[Erlias] Souvenirs d'un Griffon

[Erlias]

La découverte

Je me souviens encore de ce fameux jour.

C’était au Thanalan, je foulais le sol chaud d’une route tracée rapidement dans le sable. Il faisait une chaleur atroce. Vêtu que de ma simple chemise noire et mon saroual gris fait de lin. Je portais ce petit sac fait de jute contenant quelques livres à destination d’Ul’Dah. Je devais les apporter avant que la nuit tombe, nous étions en fin d’après-midi, mon périple allait enfin se terminer.

Au loin, je pouvais voir les bâtisses naissantes de la capitale des Immortels. Ce n’est que lorsque j’ai tourné mon regard sur un bruit métallique à une trentaine de pas sur ma droite, que j’ai vu une épaisse fumée dégager derrière un rocher. M’arrêtant, j’en vins à distinguer les bruits d’un combat. Mais celui-ci se déplaçait de part et d’autre du rocher. Ce n’est qu’au bout de dix minutes, immobilisé par ma curiosité maladive et la peur m’envahissant peu à peu que j'arriva à distinguer quelque chose.

Une fois les particules en suspension retombées, j’étais là, à admirer une trentaine de cadavres Amal’Jaa se vidant de leur sang sur le sol. Le sable devenait peu à peu rougeoyant alors que je relevais mon regard sur leurs tueurs, les Immortels. Dans leur tenue, ils étaient... Fascinants.
Je contemplais cette petite escouade, ils devaient être une quinzaine, quelques lanciers, des archers, des pugilistes ou encore des maraudeurs, en bref, des combattants divers et variés au service d’Ul’Dah.

A ce moment-là, un lancier croisa mon regard et me lança un fin sourire de défi. Au même instant, d’autres Amal’Jaa vinrent à se propulser par-dessus les rochers pour tenter de prendre en embuscade la fine équipe. Le Hyur qui venait de croiser mon regard décolla la pointe de sa lance du sol, venant la mettre en avant, dirigée vers un des serviteurs du mal. Ce fût dans un giclement de sang que le corps de l’Amal’Jaa vint à s’empaler sur la lance avec une force incroyable. Face à tout ce poids, le lancier ne bougea même pas, c’était incroyable de voir cela. L’escouade vint à sortir victorieux de tout ce combat, m’escortant même jusqu’aux portes de la Capitale par la suite. Néanmoins, j’étais silencieux face à ces hommes et femmes d’expérience.

Après avoir livré ce paquet, je me pris une bonne nuit dans l’auberge du quartier, venant à reprendre des forces pour le voyage retour le lendemain.

Pourquoi ce fameux jour reste ancré en mon esprit ? Car c’est celui-ci qui m’a ouvert les yeux sur mon futur. Le commerce n’était pas pour moi. Je voulais combattre, apprendre, découvrir, explorer, avoir de réels objectifs. Ce n’est que deux lunes après que je fis mes affaires pour quitter les terres du Clan, rejoignant Gridania et la guilde des maîtres d’hast.

[Erlias]

Le changement

Le deuxième souvenir le plus important me venant… Mh...

Cela faisait désormais douze années que j’avais quitté mes traditions, mon Clan, sans l’envie ni l’espoir d’y retourner un jour. Je me fondais dans la masse. Entre les Hyurs amoureux, les Lunaires possessives, les Elezens impliqués et les solaires dragueurs… Je devais me faire ma place dans cette société. Si je voulais réaliser mon rêve d’être reconnu comme un combattant, je me devais de ne pas garder ces traditions qui me hantaient chaque nuit.

Alors j’ai appris. J’ai mis mes pulsions de côté, mon apprentissage sur le front et mon cœur dans un rocher. Insensible je devenais, à être un meurtrier j’aspirais. La lance était désormais l’allonge de mes bras, mes sens n’étaient destinés qu’au combat, rien d’autre n’ornait ma vie, je n’avais besoin de rien d’autre. Ces affaires de Nunh, de Tia, ce n’était plus que du vent qui ne m’inspirait pas. Je n’avais plus besoin de tout cela pour aspirer à devenir un lancier. J’ai passé douze années à m’entraîner sans arrêter, et, je comptais bien continuer.

