[Voyage] Mhigoise

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Maeko
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[Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 03 oct. 2016, 07:36

Culture Mhigoise

Je regardais le soleil se lever derrière les hautes montagnes de Gyr Abania, qui nous séparent du Nord. La lumière rouge se reflétait sur les monts enneigés, sortant lentement la cité des ombres de la nuit. Plus au Sud, la mer de Jade se réveillait, agitée d’or et d’orange. Plus tard, avec les nuages, elle prendrait une teinte grise, triste. Mais, pour l’instant, pour quelques minutes, peut-être une heure, le monde était beau.

Je refermais la fenêtre de ma mansarde poussiéreuse. Je n’aimais pas ce refuge, cette cachette où je logeais. Je fronçais les sourcils à chaque fois que je posais mes yeux sur les charpentes pourries, plissait le nez en approchant de l’arrivée d’eau et de ses moisissures et bougonnait lorsqu’un coup de vent faisait lever d’épaisses particules dans l’air, qui m’irritaient les bronches et les yeux. Non, vraiment, rien ne me plaisait ici, malgré les efforts que j’avais donné pour rendre l’endroit vivable : Même en tant que Lalafelle, j’y étais à l’étroit.

Mais je ne pouvais que m’en contenter. Les Eorzéens n’avaient rien à faire ici, à la frontière de l’Empire Garlemaldais. Les patrouilles de soldats parcouraient sans cesse les rues, à la recherche d’indésirables, de nuisibles qui mettaient en danger, par leur présence ou leurs activités frauduleuses, la stabilité de la région. De gens comme moi. Mais les troupes de Garlemald n’étaient pas le seul danger pour une femme, seule dans les rues. Les gens d’ici se méfiaient de moi : je ne ressemblais à personne, et, malgré mes efforts pour me cacher des yeux hostiles, je ne pouvais effacer d’un coup de gomme la personne que j’étais. Une étrangère. Je me moquais du racisme, évidemment, car j’en avais suffisamment fait les frais sous les feuillages de Sombrelinceul. Mais ce racisme pouvait délier des langues fourchues. Ouvrir des bouches qui devraient rester closes. J’imaginais bien quel intérêt une élémentaliste pouvait présenter au regard de certains groupuscules rebelles ou de branches criminelles – bien qu’en règle générale, les deux soient liés.

Je n’avais aucune envie de me retrouver piégée en plein milieu d’une guerre ouverte : je n’étais là que pour me cantonner au rôle d’observatrice passive.

Je m’appelle Maeko. Je viens d’Eorzéa, plus à l’Ouest. Par chez nous, l’Empire est une menace constante, incisive. La guerre ronge notre pays et altère notre jugement, notre perception de la vie. La haine qui s’est emparée de mes concitoyens vis-à-vis de l’envahisseur est loin d’être canalisée : j’ai peur du jour où Garlemald percera un peu plus nos lignes, car il me semble que les bains de sang seront alors inévitables. Pourtant, je reste persuadée que tout n’est pas mauvais dans la culture impériale. Ils amènent avec eux de nouvelles technologies, de nouveaux modèles de pensée. Ce sont des hommes : ils ne sont pas malveillants par nature. Loin de chez eux, de leurs proches, je me demande encore ce qui les a amenés ici. La peur ? L’ambition ?

Peut-être pensent-ils que leur société est idéale ?

C’est la raison de ma présence ici, à Ala Mhigo. Apprendre à connaître l’Empire à travers des territoires déjà conquis. Anticiper ce qui menace de nous arriver, un jour ou l’autre, et déterminer si nous pourrions, dans une certaine mesure, en sortir gagnants. Rien de plus.
Cela va faire plusieurs semaines que je suis ici. Il aura été très difficile de m’adapter : des années de séparation avec le continent ont rendu les échanges avec les Mhigois quasiment impossibles. Le danger omniprésent m’incite à tant de prudence qu’il m’arrive, certains jours, de ne pas mettre un pied en dehors de mon abri. La nourriture m’a rendue malade plusieurs soleils. Je n’osais même pas me soigner : à tout moment, mes réserves d’éther peuvent servir à me sauver la vie. Les sorties de nuit sont impossibles : si la garde est diminuée, ce sont les coupe-jarrets qui prennent le relai. Et ils ne feront preuve d’aucune pitié à mon égard, d’autant plus que j’ai avec moi une rondelette somme de gils, qui permettrait sans nul doute d’entretenir une petite famille pour deux ou trois lunes. Alors j’attends la lumière du jour. Cela m’évitera de mourir égorgée dans une ruelle sombre.

Aujourd’hui, je dois me rendre au marché. Je n’ai quasiment plus de nourriture, et, bien qu’étant habituée aux repas frugaux, je ne peux rester une semaine sans rien avaler. Ma cape kaki sur le dos, le capuchon relevé, un sac en en bandoulière j’ouvre la porte grinçante. La lumière du jour ronge la pénombre de ma pièce et fait plisser mes yeux habitués à l’obscurité. D’un pas lent, je passe le pas et me dirige vers le centre-ville, tête baissée.

Je marche quelques minutes, me contentant d’emprunter les axes principaux. Le silence qui règne en ville fait partie des points auxquels je n’arrive pas à me faire. Tout est si calme ici que l’atmosphère globale en devient extrêmement pesante. La monotonie n’est interrompue qu’à de brefs moments, par le bruit lourd des pas d’une patrouille de soldats ou le bêlement d’un mouton.

J’arriverai bientôt. Au bout de la rue, je dois tourner à gauche, puis à droite, et alors le marché s’offrira à moi. La tête emplie des choses dont je dois absolument faire l’acquisition, je tourne.

Puis, tout devient noir.
Dernière modification par Maeko le 13 nov. 2016, 20:06, modifié 2 fois.
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 05 oct. 2016, 08:18

Acte 2 : Peur Mhigoise


Des rats. J’entends distinctement le couinement aigu d’un rat. Plusieurs, en réalité. Ils sont derrière moi.

Une goutte d’eau s’écrase contre le sol. Puis une autre. Puis une autre.

Il n’y a pas de vent ici. L’air est nauséabond. Je respire comme des relents d’ordures, quelque chose de pourri qui flotte dans l’air.

Alors, enfin, je ressens le froid. Il me mord la peau, s’infiltre dans chaque faille de mes vêtements. Je grelotte.

Non, je ne suis pas en bonne posture. Mes yeux sont bandés, je n’ai guère plus que mes oreilles et mon nez pour me repérer. Ce n’est pas comme si j’allais m’enfuir, néanmoins : mes mains sont liées à une chaise en bois. A chaque mouvement, des échardes s’enfoncent dans ma peau. La douleur, au moins, me garde bien éveillée et me permet de réfléchir.

Je suis, sans nul doute, dans une cave. Ou, tout du moins, sous terre. Captive. Probablement pas des Impériaux : Ils sont équipés de prisons pour les gens comme moi. Non, je pencherais plutôt pour des gens qui se cachent. Des parias. Résistants, peut-être. Je ne suis pas certaine que ce soit une bonne nouvelle, en réalité.

Je ne peux pas en savoir plus, je crois. Je n’ai jamais été excessivement douée pour analyser l’intégralité de mon environnement, pas sans mes yeux en tout cas : en cet instant, je regrette presque de ne pas posséder les sens incroyables des Miqo’tes. Je devrai me contenter de mon ouïe, n’ayant pas mieux sous la main. Il ne me reste plus qu’à attendre, car je ne compte pas crier en demandant de l’aide. Je préfère refuser ce genre de plaisir à mes agresseurs.

Je décide donc de patienter ainsi, assise dans cette position inconfortable, à attendre que quelque chose se passe.

Cela dura longtemps. Je tentais en vain de me perdre dans mes pensées pour ne plus sentir le froid et l’humidité, mais leur omniprésence ne cessait de me rappeler à la réalité. Plusieurs heures durant, j’attendis. Puis, la faim et la soif commencèrent à me prendre. Un élan de frayeur me traversa l’esprit. Combien de temps allais-je devoir rester ainsi, avant que l’on vienne me trouver ? Je fermais les yeux. Il fallait être forte.

Car le temps passait, mais rien ne changeait. Comme tout n’était qu’obscurité ici, j’avais complètement perdu la notion du temps. Aucun rayon de soleil, aucune étoile éclatante ne serait visible ici de toute manière. J’attendais depuis des heures. Le froid et la soif me brûlaient la gorge. Je sentis un rat me frôler la jambe et dû me contenir pour ne pas crier.

C’était si long.

Si long.

Une goutte d’eau me tombe sur le crâne.

Puis deux.

Puis plusieurs. Puis un flot glacé, qui m’agresse avec violence. Je n’y étais pas préparée. Je hurle. L’eau ne s’arrête pas de couler. Elle est si froide... Ma tête bourdonne. Je ne respire plus. Enfin, après des secondes terriblement longues, cela s’arrête. Je respire par à-coups, en hoquetant et en crachant de l’eau. Je tousse, pour ne pas m’étouffer.

Une voix terriblement douce parle. Une voix de femme. Ce n’est pas de l’Eorzéen. Je ne comprends pas. Je le dis à voix haute. Silence se fait.

Un temps plus tard, la voix se remet à parler. Je ne pense pas qu’elle s’adresse à moi en réalité, car je ne saisis rien de ces borborygmes ineptes. J’ai l’impression de me faire insulter par une sirène. Je ne comprends pas ce qui se passe, et garder mon calme devient de plus en plus difficile.

Une voix beaucoup plus grave, caverneuse, répond à la femme. Une main se pose sur mon crâne. Je commence à sérieusement appréhender la suite des événements.

