Menace sur La Brouillasse

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Kalten
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Menace sur La Brouillasse

Message par Kalten » 24 févr. 2016, 09:49

Chapitre 1 – Nuit meurtrière


Le jour déclinait rapidement à cette période de l’année et le froid se faisait plus vif au fur et à mesure que l’hiver approchait. Les chutes de neige se faisaient également plus fréquentes, le manteau blanc et cotonneux rendant encore plus difficile les conditions de vie dans La Brouillasse. Des bénévoles aidaient autant que possible les familles du quartier mais, sans une politique volontariste des autorités, cela ressemblait plus à de la survie. Ramir vivait dans ce quartier. A l’époque où La Brouillasse ne portait pas encore son nom, à l’époque où ce quartier de la ville était un endroit agréable, il vendait des étoffes. Son commerce était florissant. A tel point que son établissement recevait la clientèle de la haute noblesse Ishgardaise. La vie était belle même s’il était resté volontairement célibataire. Puis les Dravaniens avaient attaqué. Le quartier avait été détruit et laissé à l’abandon, avec ses habitants. Maintenant, il vivait de la mendicité et des vivres que des bénévoles lui fournissaient.

Assis sur sa paillasse miteuse, terne reliquat en coton de son ancienne vie, il regardait la neige traverser le toit délabré. Lui servant à la fois d’habitation et de boutique, sa maison n’était plus qu’une ruine. L’étage n’existait plus et ce qui lui servait autrefois de plafond était maintenant un toit prêt à s’effondrer. Le rez-de-chaussée était composé de deux grandes pièces. La première, la plus grande, avait été son échoppe. Maintenant, la pièce aux murs lézardés et aux fenêtres cassées lui servait de zone tampon entre l’extérieur et la seconde pièce, plus petite, où il vivait. Avec un petit rire, il prit maladroitement la bouteille de vin posée à côté de lui et en but une longue rasade, en versant un peu sur ses habits troués. Le peu d’argent qu’il gagnait en mendiant lui servait à alimenter son alcoolisme et ses longs monologues sur l’état Ishgardais abandonnant les siens et le prix exorbitant du vin. Son antre, comme il aimait l’appeler, regorgeait de bouteilles vides. Ramir ne savait pas ce que lui réservait l’avenir mais il se doutait qu’il aurait beaucoup de mal à s’en sortir. D’ailleurs, personne ne remontait de La Brouillasse. Quand vous y étiez, vous y restiez. La seule véritable façon de quitter La Brouillasse était les pieds devant.

Tout en maugréant, Ramir but à nouveau une grande gorgée de vin et posa la bouteille à côté de lui. Il n’avait pas sommeil. S’appuyant contre le mur gelé, il réfléchit à une façon de repartir de l’avant. N’importe quel petit boulot lui conviendrait. Même nettoyer les latrines des maisons nobles. Un rire lent et grave sortit de sa bouche en y pensant. Tous nobles qu’ils soient, ils déféquaient comme lui. Même leurs femmes avec leurs grands airs. Pestant, Ramir mima l’une de ces dames minaudant, l’air hautain. Une fois leur maison et leur fortune détruites par les Dravaniens, elles ne valaient guère mieux que les filles d’écurie.

Un bruit dans la pièce principale le ramena à la réalité. On aurait dit une pièce métallique raclant le sol. Ramir regarda de sa position assise le peu de lumière passant par la porte séparant les deux locaux. Ne voyant rien, il se rappela qu’il n’avait pas fini de boire le contenu de sa bouteille. Il la trouva à sa place et but longuement au goulot. Un nouveau raclement se fit entendre. Ramir maugréa en posant sa bouteille. Décidément, même ici, il ne pouvait pas être tranquille.

─ Hey ! Qui que vous soyez, vous êtes chez moi ! Alors, partez d’ici ou je viens vous mettre mon pied au cul !

Sa voix, bien que ferme, restait râpeuse par l’abus d’alcool. Et bien que légèrement saoul, il tendit l’oreille. Un reniflement lui répondit. Soit il y avait un marmot cherchant un lieu où dormir, soit il s’agissait d’un petit animal. Ramir se leva et se dirigea vers la porte. Il allait se faire plaisir en virant le ou les gamins de sa maison. Dans l’autre cas, il chasserait les rats s’il s’agissait de ces petits démons.

─ Vous êtes sourds ? Je vous ai dit de vous cass…

Personne. La pièce était vide. Pas de rats, pas d’animaux, pas de gamins. Ramir se détendit. Il pouvait donc finir de se saouler tranquillement. Il se retourna et eut un rot de surprise. Devant lui se tenait un individu reniflant sa paillasse.

─ Qu’est que tu fous là toi ?

L’individu se tourna doucement vers Ramir et sembla renifler dans sa direction. S’il n’avait pas été sous l’emprise de l’alcool, Ramir aurait trouvé anormal de voir un individu aussi grand et aussi maigre, légèrement courbé et les bras touchant presque le sol. Et surtout, il aurait trouvé inhumain le regard sans vie et les protubérances métalliques semblant soudées aux mains et au crâne de l’inconnu. Alors, au lieu de fuir, il fit un pas vers cet intrus.

─ Je t’ai dit…

Il n’eut pas le temps de finir que la créature montra ses dents, grises et pointues, et parcourut la distance qui la séparait du Hyur plus vite que sa constitution ne le permettait. Le cerveau de Ramir se remit enfin à fonctionner normalement et il réagit comme tout individu aurait réagit : il cria en se protégeant de ses mains. Ce fut tout ce qu’il put faire avant que les griffes métallique et les dents aiguisées ne lui déchirent les chairs et l’éventrent.

Kalten
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Message par Kalten » 25 févr. 2016, 16:19

Chapitre 2 – Premiers éléments


Le décor et la température n’étaient pas du tout les mêmes. La douceur de la nuit étoilée de La Brumée laissait place au froid mordant d’Ishgard. La sérénité de la terrasse du restaurant de Loki contrastait avec la grisaille miséreuse et crasseuse de La Brouillasse. Kalten prenait un verre avec Y’oreen et quelques amis devant le restaurant quand un Mog lui avait tendu un papier. Après l’avoir lu, il prit congé d’eux et se rendit à la Cité Sainte. On venait de le prévenir qu’un corps atrocement mutilé avait été découvert et que les habitants du quartier commençaient à se poser des questions. Si vraiment un meurtre avait été commis, Kalten connaissait la suite. Si les morts ne s’arrêtaient pas, les gens commenceraient à se murer chez eux, par peur. Des milices se mettraient en place car les autorités ne trouveraient rien ou ne feraient rien. Toutes personnes suspectes seraient une cible potentielle de ces milices. Les morts s’accumuleraient, innocents ou non. La garde royale finirait par intervenir pour remettre tout d’abord de l’ordre, puis pour trouver un bouc émissaire à défaut du meurtrier. Tout passerait ensuite sous silence jusqu’à ce le vrai fautif meurt de vieillesse ou se fasse prendre. Les endroits et les mœurs étaient différents, les méthodes non.

