[Chronique] Deux étoiles filantes

[Lerith]

"J'AI. LA. DALLE."
Kin'a était recroquevillé dans le fond du chariot, son ventre grondait plus fort que le tonnerre dans cette tourmente de péripéties qui les avait mené... à moins d'une demi journée depuis leur départ, en réalité. Ils n'avaient même pas encore dépassé les frontières de Sombrelinceuil. Yuen regardait le paysage et prenait son mal en patience.

"Je t'avais dit de prendre un petit déjeuner.
- Mais enfin huit heures du matin c'est pas une heure pour manger !
- Peut-être mais les caravanes marchandes voyagent de jour, et je ne sais pas toi mais moi je ne me sens pas trop de traverser les territoires Ixal."

Kin'a grogna de nouveau. Il allait répliquer, mais le chariot se stoppa brutalement avec avoir heurté quelque chose. Yuen fut propulsé en avant et lui tomba dessus, l'écrasant de tout son long.
"Tu pèse un auroch mort !"
Yuen lui couvrit la bouche, chut ! Kin'a hoche la tête, et les deux miqo'tes se dé-emmêlent lentement pour avancer ventre-à-terre jusqu'à l'entrée du chariot. Au travers de la toile délavée, ils aperçurent un bras musclé qui tirait le corps du cocher. Le malheureux avait le crâne transpercé d'une flèche... voyant cela, Yuen eut un haut-le-cœur, mais son frère posa sa main sur son épaule pour l'apaiser. Elle poussa un soupir pour se calmer... un peu fort.
Le chariot fut brusquement secoué, et les deux miqo'tes roulèrent au fond. La toile fut arrachée par une créature semblable à un troll, du moins, ce qu'ils s'en imaginaient. Le hyur avait lâché le corps du caravanier.
"Tiens, tiens, tiens... qu'avons-nous là ?"
Là, c'était vraiment pas un bon plan. Pourquoi étaient-ils partit déjà ?

---

Yuen finissait son sac, elle comptait avec minutie ses flèches, ses vivres pour le voyage, ses sous-vêtements de rechange... Ses sept frères observaient avec curiosité, sept museaux empilés à la porte.
"Eh les lardons, allez jouer dehors."
Kin'a arriva, sourire aux lèvres, mais un peu plus sérieux. Ses sept petits frères se dés-empilèrent en riant, attirant l'attention de la femelle qui se levant, sourcils froncés. "Que faites-vous ici encore vous, aller ouste, papa doit vous attendre pour la chasse !"
Et les petits se sauvèrent, Kin'a entra.
"La matriarche veut te voir avant ton départ 'gine. Les recommandations sans doute."
Elle acquiesça et le suivi jusqu'à la hutte au centre du campement.

Rinko Rahz attendait, assise sur un tas de peaux de bêtes, son collier de crocs représentait tous les types de proies et d'adversaires qu'elle avait vaincu, les deux jeunes miqo'tes ne pouvaient s'empêcher de fixer ce collier chaque fois qu'ils le voyaient. Sur un signe de la femelle dominante, Yuen pris place. Le mâle tourna les talons.
"Kin'a, reste et assieds-toi. j'ai à te parler toi aussi."
Surpris, il se retourna à nouveau et vint poser ses fesses à côté de Yuen, l'air un peu con et surtout interrogateur. Rinko haussa un sourcil avant de reprendre son sérieux.
"Yuen, tu as fait la demande de quitter le clan pour découvrir le monde... je souhaite te donner ma bénédiction avant ton départ que la règle nous interdit de regarder. Mais j'aurais aussi autre chose à te donner..."
La jeune femelle incline la tête avec respect et diligence, attendant la suite...
".. Je souhaite également donner à Kin'a ma bénédiction pour son voyage. Bien qu'il n'en ai pas formulé la demande..."
Un sourire amusé se dessina sur les lèvres de la matriarche, l’œil brillant de malice, alors que le jeune s'étouffait tout seul à cette révélation. Yuen était penchée sur son épaule et lui frappait gentiment le dos pour l'aider à respirer. Rinko n'en perdait pas une miette.
"Nous manquons de femelles ici pour toi Kin'a, tu es adulte à présent, mais tu es trop jeune pour prétendre à une femelle des Lanbatal. Le mieux pour toi serait que tu accompagne Yuen dans son voyage, et puis vous êtes..."

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"...Bien plus forts à deux."
D'un regard entendu, les deux miqo'tes bondirent chacun d'un côté du chariot, évitant les balayage de massue du troll. Ventre-à-terre ils filèrent le long du chariot et tranchèrent à coup de couteau de chasse le harnais du chocobo de trait... qui leur fila entre les mains pour s'enfuir à toutes jambes dans un "kwêêê !" sonore, les plantant lamentablement....
"..."
Même le bandit semblait blasé.
"... Tues les Rango."
Le troll s'avança alors vers eux, et leur sang ne fit qu'un tour et le poil se dressa sur leur nuque. Kin'a remarqua alors un détail. il s'écria : "YUEN !"
Sa sœur suivit son regard.D'un geste sec elle déplia son bâton rétractable et frappa un grand coup dans un sac... de clous. Elle n'eut que le temps d'éviter le déluge de ces fourbes outils piquants qui se répandirent sur la route entre eux et le troll... cela le ralentirait-il assez ? l'air de rien, un clou dans le pied, ça fait mal !
ils détalèrent sans demander leur reste.

