakari durant le rituel de purification post-mortem. Cette dernière, le visage fermé par le deuil, lavait le front et la bouche de son cadet à l’aide d’un chiffon mouillé. Ses assistantes, quant à elles, veillaient soigneusement à ne pas envahir l’espace de leur princesse. Chaque jour, elle lui disait adieu et, chaque jour, les prêtresses se taisaient. Elles brûlèrent de l’encens en signe de respect.

Eien, d’ordinaire si lumineuse, voilait d’une tristesse digne son regard améthyste dès qu’elle pénétrait dans le caveau. Elle portait le deuil avec élégance, du moins si on osait l’en juger.
Alors que celle-ci s’affairait à s’occuper de la dépouille, une servante entra nerveusement dans la crypte. Elle scruta Eien, hésitant à l’interpeller.

- Mi… Mizuki-hime, pardonnez-moi de vous interrompre… Bafouilla la domestique en s’inclinant. Un émissaire éorzéen souhaite s’entretenir avec vous. Il dit qu’il ne peut attendre…

Un lourd silence s’ensuivit. La princesse continua de laver délicatement la tête de Kyokai sans accorder le moindre regard à l’arrivante. Les deux miko se stoppèrent néanmoins, analysant timidement la réaction d’Eien.

- Les Brumdelain auraient-ils prédit le trépas de mon frère pour qu’un de leurs messagers me demande une audience moins d’une semaine après sa mort ? Répondit enfin l’embaumeuse, la voix résonnante et l’air impassible. La Mer du Chant des Sirènes est-elle devenue si rapide à traverser ?

- Je… Je ne saurais le dire… Reprit la servante, visiblement troublée que son interlocutrice devine l’identité du demandeur. Puis-je le faire entrer ?

Eien laissa quelques secondes s’écouler avant de hocher la tête en guise de réponse. D’un regard bref et assuré, elle autorisa ses deux assistantes à prendre congés et resta seule le temps que le nouveau protagoniste se présente.
L’écho des talonnettes retentirent enfin. La silhouette élancée d’un élézen se dessina alors dans l’encadrement de l’entrée. Celui-ci arborait un style typiquement ishgardais. Il baissa la tête en signe de salut à la raenne.

- Bonjour, Dame Kusakari. Excusez mon intrusion mais je crains malheureusement de ne pas pouvoir patienter davantage. De nombreuses affaires requièrent ma présence ailleurs. Je me nomme Elinaud, employé de la maison Brumdelain… Votre grand-mère, Mayu, nous a informé de la mort de votre frère. Celle-ci étant une gouvernante appréciée au sein de notre famille, les filles de Dame Elaine ont tenu à l’honorer en vous faisant parvenir quelques présents. J’ai d’ores et déjà transmis les cadeaux destinés à vos cadets.

L’élézen fit un pas en avant. Il tenait entre ses mains un écrin en bois finement sculpté qu’il ouvrit devant l’air désintéressé d’Eien. L’intérieur du coffret était matelassé d’une doublure en satin pourpre où reposait un œuf d’apparence tout à fait banale. La princesse le zieuta à peine, occupée à laver les avant-bras de son frère.

- J'apprécie la noble intention de vos employeurs, Elinaud-san, bien que je sois navrée qu’il vous ait fallut gravir nos montagnes pour m’offrir un simple œuf de zu.

Ledit Elinaud haussa les sourcils, trahissant son étonnement. Il devint alors bien moins solennel.

- Oh non, vous vous méprenez madame ! Les filles Brumdelain m’ont chargé de prendre contact avec les meilleurs spécialistes orientaux. Il ne s’agit pas d’un volatile lambda ! Le marchand qui me l’a vendu m’a garanti de sa rareté.
- Et ce marchand vous a de toute évidence escroqué, trancha Eien en parvenant talentueusement à rester cordiale. Cette situation n’a, hélas, rien d’exceptionnelle : un bon nombre de kuganiens profitent de la naïveté des touristes occidentaux pour revendre leurs babioles à prix fort.

L’élézen fixa l’œuf un moment, dubitatif. Il sembla si gêné que l’instinct maternel de l’aînée Kusakari la poussa à s’adoucir. Pour la première fois depuis le début de la conversation, elle arrêta de nettoyer le corps de Kyokai et se redressa pour parler directement à l’étranger.

- Ne vous en sentez point coupable. Votre démarche est louable et ne saurait être raillée. Transmettez mes sincères remerciements à ceux qui vous envoie. Ils auront mon affection, dans cette vie et dans les autres.

Les mots de la princesse apaisèrent le tourment naissant d’Elinaud. Ce dernier adressa alors une révérence distinguée à Eien, clôturant l’entretien. Il déposa la petite boite sur un coin de table, comme s’il souhaitait s’en débarrasser rapidement. Puis il tourna les talons vers la sortie après que la jeune femme lui ait permit de disposer.