Mon avenir était tracé. Mon maître m’envoya à Brumée consulter un autre maître qui aurait des enseignements supplémentaires à me procurer. Le voyage fût tranquille. Mon arrivée aussi. Mon hébergement était payé par la guilde dans une auberge. Le jour je m’entraînais, le soir je lisais, la nuit je récupérais.

Et ce huitième jour de la troisième lune astrale, tout vint à me percuter de plein fouet.

J’allais tranquillement au comptoir de l’auberge de Brumée, me prendre un verre de rhum quand deux miqo’te sont arrivées. Je m’en souviens encore. L’une habillée de blanc, l’autre de rouge et de noir. Je me trouvais là, accoudé à ce comptoir à imaginer l’entraînement du soleil suivant, quand la blanche vint à m’accoster. Etrange façon qu’elle avait de sous-entendre que sa copine voulait coucher avec moi. Ni une, ni deux, j’avais d’autres choses à faire. Je finis par quitter ce comptoir pour rejoindre un mur plus loin, histoire d’avoir un peu de calme pour réfléchir tout en profitant de mon verre.

Ce n’est qu’au bout de cinq minutes qu’un ami aux deux vint à m’accoster à son tour, tentant visiblement de me convaincre de les rejoindre pour... Boire sans sourciller. La blanche venait aussi insister, c’est étrange, je la trouvais presque adorable à faire cela, s’excusant presque de ses boutades douteuses. Mais, mon verre restait plus important, les deux repartirent queue entre les jambes.

Enfin tranquille, cette soirée me paraissait soudainement longue depuis leur départ. Au fond, ils m’avaient amusé, je ne pouvais le nier. Reposant finalement mon verre vide sur le comptoir, je partis en quête de sable chaud, sur la plage.

Les douze voulaient vraiment que nous nous rencontrions plus en détail. Tandis que la rouge et son… Compagnon pataugeaient au loin, nus, dans l’eau. La blanche jouait de ses doigts dans le sable, s’ennuyant. N’ayant rien d’autre à faire, et, la trouvant finalement gentille, je lançai une discussion.

On se rapprochait peu à peu.
On s’écoutait raconter nos histoires et nos buts.
On riait de nos peurs stupides.
On regardait les yeux si différents de l’autre. Tu étais une Lunaire, moi un Solaire.
Nous étions si différents, mais avions tellement de choses en commun.

L’attraction. Mes pulsions revenaient. Le Solaire ressortait, il ne fallait pas, non, il ne fallait pas.

L’entraînement me semblait si loin et si absurde lorsque j’entendais ton rire et que je voyais ton sourire.

Je ne sais pas pourquoi. Mais à ce moment, je ne pensais plus à mon avenir, mais à ce moment présent. Uniquement au présent. Mes objectifs étaient de côté, mon passé aussi.

« Je peux t’apprendre à voler une bourse ! »
« Oui, mais allons nous abriter, j’ai peur de la pluie et après je dois être réchauffé ! »
« Ce n’est pas un souci ça ! »

Joueuse, tu finis par lancer ta bourse, tu savais que j’allais aller sous l’eau pour me mouiller.
Je l’ai fait, tu m’as enlacé pour faussement me réchauffer, mais réellement me câliner.
Ta chaleur me réconfortait et me changeait. Je n’avais plus l’impression d’être seul avec mes ambitions. J’avais enfin quelqu’un qui avait accepté de rire et de partager avec moi autre chose que des enseignements.

Après cela, tu m’invitas à un concert à Costa Del Sol le soleil suivant, j’ai accepté.

Le soleil suivant, j’étais dissipé lors de l’entraînement. Mon maître ne voulait que ça se reproduise, alors je lui ai expliqué. Il m’a finalement laissé quelques soleils pour réfléchir à tout cela.

Le soir arrivé, je vins à rejoindre la fameuse plage où une hyur tout de blanc vêtue chantait merveilleusement bien.

Tu étais là, avec tes amis. Tu m’invitas, je vins à votre rencontre. Allant de discussion en discussion, de mouvement en mouvement, nous avons terminés, la rouge, Gally, toi et moi aux sources chaudes.

Assis dans l’eau, toi à mes côtés, nos doigts vinrent à la rencontre de leurs frères. Peau contre peau, la rouge finit par partir, tombant de sommeil, suivie de près par Gally.

C’est à ce moment que tout c’est finalement joué.

