[Journal] Laeko Aeko

[Maeko]

12.4As.1578

Maeko est de retour, et elle est venue avec l’incantation magique !

Oui Pageoune, je suis guérie, à la veille de mon anniversaire ! Pour mes 12 ans, je ne sens donc plus mes poumons souffrir ! C’est incroyable comme sensation. Je me sens libérée.

Maeko est arrivée il y a quelques jours. Elle finissait de travailler sur son sortilège. Et aujourd’hui, elle a fièrement annoncé l’avoir fini ! Alors tout le village s’est rassemblé dehors, et Maeko s’est mise à incanter devant tout le monde. Ça a duré longtemps, si longtemps que les gens ont fini par penser qu’il n’allait rien se passer, mais pas moi. Je savais que ma sœur allait faire quelque chose d’extraordinaire : c’est une super élémentaliste !

Après quelques minutes, elle a fini par lever son bâton, et une sorte d’énergie m’a envahie ! Quelques secondes après, j’ai senti ma respiration s’alléger. C’était comme sortir d’une grotte humide dans laquelle on aurait passé trop de temps pour profiter à nouveau de la chaleur du soleil. J’ai inspiré. Expiré. Sans aucune douleur, aucune résistance, aucun sifflement.

J’ai cru que maman allait pleurer d’émotion. En tout cas, notre village a désormais un futur médecin en la personne de ma sœur ! Vivement la fin de ses études ! J’espère que tout le monde pourra en profiter comme moi !

[Maeko]

24.5As.1578

J’ai fait du sport pour la première fois de ma vie.

Hier, j’ai fait la course avec Lou à travers le village, après le cours de madame Pomme. Il m’a évidemment battu, mais j’ai presque réussi à le suivre ! Quelle sensation incroyable ! Ma vie a pris un tournant depuis mes 12 ans. Désormais, je rêve de quitter le village pour voir du pays. Ça fait peur aux parents, mais je m’en sortirai : je suis courageuse, et en bonne santé en plus !

Ce qui est sûr, c’est que j’ai l’intention de faire un métier qui me permettra de passer du temps dehors : je suis beaucoup trop restée dans la maison étant gamine ! Je grandis, maintenant – toutes proportions gardées, je suis une lalafelle, tout de même ! – et je suis à même de prendre mes propres décisions.

Vive la vie ! A la prochaine Pageoune !

[Maeko]

13.1As.1579

Pageoune,

Il se passe des choses étranges. Je sens mon corps changer. Maman me dit que c’est la puberté. C’est à la fois étrange et inquiétant. Je me sens fatiguée et j’ai mal un peu partout. Mais je vais devenir une femme ! Ça veut dire que je vais pouvoir commencer à économiser pour partir à mon tour.

Papa n’aime pas cette idée. Il a envie que je reprenne son bateau de pêche lorsqu’il sera trop vieux pour continuer à arpenter la mer. Mais je n’ai pas l’intention de terminer mes jours ici. Je veux découvrir Eorzéa, et même la Tangée entière ! Et pour ça, j’ai besoin d’un métier qui me permette de voyager. Je pense me lancer dans le négoce et le commerce. C’est bien la seule chose que je fasse convenablement, avec le fait d’attirer tous les garçons du village ! Enfin, les lalafells, et surtout Lou. Les autres, ils préfèrent les femmes de leur gabarit.

Ils veulent se marier. Je trouve ça aberrant. Pourquoi ont-ils tant envie de rester ici ?

Au fait ! Puisque nous en parlons, j’ai échangé mon premier baiser avec Lou, il y a quelques jours ! Tout le monde avait dit que ce serait extraordinaire, mais pour ma part, j’ai simplement trouvé qu’il embrassait horriblement mal…

Je vais te laisser. La fatigue me vient, et je vais rejoindre mon lit.

Au revoir Pageoune.

[Maeko]

27.1Om.1579

Pageoune,

Je ne suis pas sûr que la puberté fasse changer les cheveux de couleur. En tout cas, les miens sont devenus blancs comme la neige. Maeko a failli s’évanouir en découvrant cela. Elle est très inquiète, je crois, et ça m’effraie un peu. Pour couronner le tout, mon corps me fait encore mal, par intermittences. Quelque chose d’anormal se produit. Papa dit que c’est la faute de Maeko et du sort qu’elle m’a lancé.