De nouveau seule dans la crypte, Eien observa l’œuf de loin. Elle soupira, la mine pensive, en reprenant la toilette de son frère.

- Ils peuvent bien me couvrir de trésors, il n'y a qu'une chose que je désire réellement : te retrouver.

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Message par Eternelle » 16 févr. 2018, 13:45

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Les jours défilèrent rapidement depuis la mort de Kyokai. Kumo retrouvait peu à peu sa sérénité et commençait à entrevoir les bienfaits de sa récente libération. La population s’était rassemblée sur la place centrale du village afin de se répartir les tâches visant à rebâtir les ruines laissées par la guerre. Très vite, tout le monde mit la main à la pâte.

La crypte familiale située dans les souterrains de la demeure Kusakari était devenue, depuis la mort du dernier né, le théâtre des lamentations. Les proches du défunt allaient et venaient quotidiennement pour se recueillir et exprimer leur peine face au corps inanimé de l’ancien traître. Eien, dont le cœur ne cessait de s’assombrir, détestait cela. La princesse, d’ordinaire si généreuse et bienveillante, s’enfonçait toujours plus dans une spirale de solitude. Le chagrin lui seyait à merveilles, la transformant en une beauté froide et amère. Elle ne s’illuminait plus qu’à de rares moments, notamment en présence de ses cadets et de Masamune, son fiancé. Pour le reste, elle était distante.

Kyokai fut installé dans un cercueil en bois finement sculpté, surélevé sur une table en pierres. Là, au centre de la pièce, il trônait élégamment. De nombreuses compositions florales ornaient le mémorial du jeune raen. Les couleurs vives des bouquets contrastaient nettement avec l’austérité de la roche. Son corps avait été lavé et soigneusement vêtu. Cela ne faisait plus aucuns doutes : la cérémonie des funérailles ne tarderait pas à arriver.

Eien resta assise un long moment devant la dépouille de son frère, le regard vitreux et l’air absent. Seule une miko lui tenait compagnie, occupée à ranger et nettoyer le sanctuaire, officialisant ainsi la prochaine étape du rite funéraire. Aucune des deux ne brisa le silence instauré par le deuil.
L’aînée Kusakari, le dos droit sur son tabouret, glissa machinalement un regard vers le petit écrin qui résidait sur une table derrière le défunt. La boite n’avait pas bougé d’un poil et renfermait toujours l’œuf de zu offert trois jours plus tôt par l’émissaire des Brumdelain. L’expression de la jeune femme en voyant l’objet rendit un éclat passager à ses yeux améthyste. On eut l’impression qu’elle redécouvrait son existence.

- Ayuri ? Dit Eien en s’adressant à la miko sans la regarder, fixant toujours d’une mine pensive le coffret fermé.
- Oui, Mizuki-hime ? Répondit l’autre femme, interrompu dans sa tâche.
- Il me semble que ton père s’est longtemps occupé de la volière. On raconte qu’il était passionné d’oiseaux et que tes sœurs et toi l’aidiez dans ses fonctions...

La miko Ayuri scruta Eien un instant, dubitative, le balai en main. Elle sembla chercher la raison d’une telle remarque mais se contenta de répondre poliment.

- En effet, nous l’assistions de temps en temps. Il prenait son métier très à cœur.

- Je m’en souviens, oui, poursuivit la princesse en détachant enfin son regard de l’écrin pour croiser celui de la miko. Son savoir en la matière était incontestable, nul autre n’aurait pu l’égaler…

Ayuri adressa ses remerciements à la Kusakari en s’inclinant bien bas. Cette dernière lui répondit par un sourire courtois qu’elle effaça presque aussitôt. Elle tourna de nouveau la tête vers l’humble coffret, redevenant impassible.

- Penses-tu qu’un œuf de zu ait une chance d’éclore dans une si petite boite ?

La jeune prêtresse suivit le regard d’Eien jusqu’à l’objet désigné. Elle analysa le coffret sans s’en approcher et marqua une pause avant de répondre.

- Je pense qu’il est ici depuis trop longtemps, trancha la miko qui tenta toutefois d’être le plus mesuré possible. Cet endroit est bien trop froid pour permettre la moindre couvaison.

Un silence s’imposa. Ayuri n’osa pas le briser et resta immobile, perplexe face à l’air soudainement intéressé d’Eien pour cet œuf qu’elle avait ignoré jusqu’à présent. Cette dernière, quant à elle, paraissait pensive.

- Je te remercie, Ayuri, conclut finalement la Kusakari, d’un ton détaché. Ce sera tout pour aujourd’hui. Laisse-moi maintenant, je dois prier mon frère.