L’irrésistible envie de te protéger, de t’accompagner, de t’avoir à mes côtés, alliées à mon côté Solaire paternel ressortant légèrement.

Nous venons à nous tourner l’un vers l’autre, à se regarder, à se rapprocher, à se coller.
Tu fermas tes yeux, j’en fis de même, m’approchant pour venir voler tes lèvres.
Ceci deviendrait notre lien. Ceci démarra la véritable histoire du Griffon. C’est ainsi que je t’ai rencontré, c’est ainsi que tu m’as changé et c'est ainsi que je t'aime.

Merci Mune.

[Erlias]

A vrai dire, tu vois. Au fur et à mesure que je te raconte mes souvenirs, je me rends finalement compte que certains sont plus importants que d’autres, bien qu’ils ne soient pas dans le bon ordre chronologique.

Je t’ai parlé de Gally la dernière fois. A cette époque, elle voulait que je sois son garde du corps, pour la protéger de personnes peu recommandables. J’ai donc accepté ce premier contrat. Malheureusement, en ce temps-là, j’étais déjà parti pour le Coerthas entre-temps. Alors nous nous sommes perdus de vue quelques temps.

La lune suivante, je vins à la retrouver avec deux miqo’te sur la plage de Brumée. Elle me sauta presque dessus, c’était assez mignon, j’avoue. Gally a toujours été avenante et gentille, une perle. Elle me demanda un nouveau contrat pour cette même soirée, l’escorter au Gold Saucer. Je vins à accepter en échange d’un simple merci, je ne voulais pas d’argent, ça ne m’intéressait pas de la faire payer pour simplement l’accompagner. Elle me présenta finalement aux deux autres, Naruh et Yriah. Ils étaient sympathiques. La soirée se déroula convenablement, je vins à repartir peu après pour le Coerthas.

Ce n’est que plusieurs soleils après que je vins à recevoir une lettre. C’était Yriah, je me souviens encore de cette lettre franchement basique. Elle voulait que je l’escorte à un mariage, étant donné que sa santé était faible et déclinante. A vrai dire, ça ne me dérangeait pas, depuis mon accès au statut de chevalier-dragon, je devais m’exporter comme on me l’avait demandé pour trouver des perles ailleurs et pouvoir ouvrir les voies d’Ishgard pour y conduire de futurs probables disciples.

J’en vins à renvoyer mon acceptation, ça ne me coutait rien, au contraire. Cela pourrait me permettre de voir ce qu’était un fameux « mariage ».
Accompagnant la jeune femme, nous sommes finalement restés dans notre coin dans le sanctuaire, sur notre banc.
C’est là que tout commença à prendre une tournure bizarre. Mon côté Solaire ressortait étrangement. Je ne comprenais et n’appréciais pas le spectacle. Je le trouvais… Bizarre, étrange. Ma voisine le perçut et un débat commença à naître. Sur ce banc, puis devant le sanctuaire, pour finir au manoir à la Coupe pour la réception. On était dans notre petit monde.

De son point de vue, l’amour nait du destin. Deux personnes qui sont ensembles peuvent l’être par erreurs, ne pas être faits l’un pour l’autre. En soit, même si j’aimais Mune, je pouvais tomber amoureux de quelqu’un qui serait pour moi l’amour ultime. J’y comprenais déjà plus rien. Comment je pouvais aimer quelqu’un plus que la personne que j’aimais ? Comment je pouvais imaginer quitter Mune pour quelqu’un d’autre ? Ce que j’avais construit concernant l’amour que je portais à une seule femme venait d’être remis en question.

Me voyant ainsi, elle me proposa d’aller au « Sable du Temps ». Le lieu de réception des Marchands de Sable, dont m’avait parlé Mune, et, d’y jouer de la musique pour me permettre de réfléchir à tout cela.

Après un transport éthéré, nous arrivâmes devant la bâtisse. Elle était magnifique, je l’avoue volontiers. Tant de l’extérieur que de l’intérieur.
Rei et Jasina étaient là, à se chamailler comme toujours à propos de nudité et de sexe autour d’un verre de jus d’orange et de rhum. Pour changer.

Suite à quelques péripéties, Yriah vint à rejoindre le piano. C’est à partir de ce moment que tout vint à basculer en moi.