Je sens une gifle tonitruante sur ma joue. Si violente que j’en ai le souffle coupé. Je n’ai même pas eu le temps de crier qu’un autre coup m’atteint dans le ventre.

Alors que la douleur me fait gémir, la femme se remet à parler. Une autre langue, je crois, car les sonorités ne sont pas les mêmes. Ou peut-être mon esprit et la souffrance me jouent-ils des tours, car rien ne me semble certain, au fond de cette cave, attachée, aveuglée et battue. Incertaine, j’essaie de marmonner quelque chose.

« Eor… Zéa… »

Le silence tombe de nouveau. Il est plus court, plus marqué. Rapidement brisé par cette voix féminine, en Eorzéen.

Dans ma langue.

« Que fais-tu ici, naine ? Les Eorzéens ne sont plus les bienvenus à Ala Mhigo. »

C’est un don remarquable que de s’exprimer avec une telle douceur en employant de tels termes. Cela donne l’effet d’un miel suave, dans lequel une guêpe s’est empêtrée. J’ouvre la bouche pour répondre, puis me ravise. Je ne peux pas décemment répondre que je suis là « juste pour voir ». Pas si je veux éviter d’être passée à tabac dans les règles de l’art.

Un coup m’atteint de nouveau.

« Ici, on répond vite aux questions. »

Bon sang, quelles brutes. Je ne dois pas traîner. Dans le doute, je tente de répondre quelque chose qu’ils pourraient trouver crédible.

« J’espionne. J’espionne l’Empire.
- Voyez-vous cela. »

Je suis frappée si violemment que la chaise sur laquelle je suis assis tombe au sol. Mon crâne touche le sol dans un craquement sinistre, et la douleur explose. Je hurle à m’en briser la mâchoire. J’ai au moins plusieurs côtes en morceaux, et probablement une fracture au crâne. Je sens une main m’attraper par le col et me redresser sèchement. Affolée, je secoue la tête.

« Dernière chance. Que fais-tu ici ? »

La main m’empoigne toujours. Elle va me frapper, je le sais. Mais que répondre ? Que faire, quand la vérité semble être un piteux mensonge ? Je ne vois pas d’issue.

« Je viens d’Eorzéa p-pour découvrir les mœurs d’une cu-culture dominée par l’Empire. J-je vous le jure. »

Je m’exprime en bégayant, lamentable. Mais, bien que je me fasse profondément honte, mes soucis d’élocution sont le cadet de mes soucis, désormais.

« Dominée ? »

La voix est toujours aussi douce. Toujours aussi effrayante. Je vais le regretter.

La main raffermit son emprise sur mon col. J’appréhende avec une horreur soudaine le passage à tabac que je vais subir. Je dois faire quelque chose tout de suite. Je n’arrive plus à réfléchir. Mon crâne me fait trop souffrir. Je sens un liquide chaud couler le long de ma nuque. Ma bouche est pleine de sang. Je n’ai toujours pas été rossée.

Toujours pas.

« Que sais-tu faire, naine étrangère ? » me demande la femme.

Excellente question, à vrai dire. Dans l’immédiat, je suis tentée de répondre que je sais avoir peur. Cela ne me sauvera que très peu probablement, néanmoins. Alors je décide d’incanter. Sans bâton pour canaliser la magie, je ne suis que peu efficace, mais je dois améliorer mon état de toute urgence ou je vais mourir, sans aucun doute : trop de sang coule le long de ma tête. Mes pensées s’égarent et mon front bourdonne violemment.

En quelques secondes d’intense concentration, je finis l’incantation et commence à sentir la douleur de mon crâne s’apaiser. Mes côtes me font toujours autant souffrir, mais je ne peux malheureusement pas les ressouder sans avoir les mains libres. Ma situation est véritablement piteuse.

« Ça, c’est extrêmement intéressant. »

J’entends mes hôtes s’en aller. Une porte grince, puis claque.

Ils me laissent seule. Agonisante, dans le noir total, avec pour seule compagnie le froid, mes vêtements trempés, les rats et l’odeur du sang.

Mon sang. Je suis effrayée.
Dernière modification par Maeko le 30 oct. 2016, 13:19, modifié 1 fois.
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 07 oct. 2016, 13:21

Menace Mhigoise


Les choses ont bien changé depuis quelques temps.

C’est la première pensée qui me vient à l’esprit quand je prends quelques secondes pour observer la pièce dans laquelle je me trouve. Complètement fermée, opaque : impossible d’avoir des fenêtres en étant sous terre, évidemment. Et pourtant, je m’y sens à relativement à l’aise. Plus que j’aurais pu le penser, en tout cas. Mes yeux en font le tour.

La porte d’entrée est faite de bois traité. Elle arbore des motifs tressés simples mais élégants, comme la majorité des meubles de pierre qui ornent les lieux, à commencer par le bureau sur lequel sont posés de nombreuses fioles de produits médicinaux, comme du désinfectant ou des solutions contre les migraines et problèmes respiratoires. Un encens y brûle également, me permettant presque d’oublier la moisissure omniprésente, cachée sous des tapisseries rapiécées et noircies par l’humidité. Un hamac coloré est monté dans un angle de la pièce, sous lequel se trouve ma paire de sandales boueuses. L’ensemble est éclairé par un lustre simple, mais rudement efficace. Cela me rappellerait presque l’infirmerie que j’avais sur l’Eternal, en mieux : j’ai construit les meubles moi-même en quelques incantations, le remous caractéristique des grands navires est absent et je n’ai pas une tripotée de corsaires abrutis à entretenir.

Cela étant, on les a remplacés par des rebelles Mhigois. C’est un vrai souci : ces gens n’ont aucun sens de la demi-mesure. Ils haïssent les soldats de l’Empire qui patrouillent en vie et des embuscades ont lieu presque tous les jours. De fait, inlassablement, je reçois ma dose quotidienne de rebelles amochés à sauver. A en juger par le sourire malsain de Saphi à chaque fois qu’elle rend visite aux blessés en convalescence, je pense que les pertes de ce groupe ont largement diminués depuis qu’ils m’ont attrapé. Cela pose, à mon sens, deux problèmes : le premier, c’est que les rebelles semblent transcendés à l’idée que je puisse les garder en vie au retour de leur mission. Logiquement, la fréquence des rixes a augmenté à un rythme impressionnant, et le courage renouvelé des troupes locales entraîne indubitablement la mort de nombreux Impériaux, à la surface. Je suis responsable, malgré moi, d’un bain de sang qui ne semble pas près de s’arrêter.

Le second souci est directement lié au premier : puisque je suis devenue un outil de guerre indispensable pour les rebelles, les Impériaux doivent logiquement vouloir me voir morte. Mes « hôtes », quant à eux, sont prêts à tout pour me garder en vie, au moins le temps nécessaire pour former un apprenti.

C’est là que la situation devient véritablement complexe : j’ai effectivement un apprenti, un jeune Mhigois répondant au nom de Djeor. Je ne lui donne pas plus de quatorze ans, bien qu’il arbore déjà des traces de la musculature caractéristique du peuple Hyurgoth. Il mesure environ deux fois ma taille, a des cheveux noirs de jais, un visage légèrement joufflu et un sourire constant qui m’agace au plus haut point : car oui, monsieur Djeor semble voir en moi et en l’enseignement que je me vois forcée de lui prodiguer un espoir fantastique pour son peuple.

Foutaises. Les Mhigois ne seront pas libérés, après tant d’années de domination Impériale, par quelques attentats dans les ombres des ruelles de la ville. Mais, ici, tout le monde continue d’espérer. Tout ce qu’ils vont réussir à faire, c’est énerver les hauts-gradés garlemaldais qui viendront avec des troupes en nombre nous faire la peau une bonne fois pour toute, dans les sous-sols de la ville. Je dois donc trouver un moyen de fuir cet endroit avant de provoquer, par mes actes, un carnage.

C’est tout de même étrange, de me dire que j’ai pu rompre un simili-équilibre avec quelques incantations basiques. Depuis quelques temps, l’idée selon laquelle guérir des gens peut entraîner la mort d’encore plus de gens commence à s’imposer dans mon esprit. Dans un premier temps, je l’ai refusée : il était inacceptable de me dire que des guérisseurs philanthropes œuvraient malgré eux à la continuité de guerres et de situations catastrophiques. Pourtant, je m’en rends bien compte désormais : je risque d’être directement responsable de la mort de centaines de personnes.

C’est un peu comme une fourmi qui vous grimpe le long de la jambe. Elle ne vous dérange pas plus que ça, et, si elle ne s’aventure pas sur le bout de votre nez, vous n’en tenez même pas rigueur et la laissez faire ce qu’elle souhaite. Mais si les fourmis tentent de monter par dizaines, avec une énergie renouvelée, vous vous dites qu’il faut traiter le problème et mettez du poison dans la fourmilière.
Je ne peux évidemment pas faire part de mon analyse à Saphi, car elle refuserait d’entendre quoi que ce soit.