La prêtresse s’exécuta alors. Elle accorda une révérence à Eien et quitta la crypte sans ajouter le moindre mot. Lorsque la raenne fut enfin seule, celle-ci se leva et approcha du cercueil. D’un geste doux et affectueux, elle embrassa le front de Kyokai et se redressa, portant encore un regard sur l’écrin. Elle hésita une seconde, préoccupée, puis se décida à contourner son cadet pour avancer vers la table du fond. Elle ouvrit le couffin matelassé où sommeillait l’œuf et resta debout devant lui un moment. Enfin, comme traversée par un élan de culpabilité, la jeune femme le sortit nerveusement de sa boite et retira son gilet pour l’emmitoufler dedans.
Elle s’éclipsa à son tour du sanctuaire, l’œuf au creux des mains, en se trouvant parfaitement ridicule.

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Message par Eternelle » 20 févr. 2018, 02:29




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- Pauvre inconsciente !

Ce jour-là, les murs de la demeure Kusakari tremblèrent. Quelques servantes s’arrêtèrent devant la porte close de la Grande Salle, l’oreille tendue, piquées par la curiosité. A l’intérieur, la voix du daimyo résonnait, vociférant sa colère.
La pièce était gardée par six bushis : trois situés à la droite du seigneur et trois autres à sa gauche. Tous gardaient un visage fermé et impassible, les mains derrière le dos, la carrure solennellement droite. Au centre, surélevé par une estrade, Kusakari no Kyokai trônait, debout, le doigt accusateur pointé vers sa fille aînée.

Eien gardait la tête baissée. Elle accepta la réprimande sans sourciller, résignée à ne pas contredire son père. Elle resta silencieuse de longues minutes, écoutant sagement les indignations de l’homme.

- Te rends-tu compte de ce que tu as fait ? Poursuivit le daimyo, l’air toujours courroucé. Réalises-tu ce qu’il aurait pu vous arriver si Gogei-san ne vous avait pas interrompu ?
- Je souhaitais simplement l’aider… Souffla l’adolescente à demi-mot, parlant pour la première fois.

Le seigneur fronça un peu plus les sourcils, assombrissant son regard. Il serra les poings et cria de plus bel…

- L’aider ?! Ce rituel que tu as préparé vous aurait tué tous les deux !
- Mais Père… Commença la fille, relevant ses yeux améthyste vers le raen pour se justifier.
- Tu n’es pas Hazakura ! Coupa Kyokai, de toute évidence peu enclin à écouter son enfant. Il n’est pas le frère qui t’es désigné !

La jeune Eien baissa de nouveau la tête, tourmentée. Elle fixa le sol, les yeux brillant d’une triste fatalité, terrée dans un silence de plomb. Soudain, une silhouette presque enchanteresse se dessina derrière le daimyo. Celle-ci fit un pas en avant pour se manifester.

- Allons, Kusakari-sama, permettez-lui de s’expliquer, déclara l’apparition, d’un ton cristallin. Votre fille a toujours agi avec prudence, peut-être aura-t-elle une raison valable qui justifiera son geste ?

La mère d’Eien accorda un regard sage à son époux. L’aura de la raenne irradiait l’endroit. Ses longs cheveux dorés tombaient en cascade le long de son dos, accessoirisés par deux larges baguettes scintillantes. Son kimono blanc était finement brodé et glissait sur le sol, à la manière d’une robe de bal. Son visage était lumineux, aussi bien par sa bienveillance que par son teint de porcelaine. Elle souriait à sa fille avec douceur, échangeant avec elle une approbation réconfortante.

- Soit, capitula Kyokai en croisant les bras, sans se défaire de sa mine irritée. Qu’as-tu à dire pour ta défense ?

L’aînée Kusakari hésita un instant, balayant son regard de sa mère vers son père, peu confiante. Enfin, elle posa une main sur son cœur, sincère, les yeux perdus dans le vide comme si elle se remémorait quelque chose.

- Je perçois la nature de son âme… Cette lumière corrompue par des énergies négatives. Je vois aussi celles des autres, à vrai dire. Mais, de toute évidence, la sienne m’interpelle beaucoup plus. Elle est comme un panier percé d’où s’échappe l’essence même de sa bonté, ne laissant plus que du ressentiment. Pardonnez-moi, je ne saurais l’expliquer aisément tant cela me parait abstrait…

Le chef de famille lui tourna le dos pour revenir s’asseoir sur son fauteuil. Il posa son bras sur l’accoudoir et se caressa le menton, scrutant sa fille d’un air à la fois pensif et sceptique. Sa femme, quant à elle, resta immobile, les mains jointes le long de son corps, d’une allure solennelle.