---

Leur sac sur le dos, tôt le matin alors que tout le monde dormait, ils avaient quitté le clan pour un temps indéterminé. La règle chez eux interdisait à quiconque de regarder leur départ.
Ils voulaient découvrir le monde, voir d'autres choses, gagner de l'expérience et peut-être qui sait, vivre de belles aventures...

"MAIS L'AVENTURE, CA CRAINT EN FAIT !!!"

[Lerith]

"Racontez-moi ça... encore une fois voulez-vous ?
- Mais c'est déjà la quatrième fois qu'on vous explique !"

Le greffier du Maelstrom commençait sérieusement à croire à leur histoire ; mais plus il l'entendait, plus il commençait à avoir pitié des deux jeunes miqo'tes complètement désemparés devant lui. L'épreuve du récit commençait à épuiser sérieusement Yuen dont la tête n'avait de cesse de retomber contre l'épaule de son frère tellement dépité qu'il en avait plaqué le front contre le bureau.

"Bon... encore une fois...."

---

Dans leur course effrénée, persuadés d'avoir encore un troll et un hyur aux trousses près à les dépecer vivants et les dévorer avec des champignons -on s'imagine de ces trucs quand on a la trouille- ils ne s'aperçurent qu'ils avaient finalement passé la frontière qu'une fois que le soleil de fin d'après midi frappait assez fort sur le sable pour les éblouir. Yuen s'arrêta brusquement, mains sur le visage.

"Aaah l'horreur ! pourquoi y a plus d'arbres ?!
- ... Je crois qu'on est arrivés au Thanalan...
- Ah ? t'es sûr...?
- ... Du sable, des rochers... des rochers et du sable... soit c'est le Thanalan, soit les ixalis déboisent plus vite qu'on le pensait et là ça va devenir inquiétant..."

Les yeux plissés, éblouit, Kin'a entoura les épaules de sa sœur d'un bras pour la guider à l'ombre d'un gros rocher. Son flair lui indiquait nettement la présence d'un point d'eau tout proche, la terre humide ne trompe pas, et les odeurs d'animaux concentrées encore moins.
En effet, derrière le rocher, un petit étang au contour piétiné par la faune locale allait leur apporter un peu de repos, mais pas seulement. Dès qu'ils furent à l'ombre, ils s'aperçurent que de l'autre côté du point d'eau se trouvait un campement désert. Diverses caisses et chariots laissaient envisager que...

"Yuen regarde, la chance nous sourit je crois. Ce sont surement des marchands ! Ils voudront peut-être nous conduire jusqu'au prochain village !"

D'un sourire entendu, ils se dirigèrent vers le petit campement vide. Aucune trace des marchands, mais tout semblait en ordre. Ils avaient dû s'absenter pour chercher de quoi manger ou alors il y avait effectivement un village à proximité.
Les deux miqo'tes s'installèrent poliment près d'un chariot. Après une bonne demi heure, ils commencèrent à bailler l'un après l'autre à répétition, la journée avait été longue il faut dire, et la toile du chariot était tentante pour se protéger du soleil et de la chaleur de cette fin d'après-midi.
"Tu crois qu'ils nous en voudront si on pique un somme ?
- Je pense pas, on leur expliquera quand ils arriveront et puis c'est pas une heure pour les miqo'tes lunaires. Aller, dormons un peu."
Le hochement de tête rassurant de son petit frère convainquit la jeune Yuen de s'allonger à l'ombre du chariot pour fermer les yeux. Peu de temps après, elle sentit le poids de Kin'a contre son dos. Il s'endormit lui aussi pour une petite sieste... ça allait finir par s'arranger en fin de compte...

...Sauf qu'en ouvrant les yeux, elle n'entendait plus les mêmes sons, ni les mêmes odeurs. Le bois grinçait sous leur poids, et on entendait les mouettes. Kin'a était assis près d'elle, visiblement lui aussi venait de se réveiller et se frottait les yeux en regardant l'aube pointer à l'horizon sur...
"Yuen... pourquoi on est entourés d'eau d'un coup ?"
Ils étaient sur un navire, en pleine mer, couchés au milieu des caisses et surtout...
"Kin'a, on a les pieds attachés."
Avant qu'ils ne puissent se poser davantage de questions, ils dressèrent brusquement les oreilles en entendant des pas au dessus d'eaux. Un roegadyn descendit les marches du pont supérieur, mains sur les hanches, un sourire narquois au coin des lèvres.
"Alors les minoux, on se réveille ?"
"Bizarrement" ce type leur faisait la même impression que le hyur sur la route... et le cache-oeil ça ne faisait pas très marchand pour deux jeunes aventuriers la tête remplie de clichés sur les...
"Vous n'êtes pas des marchands...?" demanda Yuen, d'une petite voix pas rassurée. Le roegadyn sourit un peu plus.
"Ça dépend des jours minette. Je suis sûr que pour vous deux on pourra me filer un bon prix !"
Alors là c'était pas bon du tout, du tout...

"CAPITAINE ! CAPITAINE !"
Un des marins hurlait depuis le mat de misaine. Le roegadyn leva les yeux, gueulant plus fort avec le coffre qu'il se paye.
"QUOI ?!
- Pavillon rouge capitaine ! MAELSTROM EN APPROCHE !
- Et merde !"