─ Plus les choses changent, plus elles restent les mêmes, murmura t’il en arrivant à La Brouillasse.

La fin de matinée approchait et les nuages, chargés de neige, tamisaient la lumière du soleil. Afin d’attirer un minimum l’attention, Kalten s’était paré de vêtements passe partout. Il avait tout de même pris soin de garder un couteau et une petite hache avec lui. Il se dirigea immédiatement vers la demeure concernée. Pour se rendre un peu plus crédible, il demanda deux fois son chemin. Nul doute que de nombreux badauds voulaient voir l’endroit où s’était perpétué le meurtre et interpellaient les habitants pour leur indiquer l’endroit. Arrivé sur place, Kalten fit une petite grimace. De nombreuses personnes observaient la maison, sans toutefois y entrer. Leur courage, ou leur curiosité, s’arrêtaient à quelques mètres de l’entrée. Il vit des nobles, déguisés pour l’occasion afin de ne pas se faire reconnaitre. Leurs manières les trahissaient mais ils ne semblaient pas s’en rendre compte. Ils rentreraient chez eux et raconteraient à leurs amis le courage qu’ils ont eu à se rendre sur les lieux du drame. Comme toujours, une scène de meurtre attirait les foules comme le miel les abeilles.

Kalten ne s’attarda pas et fit le tour de la maison, espérant y trouver une entrée secondaire. En effet, une porte était condamnée. Elle devait servir à faire entrer circuler marchandises. Kalten regarda l’état des planches barrant l’accès à la porte et, les trouvant pourries par le gel et l’humidité, les enleva sans problèmes. Il força sans souci l’entrée et pénétra dans une pièce aux murs délabrée. Une légère odeur de pourriture flottait dans l’air froid. Kalten trouva rapidement le corps. Du moins, ce qu’il en restait. Kalten s’approcha du tas de chairs déchiquetées. Il avait du mal à imaginer qu’il s’agissait d’un être humain. Une partie manquait, ce que voulait dire que la personne ou la chose à l’origine de ce meurtre l’avait soit mangée, soit emmenée. Il ne s’agissait donc pas d’un meurtre gratuit ou d’une vengeance, mais bien de l’œuvre d’un esprit malade. Kalten regarda autour de lui mais ne trouva rien. Il ne voulait pas fouiller la pièce principale car il préférait ne pas être vu. S’approchant des murs, il remarqua que l’un d’eux présentait de profondes rayures. Quelque chose ou quelqu’un disposait donc de longues griffes puissantes pouvant creuser un mur et préférait passer par les toits. Ne voulant pas rester trop longtemps, il sortit par la porte de derrière et prit le chemin le menant à un autre endroit de La Brouillasse. En chemin, il croisa des habitants qui commençaient à parler du meurtre. L’inquiétude s’entendait dans leurs paroles.

Kalten arriva enfin devant une bâtisse moins miséreuse que les autres. Les volets étaient déjà fermés. Kalten frappa doucement à la porte et attendit. Une jeune femme lui ouvrit et, le reconnaissant, lui sourit et l’invita à entrer. Dès que la porte se referma, une petite fille se précipita à sa rencontre et s’agrippa à son tibia, s’asseyant sur son pied.

─ Kalten ! Le cheval s’il te plait !

─ Loara, laisse Kalten s’asseoir, s’il te plait !

Isa, la mère de la petite, se penchait pour redresser sa fille mais Kalten l’en empêcha en souriant. Puis il avança en portant la petite sur sa jambe, faisant semblant d’avoir du mal à avancer.

─ Tu n’aurais pas pris du poids, toi ? demanda t’il en arrivant près de la chaise.

La petite se leva et fit une petite moue boudeuse.

─ On ne dit pas ça à une dame, Kalten. Et puis, je grandis, je prends pas de poids.

─ Ah oui, c’est sans doute parce que tu as grandi, c’est vrai.

Loara se retourna, tout sourire, et alla jouer avec sa poupée. Kalten s’assit à côté d’Harn, le père de famille. Celui-ci terminait de tracer des traits sur un plan. Isa apporta de quoi manger et boire et rejoignit sa fille. Kalten remplit les deux verres et porta le sien à ses lèvres.

─ Je suis allé voir sur place. Ce n’est pas beau à voir. Il ne s’agit pas d’un meurtre.

Harn soupira et posa son crayon. Il prit le temps, lui aussi, de boire un peu.

─ Alors, ça veut dire qu’il y en aura d’autres, c’est ça ?

Kalten opina. Il expliqua ce qu’il avait vu en évitant de se faire entendre de la petite qui essayait de se rapprocher. Mais sa mère veillait à ce qu’elle ne bouge pas.

─ Je vais rester un peu à Ishgard pour essayer d’en apprendre plus.

─ Et de mon côté, je vais me renseigner savoir si une enquête est en cours mais sincèrement j’en doute. Tant que cela reste cantonner à notre quartier, la Garde Royale ne viendra pas.

Kalten était obligé de reconnaitre qu’Harn avait raison. Il remarqua le cahier avec des plans de dessiner et interrogea Harn.

─ J’ai racheté la maison touchant la nôtre. Les occupants partent dans une autre région où ils ont de la famille. Du coup, je suis en train de voir pour faire une vraie chambre à Loara. Mais avant tout, il va falloir que je casse le mur séparant les deux maisons.

─ Alors, je vais rester avec vous et je vais vous aider. Ca fait longtemps que je n’ai pas fait autre chose que parcourir les chemins. Ca va me faire du bien. Demain, j’irai acheter les outils qu’il faut.

─ Vrai Kalten ? Tu vas rester un peu avec nous ?

Kalten vit que la petite avait réussi à s’approcher et Isa la tenait doucement entre ses bras.

─ Vrai, Loara. Je vais aider ton papa à agrandir ta maison et on pourra jouer aussi ensemble.

Le cri de joie de la petite fit sourire les trois adultes et ils passèrent une partie de la nuit à parler du futur. Un futur qu’ils espéraient maintenant moins noir.

Kalten
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Re: Menace sur La Brouillasse

Message par Kalten » 29 févr. 2016, 09:08

Chapitre 3 - Aménagements

Durant plusieurs jours, Kalten et Harn entamèrent les gros travaux : démolition de murs, retrait de fenêtres, évacuation des déchets… Ils ne touchaient pas au mur mitoyen de leur maison. Ce serait le dernier à être cassé, quand l’extension serait suffisamment chauffée. De temps en temps, Kalten voyait Harn se diriger vers un coin de la bâtisse et regarder autour de lui, plongé dans ses pensées. Kalten attendait qu’il lui parle mais jamais Harn ne voulut lui expliquer. Peut-être même ne se rendait-il pas compte que le Hyurgoth l’observait. Alors, un jour, Kalten alla voir Isa et lui parla de son mari. Isa s’occupait de recoudre leurs vêtements usés par les travaux une fois lavés et séchés. Elle arrêta son travail et montra une chaise à Kalten. Dès que celui-ci fut assis, Loara lui sauta dessus et entrepris de l’escalader par le dos. Le Hyurgoth se pencha un peu pour faciliter l’ascension de la petite tout en faisant attention qu’elle ne tombe pas.
─ Harn a un rêve, commença t’elle en regardant sa fille. Il a toujours aimé les livres et il souhaiterait ouvrir une petite échoppe. Mais nous sommes à La Brouillasse. Il le sait.
─ Et toi ? Qu’en penses-tu ?
Isa prit le temps de réfléchir avant de répondre.
─ Il serait près de nous. Il pourrait s’occuper un peu plus de Loara, ce qu’il n’a pas le temps de faire pour le moment.
Kalten hocha la tête et prit la petite dans ses bras pour la faire descendre de sa tête. Il lui sourit et retourna au travail.