Je ne pense pas que ce soit vrai. En tout cas, je fais confiance à ma sœur. Elle a promis de m’amener un médecin très compétent de Gridania.
Advienne que pourra ! En attendant, je reste à la maison, car les autres villageois ont peur que ce soit contagieux, bien que Maeko ait dit que c’était très peu probable.

J’attends donc le docteur.

[Maeko]

5.2Om.1579

Pageoune,

Trois docteurs des différentes Cités-Etats sont venus m’ausculter. Ils n’ont pas été particulièrement rassurants. Comment l’être, en même temps ?
Je souffre chaque jour un peu plus que la veille. Si ma respiration ne me pose plus le moindre problème, c’est le reste de mon corps entier qui devient fou. Des tâches et des gonflements apparaissent un peu partout.

Je commence à comprendre que le sortilège de Maeko n’y est pas pour rien. Je l’ai deviné aux regards que les médecins lui ont jetés. Elle semble dévastée. Je crois que je suis la seule à la soutenir. Et maman. Papa, par contre, ne lui adresse plus la parole.

Lou n’est toujours pas venu me voir. Il ne m’envoie même plus de courrier. Je ne préfère pas y penser. J’ai l’impression d’avoir sauté à pied joints dans une mare de crocodiles. Je ne sais pas combien de temps je vais m’y débattre, mais j’espère que je pourrai rapidement sortir de la maison : je n’en peux plus de rester enfermée ici.

[Maeko]

9.3As.1579

Cher journal,

Depuis maintenant deux semaines je n’ai plus la force de sortir de mon lit. J’ai dû demander à maman de t’amener, alors que tu étais posé sur le bureau, à deux yalms. Je me sens si faible. Je déteste ça.

Plusieurs médecins sont venus à mon chevet. Ils ne disent rien, mais je vois dans leurs yeux que je suis déjà morte. La nuit, j’entends papa pleurer dans la chambre d’à côté. Il ne se cache même plus. Tout est horrible. Je souffre jour et nuit, et la douleur m’empêche de trouver le sommeil.

Je n’arrive toujours pas à réaliser que j’ai été condamnée par la sœur que j’admirais tant. Je sais qu’elle a toujours voulu mon bien. Malheureusement, je sais aussi qu’elle est la seule et unique raison de mon état actuel. J’aimerais ne pas lui en vouloir. Mais cette souffrance me ronge sans cesse. Chaque fois qu’elle me lancine le corps, Maeko s’impose à moi.

Je sais qu’elle souffre aussi. Différemment, mais elle souffre terriblement. Elle connaît mieux que chacun son degré de responsabilité. Mais la vie va continuer pour elle.

Alors que je sens un peu moins ces maux, que la fièvre se fait moins forte, je ne peux m’empêcher d’avoir pitié d’elle. C’est étrange, car la logique me dicte de la haïr. Mais je ne peux pas. J’aime ma sœur plus que tout au monde, et je sais qu’elle aussi. Je peux presque la sentir d’ici, du fond de mon lit, parcourir la moitié du continent en ravalant sa fierté et en demandant de l’aide, dépensant tout ce qu’il lui reste d’économies.

Elle sait que je suis condamnée, mais elle ne l’avouera jamais. Alors que tous me regardent avec pitié, elle est la seule à continuer de me sourire. Plus personne ne voudra d’elle à la guilde des élémentalistes après ça.
Et dire que je rêvais de voir des dragons…

[Maeko]

Le journal s’arrête ici. Quelques mots sont griffonnés sur la dernière page.

Maeko,

J’ai demandé à papa de te donner Pageoune après l’enterrement, pour que tu ne m’oublies pas. Je m’en vais. Tu as été pour moi la sœur dont tout le monde rêverait.

J’ai énormément souffert. Mon corps me lâche. Je ne sens plus mes jambes, mais elles me font quand même souffrir.

Tuée par l’amour. C’est à en pleurer tant c’est ironique.

Je souffre.

Ça revient. Sois maudite.

[Une tâche d’encre. Des insultes rayées à plusieurs reprises]

Je t’aime. Au revoir.