Saphi, c’est la femme que j’ai rencontré à mon arrivée ici. En plus d’une voix incroyablement douce, elle possède, comme la plupart des Elézéens, un corps voluptueux aux membres démesurément longs et un extrémisme nauséabond qui déforme parfois son visage d’un rictus haineux. Elle me déteste, presque autant que les Garlemaldais. Un presque qui me permet d’être encore en vie : elle voit en moi un outil à double tranchant. D’un côté, elle ne peut pas me faire de mal, car elle a besoin que je garde ses rebelles en vie, ce qu’aucun autre que moi ne peut si bien faire. De l’autre, ma peau noire, ma petite taille et mon origine la dégoutent. Mais, en attendant, elle prend soin de moi, me met du matériel et un local à disposition et ne demande plus à Rodj, son gorille Hyurgoth, de me battre. Néanmoins, chaque fois que je les vois ensemble, mes sens se rappellent du bruit de mon crâne se brisant sur le sol. Mes côtes se fracturant sous les coups de poings. Ma voix se brisant en essayant de m’expliquer. En quelques minutes, ils ont insufflé en moi une peur démente : celle de la folie des hommes qui n’ont plus rien à perdre. Je ne pense pas qu’ils soient fondamentalement de mauvaises gens. Selon moi, les gens mauvais n’existent pas, car personne ne souhaite le mal sans raison. Mais la peur, la haine, la stupidité rendent les hommes capables des pires crimes.

Je soupire. Je ressasse de mauvaises pensées, comme d’habitude. Mon incapacité à faire preuve d’optimisme me sidère, parfois. Je devrais me contenter d’être heureuse de pouvoir vivre encore, sans être torturée ou abusée, car ma situation reste somme toute très acceptable. Mais la peur et l’appréhension sont plus fortes. J’enlève mes pieds nus du bureau de pierre pour m’asseoir convenablement sur ma chaise et jette un œil à Djeor, qui s’entraîne à incanter au centre de la pièce. Il se débrouille mieux que la plupart des débutants que j’ai pu rencontrer, compte tenu du contexte dans lequel il découvre l’élémentalisme. Ce qui le met en danger, au même titre que moi.

Il est naïf, voire niais. Malgré que ses parents soient décédés lorsqu’il était jeune, il arbore une joie de vivre surprenante. Il n’a pas appris à haïr l’Empire comme la plupart des autres Mhigois : il a grandi quasiment toute sa vie en étant dominé par les Garlemaldais. Il a assimilé, d’une certaine manière, leur mode de vie. Un coup du sort l’aura amené ici, mais je ne suis pas certaine qu’il sache véritablement ce pour quoi il combat. Quand je le regarde répéter inlassablement les mêmes formules, j’éprouve de la pitié pour lui. Il est innocent, mais sera en première ligne lorsque les événements dégénéreront. Je pense qu’il est la seule et unique raison pour laquelle je ne me suis pas encore enfuie. Je ne peux me résoudre à le laisser ici, dans ces conditions.

Je dois le convaincre de venir avec moi avant que les Garlemaldais attaquent, car des centaines de morts que ma présence entraînera, il sera celui, sans aucun doute, pour lequel j’éprouverai le plus de peine.

Je dois au moins pouvoir sortir une personne de ce bourbier.
Dernière modification par Maeko le 30 oct. 2016, 13:20, modifié 1 fois.
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 24 oct. 2016, 15:57

Fuite Mhigoise

Catastrophe.

Cela fait désormais quelques temps que je suis coincée sous terre, à prendre de soins de rebelles masochistes ne pensant qu’à libérer leur territoire de l’envahisseur Garlemaldais. Ils ont bien du mal à comprendre qu’après 20 années d’implantation, la « vermine », comme ils l’appellent, commence à se sentir chez elle, et ne compte pas bouger si facilement. Mais des nouvelles venues de l’ouest semblent avoir changé la donne. D’aucuns disent que des armées viendront en nombre pour les libérer.

Qu’ils aient raison ou tort, les tensions ne cessent de s'accroître. Un massacre est imminent, et je ne peux plus attendre pour m’enfuir. J’ai passé les deux dernières semaines à creuser un tunnel à l’aide de formules élémentalistes, à l’aveugle. Ce fut un travail extrêmement fastidieux : d’une part, je devais faire preuve d’une attention particulière pour ne pas me faire repérer. Non que les gens qui me séquestrent connaissent grand-chose à ma discipline, mais le fait de me voir parler seule dans une langue inconnue la main posée sur un mur aurait pu éveiller des soupçons. D’autre part, réaliser un passage à l’aveugle dans ses conditions relève de l’exploit minutieux. Chaque yalm creusé m’aura demandé de longues heures de concentration épuisante, au terme desquelles je me retrouvais vidée de mon énergie. Je devais pourtant m’économiser, car j’avais des Mhigois à garder en vie.

Néanmoins, cette œuvre est achevée. Le tunnel conduit à deux yalms de la surface, si je ne me suis pas trompée, et, en règle générale, je me trompe rarement. L’emprunter et le sceller derrière moi me prendra quelques secondes tout au plus, car je me suis taillé une baguette dans un pied de chaise. C’était nécessaire, Saphi me reprenant mon bâton après chaque guérison. Elle avait vu de quoi j’étais capable en sculptant les meubles dans la pierre, et avait logiquement décidé que je ne devais pas garder cet outil sur moi constamment. C’est, pour une fois, une sage décision qu’elle prit. Mais, malheureusement pour elle, j’ai appris à me débrouiller avec les moyens du bord. J’aurai donc le dernier mot.

Pourquoi est-ce la catastrophe alors ?

Il me reste littéralement quelques secondes pour partir. Dans un affolement absolu, je finis de préparer mes affaires. Ma chaise bloque la poignée de la porte d’entrée de ma cellule-infirmerie. Ma situation est extrêmement délicate.

Je souhaitais emmener Djeor, mon apprenti, avec moi en Eorzéa. Manque de chance, Saphi avait dû sentir le coup arriver. A l’instant même où j’ai fait l’erreur d’être trop explicite quant à l’avenir que je nous imaginais, il m’a injurié en hurlant que j’étais une sale traîtresse et s’est précipité dehors. Il est devenu à peu près compétent, et Saphi n’aura aucun remord à demander à son singe de me briser en deux, ayant un médecin remplaçant sous la main. Pas après ce genre de traîtrise. Ne tenant pas à être de nouveau torturée avant une mort probablement douloureuse, je referme ma sacoche, attrape ma baguette de fortune et murmure une incantation pour ouvrir le mur, avant de découvrir l’obscurité d’un tunnel qui m’attendait sagement.

Sans plus attendre, je m’enfonce dedans et le referme avec des rochers et de la terre derrière moi. Pour l’instant, je suis sauve.

L’obscurité est absolue ici, et la terre humide. Je sens mes mains et mes jambes s’encrasser de boue à mesure que je progresse. Derrière moi, bien qu’étouffés par un bon yalm de roche et de terre, j’entends les beuglements de la voix douce de Saphi. Par les Douze, comment est-ce même possible de hurler autant en gardant un tel ton ? Cette femme aurait eu un grand avenir en politique, je pense. Je devais avouer qu’elle possédait un charisme incroyable. Dommage qu’il fût pourri par ce goût pour l’extrémisme.

Bien qu’avançant à tâtons, je savais parfaitement vers où je me dirigeais : l’avantage notable d’avoir mis autant de temps à incanter mon issue de secours. Aussi, cette noirceur oppressante ne m’effrayait pas : j’avais surtout peur de faire une mauvaise rencontre en sortant. Une sortie prévue très prochainement, avant de me rendre devant le taudis qui, presque une vie auparavant, me servait de refuge dans la cité d’Ala Mhigo. Un taudis dans lequel j’avais caché mes meilleurs bâtons et une somme conséquente de gils. J’allais avoir besoin des deux pour rentrer chez moi en un seul morceau.

Après deux heures pleines de progression, je découvris le bout de mon ouvrage. Il était temps, car je commençais sérieusement à m’épuiser et à m’assoiffer. Je ne me rappelais pas avoir creusé si loin, mais je ne m’en maudissais pas, loin s’en faut : cet effort considérable me permettrait de sortir loin de ma cellule, et donc d’éviter d’être joyeusement accueillie lorsque ma tête dépassera du sol. Je commençais donc à incanter pour dégager les quelques yalms restants. Un sort de méga terre classique allait suffire, je ne perdis donc pas de temps à déblatérer une formule complexe : il fallait simplement pousser le bouchon.

Cela se fit dans un vacarme assourdissant : un bruit sourd et une détonation, à la suite desquelles il ne me fallut que quelques secondes pour me précipiter dehors et me mettre à couvert derrière la première caisse en bois que je vis. Puis, tendue, j’attendis que la poussière retombe et me dévoile mon emplacement. J’étais si concentrée que mes yeux auraient pu sortir de mes orbites. Fort heureusement, ils restèrent à leur place et je pus m’intéresser à mon environnement. Bonne nouvelle, je n’étais pas si loin de chez moi. Je reconnaissais l’architecture typique de ce quartier miséreux, cette pierre taillée s’accouplant avec les divers matériaux de récupération. Je savais où aller. Je filais donc à toute allure, pleine de boue, en prenant soin de m’éloigner du centre-ville. Je devais absolument faire le tour par la périphérie au plus vite. Le bruit allait attirer beaucoup de monde, dont mes probables geôliers.

Geôliers que j’étais presque sûre de trouver devant ma mansarde. Heureusement pour moi, il ne serait pas problématique d’escalader par l’autre côté et de passer par la fenêtre : j’espérais simplement n’avoir à affronter personne. Je pouvais me débarrasser aisément d’un opposant, mais pas d’une dizaine si des renforts venaient à être appelés. Je n’étais ni archère, ni pugiliste. Je n’avais pas d’arme d’occultisme sur moi et ne souhaitait de toute manière pas choisir une approche létale. Il allait donc falloir endormir les potentiels assaillants. Un par un. Génial.