Le soir venu, ils étaient tous les quatre réunis autour d’une bonne soupe aux légumes agrémentée de viande séchée et de tranches de pain frais à la mie épaisse et odorante. Les travaux avançaient bien. Kalten devait s’avouer qu’il aimait ces journées. L’appel des chemins et de l’aventure était toujours le plus fort mais aider Harn lui procurait un sentiment de tranquillité. Et puis, il était au plus proche des évènements qui pouvaient arriver. Depuis qu’il était là, la bête n’avait fait qu’une seule autre victime. Aucun lien ne semblait relier les personnes. La bête semblait frapper à l’aveugle. Ce qui rendait la traque d’autant plus difficile. Mais pour le moment, il avait autre chose à faire.
─ Je pensais à une chose, Harn.
Ils continuaient de savourer leur diner.
─ Un jour ou l’autre, il faudra bien sortir La Brouillasse de sa torpeur. Kalten vit que Harn l’écoutait maintenant.
─ Je me disais qu’il serait peut être intéressant d’ouvrir une boutique dans une partie de l’extension. Une petite boutique d’abord, car tu devras conserver ton travail d’origine le temps de voir si l’échoppe fonctionne bien. Mais à terme, si tout va bien, vous pourriez en vivre tous les trois décemment.
Kalten mangeait tranquillement mais il vit que Harn questionnait du regard sa femme. Celle-ci lui répondit d’un haussement d’épaules en lui souriant.
─ Tu es sérieux ?
Kalten posa sa cuillère et le regarda.
─ Tu ne rouleras pas sur l’or, c’est sûr. Mais tu pourrais en vivre si ça tourne bien. Et puis, je pourrais t’aider au début, d’une façon ou d’une autre.
Harn souriait à son tour. Il prit le temps de réfléchir.
─ J’ai toujours voulu vendre des livres. Toutes sortes de livres. Grimoires, histoires, aventures, essais. Tout. Mais ici ? Dans La Brouillasse ?
Harn essayait d’y croire. Kalten le regarda à son tour.
─ Si personne ne fait rien, pas même un petit quelque chose, alors La Brouillasse restera comme elle est. Tu sais très bien que les autorités ne feront rien pour vous aider. Alors c’est à ses habitants de s’en sortir par eux même. A eux de montrer qu’ils peuvent relever la tête et surmonter les difficultés. Pour ce qui est de la sécurité, je m’en chargerai au début. Et j’ai quelques connaissances qui voudront certainement donner un coup de main.
─ Mais et les livres eux-mêmes ? Je n’en ai aucun qui soit en état d’être vendu. Et j’en ai trop peu pour ouvrir un magasin.
Kalten sourit avant de répondre.
─ Pour les livres, ne t’en fais pas. Je t’en fournirai. Et pas la peine de penser à me rembourser. Je vais même te trouver de quoi rafistoler des livres en mauvais état. Ça te permettra d’avoir une clientèle supplémentaire.
Harn pensait rêver. Il s’imaginait déjà dans sa boutique, Loara courant dans les rayonnages. Et cela pourrait donner des idées à d’autres habitants du quartier. Il regarda Kalten, les yeux brillants.
─ Je sais comment il faudrait agencer les pièces.
Kalten sourit avant de reprendre sa cuillère à soupe.
─ On attaque demain alors.

Le lendemain, Harn expliqua à Kalten comment il voyait son futur magasin. Tout d’abord, quelque chose de simple et petit mais qui pourrait s’agrandir au fur et à mesure que la boutique rapporterait de l’argent. Il indiqua même une petite pièce qui pourrait servir d’endroit pour restaurer les livres. Ils travaillèrent toute la journée sur la pièce principale du magasin. Le soir venu, fourbus, ils rentrèrent à la maison. Ils virent Loara s’agiter sur le pas de la porte et courir vers eux.
─ Papa, Kalten ! Il y a une dame à la maison ! Elle ressemble à un ange ! Venez voir !
Se demandant de qui il pouvait s’agir, ils entrèrent et virent une jeune Miqo’te. Kalten eut un grand sourire.
─ Y’oreen, ma belle ! Tu es là !
La Miqo’te était assise à côté d’Isa, fusillant du regard le Hyurgoth, les lèvres pincées.

Ailleurs, dans un endroit sombre, la bête entendit des pas dans l’escalier. Elle grogna en reconnaissant l’Elezen. Celui-ci s’approcha d’elle, protégé par une grille aux barreaux épais. La bête le regardait, attendant.
─ C’est l’heure d’aller manger ma belle. Autant que tu voudras.
Il actionna un levier et une porte s’ouvrit. La bête grogna de plaisir et passa la porte, se dirigeant vers La Brouillasse. L’Elezen souriait.

Kalten
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Re: Menace sur La Brouillasse

Message par Kalten » 01 mars 2016, 09:12

Chapitre 4 – Première fois

Le cadavre ne fut découvert qu’au petit matin. Encore une fois, la bête avait réussi à agir discrètement. Tout du moins, sans que quiconque ne s’en rende compte. Kalten devait trouver une solution rapidement. Il avait quelques certitudes mais rien ne pouvant l’aider à trouver la bête. Tout d’abord, les victimes ne semblaient avoir aucun point commun à part qu’elles habitaient toutes La Brouillasse. Cela voulait-il dire que sa cachette se trouvait quelque part dans le quartier miséreux ? Ou bien y avait-elle accès par un tunnel ? De plus, pourquoi uniquement à La Brouillasse ? Les autres quartiers étaient certes surveillés par la garde, il y avait aussi plus de personnes pouvant l’apercevoir, mais la bête semblait pouvoir agir discrètement et rapidement. Elle pourrait donc tout aussi bien intervenir ailleurs. Plus il y pensait, plus Kalten se disait que La Brouillasse était visée. Ce qui impliquait également que soit la bête était dotée d’une intelligence et d’une raison hors norme, soit quelqu’un la manipulait, soit les deux. Il en avait parlé à Harn ainsi qu’à Y’oreen et eux aussi en venaient aux mêmes conclusions. Il allait falloir ruser pour sortir la bête de sa cachette.

