Il n'y a pas de fumée sans combustible

[Jaghatai Dotharl]

Le pas lent et cadencé du destrier frappait avec bruit et régularité le sol sec du thanalan. La brise était sans doute fraîche sous la voûte étoilée, pour quiconque s'y intéresserait réellement. Derrière, le bidon sanglé sur la selle témoignait à chaque cahot du liquide qu'il contenait, ajoutant un son régulier de plus à chacun du pas de la monture.

Il escalada la petit pente, ayant chevauché sans un mot ni une distraction pendant près d'une heure, avant d'atteindre le conduit en descente douce s'engouffrant à flanc de la montagne. S'y engouffrant dans une hésitation, le cavalier entama une descente vers les profondeurs sans lumières, suivant d'instinct un tracé déjà emprunté de nombreuses fois.

L'atmosphère surréelle s'imposa alors au cavalier, sans pour autant le perturber, il posa sa lourde botte ferrée sur le sol sablonneux, détachant son paquet avant de l'emporter avec lui d'un pas mécanique en direction du bosquet de végétation lui faisant face.

Il y eut probablement des mouvements dans les frondaisons, des lianes qui se rétractèrent avec le silence d'un reptile en chasse. Mais il n'y prêta aucune attention, son gantelet déboucha le bidon avant d'en répandre le contenu autour de lui, jusqu'à le vider.

Saisissant un petit paquet emmené pour l'occasion, acheté aux marchés d'udah la veille du départ, le chevalier en débala avec précautions un briquet gravé, qu'il alluma avant de le lâcher dans les trainées de liquide visqueux qu'il venait de répandre autour de lui.

Ce n'est que lorsque les flammes montèrent, léchant ses bottes tout en embrasant la végétation autour de lui, qu'il fit demi-tour afin de retourner de son pas lent vers sa monture.

Son heaume s'offrit un dernier regard vers les flammes montantes et dévorant la végétation dans une épaisse fumée noir et des crépitements, le hurlement de créatures invisibles dans leur habitat venant compléter la fureur du brasier en formation.

Personne n'échappe à sa justice. Personne.