C’est emplie de ces pensées que j’atteignis l’angle de rue fatidique. Je jetais un œil prudent pour observer l’escalier qui donnait accès à mon chez-moi Mhigois. Personne, au premier abord. Cela n’allait pas en me rassurant, mais j’allais devoir faire avec. Ma baguette de fortune bien en main, je me mis à avancer lentement vers le bâtiment. Mes yeux scrutaient tous les recoins à portée de vue, trahissant ma panique. Bien que je m’efforçasse de me contrôler, mes émotions avaient toujours tendance à revenir me jouer des tours dans les moments les plus décisifs. Un handicap notable qui m’avait, entre autres, conduite à quitter le front de Brumebleue. Incapable de me concentrer uniquement sur les faits, souffrante de la disparition de ma sœur, j’avais essayé, depuis, de devenir quelqu’un d’autre.

J’avais partiellement réussi. J’avais effectivement changé au point de devenir quelqu’un que je haïssais. C’est une sensation très étrange, car on ne cherche plus à se repentir de ses fautes. Seulement à se punir. Se punir en s’interdisant le plaisir simple de la compagnie d’autres gens. Se punir en allant, par principe, à l’encontre de ses interlocuteurs et recevoir leurs foudres.

Se punir en agissant contre ses convictions. Que faisais-je, moi, Maeko, si loin de chez moi et de mes proches, me mettant inutilement en danger alors que des gens auraient pu avoir besoin de moi ailleurs ? Etais-je vraiment en train d’assouvir ma soif de curiosité, où tentais-je de m’exiler d’un faible bonheur que je ne pensais pas mériter ? Tout ça, au final, pour me retrouver traquée dans les rues de cette cité, à ramper pour fuir. Fuir, comme d’habitude. Je savais faire ça.

Je n’avais pas les clefs de ma mansarde, je crochetais donc la serrure antique à l’aide d’un caillou taillé en une formule élémentaliste. Dès que la porte pourrie s’ouvrit, je me ruais dans la puanteur de ce chez-moi qui me répudiait, et, après une petite incantation, fit un trou dans le mur de briques, au-dessus de ce qui m’avait jadis servi de lit.

Pour la première fois depuis longtemps, un sourire sincère éclaira mon visage. Une bourse remplie de gils et les deux bâtons que j’avais emmenés m’attendaient sagement. Il y en avait pour une petite fortune : je ne lésinais jamais sur la qualité de mon matériel. Je saisis l’arme d’occultisme. C’était un long bâton de bois noir. Des motifs en argent longeaient la partie supérieure du manche, et le contact de mes mains fit légèrement scintiller la sphère éthérique à son extrémité. Ainsi armée, mes chances de m’en tirer vivante augmentaient considérablement.

« Mains en l’air, ma douce. Ne nous oblige pas à te rendre plus laide que tu ne l’es déjà. »

La voix de Saphi fit parcourir en moi un frisson qui descendit jusqu’à mon échine. J’eu la sensation que ma mère me racontait une histoire avant d’éteindre la lumière pour me permettre de dormir, dans le même temps que mes yeux s’ouvrirent de hantise. Cette sensation extrêmement désagréable, me disais-je, ne devait être produite que par quelques rares individus en ce monde. Dont la femme dans mon dos. Je n’avais même pas dix secondes pour réagir.

Je fermais les yeux en incantant. Sans me retourner, je devais compter les gens qui étaient derrière moi. Saphi, ça fait un. Je sentais également l’éther de son gorille de compagnie. Deux… Non, trois autres étaient avec eux. Cinq. Ils étaient cinq.
Image
Mon incantation fut déclamée dans un cri du cœur. Alors que je me retournais vivement, les cinq personnes tombèrent à terre, inertes. Je mis la bourse dans ma sacoche, accrochait le bâton d’élémentalisme dans mon dos et me précipitait vers la porte en évitant de marcher sur mes invités improvisés : ils n’allaient pas dormir plus d’une minute au maximum, je ne pouvais pas traîner. Trois personnes étaient dehors, pistolets à la main, levés vers l’endroit où je me trouvais. Dans mon demi-tour brusque, j’entendis à peine les armes faire feu, mais je sentis très distinctement une balle se loger dans ma cuisse droite. Je me jetais par la vitre à moitié brisée de la pièce, avant de tomber de quatre yalms. Ma réception dans la poussière fut extrêmement douloureuse, et le bruit sinistre que fit ma cheville me poussa à hurler comme une démente.

Dans un effort extrême pour rester lucide, je pris mon bâton d’élémentalisme et me remis sur pied en quatre secondes. L’élémentalisme ne me guérissait pas complètement et fatiguait énormément mon corps, mais allait me permettre d’endurer ce que l’être humain n’est pas censé endurer. Tant que je continuais de courir, l’adrénaline me permettrait de ne pas m’effondrer : aussi, couverte de sang, de boue et de sueur, sans même pouvoir prêter attention à l’incroyable spectacle du soleil se couchant, teintant d’orange et de rouge les rues d’ordinaire si grises, je me mis à sprinter vers les portes ouest d’Ala Mhigo.

Vers la liberté et mon salut.
Dernière modification par Maeko le 30 oct. 2016, 13:22, modifié 1 fois.
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 30 oct. 2016, 13:17

Interlude Mhigois

Une dernière fois, je prends le temps de contempler Ala Mhigo. La cité est magnifique. J’y reviendrai, un jour. J’ai à y faire. Mais, à l’instant présent, je dois réussi à rentrer chez moi. Le port est bouclé par les Impériaux, impossible de s’enfuir clandestinement. Je vais devoir sortir de la ville et marcher. Je risque d’en avoir pour une lune au moins, avant de rallier les premiers feuillages denses de Sombrelinceul. Partout, je serai en danger. Quand je regarde ma carte, le courage me quitte. Eorzéa est si lointaine…

Je ne sais pas comment je vais y arriver. Puissent les Douze me venir en aide.
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 02 nov. 2016, 20:28

Envolée Mhigoise

La nuit enveloppe les remparts de la ville. Dans son manteau sombre, tout disparait. Ou presque : quelques torches mouvantes brillent au loin. Très vraisemblablement portées par des soldats de l’Empire. Effrayant, mais moins que le groupe de rebelles à mes trousses. Je sais pertinemment qu’ils ne cesseront de me traquer tant qu’ils n’auront pas confirmation que j’ai quitté la ville. Ils doivent scruter chaque coin de muraille qui ne soit pas gardé par un Garlemaldais. Pour ne rien arranger, mes poursuivants sont loin d’être idiots : je ne pourrai même pas m’approcher des murs de la ville sans me faire attraper. J’ai eu énormément de chance en réussissant à sortir de chez moi, sans doute grâce à mon débit d’incantation rapide qui les aura surpris. De plus, ma démonstration avec le tunnel aura fait son petit effet : l’élémentalisme m’a sauvé deux fois en moins d’une heure, il n’y aura pas de troisième. Je dois me débrouiller pour être discrète.

Je me baisse pour masser ma cheville et ma cuisse : elles semblent toutes deux relativement guéries. En contrepartie, ma tête bourdonne fortement, et la fatigue doit se lire sur mon visage : mes yeux piquent, comme si j’étais restée éveillée une semaine entière après avoir bu trop de café. Me concentrer suffisamment pour éviter que ma capacité d’analyse ne soit trop altérée me demande une énergie que j’ai de plus en plus de mal à fournir. En me redressant, je tends l’oreille et lève les yeux. Un aéronef passe au-dessus de la ville, dans la direction où je souhaite aller. Il part surement réapprovisionner les camps de guerre aux frontières Eorzéennes.

J’essaie d’imaginer la réaction des soldats, lorsqu’ils voient arriver ces forteresses volantes : d’un côté, ils peuvent subvenir à leurs besoins pour quelques temps avec les précieuses ressources acheminées jusqu’à eux. Néanmoins, cela se fait au détriment de leur espérance de vie, car tant que les aéronefs réapprovisionnent, la guerre ouverte continue, et des gens meurent par dizaines chaque jour, terriblement loin de leurs proches. En proportions, j’ai l’impression qu’il y a bien peu de gens à blâmer pour de si grands malheurs et de si nombreuses vies gâchées. Ma situation laisse à désirer, mais elle vaut mieux que celle d’un de ces soldats frontaliers, à la merci de la sauvagerie de mes concitoyens, défendant leurs terres de toute leur énergie. Et les Douze savent à quel point les Eorzéens peuvent se montrer belliqueux pour peu qu’on leur donne la motivation et la force de se défendre.

Je croise les bras. Réfléchir à la misère du monde ne va pas arranger mes affaires. Si je veux un jour pouvoir transmettre les valeurs qui sont les miennes et œuvrer pour un monde plus paisible, je dois commencer par rentrer chez moi en vie : je n’ai ici aucune solution de repli, aucun endroit garantissant ma sécurité ici. En vérité, j’ai l’intime conviction que je ne survivrai pas à cette nuit si je ne sors pas du guêpier Mhigois.

Je dois me reconcentrer. Quelles sont les ressources à ma disposition ? Mes deux meilleurs bâtons de magie sont accrochés sur mon dos : je peux faire des merveilles avec, pour peu que j’y mette l’éther nécessaire. Seulement, mes réserves en l’état sont plus que limitées après ma guérison surprise en fin d’après-midi. J’avais également une grande quantité de gils dans une bourse de cuir, cachée dans ma besace. Difficile néanmoins de payer qui que ce soit ici avec une telle quantité d’argent sans me faire dénoncer, dans le meilleur des cas. En fouillant ma sacoche, je trouvais également quelques bandages, de l’alcool, un nécessaire à couture et deux prismes de mirage.