Kalten et Harn avaient fini le gros œuvre de la nouvelle maison. Harn pouvait maintenant s’occuper seul de la suite des travaux, permettant ainsi à Kalten de réfléchir à une solution. Mais aussi de passer plus de temps avec Y’oreen. La jeune Miqo’te s’était sentie suffisamment confiante pour le rejoindre à Ishgard. Et puis le fait qu’il ne lui expliquait certainement pas tout sur cette histoire l’avait motivée pour lui expliquer le fond de sa pensée face à face. Leurs retrouvailles avaient donc commencé par un sermon virulent de la jeune Miqo’te, empêchant tout simplement le Hyurgoth de s’expliquer quand il voulait parler, faisant sourire le couple les hébergeant et ouvrir de grands yeux d’étonnement à la petite. Puis, aussi rapidement que passa une tornade, elle s’était jetée dans les bras de Kalten en l’embrassant, non sans avoir préalablement fait une grimace et minaudé avec ses oreilles, sachant pertinemment que cela désarmait le Hyurgoth. Harn avait tapé amicalement sur son épaule, un grand sourire compatissant aux lèvres, et Kalten avait levé les yeux au ciel, tout en gardant précieusement la Miqo’te dans ses bras. Le lendemain matin, Y’oreen avait eu une discussion avec Isa sur ce que faisait leurs maris respectifs. Ensuite, elle s’entretint avec Harn, lui expliquant qu’elle s’occuperait de lui fournir différents livres traitant de remèdes médicinaux variés. Elle l’aida même à définir à l’avance comment agencer ses futurs rayonnages. Elle passa le reste de la journée avec Kalten. Il lui fit découvrir Ishgard et ses paradoxes. Y’oreen fut atterrée de voir comment vivaient les miséreux. Dès le lendemain, elle commença à prodiguer des soins simples mais vitaux aux différentes personnes qu’elle rencontrait. Elle prenait aussi le temps de discuter avec les gens. Le plus souvent accompagnée de Kalten, elle lui lançait de temps en temps un regard de reproche car il intimidait de par sa taille et son visage. Ou bien était-ce le fait qu’il vienne toujours armée de sa lance ? La rumeur commença à se répandre qu’un ange avait élu domicile à La Brouillasse et, même si la misère restait visible, les gens retrouvaient un peu d’espoir.

Une chose ne changeait cependant pas. Dès que la nuit arrivait, tout le monde rentrait chez soi, priant pour ne pas être la prochaine victime de la bête. Alors, certains soirs, Kalten patrouillait dans les rues. Y’oreen l’accompagnait de temps en temps, quand elle n’était pas épuisée par ses longues journées de soins. Elle n’aimait pas le savoir seul à la recherche d’une créature dont personne ne savait rien ou presque. Et puis le voir revêtir cette armure lui faisait faire la grimace. Quelque chose changeait en lui à chaque fois qu’il s’en équipait. Ses tatouages semblaient prendre vie, se mouvoir sur son visage sans changer de forme. Son regard devenait plus sauvage, ses traits se durcissaient. Comme elle voulait en savoir plus, elle l’accompagnait. Et plus elle patrouillait avec lui, plus elle s’apercevait qu’il restait le même, ce qui la rassurait. Mis à part ses tatouages et son regard. Kalten voyait bien que Y’oreen était trop fatiguée pour l’accompagner. Mais jamais il n’aurait pris le risque de le lui dire, s’épargnant ainsi de virulentes répliques. Il savait déjà qu’elle n’en ferait qu’à sa tête. Donc, certains soirs, il mettait un peu plus de temps à s’équiper, ou bien il feignait d’avoir à parler à Harn. La jeune Miqo’te s’asseyait alors et s’endormait rapidement. Il partait ensuite seul dans les rues après l’avoir allongée sur le lit. Mais ils étaient ensemble quand la rencontre eut lieu.

Cela faisait plusieurs lunes qu’il n’y avait plus eu de morts. Mais tout le monde savait que cette accalmie ne durerait pas. Les rues étant désertes, le couple évoluait tranquillement tout en se faisant le plus discret possible. Ils connaissaient maintenant suffisamment le quartier pour s’orienter d’instinct. La lune, pas encore pleine, était haute dans le ciel étoilé. Sa lumière froide donnait un aspect fantomatique aux masures plus ou moins délabrées. Y’oreen et Kalten allaient terminer leur ronde quand le Hyurgoth s’arrêta en faisant un signe à sa compagne.
─ Kalten, il y a quelque chose d’étrange sur la droite. C’est diffus mais malveillant.
Kalten avait appris à se fier au symbiote l’habitant. La noirceur appellait la noirceur et il se doutait que c’était pour cette raison qu’il ressentait quelque chose. Il fit un signe de tête à la Miqo’te en montrant la droite et avança doucement dans cette direction, les sens aux aguets. Le groupement de maisons était peu habité malgré le retour de quelques personnes. Si la bête commençait à s’activer dans les endroits plus peuplés, cela voulait dire qu’elle prenait de l’assurance. D’ailleurs, qui oserait l’attaquer, vu ce qu’elle pouvait faire ? Le couple contourna les maisons pour vérifier l’arrière.
─ Il y a vraiment quelque chose, Kalten. C’est mauvais et dangereux !
Tout à coup, il y eut un grand fracas et des cris de peur suivirent immédiatement. Kalten bondit en avant, cherchant d’où venaient les hurlements, non sans s’être assuré que Y’oreen le suivait. Il vit une fenêtre fracturée et regarda à travers. L’intérieur, spartiate, laissait voir ce qui ressemblait à un être difforme penché sur sa victime, qu’il consommait déjà avec de nombreux bruits ne laissant aucun doute. Y’oreen pâlit en entendant mais tint bon et prépara ses sorts de protection. La bête ne les avait pas encore vus. Kalten jura intérieurement et se dirigea vers la porte. Y’oreen lança ses sorts au moment où Kalten brisa la faible porte d’un grand coup de pieds. La bête se retourna avec un grognement tout en tenant un morceau indéfini de ce qui avait été un Elezen dans sa main. Suivi de Y’oreen qui restait derrière Kalten, les deux combattants se toisèrent. Surmontant deux pattes griffues servant de pieds, ce qui soutenaient la bête ressemblaient à des jambes musculeuses arquées dans le mauvais sens mais proposant ainsi une grande puissance de saut et de vitesse. Un tronc maigre laissait entrevoir les côtes ainsi que la respiration saccadée du monstre. Deux bras aux muscles secs amenaient à des doigts équipés de griffes acérées en métal. Un cou trop petit aux veines saillantes et palpitantes était surmonté d’un museau étrangement difforme mais à la mâchoire puissante. Deux yeux malveillants et un trou servant de nez terminaient la bête. Kalten tira lentement son arme de son fourreau et la tint devant lui. La bête grogna en le voyant faire mais ne se précipita pas. Elle le regarda puis observa attentivement la jeune Miqo’te derrière lui. Kalten entendit Y’oreen jurer doucement.
─ Hey, l’affreux ! C’est moi qui suis devant toi !
Kalten attira l’attention du monstre. Il se devait de protéger Y’oreen non seulement parce qu’elle était sa femme mais aussi car elle était mage et ne pourrait donc offrir aucune défense contre ces griffes. Du sang dégoulinait de la mâchoire ainsi que des doigts métalliques.
─ Personne ne t’as appris à manger proprement ? Viens vers moi, viens voir tonton Kalten, je vais t’apprendre les bonnes manières !
Kalten fit un pas en direction de la bête. Celle-ci fit un pas en arrière et regarda les deux êtres pleins de sang et de muscles succulents. Elle renifla un court instant puis émit ce qui ressemblait à un grognement de satisfaction. Sa mâchoire se referma et elle se détendit. Kalten n’apprécia pas cette attitude. Seul quelque chose douée de raison pouvait agir de la sorte : observer, soupeser les possibilités, réfléchir. Cette créature n’était pas normale.