Elle jouait pour nous un air mélodieux et presque romantique, calme, doux, reposant. J’en vins à me faire bercer, jusqu’à ce que Rei fasse un commentaire désobligeant. C’est là qu’Yriah activa le mémoquartz et commenca à chanter tout en jouant du piano. J’étais presque obligé de monter sur ce piano, face à elle.

Assis devant elle, mon regard dans le sien. Je m’en souviens, ses yeux gris-bleus étaient magnifiques. Sa voix me portait, j’allais dans mes songes. Mune, Yriah… Le Destin. Et si je ne pouvais finalement pas contrôler la vie ? Et si, le Destin choisissait à ma place ? Je devais simplement me laisser vivre ? Laisser mon cœur agir seul ? Sans intervenir ?

Plus j’y pensais, plus je me détestais. Comment pouvais-je à un moindre moment penser que je pouvais aimer quelqu’un d’autre que Mune, et encore plus fort ? C’était horrible, cette façon de penser.

Alors j’en vins à me laisser porter par mes sens, et, je contemplai Yriah durant de très longues minutes, juste cela. Elle m’apaisait. Mes ambitions s’apaisaient et je profitais pour la première fois du moment présent. Alors je l’accepta et mes yeux vinrent à se fermer. Sa voix était si douce, tout en n’étant pas si aigue. Un délice.

La tendresse, l’amour, le destin, les sentiments, la douceur, les caresses, le chant d’Yriah. Tout se mélangeait dans un flot de nouvelles choses se développant en moi. Et si je n'aimais pas réellement Mune et qu'Yriah avait raison ?

[Erlias]

L’ascension

Mon apprentissage ? Hum... Dans mes souvenirs, ça a commencé ainsi…

La neige tombait dans un blizzard glacial. Mais elle était à mes côtés et sa présence réchauffait mon cœur de Solaire. La fille de la Lune savait me protéger du froid comme je savais la protéger de la chaleur. Nos pas marquaient le sol enneigé du Coerthas tandis que la neige s’accumulait sur nos épaules. Nos châles venaient à prendre l’humidité.

Mais bien heureusement, au détour d’un arbre, nous apercevions enfin le village proche d’Ishgard. Nous devions y rester la nuit, puis, je devrais partir seul pour la capitale Nordique, seule ma présence étant requise et demandée.

Arrivant sur place, nous avons eu droit à un accueil distant et froid. Deux miqo’tes arrivant dans un auberge du nord, ça n’était jamais très bien vu.
Quoi qu’il en soit, nous avons directement rejoint la chambre. Une fois nos affaires déposées, elle m’a rejoint sous la couette. Sa peau était douce, délicate, semi-chaude. Elle se colla à moi, elle savait que j’étais une bouilloire en ébullition en tout temps. Ainsi elle passa sa dernière nuit avant un moment, dans le creux de mes bras, au chaud, ses oreilles frottant doucement mon menton.

Le lendemain, je pris seul, la route d'Ishgard. Moi, un Solaire, les regards se tournaient vers moi. Dans la fin de matinée, je vins à arriver à la caserne principale. C'est là que mon enrôlement débuta.

Les premiers jours, je n'étais affecté qu'à l'évaluation de mes compétences. Le moindre de mes muscles était sollicité. Ma rapidité était testée. Mes réflexes harcelés. Mon intelligence du combat demandée. Ils ne laissaient rien au hasard, le lancier que j'étais devait savoir répondre à des critères stricts pour pouvoir percer dans mon domaine recherché.

Suite à cela, ils commencèrent les entraînements. Ils voulaient voir si j'apprenais bien et rapidement, si il était possible de faire de moi ce qu'ils voulaient. La neige et le froid n'étaient plus mes ennemis, ils étaient mes alliés. Les courses dans la neige, les entraînements sous le blizzard. Je devais évoluer à la perfection, je devais me surpasser pour espérer dépasser les exigences.

Nous étions dix en lice. Seul les deux premiers obtiendraient la possibilité d'entrer sur la Voie du Dragon.

Plus les jours passaient, plus je me sentais différent. Plus je sentais pousser en moi l'envie d'apprendre, de me surpasser, de ne plus rien craindre.

Et c'est ce que je fis. Au bout d'une lune entière, les résultats tombèrent, l'Ordre avait accepté mon intégration de par mon évolution rapide et brillante et passaient outre ma race.

La Voie du Dragon m'attendait.