Une idée naît progressivement dans mon esprit embrumé. Sa perspective fait naître un sourire sur mes lèvres : cela me semble excessivement risqué, mais, à l’idée de retourner de dix ans dans le passé pour sauver ma peau, mon sourire niais ne décroit pas.
Il est temps de partir à la pêche dans la mer de Jade.

J’m’appelle Hunfrid Fisherman. D’puis près d’quarante étés qu’j’habite à Ala Mhigo, je pêche. C’est l’métier que f’saient mes vieux, et que leurs vieux faisaient avant eux. L’Empire m’empêche pas d’pêcher, au contraire, donc, contrairement à beaucoup d’autres, ma vie a pas tant changé qu’ça d’puis qu’ils sont arrivés.

Oh, pour sûr, on fait pas les malins quand la garnison passe, et on est payés une misère pour ramener du poisson. Mais bon, c’toujours plus que c’que mes vieux gagnaient : j’ai l’habitude de pas avoir d’oseille de toute façon. J’dépense tout à la taverne à la fin de la semaine. C’pour ça que ma femme m’a quitté, j’crois. M’enfin, ça lui a pas bien réussi à cette gueuse, parce que d’après c’que m’dit le tavernier, ils l’ont envoyée aux mines. Et, franchement, être pêcheur c’est bien plus sécurisant que de récolter des minerais et du céruléum : ceux-là, croyez-moi, sont pas beaux à voir. Ouaip.

Bon, j’dis tout ça parce que je suis un peu paumé dans mes pensées. Trop de rhum, ouaip. Puis t’façon la taverne ferme, alors j’me lève en titubant. J’manque de tomber une fois, puis après j’m’y fais et ça va mieux. J’dis au r’voir au tavernier et aux collègues, pis j’repars vers ma cabane. Faut qu’j’dorme, demain on doit ram’ner du poiscaille. J’longe donc le ponton et les p’tits bateaux des pêcheurs, dont l’mien. Une seconde, j’m’arrête, pis j’m’engage sur le ponton, vérifier rapid’ment que l’filet et les rames sont d’dans. J’ai pas envie de m’occuper de ça au réveil, pour dire vrai.

En arrivant à son niveau, j’farfouille un peu, pis j’trouve tout c’que j’cherche, en ordre. C’est bien, je pensais l’avoir fait, mais j’avais un peu oublié avec l’alcool. J’peux aller m’pieuter.

« C’est votre barque ? »

J’me r’tourne en sursaut, surpris par cette voix de donzelle qui m’interpelle. Pis je me prends une douche froide, en voyant qu’c’est un… une soldate… J’sais pas comment on dit, mais c’t’une fille de l’Empire, pour sûr. Elle a pas l’air de rigoler, même si elle est toute p’tite.

« Je vous ai posé une question. »

J’essaie de r’trouver mes mots, les gars de Garlemald, ils sont pas réputés pour êt’ gentils ou patients. Le rhum me fait bégayer, mais j’arrive à articuler quelques mots.

« B’soir. Ouais m’dame, c’est mon bateau. Quelque chose ne va pas ? »

Je sens son regard violet qui m’observe. Elle fait flipper pour dire vrai, je sais pas c’qu’elle m’veut mais j’aimerais en finir au plus vite. J’ai pas envie d’me faire envoyer aux mines comme un idiot. Elle bouge, me tend la main. J’comprends pas, alors j’regarde sa main. Des pièces d’or sont dedans.

« Je vous le réquisitionne. Prenez ça et déguerpissez. Bruyamment si possible.
- J’vous d’mande pardon ? »

Elle m’jette un regard qui tue. Elle rigole vraiment pas, mais j’veux pas abandonner mon bateau. Comment qu’j’vais m’nourrir moi après ? Puis, l’espace d’une seconde, je r’marque que sa main est couverte de sang sec. Ni une ni deux, je comprends qu’elle va m’buter si je m’bouge pas l’derche, alors j’prends les pièces d’or et j’me taille en maugréant, lui tournant le dos à elle et à ma barque. En avançant le long du ponton, je vois, plus loin, des types habillés en civil qui courent vers moi en hurlant. J’me tire alors en courant, manquant d’me faire dessus.

« C’est elle ! Arther, bute-la ! Bute-la ! »

Je rame comme une folle furieuse en regardant, au loin, l’arc me visant se tendre. Heureusement, je n’ai pas perdu la main avec la mer. Je dois sortir du port avant de prendre une flèche entre les deux yeux, et je serai presque hors d’atteinte.

Duper ces gens n’a pas été une partie de plaisir. Heureusement, avec mon ton méprisant et un uniforme Impérial approximativement miragé, j’ai pu créer une illusion plus ou moins crédible. Suffisamment, en tout cas, pour m’introduire dans le port de pêche en vie et m’approprier une coque de noix. Comme dans mon Thanalan natal, cette épave semble ne rêver que de couler, mais je ferai un effort pour qu’elle me transporte jusqu’à l’estuaire qui sépare Gyr Abania de la forêt de l’Est de Sombrelinceul.

Une flèche frôle mon oreille et me ramène à la réalité. Je suis encore loin d’être tirée d’affaire. Sur le bout de la jetée, je vois mes poursuivants enflammer leur prochaine flèche. Je souhaitais atteindre la sortie du port avant de me vider de mon éther, mais je n’ai pas le choix : je vais brûler vivante si je reste passive. Je ferme les yeux, essaie de me concentrer malgré la douleur qui martèle mon crâne, et commence à incanter, à la recherche d’un coup de pouce des éléments. Je visualise mentalement l’eau sous mes pieds, et j’imagine la forme que je veux lui faire prendre : celle d’un courant violent m’emmenant hors d’ici. Je lance mon sort d’Aura Aquatique, sentant immédiatement le reste de mon énergie me quitter brutalement, me coupant la respiration alors que même que je ressens la brusque accélération de mon moyen de transport. Puis, sans doute à cause de la douleur, de la fatigue et de mes dépenses en éther, mes yeux se ferment.

Je crois que je pars au loin.
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 08 nov. 2016, 12:04

Navigation Mhigoise


Je me réveillais en sursaut lorsque les rayons du soleil frappèrent mes paupières closes, manquant au passage de faire chavirer mon embarcation. Une nausée soudaine et violente m’envahit presque immédiatement, et je me penchais au-dessus de l’eau pour vomir. Entre deux quintes de toux, une bile nauséabonde s’échappa de mes lèvres, me rappelant que je n’avais rien mangé depuis 24 heures. Je restais ainsi, genoux à terre, pendant dix longues minutes qui me paraissaient une éternité. Puis, lorsque même la bile refusa de quitter mes entrailles, je me laissais chuter dans la barque pourrie.

J’étais affamée, malade, fatiguée et la soif me déchirait la gorge.

Mais j’étais vivante.

Les événements de la veille me reviennent en mémoire : la fuite par le tunnel, la balle s’enfonçant dans ma cuisse, la chute de la fenêtre de ma mansarde, les soins d’urgence, la course poursuite, les heures passées en cachette à réfléchir aux solutions s’offrant à moi… Et me voici libre, en mer. Je m’allongeais dans la barque et fermais les yeux. Il ne me fallut que quelques secondes pour que de vieux souvenirs ressurgissent. Je revois le visage sévère de mon père, suant et pestant pour remonter un filet chargé de déchets. J’entends le bruit de l’eau qui clapote dans le fond de l’embarcation. Mes doigts se font de nouveau piquer par des hameçons et l’odeur forte du poisson frais me monte au nez. Une vie qui aurait pu être la mienne, à laquelle j’avais tourné le dos étant plus jeune. L’on avait plus besoin de médecins que de pêcheurs, et, de toute manière, je n’aimais pas le poisson.

Puis, même si je n’aimais pas me l’avouer, j’avais eu envie d’être reconnue, ce que le métier de mes parents n’aurait pas permis. C’était effectivement une autre vie, qu’il m’arrivait de regretter de ne pas avoir choisie, mais jamais complètement. En tant qu’élémentaliste, j’étais loin d’être parfaite, mais suffisamment compétente pour pouvoir me tirer de diverses situations épineuses. Ala Mhigo l’avait prouvé.
En songeant à Ala Mhigo, je me relevais, afin d’observer autour de moi. Je repérais rapidement le port de l’ancienne Cité-Etat, à la limite de l’horizon, avant de sortir ma boussole. La ville se situait au Nord par rapport à ma position. Je devais donc naviguer vers le Nord-Ouest pour rallier la lisière de Sombrelinceul. Quoi qu’il en fût, la priorité était de me rapprocher de la côte en même temps que je m’éloignerais de mon ancienne geôle. Boire de l’eau de mer était peu recommandé, et je n’avais pas envie d’être assoiffée au point d’en être réduite à cette unique solution. Il ne me paraissait pas impossible de trouver un village côtier dans lequel je pourrais acheter des vivres et continuer ma route.

Ma réflexion fut interrompue par la levée soudaine du vent. En me tournant vers le large, je constatais que le ciel était noir comme l’encre. J’avais encore mis la charrue avant les chocobos en me croyant en sécurité : une erreur qui risquait de me coûter cher si la tempête m’atteignait avant que je ne rallie la terre ferme, ma barque n’étant surement pas assez solide pour résister à la furie de l’océan. Résignée mais inquiète, j’attrapais une rame et me mis à incanter pour que le courant me pousse dans la bonne direction.