Tout à coup, la bête lança ce qui ressemblait à un bras sur Kalten et prit la fuite. Le Hyurgoth para le membre et se plaça d’instinct entre la bête et Y’oreen. Mais le monstre sauta à travers la fenêtre brisée et prit la fuite à une vitesse impressionnante. Il était inutile de vouloir la rattraper. Kalten rangea son épée et se tourna vers sa compagne. Y’oreen semblait regarder au loin.
─ Y’oreen ? Tu vas bien ?
Kalten se rapprocha d’elle, légèrement inquiet. Elle se réveilla et le regarda, le regard vague.
─ Kalten, j’ai vu son regard.
Kalten caressa doucement sa joue.
─ Oui, moi aussi ma belle.
Elle hocha la tête.
─ Non, tu ne comprends pas. Elle m’a observée et j’ai eu comme une impression. Et plus j’y pense, plus cette impression devient une certitude.
Kalten la regarda et l’interrogea du regard. Les intuitions de Y’oreen étaient souvent juste.
─ Kalten, c’étaient des yeux humains.

Kalten
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Re: Menace sur La Brouillasse

Message par Kalten » 04 mars 2016, 14:17

Chapitre 5 – Rendez-vous nocturne

Kalten profitait encore un peu de la douceur nocturne de La Brumée avant de repartir pour Ishgard. Il avait enfin pu se libérer pour assister à la représentation dont il entendait souvent parlée. Les personnes autour de lui semblaient n’avoir pas beaucoup apprécié le spectacle. Il en avait entendu même quelques uns déclarer s’être ennuyés, principalement car il n’y avait pas possibilité de danser. Lui, au contraire, avait profité de chaque instant, de chaque morceau de musique et de chant. Il avait pu penser à autre chose pendant ces quelques instants. Certaines mélodies lui rappelaient son monde d’origine quand d’autres le berçaient tout simplement. Un peu avant la fin de la représentation, il sortit et fut rejoint par Cyrcée et Arcane, puis par Desmee et Falkhen. Il put s’apercevoir que les relations entre les deux femmes ne s’étaient pas améliorées. Et pour rien au monde il ne voulait se mettre entre elles deux. Il était resté avec Falkhen, Desmee et un certain Didimiaou qui voulaient le questionner sur la représentation du Phénix de Falkhen. Kalten les avait mis en garde contre cette invocation puis était parti rejoindre Cyrcée dans son Dojo. Il lui avait expliqué qu’il aurait besoin d’elle ainsi que d’autres aventuriers pour trouver et éliminer la menace que représentait la bête. Maintenant, il était là, sur le perron dominant la plage, seul. Le spectacle lui avait permis de se détendre mais il était venu seul. Il aurait du insister auprès de Y’oreen pour qu’elle l’accompagne mais la jeune Miqo’te voulait terminer un inventaire de livres à destination de la future boutique de Harn.

Il entendit un léger battement d’ailes et un petit animal vint se poser sur son épaule. Pendant quelques secondes, le Chevalier Dragon et sa wyvern regardèrent les cieux étoilés puis Kalten entendit son amie grogner. Kalten se retourna et vit un mog s’approcher peureusement.
─ Elle ne va pas te manger, ne t’inquiète pas.
Le petit mog ne se calma pas pour autant.
─ Alors pourquoi elle me montre les dents, kupo ?
─ Azure aime bien taquiner les gens, c’est tout. Elle ne te fera aucun mal mais n’approche pas trop tes mains d’elle quand même.
Le mog tendit une lettre en tremblant un peu. Kalten la déplia et hocha la tête.
─ On repart tout de suite Azure. Nous avons un rendez-vous il semblerait.
Kalten se raprocha d’une éthérite, se concentrant sur sa destination tout en posant une main sur le petit cristal. Il disparut dans un nuage bleuté. Presque au même moment, il se retrouva à La Brouillasse. Il regarda brièvement Azure et celle-ci sembla s’évaporer. Kalten sourit et s’engagea dans les allées sombres pour rejoindre un endroit qu’il connaissait bien. Il fit le tour de la maison avant de s’approcher de la porte d’entrée. Il pouvait voir que les restes du défunt Elezen, dernière victime en date de la bête, étaient toujours présents. Avant qu’il n’entre, une voix l’arrêta.
─ Bonjour Chevalier Dragon. Je vois que vous êtes venu promptement.

Kalten se retourna doucement et vit une silhouette encapuchonnée à quelques mètres devant lui.
─ Il aurait pu s’agir d’un guet apens, vous vous en rendez compte ?
─ J’ai des raisons de penser qu’il s’agissait d’un rendez-vous amical répondit-il en appuyant sur le dernier mot.
─ Et vous avez raison. Je voulais vous voir pour vous parler. Seul à seul.
─ Me parler de quoi ?
─ Mais de la bête voyons. Je suis son gardien, son père.
Kalten n’était pas étonné par les propos de l’inconnu. Il avait déjà rencontré ce genre de personnage. Il allait lui expliquer pourquoi il faisait ce qu’il fait, que c’était pour le bien de l’humanité, ou pour faire évoluer la ville. Il allait le mettre en garde ou bien lui proposer de se joindre à lui. Encore une fois, Kalten se rendait compte que plus les choses changeaient, plus elles restaient les mêmes.
─ Je vous propose de procéder de la façon suivante : vous me posez des questions et j’y réponds, Sire Tamral.
Kalten croisa les bras avant de commencer à jouer. Car il s’agissait bien d’un jeu, du moins pour l’inconnu.
─ Comment connaissez-vous mon nom ?
─ Il est difficile pour une personne telle que vous de rester inconnu, Sire Tamral. Et comment va votre charmante épouse ? Toujours en train de porter secours aux habitants de La Brouillasse ?
S’il y a bien une chose que Kalten n’aimait pas, c’était que l’on menace Y’oreen. Il se tendit avant de continuer.
─ Passons à autre chose. Il ne voulait pas que la discussion s’oriente vers sa femme. Quel est votre but ? Car j’imagine que vous ne faites pas une expérience ?
L’inconnu ouvrit ses bras, comme voulant englober le quartier.
─ J’assainis Ishgard de sa vermine.
"Nous y voilà" pensa Kalten.
─ La Brouillasse, telle qu’elle apparait actuellement, ralentit la progression d’Ishgard.
─ Mais ses habitants n’y sont pour rien. Ils ne demandent qu’à sortir de leur condition. La guerre les y a plongé.
─ Vous avez raison. Ils ne peuvent donc plus servir Ishgard à sa juste valeur. Mais vous, vous le pouvez, Kalten. Joignez-vous à moi, Chevalier Dragon. Nous sortirons Ishgard de sa torpeur et elle resplendira sur tout le continent et au-delà ! Rien ne nous arrêtera.
Kalten sourit devant la suffisance de l’inconnu.
─ Tout le monde peut être arrêté au contraire. A un moment ou à un autre tout s’arrête.
L’inconnu replia ses bras autour de lui.
─ J’en conclu donc que vous ne viendrez pas avec moi ? Je m’en doutais. Je connais votre façon de faire. Je connais tout de vous. Vos forces, vos faiblesses. Tout.
Kalten, nous ne sommes pas seuls.
─ J’ai comme l’impression que vous allez me laisser avec quelques-uns de vos amis, n’est-ce pas ?
L’inconnu ne dit rien mais Kalten savait qu’il devait sourire. Au même moment, quatre inconnus aux visages masqués sortirent de l’ombre. Deux avaient des arbalètes, le troisième une lance et le dernier une épée.
─ Je dois en effet retourner à mes affaires. Amusez-vous bien, Sire Tamral. Au plaisir de vous revoir.