Il laissa là ses deux prisonniers et remonta sur le pont supérieur pour prendre la barre. Hélas pour lui, la flottille du Maelstrom l'avait déjà presque encerclé et en quelques minutes les pirates furent encerclés pas trois navires de guerre aux voiles d'un rouge flamboyant baignant dans les premiers rayons du soleil matinal.
L'équipage se rendit sans résistance, ils se savaient perdus d'avance et bons pour le bagne. Le plus gros vaisseau se mit en position d'abordage et on fit monter l'officier supérieur à bord. Il fit un bref passage en revue du navire et de son équipage aligné et mis aux fers.
"Bien, bien, bien. Le tuyau des surineurs nous aura été très utile. L'équipage des Ecorcheurs est maintenant hors d'état de nuire. Messieurs, j'ai consulté personnellement votre dossier et permettez-moi de vous dire que vous allez passer un long moment au f-... c'est quoi... ça ?"
Son regard se posa enfin sur les deux miqo'tes ratatinés entre les caisses de nourriture et l'escalier, les oreilles tellement basse qu'elles se fondaient dans leurs cheveux. Kin'a répondit, d'une voix tremblante :

"On... on pensait arriver à Uldah dans cinq jours et prendre notre temps..."

---

"...Et c'est comme ça que vos collègues nous ont ramené ici pour vous raconter comment on était arrivés là... on peut s'en aller maintenant ?"
Le greffier soupira, voyant bien le visage désespéré de Kin'a avachi sur le bureau, sa soeur les yeux dans le vague sur la chaise d'à côté. Il posa finalement sa plume et hocha la tête, soufflant un "sortez d'ici..." dépité. Le duo ne se fit pas prier, et moins de cinq minutes plus tard ils se retrouvaient debout à la porte du quartier général de la grande Compagnie, éblouit par le soleil qui se reflétait sur le pavé limséen, leurs effets et armes sur le dos, complètement déconfits.

"Bon... et maintenant, on fait quoi ?"

[Lerith]

Quand ils poussèrent la porte, le soleil était haut dans le ciel et les rayons filtraient au travers des rideaux. Yuen lâcha son arc et n'attendit même pas d'enlever ses bottes pour s'étaler sur le canapé alors que Kin'a rampait vers le lit. Puisqu'ils partageaient la même chambre, ils partageaient le même lit. Mais puisqu'ils sont frère et soeur, ça n'a pas d'importance, ils l'ont déjà fait après tout...
Il ronfle déjà. Yuen prend alors son sac et en tire son petit carnet en cuir et sa mine de plomb. Elle commence alors à écrire et faire quelques croquis...

"Nos premiers jours à Brumée sont plus calme, on a enfin pu passer une vraie journée de sommeil et récupérer dans cette auberge, le Dauphin Cuirassé. Je me suis levée tôt pour aller nous inscrire à la Guilde des Aventuriers, on verra bien ce que ça donne... Kin'a lui, semble ravi. Je ne l'ai jamais vu aussi empressé de se trouver des adversaires.
On rencontre des gens, les limséens sont plus accueillant que les gridaniens c'est indéniable. Il y a d'abord eu cette Lewena, qui m'a parlé de la Valention et puis cette Saphyra, qui nous a souhaité la bienvenue à Brumée... et ensuite il y a eu le Lanbatal..."

Elle suspend sa mine quelques instants, songeant à cette rencontre. Si elle s'attendait à croiser un natif du clan avec qui ils chassaient quelques semaines plus tôt. Combien de chances y avait-il pour qu'ils croisent l'un d'eux si loin de la forêt de l'Est ?
Les ronflements de Kin'a la rappellent à la réalité. Il est encore plus fatigué qu'elle, après tout il s'est battu contre ce Yehn'sae, et il a gagné ! Surprenant, mais il a gagné ! elle sourit et reprend :

"... Je crois que les Douze ont voulu que nous arrivions ici précisément, pou expier nos fautes, car ce Lanbatal est en lien avec le groupe d'intrus que nous avions surpris sur notre territoire avec la parias..."

A nouveau elle lève sa mine et fait la moue. C'est vrai qu'ils ont eu la trouille de leur vie quand le hyur, là, Nathael, s'est pointé. Tout leur est alors revenu en mémoire, comment Kin'a a tiré dans l'épaule de la parias Ako et comment elle a touché l'autre miqo'te solaire dans le dos... N'étant plus sur leur territoire de chasse ils avaient tenté de s'excuser mais...
"Je ne voulais pas le blesser... en fait c'est vous que je visais..."
Elle se tape le front, repensant à ses explications maladroites. Mais c'était quand même pas compliqué de tirer sur un type en armure. Il sentira rien qu'il disait ! c'est juste un tir de semonce qu'il disait ! C'est dans un soupir dépité que Yuen retrouve ses mots pour écrire.

"... Enfin, on n'a pas fini accrochés par la peau du cou à un lampadaire et c'est plutôt une bonne chose. Je pense que ça va finir par passer quand les gens auront vu qu'on est pas des proches d'Ako, elle avait l'air assez connue ici."

Elle hoche la tête, l'air de vouloir se convaincre de ses pensées. Vrai quoi, ça pourrait être pire ! Et à en voir son frère étendu en travers sur le lit, serrant l'oreiller dans ses bras et ronflant la bave aux lèvres comme un bienheureux, tout semble s'arranger pour l'instant alors ne tentons pas le démon.