Je fus rattrapée par les éléments alors que la côte semblait s’être bien rapprochée, après près d’une heure de rame musclée. Je n’avais plus d’énergie, et les vagues commençaient à me balloter dans tous les sens, sans que je puisse les influencer d’aucune sorte, ce que je n’essayais même pas de faire de toute manière : un imbécile heureux pouvait peut-être penser stopper une tempête avec quelques formules élémentalistes, mais je préférais pour ma part songer à un moyen d’atteindre la rive saine et sauve.

Une vague frappa de plein fouet et manqua de retourner mon embarcation. Regardant tant bien que moi les alentours malgré la pluie, je remarquais bien vite que j’étais poussée par le courant vers des falaises, m’éloignant de la plage que je visais. Une très mauvaise nouvelle, en somme : cela impliquait des vagues gigantesques, des rochers et, plus dangereux encore, des lames de fond violentes. Très rapidement, j’attachais sur moi tout le matériel important que je ne devais perdre sous aucun prétexte : mes bâtons et ma sacoche. Une autre vague frappa et m’amena si près des rochers que je pouvais voir les coquillages qui y étaient logés. Je devais rapidement trouver une solution ou je risquais de finir noyée, sans autre forme de procès.

Une troisième vague, plus violente que les précédentes, jeta ma barque sur les rochers pointus avec une violence inouïe. Celle-ci se fracassa dans un bruit largement couvert par le vacarme des éléments : quant à moi je me retrouvais à la merci de la mer. Tant bien que mal, malgré la panique qui m’avait envahie, je m’accrochais à un des rochers proches, m’arrachant plusieurs ongles. Trop effrayée pour sentir la douleur, je me levais tant bien que mal sur mon support. Avant que la vague suivante n’aie le temps d’arrive, je dégainais mon bâton d’élémentalisme et, en une formule hargneuse, projetais en l’air le rocher sur lequel je me trouvais.

L’accélération violente m’éjecta de cette plateforme glissante, me jetant dans la mer, à plusieurs yalms de distance, mon bâton à la main. Je refis surface en cherchant ma respiration, luttant pour garder la tête hors de l’eau. Puis, je repérais la petite plage que j’avais vue en naviguant. Exténuée, blessée et affamée, je jetais ce qui me restait d’énergie dans une brasse salvatrice pour atteindre le sable humide qui signerait peut-être mon salut.

J’aurais fait une piètre pêcheuse.
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 13 nov. 2016, 20:05

Repos Mhigois

Mon visage est éclairé par une forte lumière, qui me sortit d’un profond sommeil. Dans une tentative vouée à l’échec visant à dormir quelques minutes de plus, je passe mon bras devant mes yeux, mais rien n’y fait. Avec l’éveil, viennent à moi les réalités de mes récentes aventures. Mon corps est terriblement endolori. Cela faisait longtemps que je n’avais pas ressenti une telle souffrance physique, rendue plus difficile encore par le contrecoup de l’élémentalisme. Alors que je tente de me redresser pour faire le point sur ce qui m’est arrivé ces derniers jours, une fulgurance me fait siffler de douleur au niveau du bassin. Des côtes cassées, probablement. Il me faut une bonne minute pour faire l’inventaire de tout ce qui semble mal fonctionner chez moi, et ma conclusion, à première vue, ne semble pas glorieuse : ma cheville droite est enflée et je n’arrive pas à bouger mon pied, la douleur de ma jambe, touchée par une balle auparavant, est à son paroxysme, ma respiration est rendue difficile par mes côtes fêlées, et, pour couronner le tout, une sensation globale d’épuisement semble ne pas vouloir me laisser en paix.

Peut-être parce que c’est en réalité plus qu’une simple sensation : je suis réellement épuisée, éprouvée de cette échappée Mhigoise. Échappée qui aurait pu se terminer à mon naufrage près des côtes, si je n’avais pas été secourue par un bienfaiteur anonyme, dont j’occupe probablement la chambre : à moins de m’être téléportée par un quelconque maléfice sur ce lit, ou d’être coincée dans un rêve trop réaliste à mon goût, j’avais vraisemblablement été repêchée. Je me rappelle simplement avoir tenté de nager jusqu’à la côte, puis, alors que j’en approchais, le trou noir. Ma chance me semble indécente : Didimiaou doit être en train de copuler allègrement avec quelque demoiselle inconnue. Enfin, après la façon dont je l’ai abandonné pour venir ici, je conçois sans trop de difficultés qu’il n’ait plus jamais envie d’entendre parler de moi. J’espère qu’il n’a pas été trop malheureux : surement que non, je suis une telle bourrique… J’esquisse un demi-sourire en imaginant le sourire de soulagement qu’il aurait pu pousser en me voyant enfin partie. Après tout, j’ai une réputation à honorer.

Je m’en occuperai quand je serai rentrée chez moi, et que je pourrai boire une bière fraîche dans une taverne eorzéenne en injuriant quelques clampins à l’air imbécile. En attendant, je dois apprendre où je me trouve, et trouver un moyen de descendre du lit sans me blesser plus que je ne le suis déjà. Ce deuxième point me paraissant hautement périlleux, je m’accorde un temps pour observer mon environnement. La bâtisse dans laquelle je me trouve doit être minuscule, car le lit, même s’il est très long pour une lalafelle, prend presque toute la place dans la pièce. Une commode est calée par un livre moisi, au pied de laquelle se trouvent mes affaires. Les voir ici me rend heureuse, tout en me rassurant profondément : la bourse de gils dans mon sac inciterait n’importe quel bougre simplet à me trancher la gorge et à cacher mon cadavre quelque part, preuve que mon bienfaiteur, quel qu’il soit, me veut du bien. Une petite fenêtre, unique source de lumière, donne sur ce qui semble s’apparenter à un village. D’ici, je ne vois néanmoins personne.

Ne sachant que faire de plus, je m’allonge de nouveau dans le lit, laissant mon regard vagabonder sur la toiture de chaume, moisie par endroits. Puisque personne ne semble être là, je décide de m’occuper en répétant à voix haute l’intégralité des formules occultistes que je connais. C’est mon passe-temps depuis des années. Depuis que j’étudie la magie orale, en réalité : prononcer les différents sorts le plus rapidement possible, en les chantonnant si nécessaire. Cela a considérablement amélioré mon débit et mon élocution, tout en me faisant gagner un temps précieux dans des situations épineuses. Tout le temps qui n’est pas perdu à incanter peut être investi en réflexion.

Je reste ainsi, me semble-t-il, plusieurs heures durant. Lorsqu’enfin j’entends une porte s’ouvrir, le soleil est haut dans le ciel et ne me tape plus le visage en tentant de me faire rôtir vive. Je me redresse avec difficulté, alors que la porte de la chambre s’ouvre, laissant entrer un jeune garçon hyur à qui j’aurais donné une quinzaine d’années, probablement moins. Il avait les cheveux blonds, attachés au niveau de la nuque. Sa peau était constellée de taches de rousseur, et il avait le gabarit lâche des jeunes adolescents, qui n’était pas arrangée par sa tenue pauvre. Me voyant éveillée, il me fit un sourire, que je m’efforçais de lui rendre. Je n’étais pas à l’aise dans cet exercice : j’avais tant perdu l’habitude de sourire, même lorsque la situation s’y prêtait, que j’avais l’impression désagréable de faire une grimace. Paradoxalement, les paroles de Bernard, un de mes mentors, me revenaient toujours : Tu as un beau sourire, Maeko, qu’il disait. Difficile à croire.

« Z’êtes enfin réveillée m’dame la sorcière ! Z’êtes une sacrée dormeuse dites ! » me lança l’ingénu d’une voix qui trahissait un âge plus jeune encore que ce que je m’étais imaginée. Ces grandes gens, ils paraissaient tous si vieux pour moi… Attendez, venait-il de me comparer à…

« Je vous demande pardon ? Sorcière ? Désolée de vous décevoir jeune homme, je suis tout ce qu’il y a de plus normal », répondis-je, hébétée.

Je le vois hausser un sourcil, avant de reprendre la parole.

« Bah oui, vous faites de la magie. Vot’ bâton là, ajouta-t-il en pointant mon bâton d’élémentalisme, y brillait comme la lune dans l’eau, c’était très fort. J’ai ben cru qu’les dieux v’naient m’rendre visite. »

Sauvée par l’élémentalisme, donc. Je ne compte même plus le nombre de fois que cette magie m’a gardé en vie. Rien que depuis mon arrivée dans les contrées de Gyr Abania, le chiffre doit être impressionnant.

« En tout cas je suis content qu’vous soyez réveillée, j’commençais à m’inquiéter, après deux jours. J’ai tout plein d’questions à vous poser ! Après tout, z’êtes pas d’ici, ça se voit à vot’ peau, alors vous avez forcément des trucs de dingue à raconter ! »

J’essayais de faire de l’ordre dans ma tête, puis, en faisant un gros effort de bonne volonté, je me mis à écouter le jeune homme dont je ne connaissais même pas encore le nom m’interroger. La plupart des questions concernaient l’endroit d’où je venais, qui j’étais, ce que je faisais, si j’étais envoyée des dieux… Je pris sur moi pour répondre honnêtement, en me rappelant que je devais probablement la vie à cet inconnu : il ne risquait donc pas de m’attirer d’énormes ennuis, ou du moins pas volontairement. En abrégeant volontairement sur les raisons de ma fuite de la cité Mhigoise, je lui demandais donc de faire preuve d’une grande prudence à mon sujet. S’il voulait rester en sécurité, il me semblait important qu’il reste muet comme une tombe au sujet de la lalafelle eorzéenne élémentaliste qu’il hébergeait dans sa cabane. Non que je le prenne pour un idiot, j’avais eu quelques mauvaises surprises au cours de ma vie à cause de l’indiscrétion de certains de mes compères.