L’inconnu partit, accompagné du lancier et de l’épéiste. Ne restaient que les deux arbalétriers. Kalten ne bougea pas. S’il faisait le moindre geste en direction de son arme, ils tireraient. Il les observa, bandant ses muscles, attendant le bon moment. La neige commença à tomber, épaisse et silencieuse. Les arbalétriers laissèrent l’inconnu disparaitre et fixèrent Kalten. C’est à ce moment qu’Azure apparut au-dessus des deux inconnus. Elle cracha un jet de flammes sur l’un d’eux qui s’enflamma aussitôt. Kalten prit sa lance et sauta sur le second, l’assommant. Il abrégea les souffrances du premier arbalétrier puis fit un geste en direction de la wyverne. Celle-ci disparut aussitôt. Se tournant dans la direction prise par l’inconnu, il s’aperçut que la neige recouvrait déjà les traces. Inutile de tenter de le suivre. Ne lui restait donc que l’arbalétrier qu’il avait assommé. S’approchant de lui, il se rendit compte que quelque chose clochait. Il se pencha vers l’Elezen. Celui-ci ne respirait plus. L’inconnu avait pensé à tout. Il avait dû préparer un sort quelconque tuant ses hommes s’ils se faisaient prendre. Malgré les apparences, Kalten avait appris certaines choses ce soir. Il prit une profonde inspiration, regardant les masures délabrées autour de lui. La menace était bien réelle et elle se précisait. Kalten ferma les yeux et leva la tête. La neige mouilla son visage. Après plusieurs minutes, il rouvrit les yeux et soupira. Il était temps de rejoindre sa femme.

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Re: Menace sur La Brouillasse

Message par Kalten » 07 mars 2016, 09:20

Chapitre 6 – La traque

Ils avaient réussi à tromper la bête. Deux zones de La Brouillasse semblaient l’attirer. Kalten avait donc monter deux groupes, un par zone, pour faire des maraudes en priant pour que cela fonctionne. Le premier groupe, formé de Cyrcée et Loki, avait pris la partie Ouest. Le second groupe, dont il faisait parti avec Y’oreen ainsi que sa Wyvern Azure, avait pris l’Est. Comme il leur avait expliqué, l’objectif n’était pas de tuer la bête mais de la débusquer et la blesser pour la faire fuir. Ensuite, Cyrcée et Azure n’aurait plus qu’à la suivre jusqu’à sa tanière. Il fallait trouver son antre pour être certain qu’elle était la seule de son espèce. Ce plan s’avérait dangereux sur de nombreux points mais il y avait, dans tout plan, une part de risques inévitable.

Ils avaient donc commencé leur maraude, se faisant le plus discret possible pour surprendre la bête. Kalten savait très bien qu’il fallait qu’elle s’attaque, et donc qu’elle tue, quelqu’un pour pouvoir la débusquer. Il n’y pouvait rien mais il espérait quand même ne pas en arriver là. La nuit était comme toujours glaciale mais il ne neigeait pas malgré un plafond nuageux bas. Par moment, ils communiquaient par linkperle pour parler de tout et de rien. Y’oreen croisaient de temps en temps personnes qui la reconnaissaient et elle en profitait pour les réconforter un peu, elle qui passait la majeure partie de ses journées à soigner tant physiquement que moralement les miséreux.

Plusieurs heures passèrent ainsi jusqu’à ce qu’Azure lui envoie une pensée que Kalten traduisit par danger et Miqo’te. Aussitôt, il comprit. Lors de leur première rencontre, la bête avait pris le temps de dévisager Y’oreen. Maintenant, il savait qu’elle était sa prochaine victime. Alors, sans réfléchir, il hurla son nom et plongea au sol avec sa femme dans les bras. Au même moment, il sentit plus qu’il ne vit une masse atterrir à l’endroit où se trouvait la Miqo’te auparavant. Kalten poussa Y’oreen derrière lui et sortit sa lance, parant une attaque de la bête. Des étincelles crépitèrent quand les griffes métalliques rencontrèrent son arme. La bête cherchait à passer la défense du Hyurgoth pour atteindre la jeune Miqo’te. Kalten devait tenir en attendant l’arrivée de Loki et Cyrcée. Il savait qu’ils avaient compris ce qu’il se passait dès qu’ils l’avaient entendit hurler le nom de sa femme. Azure, qui semblait comprendre ce qu’elle devait faire, harcelait la bête tel un moustique cherchant à piquer. Elle permettait ainsi à Kalten de gagner du temps et de mieux protéger Y’oreen. La bête s’énervait tellement à tenter de chasser la Wyvern qu’elle ne vit pas deux formes arriver derrière elle.