"Alors note pour plus tard : ne plus tirer sur les gens dans la forêt, ne plus détourner de sanglier sur un Lanbatal -c'était il y a dix cycles, pourtant il s'en souvient encore... Kin'a et ses plans stupides !- et surtout, SURTOUT, ne plus jamais réveiller un dodo qui dort... à partir de maintenant, on chassera le dodo de jour... et je ne sais toujours pas quel gout à ça...!"

Dans un ultime soupir de désespoir, Yuen se leva et quitta sa fourrure, dévoilant sous sa chamise les marques de pattes de la dizaine de dodos qui l'avaient piétinée parce qu'ils poursuivaient Kin'a qui les avait réveillé en tirant sur le plus gros du groupe. Ils lui étaient passés dessus en faisant deux aller retour ! La chasse la plus lamentable de toute leur vie, vaincu par une légion de dodos pas du réveil...
Promis juré, on ne les y reprendra plus.

[Lerith]

"Aie..aie... aiiiiiiie !
- Arrête de bouger !
- Mais ça me fait mal...!"

Yuen pleurnichait, assise sur le lit, pendant que Kin'a lui retirait l'une après l'autre les fleurs de cerisiers dans ses cheveux tout emmêlés. C'est qu'ils avaient eu une sacré frayeur en sortant du Dauphin Cuirassé, avec cette musique et cette chanson... bizarre. Cependant il faudra noter que le vent marin souffle, et que seules les héroïnes de romans arrivent à courir en robe, talons et fleurs dans les cheveux sans se tordre la cheville, s'étaler sur le pavé, et se retrouver avec plus de nœuds dans la tignasse que d'écailles sur un dragon ; meme si ils n'ont jamais vu de dragon.

"C'est la dernière...?
- Non..."

Kin'a essayait de ne pas rire mais voir Yuen aussi douillette alors que quelques heures plus tôt elle était élue "femme la plus forte" de ce concours de la Valention l'amusait énormément. Il était le seul "privilégié" à la vois ainsi.

" Engins de torture...
- Tu étais très jolie."

Elle sourit malgré tout. Bien au chaud dans sa fourrure d'ours, deux tasses de kururu chaud sur la table de chevet, et son petit frère qui se moquait d'elle... c'était presque comme à la maison. Quand le dernier pétale de fleur fut délivré de ses cheveux, elle se saisit de la brosse pour tenter d'atténuer le carnage pendant que Kin'a allait jeter les restes de la soirée.
"Il faudra que je parle à Nesuta aussi...
Le miqo'te se figea et tourna la tête vers elle si lentement qu'on aurait presque pu entendre grincer son cou, ses petits yeux plissés avec méfiance.
- Pour le dîner et... les sources chaude. Il faut bien que je profite de mon "prix" non ...?
- mouaiiiiiis..."
il sortit jeter les fleurs, puis remonta quelques minutes plus tard dans l'appartement avec le courrier ; surtout une enveloppe brune qu'il observait avec attention, remuant la queue. Yuen se leva, laissant sa fourrure sur le lit elle vint s'asseoir près du feu pour qu'il la rejoigne. D'une griffe, il sortit la lettre de l'enveloppe et ils purent lire à voix haute à tour de rôle :

"J'espère que vous allez bien mes chéris, votre père passe ses nuits à la chasse avec trois de vos frères depuis que vous êtes partit...
- ... Il comprend maintenant ce que Kin'a devait ressentir, mais ce n'est pas pour me déplaire de voir moins de désordre à la maison. Ah, ça c'est pour toi Kin'a !
- Eh ! C'est pas moi qui laissait traîner mon bâton partout !
- Je ne le laisse pas traîner, je le garde à portée, nuance !
- Ouais bon bref...
- Hm... La Matriarche attend de vos nouvelles, on espère tous que vous êtes bien arrivés à U... Uldah..."
Ils baissèrent simultanément les oreilles, comprenant brusquement pourquoi la lettre avait mit si longtemps arrivée. D'un commun accord et sur un hochement de tête entendu, ils laissèrent le courrier de côté pour plus tard.

Le feu crépitait dans la cheminée, à cette heure tout était endormi dans les environs sauf peut être deux miqo'tes lunaires silencieux. Kin'a passa un bras autour des épaules de sa sœur, épuisée par cette soirée. L'air de rien, elle avait fait une prestation sur scène en fin d'après-midi, en fourrure et à l'intérieur, elle s'était donnée à fond pour un simple jeu... elle avait sué comme pas deux.
"Tu vas avoir des courbatures demain.
- ça valait le coup.
- Alors tu m'en veux pas trop de t'avoir inscrit...?
- Si... mais je me vengerai après-demain."
Elle sourit, il la serra un peu plus fort songeant qu'il payait déjà sa fourberie : laisser sa sœur deux jours avec un hyurois tout frêle ! Non mais c'est quoi ces idées de prix ? Ils peuvent pas offrir une proie fraîche comme tout le mo-... oui bon d'accord, tout le monde n'est pas miqo'te. Ni lunaire. Ni Rahz... pfeuh.
Yuen posa sa tête contre son épaule, et son regard se perdit sur sa droite au travers de la vitre. Dans le ciel, on pouvait voir deux étoiles scintiller l'une à côté de l'autre alors qu'à l'horizon le ciel se tentait de violet. L'aube est proche, il ne faudra pas se coucher trop tard.

"Quand même... on est bien là, non...?"