Lorsqu’il fut enfin à court de question à me poser – la dernière ayant eu pour sujet ma couleur préférée, je pu enfin poser les miennes, probablement plus pragmatiques.

« J’dirais plutôt chiantes. »

C’est une autre façon de le dire, oui. Toujours est-il que j’appris que j’étais à l’embouchure d’un fleuve dont le nom m’échappe complètement, à quelques jours de marche des frontières sombrelinçoises. Le village où je me trouve vit de la culture de céréales et de la pêche, et se trouve dans un creux de falaise, le gardant à la fois à l’abri des tempêtes et des prédateurs. La présence Impériale y était légère, et l’occupation se traduisait par la livraison à l’Empire d’un quota des cultures deux fois l’an.

Je me répète, mais je faisais preuve d’une chance insolente. Rentrer à pied allait être extrêmement rapide, une fois remise sur pieds. Je trouverais un moyen de dédommager mon sympathique hôte d’une manière ou d’une autre, mais la perspective de la bourse dans ma sacoche me donnait quelques idées. Je n’avais plus qu’à réfléchir à un moyen de passer les murailles de Castrum Oriens lorsque j’y serai pour, finalement, rallier la Forêt de l’Est.

« Oui enfin m’dame la sorcière, je veux pas vous décevoir mais pas grand monde prend la route seul. C’est truffé de monstres voraces, et j’parle pas des griffons. Faut être sacrément stupide à mon avis pour faire ça. ‘Fin, je dis ça à une fille qui naviguait en pleine tempête, donc j’imagine que la réflexion c’est pas trop vot’ truc. »

Je soupire. Par les Douze, ce gamin vient de soulever un point important, mais j’ai surtout l’impression qu’il tente de me mettre le moral dans les chaussettes. Ravalant mon envie brulante de lui répliquer que je faisais de mon mieux avec les moyens du bord, je réfléchis au problème impliqué par les dangers de la route. Qu’importe, comme d’habitude, j’allais trouver une solution. Et, dans le pire des cas, je n’avais qu’à remuer mon bâton « magique ». Avec la chance démoniaque que j’avais eu ces derniers temps, je songeais avec humour que même un gros dragon devrait avoir peur de ce que j’aurais pu projeter de lui faire subir. C’est alors qu’une dernière question me vint à l’esprit, et je me sentis si stupide de l’avoir oubliée que je baissais la tête un peu piteusement.

« Au fait, quel est votre nom, jeune homme ?

- On m’appelle Petit Greg’ m’dame ! »
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 16 nov. 2016, 08:20

Au revoir Mhigois

Vautrée dans l’une des deux chaises de la pièce à vivre, épluchant négligemment des gros haricots verts, j’observe Greg, face à moi. Ce gamin énergique et franc fait indéniablement partie des quelques bénédictions qu’un ange gardien m’aurait offert. En premier lieu parce que ma présence ici, sur la terre ferme, bien vivante, lui est en grande partie due. Mais ce n’est pas seulement ce qui m’e poussa à m’attacher à lui.

J’ai toujours été différente avec les enfants. Face à eux, mon humeur bougonne s’envole et mon sourire revient. Leur insatiable curiosité, leurs questionnements vis-à-vis du monde, leur candeur mais aussi leur maturité me donnent une forme de foi. En quoi ? Je ne le sais pas vraiment moi-même. Mais je prenais à cœur, en Eorzéa, d’accompagner les plus jeunes. Ici, je n’avais ni les moyens, ni le temps pour m’atteler à ce genre de mission ; mais je profitais avec mon hôte de quelques moments de complicité précieux. Cela étant, la fin de ma convalescence approchait : je le sentais distinctement dans mon corps. J’étais évidemment encore fragile : les os ne se ressoudent pas naturellement en quelques jours, et j’avais donc usé de magie curative pour accélérer le procédé, sans pour autant en abuser.

Je me sentais reposée, presque apaisée. Me résigner à quitter cet endroit aussi vite m’arrachait le cœur, mais je ne pouvais pas me permettre de traîner. Les gens ne tarderaient pas à se demander pourquoi Greg achetait deux fois plus de nourriture qu’à son habitude, et je comptais avoir disparu d’ici avant que la question ne germe dans leur esprit. J’avais dû réfléchir à un moyen de traverser les derniers reliefs de Gyr Abania sans me faire dévorer en cours de route : seule, cela semblait effectivement compliqué. Les prédateurs étaient nombreux, de jour comme de nuit. Il y avait peu de chances qu’ils me tombent dessus lorsque j’étais en mouvement, néanmoins : ils préféreraient me prendre par surprise dans mon sommeil. Dans un cas comme dans l’autre, je ne me voyais pas repousser une horde de griffons sans aide extérieure.

J’avais donc dû demander à Greg de soudoyer une caravane marchande qui partait dans quelques jours vers la frontière Sombrelinçoise pour monter à son bord sans que l’on me pose de questions. C’était dangereux, car rien ne me certifiait que je pouvais avoir foi en ces gens. Jeune femme seule, Eorzéenne et ayant en ma possession une somme d’argent importante, je ne pouvais pas me permettre d’accorder ma confiance à des gens qui acceptaient les pots de vin. J’avais donc prévu de leur faucher compagnie dès l’atteinte des premiers arbres denses, qui me couvriraient le temps que je m’approche de Castrum Oriens. De là, je comptais simplement creuser un petit tunnel pour passer en dessous de l’une des murailles, puis grimper la falaise qui bordait la Forêt de l’Est aussi vite que possible : c’était dangereux, car l’endroit était exposé, et les soldats Garlemaldais auraient carte blanche pour m’abattre dans le dos si je trainais trop.

Prudence, prudence et encore prudence allaient être les directives maîtresses pour me sortir d’ici. Avec, si possible, un soupçon de discrétion, de rapidité et, pour changer, un grand bol de chance. C’était dans mes cordes.
« Maeko tu t’es encore perdue dans tes pensées. A ce rythme-là, les haricots s’ront pas prêts demain, et moi j’ai faim. »

La voix de la raison, en la personne de p’tit Greg, venait de s’exprimer. Je sors donc de ma rêverie pour me concentrer sur la préparation conjointe du dîner. J’ai l’impression d’avoir de nouveau onze ans et d’être chez mes parents, ce qui, il faut le dire, est assez déconcertant. La vie est étrange.

Le dîner fini, je fais part de mon programme à Greg, sans omettre les détails. Il est parfaitement en droit de savoir quand je partirai, dans quelles conditions et à quels risques je serai soumise. Une fois n’est pas coutume, il semble m’écouter attentivement, un air sérieux ayant remplacé sur son visage l’habituel sourire moqueur. En mon for intérieur, j’espère qu’il me donnera son avis, car rien ne me permet de savoir si mon coup marchera. Pour une fois, l’opinion d’une tierce personne me serait précieuse. Malheureusement, je n’y aurai pas droit. A la fin de mon exposé, Greg me regarde simplement.

« Tu vas me manquer, la sorcière. »

Oui, tu vas me manquer aussi. J’aimerais le lui dire mais ces mots restent coincés dans ma gorge. Je me contente donc de hocher la tête en soutenant son regard. Je suis socialement inapte et c’est, parfois, extrêmement frustrant. Je fais néanmoins un effort important pour prendre la parole, et briser l’étrange silence qui s’installait.

« Je te laisserai quelques gils, pour m’excuser du dérangement. »

En prononçant ces mots, je me rends compte d’une chose : Je suis une catastrophe ambulante,ce qui me met en colère contre moi-même. Tandis que je regarde Greg se lever sans bruit, un sourire forcé sur le visage, pour rejoindre la couchette qu’il s’est installée dans la pièce, je me surprends à m’en vouloir de ne pas mettre de mots sur la gratitude infinie que je ressens. C’est plus fort que moi : je ne sais guère plus dire merci que lorsque l’on me sert une bière. Et je déteste cela.

A mon tour, je me lève et rejoint la petite chambre. Alors que j’en passe le pas, j’entends la voix de Greg s’élever derrière moi.

« Bonne nuit. »

Je soupire. Puis, au risque de fondre en larmes, je lui réponds.

« Bonne nuit Greg. »
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Re: [Voyage] Mhigoise

Message par Maeko » 18 nov. 2016, 12:06

Frontières Mhigoises


Assise en tailleur dans l’un des inconfortables chariots de la caravane marchande, je regarde défiler devant moi le paysage aride de Gyr Abania, qui, au fur et à mesure que le temps passe, se pare d’arbres, de bosquets et d’une végétation variée. Nous approchons d’Eorzéa.

Mes pensées s’égarent alors vers tous les gens que j’ai rencontrés ici, dans cette partie du monde presque oubliée par nos contrées occidentales. Je revois Djeor, son sourire et sa détresse quand il apprit que j’allais fuir. Je me rappelle des coups portés par Rodj, le gorille qui accompagnait partout Saphi, cette élézenne sadique, cause principale de tous mes soucis ici. Je me surprends à espérer qu’ils n’aient pas eu trop de soucis avec les troupes Garlemaldaises : bien que haïssables, ils méritent mieux que d’être torturés et tués pour le plaisir de quelques Impériaux gradés avides de sang. Mon esprit me porte ensuite vers les soldats de l’Empire, la nuit, sur les remparts de la cité, à la merci des groupuscules rebelles qui, à défaut de pouvoir être plus ambitieux, se contentent de leur ôter la vie sauvagement. Je songe ensuite au pêcheur anonyme, à qui j’ai volé et détruit sa barque pour quitter Ala Mhigo en vie. Enfin, je revois le p’tit Greg, qui, d’entre tous, aura été ma plus belle rencontre en ces terres hostiles.