Cyrcée et Loki prirent tout de suite compte de la situation. Cyrcée sortit ses dagues et sauta sur le dos de la bête. Elle tenta de les lui planter mais celle-ci semblait disposer d’une protection magique car aucune des dagues ne parvinrent à traverser la peau rugueuse. La bête se contorsionna dans tous les sens pour chasser ce nouvel intrus. Loki, dont les pouvoirs étaient amoindris, s’approcha et se servit d’un madrier comme d’une masse d’arme sur le ventre de la bête. Le bois éclata et le monstre, énervé de cette nouvelle gêne, lacéra les vêtements et le ventre du Hyurgoth. Avec un cri de douleur, celui-ci recula. Dans un état second, il psalmodia sans réfléchir et une boule d’énergie vint percuter le dos de la bête alors que Cyrcée avait réussi à se mettre à couvert. Au même moment, Kalten effectua un Saut, tranchant profondément dans ce qui ressemblait à un mollet et touchant l’os. Blessée, la bête n’en était que plus dangereuse. Elle renifla l’odeur de sa chair brûlée et gouta à son sang. Un grognement haineux sortit de sa gorge alors qu’elle fixait le mage en léchant ses lèvres dégoulinantes. Loki , étonné d’avoir pu lancer un tel sort, se mit en position défensive, Cyrcée se préparant à attaquer si la bête voulait se lancer sur son ami. Y’oreen choisit ce moment pour guérir Loki, effectuant un Soin plus curatif que d’ordinaire. La bête se tourna alors vers la mage blanche, grognant de dépit et de rage. Alors qu’elle fit un pas en direction de la Miqo’te, Kalten se plaça entre les deux, un sourire mauvais aux lèvres, sa lance dansant doucement entre ses mains. La bête observa le couple, semblant se rendre compte de quelque chose, et recula contre le mur. Les quatre compagnons ainsi que la Wyverne formèrent un demi-cercle, empêchant ainsi la bête de s’enfuir. Celle-ci les regarda tour à tour et se recroquevilla.
─ Gaffe ! clama Kalten. Elle prépare un mauvais coup !
Alors, sans prévenir, la bête prit appui sur le mur branlant et tendit brusquement ses jambes, lui arrachant un cri de douleur à cause de son membre inférieur gravement tranché. Le saut qu’elle effectua au dessus du groupe les surprit tous. De nouveau libre, elle prit alors la fuite. Cyrcée grogna.
─ Elle court vite cette saleté !
─ Cyrcée ! Azure ! A vous de jouer !
La Miqo’te et la Wyverne s’élancèrent aux trousses de la bête. Kalten prit le temps de vérifier que Y’oreen allait bien puis se dirigea vers Loki. Celui-ci regardait sa chemise éventrée.
─ Et voilà ! Encore une chemise de fichue !

Kalten tapa de la main le dos du mage et tous trois partirent au petit trop, suivant les indications que leur fournissait Cyrcée par la linkperle.
Ils gravirent des amas de débris, passèrent sous des planches et poutres pourries et gelées et rejoignirent Cyrcée à l’entrée d’un trou. Kalten ne voyait pas Azure. Cyrcée leur montra l’étendue noire devant eux.
─ Elle a filée par là. Azure l’a suivie.
Elle jura en draconique.
─ C’est noir comme dans une tombe là-dedans.
Kalten doutait que cette traduction soit la bonne mais elle avait le mérite de dire vrai. Le Hyurgoth ressentit les pensées et les émotions de sa Wyverne. Y’oreen regarda les ténèbres devant elle.
─ Et comment va-t-on faire pour avancer ? interrogea t’elle.
─ Je peux voir dans la pénombre, répondit Cyrcée. Mais là, c’est beaucoup trop noir. On tomberait dans un piège que l’on ne s’en rendrait compte qu’au dernier moment.
Kalten fixa le trou, comme s’il voulait trouver la Wyverne.
─ Azure va nous aider. Ce qu’elle ressent, je le ressens, et vice-versa. S’il y a un danger quelconque, elle nous préviendra. Pour ce qui est de l’obscurité, nous prendrons une torche.
Puis, comme s’il se rendait compte de quelque chose, Kalten se tourna vers le groupe.
─ Je vous ai déjà beaucoup demandé. Cette mission est la mienne. Et je ne sais pas ce que l’on pourrait rencontrer. Si vous voulez en rester là, je comprendrais tout à fait…
Le regard glacial que lui lança Y’oreen lui fit comprendre qu’il valait mieux qu’il se taise.
─ Et qui va vous protéger, le petit chat et toi ? répondit Cyrcée. Si je ne suis pas là, vous seriez capable de faire des bêtises. Et quand je dis bêtises….dit-elle, regardant Y’oreen en souriant.
Y’oreen devint cramoisie et trouva la contemplation des gravats magnifique.
─ On est frères, Kalten, je te rappelle. Donc, là où tu vas, je vais. Y a pas à négocier. Et pour ce qui est de la lumière, pas besoin de torche.
Le mage sortit une petite boite de sa besace, regarda autour de lui et se pencha pour prendre un morceau de madrier qu’il fendit. Il aspergea celui-ci d’un peu de poudre venant de la boite et psalmodia quelques secondes. La poudre émit un léger chuintement puis prit feu. Avec un sourire suffisant, il regarda Kalten. Celui-ci leur souriait. Inutile de les remercier, il le savait.
─ Cyrcée, tu te mets en tête du groupe avec Loki derrière toi. Prends la torche aussi. Y’o, ma belle, derrière Loki. Je ferme la marche. On avance avec précaution mais le terrain semble sûr. En avant, qu’on en finisse enfin.
─ C’est parti ! fit Cyrcée avec un sourire carnassier.

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Re: Menace sur La Brouillasse

Message par Kalten » 11 mars 2016, 09:13

Chapitre 7 – Mélodie nocturne

Le groupe avançait à bonne allure malgré les conditions. Assez grand pour Y’oreen et Cyrcée, Kalten et Loki devaient se courber un peu pour évoluer dans le boyau. La torche éclairait suffisamment pour qu’ils puissent voir où ils marchaient et ce qu’il y avait devant eux. Ils commencèrent par descendre puis le chemin sembla s’aplanir. Après quelques minutes, le boyau remonta, leur indiquant qu’ils avaient probablement quitté le quartier de La Brouillasse. Pour arriver où ? Comment un tel souterrain avait-il pu être creusé ? Et dans quel but à l’origine ? Ils virent au loin une lueur : la fin du tunnel. Kalten ressentait les émotions de sa Wyverne : calme et attente. Il murmura au groupe qu’il n’y avait aucun danger apparent mais de rester vigilant. D’autant plus qu’ils entendaient par moments une voix accompagnée d’une plainte. Cyrcée les fit ralentir comme ils approchaient de la lumière. Elle observa rapidement l’endroit afin de détecter une éventuelle présence. Elle aperçut à l’autre bout de la caverne la bête allongée avec a ses côtés un Elezen qui lui parlait doucement. Elle indiqua aux autres qu’ils pouvaient sortir. Ce qu’ils firent en se déployant, prêts à intervenir au cas où.

Ils se trouvaient dans une vaste caverne éclairée par de nombreuses torches. Une grille aux barreaux épais fermait la partie ouverte et un escalier montait, de l’autre côté. Azure vint se poser sur l’épaule de Kalten et il caressa doucement le cou de la petite créature. Avec ce regain de lumière, ils virent les traces de sang laissées par la bête blessée. Elle était allongée, gémissant par moment, un inconnu lui parlant doucement, une main caressant sa gueule. Kalten fit quelques pas et toussa pour se faire entendre. L’inconnu tourna la tête et se leva, leur faisant face. La bête se contentait de les regarder.
─ J’imagine que vous êtes ceux qui l’ont blessée.
L’Elezen regarda tendrement la bête.
─ Cela devait arriver tôt ou tard, bien sûr. Et dans un sens, je l’espérais.
L’inconnu les regarda à nouveau.
─ Je suis Hortay, un dignitaire de notre Sainte Cité. Et je vous présente ma fille, Ryysa, ou ce qu’elle est devenue.