[Lerith]

" Kin'a, debout...
- mmmmmrrr...
- ... debout je te dis...!
- ... mais il fait encore jourrrr....
Yuen leva les yeux au ciel. Faisant craquer ses doigts, elle commença à tirer sur la couverture de son frère qui avait anticipé le coup fourré. Un classique qu'il ne connaissait que trop bien ! ses petites mains s'accrochaient à la précieuse couverture et il tirait lui aussi dessus en se roulant en boule sur le matelas.
- Yueeeen, laisse-moi fairrrrre la grasse soirée...!
- On a du boulot grrros malin !
- Ah oui...? Rien à foutrrrre....
- Et on doit envoyer la lettrrrre..."
Kin'a ouvrit grand les yeux et se redressa d'un bond, lâchant de ce fait la couverture qui accompagna Yuen dans une perte d'équilibre suivie d'une chute dans le tas de linge sale de son frère. Il n'y avait pas quelqu'un pour laver le linge avant...? Tandis que Yuen réfléchissait au pourquoi du comment, une chaussete accrochée à l'oreille, Kin'a se traîna vers le bain.

Il faisait bon cet après-midi là. La belle saison approche, et elle semble arriver plus tôt en Noscea. Les cerisiers en fleurs laissaient leurs pétales danser dans le vent de façon très poétique, et bien sur s'accrochaient au pelage de Yuen, véritable aimant à confettis.
" Nyuaaah je déteste ça !
- C'est toi qui trrrrouvait ça joli! Kin'a était clairement amusé par le spectacle.
- Joli à voirrr, pas à rrresembler à un coeurl rose moucheté !
- Tu fais un coeurl rrrose très mignon !"
Il esquiva le faux coup de poing alors qu'ils remontaient la route jusqu'à la sortie du Brumée. Le soleil commençait à décliner, la lumière était déjà moins agressive pour leurs yeux. Malheureusement pas assez...


"Yuen attention !
- HIIIIIII !"
La miqo'te bondit du terrier, son derrière évitant de peu les trois griffes imprégnées de fumée noire qui se plantèrent dans l'arbre en face. Un terrier de mandragore, mon œil. C'était bien un Nocturne et il était en avance sur son réveil !
" Ils ne sont pas censés dormirrr la journée ?
- Alors techniquement, il y a un débat entre les démonologues sur les horaires d'hivers à prop-..
- Et c'est maintenant que tu me le dis ?!!!"
Ils durent plonger chacun d'un côté pour éviter un nouveau lancer de griffes. La créature n'était pas plus grande qu'eux, entièrement faite d'ombre et de fumée sauf ses griffes, ses yeux rouge, et le petit objet brillant pendu à son cou. Les oreilles de Kin'a se dressèrent sur sa tête.
" Ce doit être l'objet de la malédiction ! Tire !"
Les deux miqo'tes bandèrent leur arc de chasse, la pointe de leur flèche était lisse et brillante comme si on les avait polies. En réalité il ne s'agissait que d'eau bénite. Les deux flèches attinrent leur but quasiment en même temps, si bien qu'on n'aurait su dire laquelle avait touché en premier. Un craquement se fit entendre et le Nocturne poussa un hurlement strident avant de partir littéralement en fumée, ne laissant derrière lui que les débris de la pierre gravée qu'il portait au cou et que Kin'a vint ramasser avec un mouchoir, et toutes les précautions d'usage.
"On va rrrapporter ça au labo. Ils devrrraient être capable de trouver qui l'a réalisé.
- Là comme ça, on dirrrait que c'est encore une personne mal intentionnée qui est allé acheter ce trrruc à un mage douteux pour maudirrrre le meunier.
- Tu dois avoirrr raison Yuen. Et il serrrra le mieux placer pour nous dire qui lui en veut."
Le duo pris quelques minutes pour retrouver son souffle, avant de se remettre en route vers Brumée rendre leur rapport, et poster leur lettre.

A vous tous,

Nous allons bien, et nous sommes ensemble tous les deux en Noscea. Notre premier voyage s'est.... on va dire bien passé sur la fin. On s'est arrangé comme on a pu mais on a finalement trouvé un groupe pour nous faire découvrir le monde et apprendre de ses mystères.
Nous vivons dans un manoir, avec beaucoup, beaucoup d'autres personnes très chouette ! Nous avons même été "adoptés" par une petite sœur lunaire qui vient de rejoindre la même organisation.

On chasse des démons, on mène des enquêtes sur un tas de phénomènes étranges et Kin'a étudie avec soin la criminomagie. Il rencontre beaucoup de moines ici à Brumée, et même un maître qu'il doit revoir bientôt, si il montre qu'il a ce qu'il faut pour suivre cette formation. Moi je cherche toujours ma voie mais je finirai par trouver. Je m'entraîne tous les jours avec Kin'a au pugilat et ni lui, ni moi, n'avons délaissé le tir à l'arc. On en apprend tous les jours et on progresse petit à petit.
On vous écrira à nouveau bientôt. Prenez soin de vous, et on espère que les lardons ne vous causent pas trop de souci. Surtout empêche Kin'wo de toucher aux livres de Kin'a ! J'espère que Kin'sae continue à s'entraîner avec la chamane.

A bientôt, on vous aime.