Greg, pour qui je n’ai même pas eu la force de mettre des mots sur ma gratitude. Je prie pour qu’il comprenne à quel point je lui suis redevable. Il me manquera. En réalité, il me manque déjà.

Je soupire, fatiguée de mon acharnement à me haïr moi-même. J’ouvre ma sacoche, dont les fermetures en fer sont désormais rongées par la rouille, pour en sortir un petit paquet fait de feuilles d’arbres, scellé par une large lanière de cuir. Il m’a fallu faire preuve d’une certaine ingéniosité pour l’enchanter, mais, avec l’aide de connaissances dans le domaine du sertissage de matéria et d’autres élémentalistes, j’ai pu créer cet emballage extrêmement résistant il y a plusieurs lunes de cela. Protégé par plusieurs incantations permanentes et des matérias élémentaires en tout genre, il a pour mission de garder à l’abri de toute agression extérieure de vieilles lettres que je conserve précieusement.

Je l’ouvre, et sort, au hasard, l’une des correspondances, que j’étudie. L’écriture est enfantine, et le papier truffé de taches d’encre, mais l’ensemble reste assez simple à lire. Je m’octrois quelques minutes, pour me replonger dans ces mots datant d’un autre temps : un temps où je souriais un peu plus, et où ma petite sœur m’écrivait toutes les semaines. Ce sont des jours que je regrette amèrement, car, depuis qu’ils sont passés, le monde me semble plus terne, plus effrayant.

Ma lecture finie, je range mes affaires et lève la tête pour observer les visages des marchands qui voyagent avec moi. Tous sont tendus, et je peux le comprendre : faire du négoce dans un camp de guerre Garlemaldais ne doit pas être l’activité la plus agréable du monde. Je devais leur fausser compagnie avant que les murs de Castrum Oriens ne soient en vue : je n’avais aucune envie d’être l’objet des négociations, et je doutais de la philanthropie de mes hôtes à mon égard, d’autant plus que mes bâtons de bois précieux aux motifs complexes devaient leur donner une furieuse envie de s’intéresser au contenu de ma sacoche.

Tandis que les jours passaient, j’attendais donc patiemment, restant à l’écart. La nuit, à l’aide de sortilèges de sérénité, je m’assurais que ceux qui n’étaient pas de garde restent bien endormis, et que l’idée de troubler mon sommeil à coups de dagues reste un simple songe. La journée, je répétais mes formules sans relâche : je savais qu’avant la fin, il me faudrait user de l’élémentalisme. Ce fut alors que la végétation se densifiait qu’un imprévu se présenta.

« Inspection ! » brailla le gradé Garlemaldais, donc le bataillon nous bloquait la route.

Cela ne me réjouissait pas spécialement : en Gyr Abania, les lalafells des dunes n’étaient pas communs. Si l’on me voyait, je risquais d’avoir quelques soucis de taille. Je me mis donc à cogiter rapidement pour trouver une solution. Heureusement pour moi, j’entendais les marchands détailler le contenu de leur caravane, ce qui me permis de gagner un peu de temps. Je songeais donc à me cacher sous un chariot et à m’accrocher, afin de ne pas être vue. Bien que je doutais de posséder la force nécessaire pour tenir plus de quelques secondes, aucune autre idée ne me venait à l’esprit : je n’étais pas réputée pour être la reine du camouflage, encore moins dans ces conditions.

Ce fut alors que j’entends distinctement, de la bouche des marchands, le mot « Eorzéenne ». Je tiquais. J’étais en danger. Il me fallut une poignée de secondes pour rassembler toutes mes affaires, accrocher mon bâton d’élémentalisme dans mon dos et m’armer de celui qui me servait à pratiquer l’occultisme. Puis, alors que j’entendais des pas se rapprocher du chariot dans lequel j’étais, je me servais d’une sorte de nappe pour me cacher et me mis à incanter.

Le tissu sous lequel je me cachais fut soulevé brusquement, dévoilant le visage interloqué d’un soldat de l’Empire. Il n’eut pas le temps d’avertir ses camarades qu’il s’effondra sur le sol, endormi. Immédiatement après l’impact, je sortis à toute vitesse du chariot, me protégeant avec deux murs de glace qui formèrent un couloir jusqu’à la lisière de la forêt, afin d’éviter de prendre une balle en pleine tête. Je devais faire vite, car la prochaine incantation m’obligerait à m’arrêter, et je tenais à ralentir mes poursuivants au maximum avant de m’enfoncer dans les fondements de Sombrelinceul, qui se dressait devant moi.

Il me fallut quelques secondes pour parcourir la centaine de yalms qui me séparaient d’une sécurité relative, dans la pénombre des arbres. Je voyais, à travers la glace, une dizaine de soldats me rattraper. Je m’arrêtais donc et me mis à incanter à toute vitesse, pleinement concentrée sur ma survie. Un mur de feu jaillit entre eux et la forêt. Je doutais qu’ils aient un occultiste avec eux, et j’avais donc gagné de précieuses secondes pour disparaitre de leur vue. Sans attendre, je me remis à courir aussi vite que possible.

J’avais pris l’habitude de la densité de la végétation de Sombrelinceul, lorsque j’étudiais à Gridania, mais elle me posait néanmoins des soucis certains dans ma progression. Je sentais les branches griffer mon visage, mais je ne comptais ralentir que lorsque les voix derrière moi auraient disparu. Plusieurs longues minutes de course-poursuite furent nécessaires avant que les Impériaux, pour un temps au moins, ne perdent ma trace. Je sortis ma boussole et, sans attendre, me mis à marcher vers l’Ouest. En plus des hommes, je devais faire attention aux nombreux prédateurs que la forêt abritait : je ne souhaitais pas finir mes jours embrochée par un Tréant ou en tombant dans un nid de Morbols.

Je continuais donc d’avancer, à pas légers, sans jamais m’arrêter. Le temps devint long, et, sans que je m’en aperçoive, le soleil était passé du zénith à une lumière rougeâtre qui filtrait à travers les feuillages. Le crépuscule était là : je devais me dépêcher, car si je n’atteignais pas la frontière avant la nuit, mes chances de survie risquaient d’être grandement diminuées. Je continuais donc vers l’Ouest, boussole et carte à la main. J’ignorais quelle distance j’avais parcouru, mais je ne pouvais me permettre de m’arrêter pour le calculer : Castrum Oriens devait être en ébullition, après avoir été informé qu’une « espionne » Eorzéenne était en fuite aux alentours, et des soldats devaient rôder un peu partout, ce qui rendait mortel tout chemin autre que les bois profonds.

C’est alors que la nuit venait de tomber et que la progression devenait impossible que ma bonne étoile revint. La lisière de la forêt. Une clairière, puis, devant moi, se dressaient des remparts d’acier gigantesques, d’une vingtaine de yalms de hauteur. Je ne pouvais pas sortir de la pénombre des feuillages, mais j’imaginais me trouver à la gauche de Castrum Oriens, à quelques centaines de yalms, tout au plus. Des soldats gardaient, torches à la main, les murailles qui me séparaient d’Eorzéa. Je rangeais la boussole et la carte, dégainant mon bâton d’élémentalisme. J’y étais enfin : il était temps de creuser. J’évaluais la distance qu’il me faudrait parcourir : cela allait me prendre plusieurs heures, peut-être l’intégralité de la nuit. Mais qu’importe, je m’y étais préparée. Je m’autorisais une bouchée de pain rassis et une gorgée d’eau, puis je me mis à incanter.

Bien que moins épuisante que ma précédente session de forage dans les sous-sol d’Ala Mhigo, mon entreprise me demanda énormément d’abnégation. La terre qui s’ouvrait devant moi, au son de ma voix, était souvent projetée sur mon visage, dans mes yeux ou ma bouche. La chaleur m’étouffait, au même titre que l’air raréfié. Souvent, des racines profondes entravaient ma progression, et le moindre détour me prenait plusieurs longues minutes, pendant lesquelles je transpirais un peu plus et respirais un peu moins. L’obscurité était presque complète, à l’exception de la tête de ma canne d’élémentalisme, qui brillait faiblement, fantomatique. J’ignore le temps que je passais à avancer : après avoir creusé pendant des heures infinies, je me mis à remonter, toussant à chaque motte de terre qui s’abattait sur moi.

Puis, enfin, j’atteignis la surface.

Je ne vous cache pas l’incroyable sérénité qui s’empara de moi, lorsqu’enfin, après tant de temps, je sortis de ce trou pour fouler le sol de la Forêt de l’Est, que je connaissais si bien. J’étais sortie en plein cœur d’un bosquet : j’attachais donc mon bâton d’élémentalisme dans mon dos, puis, couverte de boue qui s’insinuait dans les coupures de mon visage, je me mis en marche pour trouver la route.

L’obscurité des bois était absolue : il me fallut un temps certain pour m’en extraire, après avoir avancé à tâtons. Puis, finalement, je dépassais la lisière. Autour de moi, je voyais d’énormes arbres éparpillés dans le relief irrégulier de Sombrelinceul. Puis, au loin, j’aperçus une lueur bleue chatoyante. L’éthérite de la Hutte des Hawthorne me tendait les bras. Je soufflais longuement, puis, concentrée, je me remis en marche, avant d’être interpellée par une voix que je connaissais bien.

« Bonsoir Maeko », me lança Djeor.
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