Tous ouvrirent de grands yeux, étonnés. Même la voix dans la tête de Kalten y alla de sa petite phrase.
─ Là, je ne sais pas quoi dire…
─ Je crois que quelques explications s’imposent, l’Elezen s’accroupissant à côté de la bête.
─ Ryysa a toujours été intéressée par la magie. Sous toutes ses formes malheureusement. Il y a quelques années, elle a réussi à obtenir un vieux grimoire d’une magie obscure, maudite même. Une magie capable d’invoquer des démons, des goules. Cette magie impliquait l’utilisation de potions pour pouvoir « accroitre » l’efficacité de certains sorts. Sa mère et moi n’en savions rien. Nous étions trop occupés par nos affaires et, quand nous étions avec notre fille, rien n’indiquait ce qu’elle s’apprêtait à faire. Elle était toujours d’humeur joyeuse. Jusqu’à...
La bête gémit et Hortay caressa la tête de la créature en lui parlant doucement. Kalten avait rangé son arme, ses compagnons ayant fait de même.
─ Elle avait pris l’habitude de venir faire ces expériences ici. Un soir, nous l’attendions pour diner mais elle ne venait pas. Nous nous sommes inquiétés et nous avons commencé à la chercher. Finalement, nous l’avons trouvé ici, prostrée et son établi de travail en morceaux. Des fioles étaient cassées un peu partout. En nous voyant, elle nous a expliqué qu’elle avait fait une erreur dans son imprécation.
Loki et Y’oreen, tout deux mages, étaient particulièrement attentifs. Devant le drame se déroulant, ils ne voulaient porter aucun jugement.
─ La potion qu’elle avait préparée était mal dosée. Elle a tenté d’annuler le sort qu’elle lançait et une explosion a eu lieu. Les premiers symptômes sont apparus trois jours après. Elle devenait agressive, son corps commençait à changer. Nous avons dû nous résoudre à l’enfermer ici. Des spécialistes en magie noire ont essayé de l’aider mais rien n’a fonctionné. Et puis un jour, un intrus s’est introduit dans ma maison. Croyant trouvé des objets de valeur, il est entré ici. Ryysa l’a tué et a commencé à s’en repaitre.
Hortay s’arrêta un moment pour murmurer tendrement à sa fille.
─ Ma femme a failli devenir folle en voyant ce qu’était devenue notre fille. Elle est morte il y a deux ans. Elle n’en pouvait plus de….
Hortay ne put retenir un sanglot. Il se força à retrouver son calme.
─ C’est ma fille vous comprenez ? Je n’arrive pas à trouver la force pour… pour…
─ Se rend-elle compte de ce qu’elle est ? De ce qu’elle fait ? demanda Loki. Hortay haussa les épaules.
─ Je ne sais pas. J’ai eu l’idée d’utiliser ce vieux tunnel de contrebande pour qu’elle aille se « nourrir ». Elle n’a toujours attaqué que des personnes seules, sans famille. Alors, elle doit bien se rendre compte de quelque chose. Avoir gardé une part d’humanité en elle. C’est pour ça que je n’arrive pas à trouver la force de…faire ce qu’il faut. C’est ma fille vous comprenez ?
Tous regardèrent la bête allongée, agonisante.
─ Vous avez touché une artère en la blessant. Elle a eu suffisamment de force pour revenir mais maintenant elle se meurt.
Hortay tourna la tête vers Y’oreen et Loki.
─ Vous êtes mages ! Peut être même guérisseurs ! Vous pouvez soigner ses blessures !
Loki pinça les lèvres et Y’oreen sourit tristement.
─ Et tout recommencera, conclut Kalten.
Hortay baissa la tête vers sa fille, avec un je sais sortant difficilement de sa bouche.

─ Il faut que ça s’arrête, déclara doucement Cyrcée. Vous devez faire le deuil de votre femme et laissez partir votre fille. Nous pouvons nous en charger.
Kalten regarda Cyrcée. Elle changeait et ce n’était pas pour lui déplaire.
─ Je vais m’en occuper. Loki se pencha sur la créature. J’ai ce qu’il faut pour la…faire partir doucement et sans douleur.
La créature leva la tête et regarda Loki, semblant attendre quelque chose. Pris d’une impulsion, le mage posa une main réconfortante sur la créature.
─ C’est bientôt fini. Tu vas pouvoir te reposer, murmura t’il.
La bête reposa sa tête. Ce qui ressembla à un soupir sortit de son museau. Tandis que Loki préparait sa potion, aidé de Cyrcée, Y’oreen et Kalten aidèrent Hortay à se relever. Kalten le fit asseoir un peu plus loin.
─ Si vous le souhaitez, je reviendrai demain à la tombée du jour pour l’enterrer.
─ Merci de votre aide. A tous, répondit l’Elezen. Au fond du jardin, j’ai enterré ma femme. Vous pourriez….
─ Je le ferai, le coupa Kalten. Ensuite, nous comblerons l’entrée du tunnel côté La Brouillasse.
Hortay hocha la tête, regardant Loki administrer le contenu d’une fiole à la créature. Celle-ci se laissait faire. Kalten se demandait si Ryysa savait. Un oui lui fit écho dans sa tête.
Puis Loki se leva et rangea sa fiole vide. Hortay se rassit à côté de sa fille et mit son museau sur ses jambes, lui parlant tendrement, ses mains l’entourant, tentant de retenir ses larmes. Loki s’approcha de Kalten.
─ Il y en a pour deux ou trois minutes avant la fin. Elle va s’endormir et son cœur va s’arrêter. C’est une dose très concentrée d’un remède pour faire dormir, auquel j’ai rajouté un ingrédient pour la faire partir.
─ Je vais rester ici avec Hortay. Je serai à distance pour ne pas le déranger puis j’irai enterrer sa fille.
─ Je reste aussi, mon frère. Je te donnerai un coup de main.
─ Et nous aussi nous restons, déclara Cyrcée accompagnée de Y’oreen. Nous nous occuperons des éventuels curieux.
Kalten hocha la tête. Il ne savait pas s’il était heureux que tout s’arrête ou malheureux devant cette histoire familiale. Soudain, Hortay pleura en gémissant. Ils surent que c’était fini.

Etrangement, il faisait beau ce jour-là. Le soleil allait bientôt disparaitre et éclairait de ses derniers rayons un petit groupe recueilli devant deux tombes. L’une d’entre elle était toute fraiche. Alors, tandis que les premières étoiles apparaissaient, un chant doux et mélancolique s’éleva du groupe, rejoignant le ciel limpide.

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