Kin'a et Yuen

[Lerith]

Le crayon était passé par tous les coins de son visage, de coincé entre ses crocs -le classique- en équilibre sur le nez, derrière l'oreille, comme épingle à cheveux pour chignon désastreux et pincé entre le nez et la lèvre supérieure, il avait fini son parcours comme fléchette pour cible improvisée. Et la cible était ce croquis qui n'arrivait à rien.
Dague, collier, pointe de flèche.... rien à faire, les idées ne manquaient pas mais aucune ne convenait à ce qu'elle voulait pour rendre hommage à l'exploit de Kin'a. Elle focalisait son regard sur la dent de dragon, qu'il avait courageusement arraché à la bête -déjà agonisante mais on passera ce détail- qu'ils avaient tué. La miqo'te réfléchissait... cet objet, arme, ornement, ou peu importe, allait faire la fierté de Kin'a au sein du clan pour les années à venir, elle devait trouver le meilleur moyen d'en faire l'image de cette gloire, ce haut-fait à échelle familiale qui ferait de lui un grand chasseur.

Le tailler pour faire une dague rendrait la pièce difforme, non il fallait qu'on la voit toute entière pour ce qu'elle est, un croc de dragon ! Mais elle était trop grosse pour faire un collier. Une pointe de flèche ? Encore pire, elle s'abîmerait ou se briserait ! Non, non et non, je dois trouver quelque chose ! Réfléchis Yuen !

Les flammes du chandelier dansent dans la pénombre, et le papier demeure vierge. Aucune idée ne lui vient. L'idée de base était pourtant simple : un outil qui lui servira lors des chasses, et donc visible, mais pas une arme afin qu'elle ne risque pas de se briser. Mais quoi ? Telle était la question.

Inutile de forcer, je ne trouverais rien de cette façon.

Elle se saisit de son gilet et sortit faire un tour sur la plage. elle marcha un long moment, fixant le sable et les coquillages à la recherche de la moindre petite étincelle, son carnet de croquis sous le coude et une mine de plomb derrière l'oreille. S'asseyant sur un rocher, elle soupira. Elle voulait être à la hauteur...

---

Passant la porte, elle soupira. Elle n'avait rien trouvé. La nuit était déjà bien avancée et elle était fatiguée... elle ne se coucherait pas trop tard ce matin. Son carnet toujours vide, ou plutôt remplis de croquis n'ayant rien à voir avec son projet, elle le laissa tomber sur le canapé et posa ses bottes devant la cheminée. La dent était toujours là, posée sur la table, attendant son heure. Yuen la fixait avec une exaspération fortement exagérée. Les oreilles basses, elle posa son derrière sur le tapis et son menton sur ses bras croisés devant le trophée, le fixant comme pour lui parler par clignement d’œil.
"Tu dois être un chef d’œuvre, tu le sais ça...!"
La porte s'ouvrit, Yuen se redressant. En nage, Kin'a entra et avant même de saluer sa sœur, avait balancé son arc et sa veste contre le mur pour se précipiter dans le bain, couvert d'une substance étrange dont le nom ne saurait être autrement plus répugnant.
"Borrrrdel je me suis encorre retrouvé asperrrgé de mucus ! BOUAH !"
Le plouf significatif du saut dans le bain précéda une suite de grognements et de couinements propres au lavage des cheveux de ce mucus tout collant. Yuen soupira, reportant un instant son regard sur la dent.

"Ouais... c'est ça la gloirrrre de mon frère..."

[Kin]

Ode à Menphina

Kin'a aura passé une soirée, stylo en main, à reprendre ce qu'il ne s'était pas donné le luxe de faire depuis un moment. Laissant son inspiration et son imagination guider le stylo sur la feuille, il rédigea cette ode qu'il comptait réciter à la soirée des Contes de Sombrelinceul.

Ô toi, Menphina, appose ton doux manteau sur la forêt.
Appelle-nous, tes enfants, à nous éveiller, à prrrésent Azeyma s’en est allé.
Que cette obscurité soit notre foyer, le silence et les ombres, tu nous les as donnés.

La chasse peut à présent débuter, nos proies ne pourrons se cacher.
Sous le regard de la déesse nocturne, nul n’échappe à la lumière de la Lune.
Sans même nous voir, sentir, nous abattons en un instant, nulle inquiétude, ce ne sera qu’un temps.
Nul regret, nul pleure, mais le respect pour cette âme de valeur.

Ô toi, Menphina, veille sur tes enfants bien aimé.
Appelle-nous, tes enfants, à nous protéger, le danger, lui, ne s’en est pas allé.
Que ce territoire soit notre foyer, les armes pour le défendre, nos ancêtres nous les ont légués.

Certains souhaitent y pénétrer, le violer, s’en emparer.
Pour y arriver, de notre clan, et notre force, ils devront triompher.
Les voilà déjà encerclés, les chasseurs sont devenus chassés.
Mes frères, mes sœurs, abattons sur ces intrus notre fureur.

Ô toi, Menphina, appose ton calme et ta sérénité.
Appelle-nous, tes enfants, à évoluer et avancer.
Que le passé soit notre identité, le présent notre choix, l’avenir notre liberté.

Ensemble sous son regard bienfaiteur, nous observons ce ciel de mille splendeur.
Un spectacle des plus lumineux, chaque nuit il illumine ce lieu.
Ce sentiment protecteur, ce coup de vent empli de douceur, c’est ce qui rapproche nos cœurs.
Notre pensée n’est pas faite de rancœur, nos étoiles se suivent, nos étoiles sont proches ma sœur.