- Il n’est point rare que cela arrive, mon enfant, répondit-elle d’une voix monocorde, toujours aussi douce. Certaines personnes sont dotées d’une sensibilité plus accrue aux énergies vitales. Nous connaissons déjà tes facultés à communiquer avec nos dieux. Tel sera ton rôle entant que miko. Il va de soit que cette spiritualité t’ouvrira la voie d’une vision plus large du monde et des êtres qui y habitent.

La jeune fille écouta sa mère dans un silence respectueux. Bien que ces mots purent l’apaiser, son visage restait troublé. Elle paraissait être la gardienne d’un secret trop lourd à porter.

- J’ai vu sa tristesse se noircir en une violente colère, poursuivit Eien. Le troisième fils souffre dans l’ombre de ses frères. Il est seul. Bientôt, cette colère sera l’outil qui contribuera à ravager notre patrie… Je ne pouvais laisser cela arriver.
- Et donc ta solution est d'accroître la force de ton cadet en lui transmettant ta propre énergie vitale ? Cassa le patriarche, tout aussi déçu qu’agacé par la remarque. Je t’ai connu plus sage, ma fille.
- Il doit se sentir égal à nous pour éviter que cette frustration ne devienne dangereuse. Un homme furieux est un homme déraisonnable. Le rituel dont il a été privé étant enfant a laissé un vide dans son cœur qui ne se comblera que par la haine et la vengeance. Je vous en prie, Père, écoutez cette prophétie !

Le daimyo et son épouse échangèrent tous deux un regard plus loquace que mille mots. L’homme semblait attendre une approbation de sa femme, de toute évidence bien plus pieuse que lui. Celle-ci hocha très subtilement la tête en guise de réponse. Kyokai reporta alors son regard violacé vers Eien, le ton se radoucissant un peu, quoi que toujours ferme.

- La perte de ma dernière fille a définitivement scellé le destin du frère qui lui était désigné, reprit-il. Nos traditions sont formelles et inflexibles. Il est exclu que nous bafouions nos préceptes les plus ancestraux pour satisfaire l’interprétation inexacte d’une vision que quiconque retranscrirait sans fondement.
- Mais enfin, écoutez-moi ! Insista la jeune raenne, haussant à peine le ton dans l’espoir de se faire entendre.
- ASSEZ ! Nous ne discuterons plus de cela et tu ne retenteras jamais de célébrer ce rituel sacré ! Va maintenant, et remercies ta mère pour sa clémence. Je t’épargne, grâce à elle, la sanction qui t’était réservée.

Eien implora alors sa génitrice du regard. Cette dernière se contenta de lui sourire d’un air navré, l’incitant à faire profil bas. Vaincue, la fille Kusakari s’inclina tristement vers ses parents sans rien ajouter. Elle tourna les talons et sortit de la pièce, muette, en grinçant des dents.
***
- Eien-chan ? Vous m’écoutez ?

Une voix lointaine tira Eien de ses souvenirs. La princesse cilla deux, trois fois, avant de se reconnecter à la réalité. Elle se tourna vers l’endroit d’où venait cette voix familière et accorda un sourire peu convaincant à Masamune qui la zieutait d’une mine inquiète. Enfin, elle reporta son attention sur la vue qu’offrait la fenêtre de sa chambre.
Au loin, une épaisse fumée noire s’élevait jusqu’au le ciel. Les funérailles de son frère cadet et de sa mère étaient terminées depuis plus d’une heure, laissant l’aînée Kusakari dans une détresse inavouée. Les flammes du bûcher venaient tout juste de s’éteindre. La raenne observait l’endroit où c’était tenue la cérémonie sans cligner d’un œil pendant que son fiancé restait préoccupé par son état. L’atmosphère de la pièce était pensante.

Tout à coup, un craquement étouffé retentit. Eien eut un léger sursaut, le visage exprimant une hâte soudaine, comme si elle avait attendu ce bruit depuis des jours. Elle plongea machinalement son regard en direction d’une table près de la porte. Sur celle-ci logeaient deux coussins superposés entourés de quelques bougies allumées. D’un pas pressé, la princesse contourna Masamune et s’arrêta devant la table, retirant le premier coussin. Devant elle reposait l’œuf de zu, précédemment offert par les Brumdelain. L’aînée Kusakari inspecta l’éclosion qui brisa la coquille en trois larges parties distinctes, visiblement fascinée par la scène. Une minute plus tard, un poussin hideux à la longueur de cou disproportionnée piailla. Il scruta Eien avec insistance, de ses petits yeux blancs.

- Il va falloir lui donner un nom, maintenant, déclara le Umiken, aillant, lui aussi, assisté à la naissance.

La jeune femme ne répondit pas tout de suite. Elle se contenta de sourire d’une façon on ne peut plus mystérieuse sans quitter des yeux son zu.

- Je sais déjà comment l’appeler.

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