[Lerith]

Elle dansait sous la lune, sur son rocher, comme chaque soir depuis... il ne comptait plus depuis, en fait. Même à Sombrelinceuil, il y avait ce rocher près du ruisseau où elle allait danser sous la lune, prétextant devoir chercher de l'eau. Il avait toujours été dans la confidence, puisqu'en bon petit frère il l'avait toujours suivie quand elle était de "corvée". Avant de quitter le clan, il n'avait jamais connu d'autre type de danse. Il se plaisait à regarder les danseuses uldiennes, les charmantes limséennes foulant le pavé blanc en faisant voler leurs jupes, il avait entendu parler de ces "valses" ishgardaises... rien à voir avec "ça".
Plus il la voyait bouger sous la lune, plus sa queue remuait avec enthousiasme. C'était à la fois captivant et apaisant de la regarder faire, son bâton à la main, enchaînant ses mouvements souples et puissant tout à la fois.
"Tu es redoutable 'gine.
- Cesses un peu tes bêtises Kin'a." Lui rétorqua Yuen entre deux souffles. "Ce n'est pas comme si tu me voyais me battre contre un béhémoth."
Il n'était pas objectif, certes, pas du tout même. Aux yeux du petit frère, l'aînée aurait très bien pu en battre deux d'un coup, à mains nues et les yeux bandés. Pourtant ce soir, il serrait contre lui ce trophée qu'il avait gagné et qu'elle avait transformé pour lui. L'honneur du clan, l'honneur d'un mâle Rahz, il en avait encore des étoiles dans les yeux. Un grappin en croc de dragon, qui y aurait pensé ? Il était unique, imparfait, rudimentaire, assemblé avec une chaîné et un anneau fait sur mesure par la guilde des forgerons, mais il était à lui.

"Yuen, Kin'a ! Arthurin vous demande !"
Fin de la récréation, dans les règles de l'art, le miqo'te surpris fit un bond en entendant la voix de Florine qui leur faisait un signe du bras depuis le bord de la jetée. Les Rahz se regardèrent brièvement, la nuit était bien avancée ; l'heure de se remettre au travail. Un bref passage dans le hall, ils se saisirent de leurs armes et quittèrent la Brumée, trois cartes de mandat en poche.

*****

"Pas encore... pas encore...
- Maintenant...?
- Pas encore....
- 'Gine, ça commence à sentir mauvais là...
- ... Pas encore je te d-... MAINTENANT !"
Ils décochèrent en même temps leurs flèches sur le bûcher où les trois elezennes s'apprêtaient à brûler vif un malheureux lalafell sous l'emprise du somnus. Les cristaux de glace gelèrent les flammes instantanément et une clameur retentit dans la clairière autour des trois sorcières. Seules elles demeuraient parfaitement calme, comme si elles s'attendaient à être démasquées. Les quelques autres spectateurs, eux, tentèrent de fuir mais les Deux Viipères avaient été prévenus. Ils les cueilleraient un peu plus loin.
"Et maintenant, on danse !"
L’apprenti moine bondit le premier de leur cachette et se rua sur le trio. Yuen leva les yeux au ciel, il gagnait confiance mais aussi maturité et sens de l'observation. Kin'a avait très bien su détecter la supercherie des soit-disant grands pouvoirs de ces sorcières. Rien de plus que des tours de passe-passe et quelques sacrifices pour enjoliver le tout. Elle dégaina son bâton rétractable et se lança à sa suite avant qu'il ne soit entièrement déployé. Deux contre trois, le tandem Rahz se retrouva dos à dos, bien moins inquiet qu'à leurs précédentes missions.
"Maintenant, on danse."

Cette nuit-là le grappin resta accroché à la ceinture de Kin'a, qui enchaînait les coups de poing avec précision sur les trois femmes avant qu'elles ne puissent incanter leurs sorts de terre. C'étaient donc bien des élémentalistes, surement celles signalées peu avant leur arrivée. Arthurin ne s'était pas trompé, les trois mandats n'en faisaient qu'un seul.
Yuen dansait à la lueur des flammes qui avaient fini par faire fondre la glace. Ils étaient si emportés par leur combat qu'ils avaient cependant oublié un minuscule et infime petit détail...

"Non mais c'est bien joli votre petite valse là, mais en attendant je commence à avoir très chaud moi ici !!!"

Note pour plus tard : Toujours, TOUJOURS libérer l'otage avant d'engager le combat. Oui, bon, y a encore quelques menus détails à peaufiner...

[Lerith]

"Je relève ce défi !"

Et bien entendu il s'était empressé de quitter le manoir avec tout son matériel pour se précipiter à l'ethérite la plus proche et disparaître quelque part en pleine nature. Tout ceci parce qu'un mâle extérieur au clan -un qu'il appréciait en plus- avait décidé de rapporter un trophée à sa sœur. Et depuis qu'il l'avait vu ainsi arnaché, le visage décoré de peintures de chasse traditionnelles, il n'avait pas pu résister.

"Honneur au vainqueur, respect au vaincu."

La dernière fois qu'il avait relevé ce genre de défi, c'était face à un mâle du clan Lanbatal et il avait été battu à plate couture, rentré bredouille d'une partie de la forêt qu'il connaissait mal et une épaule déboiter en prime. Mais cette fois, plus d'imprudence !
C'est de Yuen qu'il s'agit, et de l'honneur des Rahz !

Ihta'a et l'alpha
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Yuen ne s'attendait pas à le voir rentré la même nuit, avec pour trophée un collier en crocs de coeurl tacheté, ils étaient si gros qu'on devinait aisément la taille de la bête : un alpha à parier. Il les avait lavé et assemble en une pièce rudimentaire mais non moins remarquable pour un tel défi.
"Tournez-vous, je vais vous l'accrocher."
Ce chasseur était expérimenté, et le plus impressionnant était qu'il n'avait aucune trace de blessure sur le corps.
"Je l'ai eu par la ruse, ce fut rude mais un plan bien mené porte ses fruits."

Flattée par ce présent, Yuen attendait le retour de son frère. Si son sourire était sincère, dans son cœur brûlait un désir ardent de vaincre. " Frangin, t'as intérêt à gagner... "
Un défi de taille laissé par le mâle pour un jeune chasseur de dix ans son cadet...

Kin'a et le Mylodon
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Il passa la porte de l’institut en titubant, refermant derrière lui. A la main droite, un sac de jute laissant apparaitre des formes de pointes. La totalité de son équipement était recouvert de neige en train de fondre, signe qu’il avait tout juste passé l’éthérite. Il titubait en marchant, mais se tenait droit. Une chose était sûr, il n’avait plus rien sur lui de l’équipement de la veille. Même plus son arc.
Quand Yuen arriva, il dévoila ce que contenait le sac. Deux lames, de la taille de couteaux de chasses. "Les corrrnes d’un Mylodon des Plaines. Ça fait déjà une semaine que je l’ai rrrepéré, un solitaire. J’ai attendu la nuit qu’il retourne à sa grotte, et ai fait s’effondrer les stalactites au plafond surrr lui pour bien l’affaiblir, avant de prrrofiter de l’effet de surprise pour l’achever."
Ce qui est sûr, c’est que l’achever n’aura pas été sans efforts, ni sans blessures, mais le jeune Miqo’te y est parvenu. Il aura pris les cornes de la bête afin d’y tailler les lames, montrant tout de même des traces d’imperfections dans l’ouvrage.

[Lerith]

"La prochaine fois, vous danserez"


Elle enchainait ses pas au bord de l'eau, même sans son bâton, elle pouvait encore laisser ses bras glisser sur les courants d'air et sa peau frissonnait dans la pénombre qui précède l'aube. Le sous-bois était encore humide et la rosée perlait ça et là sur les roseaux. Depuis combien de temps était-elle ici, à danser sur la mélodie chantante de la rivière ?
Son pied se soulève ; elle bondit sur les rochers encore glissant mais elle garde son équilibre. Son pied touche à peine la pierre. Ses oreilles captent le flux de l'eau qui s'écoule, ses yeux brillent à la lueur des dernières lucioles qui s'éteignent les unes après les autres, le moment touche à sa fin.

"Yuen, tu me montreras comment tu danses ?"

Encore un moment, le ciel s'éclaircit, mais le soleil n'est pas encore là, certaines étoiles brillent encore au dessus de la rivière. Elle tourne sur elle-même et regagne la rive de son pas aérien. Son écharpe bleue danse elle aussi ; le vent se lève dans la forêt. Quelque chose approche.


"Vous n'entendez pas les esprits ?"


Yuen ferme les yeux, les sens en éveil. Elle n'a jamais eu de don pour la magie, ni le moindre talent pour la sentir. Mais il y a quelque chose au bord de cette rivière, elle le sait. Une croyance d'enfant, comme une présence apaisante qui l'accompagne dans cette partie de la forêt, son imagination sans doute. Elle danse encore, encore un peu. Son bâton lui manque mais ses mains appellent le mouvement. Encore un pas, encore un tour, encore un souffle, et les premiers rayons de soleil qui percent à travers la cime des arbres. Les lucioles ont toutes disparu, la température remonte doucement.
Son genou se plie, ses hanches se rapproche du sol ; elle tend l'autre jambe, tournant la cheville. Sa danse s'achève les mains frôlant la terre, ses bras chatouillés par les herbes hautes, la pointe de son pied tendu vers la rivière. Elle garde sa position quelques secondes, puis se détend et s'allonge doucement sur le côté. Ses yeux continuent de fixer la rivière qui reflète les rayons du soleil printanier, comme si elle était faite d'or.

"Vous veillerez- sur Kin'a, n'est ce pas ?"

Yuen ferma les yeux. Ce carré d'herbe était si apaisant et pourtant quelque chose continuait de compresser sa poitrine.


" Kin'a a toujourrrs su ce qu'il voulait, moi je cherrrche encore ma voie. Il m'a suivi pourrrr faire ce voyage, mais il s'éloigne pour partir sans moi avec d'autres tandis que je rrrreste immobile, comme l'eau stagnante. "


Comme l'eau stagnante, elle continuait de dormir sur la rive, sans rejoindre le courant. Elle était partie pour se trouver elle-même, découvrir le monde et ses aspirations, mais elle n'avait toujours rien trouvé. Et elle regardait Kin'a avancer, se perfectionner dans la voie qu'il avait choisi avant même leur départ. Elle était heureuse, elle souriait de le voir s'épanouir, faire des rencontres, voyager... Elle l'enviait, oui, sans le jalouser car sa voie ne serait pas forcément la même, mais elle l'enviait et plus que tout, elle ne voulait pas être un poids.
"Je vais trouver qui je suis avant que tu reviennes."
Dans la clarté matinale, ceux qui passèrent ce matin-là près du refuge purent apercevoir dans un carré d'herbe hautes, deux jeunes miqo'tes endormis contre un arbre ; leurs têtes reposaient paisiblement l'une contre l'autre.

"je serais toujours là."